• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > L’égoïsme comme horizon

L’égoïsme comme horizon

 Chacun pour soi...

____Tel est l'idéal éthique et politique de Paul Ryan, à l'avant garde de la droite conservatrice américaine décomplexée, partenaire de Romney et peut-être futur vice-président.

____________"...Président de la commission du budget à la Chambre, il est un ardent défenseur d'une réduction des dépenses publiques, de coupes dans les programmes sociaux et d'une baisse des impôts de 20% pour tous les revenus, même ceux des plus riches. Il est également l'auteur d'un projet de privatisation de Medicare, le système d'assurance-maladie des seniors. D'ascendance irlandaise, fervent catholique, Paul Ryan est un farouche adversaire de l'avortement. Il s'y est très récemment déclaré favorable dans des cas limités —viol, inceste ou danger pour la mère—, une évolution de sa position précédente qui ne prenait en compte que la vie de la mère. Il est également contre les mariages homosexuels et défend les droits des propriétaires d'armes à feu. Fou de musculation"

Bref un vrai blanc américain, battant, se déclarant self made man, digne de Reagan et de son idéal de libéralisme intégral, celui que les républicains appellent l'"intellectuel du Parti", qui s'est nourri à la fac des grands penseurs de la droite : Friedrich Hayek, Milton Friedman... et Ayn Rand, l'auteur culte de "la Grève" ("Atlas Shrugged"), roman dans lequel le héros, John Galt, se lance dans une ode de 64 pages à l'individualisme.

 Rand a profondément marqué plusieurs générations de libéraux, dont Alan Greenspan, l'ex-patron de la Réserve fédérale. Paul Ryan affirme. "Si je devais créditer une personne pour mon engagement au service du public, ce serait Ayn Rand, expliquait ce dernier, en 2005, avant de minimiser l'influence de l'écrivain athée sur sa pensée. Ne vous trompez pas, le combat que nous menons est une lutte de l'individualisme contre le collectivisme." Ce qu'il appelle le collectivisme, c'est juste le minimum de solidarité et de redistribution nécessaire qu'un Etat doit garantir pour faire société.

Les pauvres et les précaires sont donc les seuls responsables de leur sort et ce que Ryan appelle collectivisme est juste une meilleure répartition de la richesse (quand on sait que  aux USA, les 20 % des ménages les plus pauvres ne disposent que de 3,4 % de l’ensemble des revenus, mais les 5 % les plus aisés en perçoivent 21,2 %. A eux seuls, les 20 % les plus riches perçoivent près de la moitié du revenu national  ). Les fantasmes de la guerre froide servent toujours à quelque chose...

________Ayn Rand, égérie de Ryan, même si elle ne voulait pas se dire exactement libertarienne, n'a eu de cesse de plaider la cause d'un individualisme assumé, critiquant les plans sociaux, ramenant la fonction étatique au minimum (l'état-gendarme) ne devant pas s'ingérer dans le domaine économique, sauf pour inciter les individus à réaliser leurs potentiels.

Ce minarchisme s'inspire de l'économiste libéral Frédéric Bastiat qui disait : «  L'État, c'est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s'efforce de vivre aux dépens de tout le monde » et de Friedrich Hayek qui dénonce l'empiètement croissant des structures étatiques sur les libertés individuelles qui aboutit à la consécration d'un régime paralysant et inefficace : l'État-providence.
 ____________________Ayn Rand, l’apôtre de l’égoïsme, inspire la droite américain, garde encore une influence certaine.

Son oeuvre "magnifie les entrepreneurs en héros des temps modernes, l'égoïsme est la vertu suprême. La seule éthique, en fait. Car l'altruisme, qui fait de l'homme un être dépendant des autres, « est une notion monstrueuse. C'est la moralité des cannibales se dévorant les uns les autres », proférait Rand. Brillante et vorace prêtresse de la liberté, y compris sur les questions sociales, Ayn Rand a fourni des ­racines morales, anthropologiques, à l'individualisme le plus débridé. Sa « philosophie pour vivre sur la terre » est une légitimation du libéralisme le plus radical, ayant inspiré Alan Greenspan, son très proche acolyte qui, nommé par Ronald Reagan, dirigea la Réserve fédérale pendant seize ans...
 . Elle aurait mené le bras de fer d'aujourd'hui. Selon le républicain Romney, deux mains se déchirent, « la main invisible du marché » contre « la lourde main de l'Etat ». Les deux visions de l'Amérique qui s'affrontent dans cette bataille électorale ont rarement été aussi opposées. Notamment en ce qui concerne la place du gouvernement et celle de l'individu dans le groupe, thèmes chéris d'Ayn Rand. Sacrifier l'individu (créateur) à la société (prédatrice) est, pour elle, un crime contre l'humanité. Quant à l'Etat, il devient le pire ennemi de l'homme s'il ne se voit pas limité. Ce serviteur est là pour fournir trois prestations, et pas une de plus, la police, l'armée et la justice..."

