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Accueil du site > Tribune Libre > L’art de la guerre expliqué à un Nul

L’art de la guerre expliqué à un Nul

Pour ces quinze jours entre les deux, les amis de Nicolas Sarkozy devraient lui offrir non pas la Princesse de Clèves, ouvrage contre-productif pour tout tempérament sanguin, mais l’Art de la guerre ; Il y apprendrait que l’important dans une campagne, c’est l’inattendu. L’évaluation des forces de soi-même et des autres. La mise en avant de ses propres avantages et pas de ses défauts criards. La connaissance et le contrôle de soi. Et surtout l’articulation dosée entre humilité et audace : dans cette campagne, la démesure sera mortelle.

Le soir même des résultats le général Nicolas a sacrifié le meilleur de ses éléments en les obligeant à utiliser des « éléments de langage » stéréotypés, toujours les mêmes. Lorsque les mêmes phrases sont utilisées, à la virgule près, par Juppé et Nadine, par NKM, Rachida ou Copé deux choses arrivent : uniformisés, ils s’abaissent au plus petit dénominateur commun. A quoi bon d’être « le meilleur d’entre nous » si ont dit la même chose que la cantinière ? Par ailleurs, écouter durant une soirée cinquante fois la même chose n’est pas forcement productif. On s’amuse, s’en lasse, on décortique les défauts de logique, et on finit par ressentir une allergie dès que la phrase commence. Entre le seigneur de la guerre et la cantinière, il faut un minimum de hiérarchie. Des relais, des interprétations divergentes et saisissantes qui restent à la mémoire et pour longtemps.

Il n’y a pas pire ennemi de la parole que la logorrhée (en grec colique des mots). Qui ne se souvient d’un je vous ai compris, vous n’avez pas le monopole du cœur, vous êtes le président du passif, existe-t-il une fatalité de la gauche  ? Pour ne citer que quelques-unes de ces phrases qui font désormais partie de notre patrimoine politique. Incisives, elles faisaient en même temps partie du personnage qui les prononçait tout en étant inattendues, surprenantes en décalage avec lui-même. Le soir du premier tour, après une défaite de votre camp ressentie par tous et visible sur tous vos visages, il en fallait une. Or, c’est le président gadget qui est apparu, en proposant un nouveau et déjà élimé : face à la situation, il proposa trois débats au lieu d’un. En sachant que il y aurait une fin de non recevoir, et donc en affirmant que la campagne de ces deux semaines sera axée sur ce refus. Est-ce productif ? Est-ce cohérent que de voir cette demande démultipliée et argumentée par toutes les bouches de tous vos gradés, du caporal au général ? Evidemment non. A l’argument élimé vous avez pourtant effectué trois débats pour désigner le candidat socialiste, vous avez in fine la réponse malicieuse et assassine et vous, combien de débats avez-vous eu pour désigner le votre ? A trop répéter le même argument, on donne le temps de la parade la plus logique, la plus cohérente et surtout la plus létale. Si vous aviez lu Sun Tsé, vous auriez su qu’une arme (proposition) peut être exhibée, puis cachée (oubliée) pour réapparaitre au moment propice (pendant le débat lui-même, par exemple). Dans ce cas vous aurez subi une riposte (efficace ou non) mais pas une ribambelle de réponses, les unes plus spirituelles et élaborées que les autres. 

 Votre arme préférée, monsieur le général en chef, semble être le bélier, et c’est sans doute une arme propice lorsqu’il faut prendre un château fort. En est-il ainsi ? Avez vous à faire à une place fortifiée, à un bunker, à un oppidum ? Certainement pas, malgré l’idée que vous vous en faites. Mais serait-il ainsi, le bélier n’est pas suffisant. Ni la fougue offensive, ni même vos soldats aguerris. Il faut occuper le territoire, couper les vivres, faire, comme disait Mao, un disciple du stratège,  le vide par le plein. Hélas pour vous, être omniprésent, comme une puce excitée, n’est pas occuper le terrain. Dire tout et son contraire n’est pas articuler un discours dominant. Il y a eu plusieurs fautes, tactiques ou stratégiques durant votre première campagne, dont celle d’utiliser le discours de vos supposés ennemis n’est pas la moindre. Une autre pourtant, passée quasiment inaperçue mais qui revient comme un boomerang pourrait vous être fatale : juste pour amuser et galvaniser vos troupes vous avez inventé un voyage imaginaire à Fukushima. La futilité de l’objectif (faire le malin, lancer une vanne), adossé à un drame terrible du aux penchants prométhéens de l’humanité, a démonétisé à l’extrême votre parole. Quand on ment pour si peu sur un sujet aussi grave, comment pourrait-on être cru pour l’essentiel ? Comment peut-on proposer un monde, des solutions, un projet, sans que ceux-là soient dépréciés à l’instant même où ils sont prononcés ? Sun Tsé vous aurait dit : la moralité est l’accord de tous sur les lois, qui les suivront au péril de leur vie et sans voir le danger. En d’autres termes, on ne badine pas avec la vérité, les lois établies, les règles. On peut ruser pour prendre une place forte mais pas avec la morale communément établie. Faire le vide par le plein, c’est être irréprochable sur le tronc commun des règles et des lois. Sinon, toute prise reste éphémère, car le choix final se fait selon Sun Tsé : lequel des deux souverains est le plus moral, en accord avec ses sujets ?

