Journée mondiale du livre... numérique gratuit
Pour un équilibre entre le commercial et l’accès libre et gratuit
Le 23 avril prochain se tiendra la Journée mondiale du livre et du droit d’auteur sous l’égide de l’UNESCO. « En célébrant cette journée, l’UNESCO cherche à promouvoir la lecture, l’industrie éditoriale et la protection du droit d’auteur » précise l’organisme des Nations Unies. Malheureusement, cet appel lancé aux « auteurs, éditeurs, libraires, bibliothécaires » à travers le monde n’encadre pas les initiatives prises par les instances internationales, nationales et locales. Ainsi, chacun y va avec sa propre perception des activités à tenir dans le cadre de la journée mondiale. Et dans le contexte où les intérêts du capitalisme dominent notre société, la Journée mondiale du livre devient de plus en plus commerciale et tenue dans le seul but de vendre davantage de livres.
Un grand nombre d’activités visent uniquement à inciter les lecteurs à visiter leurs libraires, c’est-à-dire à acheter un livre. Et au Québec, un « concours pour tous » cible uniquement les librairies indépendantes au détriment des chaînes de librairies.
Heureusement, des activités se tiennent en dehors des établissements du commerce du livre : bibliothèques, écoles, centre de la petite enfance et garderies, Maison des jeunes et de la famille, Maisons de la culture, centres de loisirs, etc. Mais l’objectif ultime des organisateurs vise une augmentation de la clientèle de ces lieux pour en assurer le financement public et/ou le renouvellement du segment de marché des lecteurs pour assurer la survie de l’industrie.
Si je ne m’oppose pas d’emblée à la commercialisation du livre lors de cette journée mondiale, je m’inquiète cependant du peu de place fait à la culture et au livre libre.
Le but demeure noble, « la promotion de la lecture », mais son amalgame quasi-automatique avec le commerce du livre me pose un sérieux problème.
Promouvoir la lecture dans le cadre de la Journée mondiale du livre nous oblige à donner libre accès au livre. Pendant que l’industrie traditionnelle du livre pilonne et détruit des millions d’invendus partout dans le monde à chaque année (voir le documentaire « On achève bien les livres » http://onachevebienleslivres.blogspot.ca/), l’accès libre et gratuit aux livres passe sous silence et nous continuons à célébrer le livre de la même façon, sans soulever les problèmes et surtout les solutions.
À titre d’éditeur libraire québécois en ligne depuis bientôt une quinzaine d’années, je considère le livre numérique gratuit en libre téléchargement comme la meilleure solution pour promouvoir la lecture partout dans le monde. À notre librairie s’ajoute une bibliothèque de livres numériques gratuits.
Pourquoi des auteurs offrent-ils gratuitement la version numérique de leurs livres ? Je peux donner une réponse personnelle à cette question puisque les intéressés peuvent télécharger gratuitement mes trois essais. Mon but, mon seul et unique but, est d’être lu et, pour ce faire, rien de mieux que d’offrir mes livres numériques en libre téléchargement. J’ai décidé que la vente de quelques centaines d’exemplaires dans les réseaux de librairies traditionnelles ne rapporterait pas suffisamment de redevances pour en priver l’ensemble des lecteurs potentiels.
La surproduction de l’industrie traditionnelle du livre a passablement réduit la durée de vie des nouveautés en librairies et la redevance dépasse à peine les 10% du prix de vente de chaque exemplaire. Est-ce que la cession de mes droits d’auteur (jusqu’à 50 ou 70 ans après mon décès) exigée par l’éditeur traditionnelle est équitable compte tenu de l’offre ? Pas pour moi. Et c’est de plus en plus le cas de nombreux auteurs partout dans le monde.
Nous recherchons davantage un succès d’estime qu’un succès commercial. Voir des milliers d’exemplaires numériques de mes livres téléchargés gratuitement de partout dans le monde comble toutes mes attentes. Après des mois voire des années d’écriture, mes œuvres en format numérique trouvent leurs lecteurs par milliers sans craindre d’être retirées du marché pour des impératifs commerciaux. C’est la beauté du livre numérique. Vendus ou offerts gratuitement, ils demandent peu d’investissements à produire et à entreposer sur un serveur, contrairement aux dépenses élevées pour des exemplaires papier.
L’offre de téléchargement libre et gratuit ajoute une touche finale à la beauté du livre numérique. Ainsi, je peux rejoindre tous ceux et celles dont les ressources financières ne peuvent pas soutenir l’achat de livres ou tous ceux et celles dont le budget pour la culture est déjà à son maximum, tous ceux et celles dont l’importation d’exemplaires papiers en leurs pays en fait grimper le prix au-delà du raisonnable et tous ceux et celles qui ont épousé la culture de gratuité sur internet et le libre accès, dont je suis.
J’invite tous les adeptes du libre accès à la culture, notamment au livre numérique, à peser de tout leur poids pour rééquilibrer la balance entre le commercial et le gratuit à l’occasion de la Journée mondiale du livre du 23 avril prochain.
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