Jurassic Park et mammouths transgéniques en Dordogne ?
Jésus transformait l’eau en vin, en Dordogne la Direction Départementale des Territoires transforme les fougères en séquoias millénaires
Le Périgord vient de se rendre célèbre par un des plus beaux fiascos politico administratifs mais ce n’était qu’un début.
Un projet de déviation routière à 30 millions d’euros a été stoppé par le Conseil d’Etat fin décembre en Dordogne, après dix mois de travaux. La déviation est un chantier de 3,2 kilomètres de route qui devait permettre de préserver Beynac du trafic routier. Cette déviation devait enjamber deux fois la Dordogne et passer sous une voie ferrée pour un montant de plus de 30 millions d’euros. Quinze millions d’euros ont déjà été dépensés pour lancer les travaux, achevés à 50 % selon Germinal Peiro et 30 % selon Jean-François Vidalie, membre de la SEPANSO et membre du collectif sauvons la vallée de la Dordogne.
Stéphane Bern en personne est intervenu pour s’opposer au contournement, donnant un retentissement médiatique national à ce dossier.
Le Conseil Départemental a fait preuve d’imprudence mais pour Germinal Peiro, l’administration porte toute la responsabilité. La Préfecture selon lui a permis les travaux, mené les enquêtes préalables et malgré les recours a fait le nécessaire pour que ces travaux soient lancés et se poursuivent.
Quinze millions pour construire, autant pour détruire, trente millions auront donc été gaspillés dans un fiasco total qui illustre la toute puissance des décideurs .
Dans la Vallée de l’Homme, des Eyzies à Lascaux, l’Administration veut imposer aux élus la mise en place d’un « Jurassic Park » ubuesque. Les espaces constructibles seront réduits de 80%, et la plus grande partie du territoire sera considérée comme un espace boisé protégé, même s’il s’agit de prairies. A quand les mammouths transgéniques…
Le futur Plan Local d’Urbanisme est en préparation, il n’y a pas encore eu d’enquête publique mais il est anticipé par l’Administration dans sa mise en œuvre.
Tout est fait pour empêcher le peuplement et les activités économiques. La mise en place du facsimilé de Lascaux IV aurait pu dynamiser la région mais la ville de Montignac, tenue à l’écart n’en profite pas. De la vente de livres à la restauration tout se fait à l’intérieur du site. Il suffisait de laisser en ville la billetterie du premier facsimilé pour que Montignac bénéficie de retombées positives. Lascaux II continue en effet à attirer les puristes.
Je n’ignorais pas que l’Etat était le « maitre des horloges » mais je viens de faire l’expérience qu’en Dordogne ses services disposaient de surprenantes facultés pour étouffer la ruralité…
Cette toute puissance, je viens d’en faire les frais à mon humble niveau.
Pour restaurer la maison familiale j’ai mis en vente pour la somme de 20 000 euros un petit terrain constructible qui pendant soixante ans avait accueilli la scierie de mon grand-père. La parcelle est située au hameau des Arzillets, commune de La chapelle Aubareil.
La propriété familiale n’était pas bien grande, moins de dix hectares de cette argile rouge si peu généreuse et qui colle aux sabots. Mais chaque parcelle renvoyait à une histoire de famille, à de la sueur, chaque parcelle avait un nom.
Dans ma tête rien n’a changé, ce bout de terre, c’est celui sur lequel a travaillé mon grand père Edouard Delteil. C’est là qu’en 1935 il s’est coupé la main…
A l’époque les assurances sociales n’existaient pas. Il obtint d’Yvon Delbos de quoi acheter une prothèse métallique sur laquelle il fixait un crochet. Edouard dépassa son handicap, il dut renoncer à la moto mais pour le reste, il stupéfia son monde. On le vit reprendre la scierie, remonter sur les charpentes et planter les clous avec une extraordinaire dextérité.
