Journal d’un BAC+5 SDF #67
Jeudi 4 Juillet 2024
Encore une nuit sans Lune, mais on pouvait apercevoir un poignée d’étoiles que les nuages n’ont pas réussi à cacher. En tout cas j’ai pu éviter la pluie, c’est déjà bien.
A l’intérieur de ma tente il y a un long fil élastique qui longe le plafond. Je l’utilise pour suspendre mes vêtements que j’utilise fréquemment. D’une part ça leur permet d’être un peu aéré, de sécher le cas échéant, de se défroisser, de limiter les risques de verser mon gobelet dessus et aussi de réduire drastiquement l’infiltration des bestioles dedans. Mais ce qui devait finir par arriver arriva…
Comme à mon habitude j’ai secoué mon pantalon avant de l’accrocher et « poc » j’ai senti quelque chose tomber sur mon pied. Ni une ni deux, j’attrape ma mini-lampe de poche avec la rapidité de l’éclair et j’aperçois un perce-oreilles terrorisé se dandinant vers moi.
N’ayant aucune envie d’avoir des restes d’insectes sur mon sac de couchage je renonce très vite à l’idée de l’écrabouiller sans pitié. Je n’ai qu’une solution potable : l’attraper pour le mettre dehors. Le premier point fut facile, mais il se défendait le bougre, je pouvais sentir ses pinces et/ou ses pattes sur la peau de mes doigts alors qu’il se démenait et essayant d’échapper à ma poigne maîtrisée pour ne pas l’écraser. De mon autre main j’ai du réussir à trouver l’ouverture dans la pénombre et écarter la tirette pour laisser juste assez de place et de renvoyer le malotru de là d’où il venait : dehors ! Enfin bon, ce n’était encore qu’entre les deux bâches, à lui de faire le reste du chemin vers la nature s’il ne voulait pas subir mon courroux au réveil…
Et ce matin, pas la moindre trace de bestioles, heureusement.
Hier j’ai à nouveau acheté de la charcuterie à la découpe, ne trouvant pas ma planchette habituelle de 12 tranches (idéale pour 4 sandwichs). Aujourd’hui en préparant mes casse-croûtes je comprends finalement un peu mieux pourquoi elles coûtent plus chères : elles sont bien plus épaisses et donc pèsent plus.
Vers midi le papy UPRiste écoute à nouveau diverses vidéos dont celles de Régis de Castelnau et d’Anne-Laure Bonnel.
Dag me snob. Il vient déposer des bières dans le frigo, alors je le taquine et disant que ce n’est pas bien avant de conduire, et il s’en va sans dire un mot sitôt fait.
Il pleut de nouveau. Je me demande si Dag a déjà plié sa tente avant qu’elle ne soit mouillée, ou bien s’il envisage finalement de rester.
Yves vient de rentrer. Il a visité l’ophtalmologue pour ses yeux et il a appris qu’il a en fait un glaucome et va donc se faire opérer bientôt. Il est gâté notre cher Yves. Alors qu’il m’explique en détail ce qu’il se passe dans son œil et ce qui est attendu de l’opération, je ne peux pas m’empêcher de dire « alors qu’il suffirait de retirer l’œil »…
Hum, hum, hum. Et crotte… Vous comprenez aussi pourquoi j’évite de parler ? J’aime, et même j’adore, l’humour noire. Et parfois ça risque d’être très mal pris.
Heureusement que Yves a compris, même si ça ne lui a pas plu. Et je l’ai fait rire juste après lorsqu’il me faisait remarquer que ses journées étaient bien chargées, j’ai sorti un « vivement la retraite ! ».
(Rappel si besoin : Yves a 70ans et est déjà à la retraite depuis un moment.)
J’émets l’hypothèse que le niveau de parlote de Dag est proportionnel au nombre de bières ingurgitées : les premiers jours je ne l’ai pas vu boire et il ne disait pas un mot, ensuite il buvait de la bière tous les jours et s’est mis à discuter, aujourd’hui je ne l’ai pas encore vu boire et il ne dit mot. Ceci dit il est retourné à son emplacement avec un verre givré rempli d’un liquide couleur bière… Peut-être qu’il va revenir ici en titubant au lieu de prendre le volant. Nous verrons cela.