Le choix exclusif du bélier, cette vision monomaniaque d’une offensive sur un mur solide qui esquive le choc, finira par vous détruire : Quand vos armes et vos hommes s’émousseront, quand vos forces s’épuiseront et quand votre trésor sera vide, d'autres chefs apparaîtront brusquement pour profiter de votre état. 


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20 réactions à cet article    


  • devphil30 devphil30 24 avril 2012 11:41

    Tant mieux qu’il soit mauvais dans sa campagne 

    On connait ses mensonges et son mode de fonctionnement basé sur l’agitation permanente sans résultat et maintenant les Français ont besoin d’un direction et se sérénité pour reconstruire une société qui a été détruite en 10 ans.

    La destruction de notre société est caractérisé par la monté de l’extrême droite.

    Je redoute une montée du FN avec son arrivée au pouvoir à cause de la dérive xénophobe de sarko qui aura permis d’assécher les voix de l’ump et de permettre un éclatement de la droite vers l’extrême droite et le centre.

    Un vrai cataclysme ce mec 

    Philippe 
     

     

    • Susanoo ! Susanoo 24 avril 2012 19:54

      Hollande ? Ouais c’est un cata ce type.

      Il y a pas de dérive xénophobe se Sarko. Il y a une passivité naïve du PS.

      S’il y a bien un parti qui caresse tout le monde dans le seul du poils juste pour garder ses privilèges et qui ensuite se retrouve dans l’incapacité de prendre les bonnes décisions : C’est le PS.


    • J-J-R 25 avril 2012 11:05

      Vous redoutez ceci, vous redoutez celà. Vous surfer sur la peur, ce qui vous met hors jeux pour comprendre les problématiques essentielles pour l’avenir de notre société. Votre obnubilation du FN fait de vous un laquet de l’UMPS. 


    • lessonless 24 avril 2012 15:38

      Excellent article, merci à vous.
      Mais reconnaissez que cette façon de procéder ne fera que le desservir, et je m’en réjouis.
      A propos de guerre, Napoléon disait : « A la longue le sabre est toujours vaincu par l’esprit » sans commentaire !


      • Michel Koutouzis Michel Koutouzis 24 avril 2012 15:57

        J’espère que vous avez saisi, que l’article était basé sur l’humour...


        • J-J-R 25 avril 2012 11:10

          Méditez cette expression chinoise qui tombe bien à propos : la bodruche Mélanchon n’était qu’ « un tigre de papier ». 


        • bakerstreet bakerstreet 24 avril 2012 16:22

          « Leurs pauvres mots finiront par les étouffer ! »
           Shakespeare : « Beaucoup de bruit pour rien ! »


          • tribulus tribulus 24 avril 2012 17:52

            Bonjour et merci pour cet article, quel esprit ! un vrai régal !


            • Peachy Carnehan Peachy Carnehan 24 avril 2012 22:39

              C’est excellent.


              • kssard kssard 24 avril 2012 22:51

                Le voyage imaginaire de Sarko à Fukushima est lamentable 


                Mais il y a encore plus lourd..... En décembre 2011, 

                Les déclarations de Sarko à la sortie de l’hôpital à Marseille à propos du sous-brigadier Éric Lales 37 ans abattu à la kalachnikov : « Je vous annonce le décès du policier Eric Lales, abattu froidement », a déclaré le chef de l’Etat, expliquant qu’il venait d’« assister aux derniers instants de sa vie ». « Il laisse une jeune femme veuve et deux petites filles », a-t-il ajouté. » 

                En fait le policier était en état de mort clinique depuis de nombreuses heures et l’hôpital a attendu la visite de Sarko avant de le débrancher !!!



                Tout ce cela est totalement abject, encore pire que « vendre père et mère » et en dit long sur le personnage...

                • Lou Lou 24 avril 2012 23:15

                  Sarko le nabot, la taupe US n’ est pas si malin que cela en fait, tous ses coups fourrés sont prévisibles, bien vu de le décrire comme utilisant le bélier comme arme ...
                   
