Journal d’un BAC+5 SDF #120 (« Saint Vergeron »)
Lundi 26 Août 2024
Il fait glagla cette nuit encore. Il doit faire 12-13°C. Merci à mon K-way de me protéger sur le chemin du retour. Il y a quelques branches qui sont tombées à coté de ma tente. Je les repousse du pied avant de l’inspecter brièvement. A part quelques œuvres artistiques en bave de limaces ou d’escargots sur la bâche interne, rien de nouveau.
Sur le chemin des wc je croise Josua qui discute avec la femme de ménage. Il lui manquerait une boîte contenant un parfum très cher. Elle se souvient de l’avoir placé au bord des fenêtres du bâtiment, mais pense qu’elle a aussi pu très bien finir à la poubelle.
Jordan le repère et ils sont aller discuter en tête à tête. Une poignée de minutes plus tard je le vois au téléphone raconter ce qu’il s’est passé à je ne sais qui.
Il était question que Momo et sa demi-sœur viennent s’installer quelques jours. Jordan les a menacé et prévenu que ça se finirait mal pour eux s’ils décidaient vraiment de venir s’installer au camping.
Gros soucis de connexion. Certains sites fonctionnent mais même google est perdu. Ca semble refonctionner très partiellement peu avant midi… mais mon VPN a subitement terminé son service dans les pays où je me connecte habituellement. Génial. Encore une perte de temps en perspective pour en trouver un autre. Mais vu que leur site est down, je vais attendre un peu, qui sait, ils font peut-être une grosse mise-à-jour globale.
« T’as p’t’être tué deux mecs mais je ne serais pas le troisième. Si tu reviens, c’est toi qui va morfler. Va chercher un couteau si tu veux. » Il paraît que c’est, en gros, en ces mots que Jordan a viré Josua du camping aujourd’hui. Il lui a rendu son oreiller mais regrette déjà de ne pas avoir foutu sa semence dessus avant…
La joie, la bonne humeur, le vivre ensemble, ça ressemble souvent à ça, non ? Quand on le vit, pas quand on l’idéologise, bien entendu.
(Pour info, Josua aurait tué deux personnes, par accident, mais les enquêtes sont en cours il me semble. L’un en voiture, l’autre lors d’un bagarre qui aurait terminée en chute mortelle dans un escalier. C’est lui-même qui en avait parlé. Aucune idée si c’est vrai ou du mytho…)
A nouveau des oiseaux semblent s’être installés au-dessus du parasol géant.
Eh ben, il a fallut attendre 12h30 pour qu’internet refonctionne enfin. Ah non, fausse alerte… Je vais finir par aller prendre ma douche plutôt que de perdre mon temps à réessayer.
C’est ce que j’ai fait. Jordan passant par là, pour je ne sais quelle raison, a été époustouflé par ma chevelure détachée alors que la démêlais. « Oh ça te va bien en détachés, ils sont beaux tes cheveux ! »
Il y a un couple de petits vieux anglophones qui vient de s’installer sur la terrasse. La femme utilise une tablette et écoute des vidéos plutôt étranges avec des sons ralentis de bébés et de happy birthday…
Internet fonctionne à nouveau, heureusement.
Jordan revient d’une séance de sport. « Ils ne se font pas chier de se mettre au milieu du chemin. » Visant les deux petits vieux de la terrasse. Je lui dis que ce sont des anglophones, alors la gauche, la droite, le milieu, le coté, ils n’ont pas les mêmes références que nous. Perfide Albion !
Il se fait un petit café au lait bien chaud, en plein été. Soit. Et accompagné d’un petit gâteau comme goûter.
Oooh une autre réponse à priori positive, j’aurais le profil qu’ils recherchent… Si je peux profiter de mon hypothétique voyage samedi pour faire deux visites au lieu d’une, ce serait cool.