Pfff… Les logements que je convoitais depuis un moment, en attente de réponse, ont tous été loué à d’autres. Fallait s’y attendre.
Il y a du Soleil sacrément tôt aujourd’hui ! La cour de sables est illuminée alors qu’il n’est que 17h30. Mais rassurons nous, ce n’est que passager, les gros nuages sont juste au-dessus de nos têtes. Il y a des chances qu’on reste dans la norme et qu’il pleuve incessamment sous peu !
J’ai mangé trop de petits gâteaux qu’Yves m’a offert. Heureusement que j’ai résisté à l’achat de glace l’autre jour, sinon j’aurai cumulé les deux.
Ah ben voilà, 18h, il pleut.
Un troupeau de dames est entré dans la salle commune toquer à la porte de l’accueil. Elles ont un problème existentiel de machine à café ! Il y a une bouilloire disponible, et une machine payante, mais elles sont venues avec des dosettes… Et puis c’est l’anniversaire de l’une d’elle (pas présente ici), vous vous rendez compte ? Non, je ne crois pas. Alors la cheffe du camping (il me semble) leur a proposé une solution (je n’ai pas tout suivi) et elles sont parties souriantes et soulagées.
Il y a maintenant de la vapeur d’eau qui coule légèrement à l’extrémité du parasol géant que le Soleil réchauffe, avant d’être entraînée par un petit vent bien agréable.
Dag est encore là. Ca sent à nouveau la bière ici. Il a mangé sa dernière glace. Selon le temps qu’il fait il va ou non rester ici ces prochains jours, mais de toute façon au plus tard il partira lundi puisqu’il a un rendez-vous ailleurs.
« A demain, à deux pieds » qu’il me sort en partant ! Je n’avais jamais entendu ça, et pourtant c’est un jeu de mots en français.
Un grand gaillard bien costaud promène son tout petit chien. Une vraie petite teigne pleine d’énergie qui se met à aboyer en remuant la queue et tourne autour de lui en sautillant.
Ca y est, je vais peut-être enfin chopper un logement. Je le visite demain matin et ça semble bien engagé. C’est un petit studio de 21m² déjà meublé et fibré pour 410€ par mois.
Et merde, il n’y a pas de machine à laver…
P***** mais c’est pas vrai, il faut toujours qu’il y ait quelque chose qui merdouille. Si je paye un an de loyer, ça veut dire que je serais là pendant un an, sans machine à laver. Faudra tout laver à la main ou bien voir avec les voisins. Bon il y a un pressing à 7min de marche aussi.
21h et me voilà tout seul ! Ca faisait longtemps que ça ne m’était pas arriver. Alors que j’écris cette ligne un gars arrive avec un sac plein qu’il voulait déverser dans le frigo alors que celui-ci est déjà plein… Il essaye de bouger les étagères et fini par réussir à engouffrer son sac tout entier et refermer la porte.
Yves vient de passer pour papoter et me raconter sa journée. Il me sort des contrats pour son téléphone et puis un prélèvement douteux qu’il a fait annuler, une certaine entreprise « Protected » qui vraisemblablement travaille dans la cyber-sécurité. Il ne sait pas comment il a pu souscrire à une telle offre. En tout cas il a pu la bloquer à sa banque.
Vous souvenez-vous de l’affaire du fugueur que la nouvelle employée (Aïsha) avait caché ? En tout cas c’est que j’avais compris à l’écoute de leur discussion au téléphone. Et bien j’ai le fin mot de l’histoire : c’était son fils en fait, il est en foyer de rééducation. Et ça ne lui plaît pas, donc il se barre tout le temps pour retourner chez sa mère. Même s’il est très éloigné il prend le train sans ticket et trouve toujours un moyen pour rentrer.
Bon c’est pas tout ça mais je ne dois pas rater mon réveil ni mon bus demain matin. Alors je m’en vais retourner à mon indispensable sac… tenter de me reposer un peu.
Faites de beaux rêves !
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