                  Surprenant tous ces veaux qui votent pour lui malgré le nombre effarant de squelettes dans le placard ...
                  Faut admettre qu’ il a mis aux pieds tous les médias qui appartiennent à ses copains milliardaires ...



                  • sisyphe sisyphe 24 avril 2012 23:40

                    Très beau texte, très bonne analyse.

                    Puisse-t-elle être logiquement validée.

                    J’adore le coup du « 3 débats ! On veut 3 débats ! Kes’ t’as ? T’as la pétoche ? »
                    de cour d’école, de bonimenteur, de marchand du Sentier, comme seul argument politique.

                    Et le programme de Sarkozy, vous le connaissez ?
                    A part le coup essentiel de la retraite payée le 1er au lieu du 8 , of course
                    Pour les banques, toussa.. ?
                    Quelqu’un a un lien ? 

                     smiley


                    • Roubachoff 25 avril 2012 01:01

                      En ce moment, dès que Sarko ou un de ses ahuris dit trois mots, ça convainc un indécis de voter Hollande. Ce sinistre sire est incapable de faire face à la difficulté, du coup, il la nie. Alors qu’on pourrait admirer un combattant qui refuse de s’avouer vaincu malgré l’adversité, on est agacé devant un sale gosse qui tape du pied en couinant « je vais gagner, je vais gagner » ! Le ressort de tout ça, me semble-t-il, c’est le fond monarchiste du personnage. Il pense avoir un droit divin d’occuper son poste, et ça l’autorise à ne tenir aucun compte des faits. (Perdre le AAA était une catastrophe, puis rien de grave une fois qu’il l’a perdu. Il allait arriver en tête du premier tour, c’était couru, et maintenant qu’il est deuxième, c’est un super résultat...) Drapé dans son droit divin, le petit Nicolas tente de culpabiliser le peuple français. « Enfin, vous ne pouvez pas me faire ça à moi ? » Toutes choses égales par ailleurs (autant préciser qu’il s’agit d’une métaphore, par les temps qui courent) c’est ce que devait penser Louis XVI, la tête sous le couperet. Tous les porte-flingue qui répètent les fameux « éléments de langage » se ridiculisent, et franchement je ne vois pas pourquoi on s’en plaindrait.

                      Au fait, très bon article, l’auteur !


                      • Soi Même 25 avril 2012 15:13

                        Ce qui inquiété ce n’est pas tellement ce que dit Sarkozy, c’est plutôt ses 27% et des poussières qui n’ont rien compris qui il est !


                        • modesto modesto 25 avril 2012 22:16

                          quelqu’un a écrit ici ou là sur le net que sarkozy a une conception « pugilistique » de l’affrontement politique. c’est bien trouvé. ça a marché avec les gogos en 2006-2007 quand il voulait nettoyer au karcher, débarrasser de la racaille, se battre avec les marins-pêcheurs (ou le agriculteurs) insolents, et j’en passe...

                          aujourd’hui, je crois que ça tombe à plat et plus il joue les caïds de cour de récré, plus il se déconsidère.. la magie du cow-boy, aujourd’hui, dans une france fatiguée, ne marche plus !

                          • agent orange agent orange 26 avril 2012 09:09

                            A propos de L« Art de la guerre » de Sun Tzu, les éditions Arcturus ont réédité ce classique dans un bel ouvrage pas cher. Ceux qui ne lisent pas l’anglais, pourront toujours se contenter de sa richesse iconographique. Magnifique !


                            • JUILLARD MICHEL 26 avril 2012 11:57

                              on peut haïr Staline, mais je pense que dans des circonstances analogues, guerre mondiale puis guerre civile et chaos, notre Nabot par sa suffisance et sa haine de classes aurait dérivé de la même manière, prise totale du pouvoir,médias mis au pas, propagande, mensonges et duplicité toute la panoplie du parfait dictateur qu’il est en herbe !!!!! 


                              • JUILLARD MICHEL 26 avril 2012 12:02

                                n’oublies pas que on voit arriver et même pressentir tous ces coups grâce au web, mais pense à ceux qui n’y ont pas accès, ou qui se contentent des médias (rubriques chiens écrasés), toute cette agitprop finit par imprégner les cerveaux !


                                • ddacoudre ddacoudre 30 avril 2012 09:07

                                  bonjour koutouzis

                                  quand l’UMP va imploser après les législatives ou avant après la défaite d e Sarkozy, cela va être un spectacle, depuis 10/2009 il ne dépasse jamais la barre des 30% de satisfait, sauf miracle il sera battu.http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=115681
                                  cordialement.

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