Un demi-siècle après l’accident il travaillait toujours dans sa scierie installée aux Arzillets, pas très loin de Fougéras. Rien n’avait changé, la scie mécanique était la même, mais un tracteur remplaçait la machine à vapeur. On retrouve encore aujourd’hui les fondations de la scie et des mètres cubes de sciure. La nature n’efface pas tout de suite la vie des pauvres gens. Elle se montre plus indulgente que l’Administration qui refuse de reconnaitre l’existence de cette activité.
Depuis le décès d’Edouard personne n’a repris la suite et la végétation est devenue plus dense. La scie a été vendue, les bâtiments démantelés et la forêt proche a étendu ses fougères. Il y a quelques arbrisseaux mais aucun n’est trentenaire.
Il existe à Périgueux une toute puissante direction qui a la faculté de remonter le temps, de gommer l’histoire et d’en changer le sens, il s’agit de la Direction Départementale des Territoires
Qu’importe si du 18eme siècle à aujourd’hui les documents prouvent que cette parcelle n’a jamais été boisée, qu’importe si elle appartient à une zone bâtie en bord de route (une maison tous les 50m), l’administration vient de décider que nous étions au cœur de la forêt en refusant de laisser construire une maison là où se trouvait la scierie …
Le terrain faisait l’affaire d’un jeune du village méritant et souhaitant rester au pays. Il parait que le gouvernement veut revitaliser l’espace rural… Les terrains constructibles dans la commune sont rarissimes et dans les faits l’administration espère bien les voir disparaitre.
Vendre un terrain à bâtir 11 euros le m2 n’est pas une opération spéculative mais une opportunité offerte à un jeune de vivre et travailler au pays.
Sublime réponse d’une fonctionnaire : »Vous pouvez faire un recours au tribunal administratif mais d’ici là le terrain ne sera plus constructible… ».
Les autres terrains sont deux fois plus chers et souvent préemptés par un constructeur de maison …
L’Administration aime la campagne mais sans habitants…
J’ai tenté d’expliquer à cette toute puissante administration que la parcelle n’était pas boisée et que l’autorisation de défricher qu’ils exigeaient n’avait donc pas lieu d’être …
Fournissez les preuves me dirent-ils, ce que je fis en fournissant les témoignages.
Avec le malin plaisir du chat qui joue avec la souris, ils balayèrent les preuves …
Le fonctionnaire m’a expliqué que je ne pouvais apporter la preuve d’impôts sur les bâtiments de la scierie… Eh bien oui le pauvre Edouard payait bien des impôts mais pas sur la scierie qui lui avait coupé la main, personne ne lui en demandait…
Donc pour la DDT la scierie n’existait pas et à la place il y avait des bois. La DDT vient de gommer la vie d’Edouard Delteil, menuisier scieur pendant soixante ans à La Chapelle Aubareil.
Qu’importe le plan local d’urbanisme actuel qui ne classe pas ladite parcelle en espace boisé mais en espace constructible, il suffit d’être à proximité d’une forêt pour se retrouver au milieu des bois… Toute parcelle située à côté d’une forêt est soumise à une autorisation de défricher qui sera refusée même si la parcelle n’a pas besoin de défricher …
Qu’importe si la parcelle se trouve dans un hameau, le long d’une route urbanisée, elle est même le dernier espace constructible…
Des maisons sont construites, il y en a une tous les 50m au bord de la même route et des mêmes bois…
L’emplacement de la scierie de mon grand- père contient des broussailles, pas d’arbre à dessoucher… La loi n’impose pas d’autorisation si les arbres ont moins de 30 ans, ce qui est le cas pour les quelques-uns qui s’y trouvent (L342-1 4eme du code forestier) …
Si la DDT appliquait la loi elle n’aurait aucune autorisation de défrichement à exiger et à refuser.
Jésus transformait l’eau en vin, la DDT transforme n’importe quelle parcelle en forêt profonde et les broussailles en arbres de haute futaie, les fougères en séquoias millénaires.
Ils ont raison et j’ai tort, 2000m2 de bois en plus en Périgord, ça compensera l’Amazonie qui perd chaque année l’équivalent de la surface de la France.
Madame Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires, vient de lancer un grand plan au niveau national sur la revitalisation de l’espace rural.
Paroles, paroles …
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