Il est presque 17h. Jordan a faim, pour changer. Il commence avec un vieux taboulé de trois jours mais n’en mange que quelques fourchettes. Ensuite il se régale avec des saucisses réchauffées au micro-onde : une saucisse « au fromage de bite » avalée goulûment, et un merguez qu’il savoure entre deux tranches de pain de mie. Il voulait du ketchup mais n’en a pas. Comme boisson, c’est assez exceptionnel, ce n’est pas du coca, mais de l’ice tea pétillant ! Je ne savais même pas que ça existait. « C’est pas mauvais cette merde » dit-il. « Le pétillant me veut ».
Jordan me raconte qu’il y a quelques années, lors d’un « rapport » trop violent il s’est blessé aux testicules. De temps en temps il peut avoir quelques soucis gênants, notamment des douleurs.
Il arrive à faire bouger ses seins, et ça l’amuse beaucoup.
Une famille s’est installée sur la terrasse et un adolescent a été envoyé chercher une bonne bouteille du frigo. Pour rigoler il a mimé un alcoolique mais ses parents n’ont même pas réagit. J’ai de la compassion pour ce p’tit gars.
Etrangement aujourd’hui il y a pas mal de personne avec un ordinateur portable, aussi bien dehors que dans la salle commune. De même, les gens se succèdent pour accéder à la bouilloire. Pas mal d’assiettes de pâtes et de soupes sont en préparation.
Mais qu’est-ce qu’il se passe aujourd’hui ? Cette fois-ci une agence immobilière qui semble finalement être plutôt ok. Ca fait trois visites potentielles samedi, si tout se passe bien, mais ce n’est pas la même ville là, c’est embêtant.
Jordan est au téléphone, bien plus tôt qu’hier. « Quand je donne des ordres ça marche mieux ! » dit-il en décrochant au coup de fil.
Il n’est même pas 21h et pourtant il commence à faire sacrément frisquet.
Plein de petits vieux sont entrés dans la salle commune qu’ils semblent considérer comme un musée ou une exposition. Ils regardent partout, jusqu’au moindre recoin, du sol au plafond.
Repas du soir pour Jordan, il ne lui reste plus que 3 merguez et une baguette. Il n’a plus faim pourtant, mais il se force. Il veut de l’aide pour finir, mais je n’aime pas spécialement les merguez, je préfère les saucisses blanches. Et là on revient sur ses « saucisses au fromage de bite » qui nous rappellent le célèbre secret des moines, le « Saint Vergeron ».
Ca y est, il est au téléphone avec sa cible. Elle devrait venir mercredi au camping, et l’a invité samedi en boîte de nuit avec ses copines, alors qu’elle n’aime pas ça. Jordan non plus d’ailleurs. Je me dis qu’ils sont très cons d’y aller quand même.
Il fait froid bon sang… Et demain je vais devoir me lever tôt pour marcher jusqu’à mon rendez-vous inutile… Si au moins c’était pour un travail, et des sous à gagner, mais non, ce sera un truc très probablement inutile comme tous les précédents du même genre. Mais bon, peut-être que je me trompe, on va laisser le bénéfice du doute.
David a invité sa copine qui l’aide beaucoup depuis quelques semaines, avec ses séances de bien-être, de spiritisme, de thérapie avec les arbres etc. Ils ont mangé des petits pains étranges cet après-midi, à la banane, entre autres. David essaye de se souvenir de ce qu’il a goûté pour la première fois, et sa copine (je rappel platonique) le corrige le cas échéant.
Pour tenir le coup Jordan doit se refaire une clope et un grand gobelet de café. C’est difficile la chasse au téléphone… Il est étonné que son interlocutrice pense qu’il est un Escort Boy. Bah sachant qu’elle a téléphoné à Elodie (qui veut manger Jordan alors qu’il lui a dit plutôt clairement qu’ils resteront au stade « amis »), il y a de fortes chances que cette dernière lui ait fait comprendre ça en parlant un peu.
Minuit passé, il est toujours au téléphone, en marchant un peu partout, dehors comme dedans. Moi j’ai enfilé mon K-way parce qu’il fait décidément trop froid. Et comme je me lève tôt tout à l’heure, je vais m’arrêter là pour ce journal. Puissions nous tous passer une bonne nuit réparatrice !
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