JOYEUX NOËL LAÏC

A l’origine c’était la fête du solstice d’hiver. On fêtait le retour du soleil, le retour de la lumière. Au IV° siècle l’Eglise, n’ayant pas réussi à supprimer les festivités païennes, décida d’interpréter le retour de la lumière comme la naissance de Jésus. Ainsi est née la fête de Noël, la Nativité, la naissance du Christ. La date réelle de sa naissance est inconnue, mais le solstice convient comme date symbolique.
Cependant, depuis le XIX° siècle, Noël a été progressivement sécularisé, et aujourd’hui seuls les croyants gardent un peu de son caractère religieux. Noël redevient donc, généralement, une fête profane, une simple fête familiale, et surtout une fête pour les enfants. Le Père Noël, malgré l’effort de l’Eglise de le faire considérer comme symbole de saint Nicolas, n’est plus qu’un symbole de la société de consommation, présent dans tous les hypermarchés, au milieux des rayons sans fin de jouets et gourmandises. L'expression "Joyeux Noël" est remplacée par "Joyeuses Fêtes", plus neutre. Les chants de Noël chrétiens cèdent la place aux chants traditionnels comme "Jingle Bells". Cependant, les crèches de Noël sont encore populaires, justifiées, en Provence, par la tradition.
En Allemagne, dans beaucoup de familles, la fête est encore religieuse. Avant Noël, quand la période de l’Avent commence, on confectionne une couronne de branches de sapin, entourée de rubans rouges et ornée de quatre bougies, qui marquent les quatre semaines de l'Avent et sont allumées chacun des quatre dimanches. Noël sera là lorsque la dernière bougie sera allumée. Les bougies symbolisent aussi les quatre saisons passées. En allemand la couronne s’appel Adventskranz. À partir du premier décembre, les enfants possèdent un calendrier, où chaque jour, en en ouvrant une fenêtre, ils découvrent un chocolat ou une petite pièce. La fête de Noël en elle-même se déroule sur deux jours, qui sont fériés. La distribution des cadeaux se fait le 24 décembre dans l'après-midi ou dans la soirée, non pas par le Père Noël, mais par le "Christkind" qui en Allemagne désigne l'enfant Jésus.
La question se pose si l’application conséquente de la laïcité nous oblige à abandonner nos traditions chrétiennes ? Devons-nous supprimer du calendrier Pâques, l’Ascension, Noël etc., interdire les arbres de Noël, les crèches et tous les symboles chrétiens, et rayer des manuels scolaires toute référence à notre héritage chrétien ? Certains seraient en faveur d’un sécularisation de tous ces vestiges religieux. Dans les écoles le congé de "Toussaint" devient congé "D'automne", le congé de "Noël" devient congé "d'Hiver" et celui de "Pâques" devient "de printemps", cela afin "de ne pas choquer certaines communautés."
En France, historiquement, la laïcité s’érigea comme l'adversaire de la religion catholique, et de cette opposition naquit l'impression que la laïcité est une alternative à la religion. Depuis que l'Eglise a accepté le principe de la séparation des pouvoirs, la laïcité française se cristallise essentiellement autour de l'islam et des populations musulmanes, mais puisque ce fait est politiquement inavouable, on a préféré l'habiller d'une apparence impartiale en désavouant nos origines chrétiennes et en soumettant toutes les religions aux mêmes restrictions, notamment l'interdiction des signes "ostentatoires". Sont aussi tombées sous cette interdiction certaines de nos traditions comme l'arbre de Noël et la crèche sur la place du village, ou des illuminations "Joyeux Noël" et autres références bibliques. Interpréter la laïcité comme une prise de distance avec le christianisme, le mettant au même plan que les autres religions, avec ni plus ni moins d’importance que celles-ci, s’apparente à un rejet de notre culture. La laïcité n‘a plus de querelle, aujourd’hui, avec le christianisme, qui, de toute façon, était déjà laïc dès le début - « Rendez à César ce qui est à César … ». Elle concerne les religions qui ne connaissent ou ne reconnaissent pas la laïcité, et notamment l’islam, qui, pas sa nature même, contrôle le temporel autant que le spirituel. L’Eglise a depuis longtemps accepté la laïcité, mais le principe de la séparation et l’indépendance de l’Etat et la religion est étranger à l’islam.
La confrontation avec l’islam est un des événements les plus importants de notre époque. Elle nous trouble, nous inquiète, et nous entraîne dans des débats passionnés, débats qui ont aussi une importance politique majeure, vu l’influence grandissante de cette religion dans nos sociétés. Les questions que cette confrontation soulève sont encore loin d’être résolues. L’Europe hésite, recule, se fâche par moments et se divise en camps opposés.
En interdisant la Burqa, sommes nous obligés d’interdire aussi les nonnes dans l’espace public ? En interdisant les appels à la prière du minaret, sommes nous obligés d’interdire les cloches des églises ? La réponse dépendra de l’acceptation ou refus de notre héritage chrétien. Soit on maintient que l’Europe est historiquement et culturellement chrétienne, et que les signes et symboles chrétiens font partie du paysage, soit on renie cet héritage et on supprime tout.
Chaque année, à l’approche de Noël, nous sommes confrontés à la question des symboles chrétiens. Est-il nécessaire ou souhaitable de les supprimer ? Ce n’est pas seulement une question de religion, mais, surtout, de culture.
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