___Cette position, explicable partiellement par les origines de Rand et l'esprit de l'aventure économique américain dès ses débuts, est littéralement intenable à la lettre dans une politique réelle (on voit mal Romney et Ryan abandonner tout programme social, toute sécurité sociale, sous peine de déclencher une quasi-guerre civile), mais peut marquer un infléchissement encore plus reaganien au bénéfice des plus riches s'estimant encore trop soumis à l'impôt (alors qu'il a constamment baissé ces dernières années, ce qui est une des sources des difficultés actuelles), creusant encore un peu plus les inégalités, dans un pays déjà ravagé par le chômage, la précarité, l'exclusion. .Le struggle for live ne doit pas léser ceux qui s'enrichissent aux dépends des autres. Le rêve américain doit continuer...Tant pis pour les losers, comme l'estiment les adeptes du Tea Party !
On comprend pourquoi Rand, pour qui l'altruisme est "monstrueux" et pour qui les pauvres exploitent les riches, se réfère sans cesse à la raison (celle du froid calcul égoïste) et jamais à la justice ou à la compassion...

Un essayiste français apporte sa bénédiction à cette idéologie que Roosevelt lui-même avait répudiée comme perverse et génératrice de crises.

Cette folle prétention à vouloir s'accomplir en dehors de tous liens, contredisant les données de l'anthropologie la plus basique, contient des germes destructeurs pour leurs propres zêlateurs.
La solidarité est un combat, seule condition d'une paix sociale acceptable.
L'individualisme véritable, non exclusif, ne peut se réaliser en dehors des liens sociaux qui nous font être ce que nous sommes et qui peuvent nous rendre plus humains.

____Alors, y a-t-il lieu de sauver le soldat Ryan ?

Moyenne des avis sur cet article :  3.86/5   (21 votes)




Réagissez à l'article

21 réactions à cet article    


  • alberto alberto 5 novembre 2012 13:38

    Salut ZEN,

    Le titre de ton article est déjà tout un programme !

    Hélas, voilà une musique que l’on entend même ici...

    D’ailleurs, les technocrates de Bruxelles , tout en augmentant leurs propres émoluments, n’ont-ils pas diminué drastiquement les montants des subventions aux associations humanitaires ?

    Mais c’est une des clefs de la campagne étasunienne : à suivre.

    Bien à toi.


    • Laurent Watrin Laurent Watrin 6 novembre 2012 10:40

      @ Alberto : ce ne sont pas les technocrates de Bruxelles qui ont décidé de diminuer les subventions aux associations humanitaires, mais les chefs d’Etat qui ne parviennent pas à se mettre d’accord pour une solidarité européenne. L’Europe sociale ne peut pas progresser tant que les Etats se font concurrence. Tout le monde (ou presque) en France - à gauche et à droite - évoque l’harmonisation mais qui la souhaite réellement ? Elle serait une catastrophe pour les partis en place qui font leur campagne sur les valeurs de la Nation et pas sur les progrès de l’Union européenne.
      Cordialement.


    • lulupipistrelle 5 novembre 2012 13:40

      Ben oui, chacun pour soi et pour les siens... parce que ce que l’anthroplogie met en évidence, c’est la solidarité restreinte à son groupe...

      La solidarité est volontaire et réciproque... après vient l’échange...puis le racket institutionnel.

      Vous pouvez continuer à nous bassiner autant que vous voudrez, tous les faits vous donnent tord : on observe de plus en plus de micro-solidarité, spontanée et éfficace, et de plus ne plus de défiance, pour ne pas parler de résistance, envers la solidarité institutionnelle, et ses dérivés (ONG par exemple... ).


      • ZEN ZEN 5 novembre 2012 14:03

        Cher lulu
        Mais vous avez tout à fait raison en ce qui concerne les microsolidarités
        La preuve...
        La prochaine fois, restez dans le sujet quand même


      • Francis, agnotologue JL 5 novembre 2012 14:29

        Bonjour,

        "...Président de la commission du budget à la Chambre, il est un ardent défenseur d’une réduction des dépenses publiques, de coupes dans les programmes sociaux et d’une baisse des impôts de 20% pour tous les revenus, même ceux des plus riches.« 

        D’un autre coté, je lis : »Ces groupes français qui aimeraient se débarrasser d’Obama et financent l’ultra-droite américaine ; Par Olivier Petitjean (5 novembre 2012)"

        Et je me dis : faut-il voir dans tout ça, la raison qui pousse Hollande à abaisser les charges des entreprises ?

        Ou bien dit autrement : cette aide à l’ultra-droite n’a-t-elle pas n’était pas désintéressée et avait pour but d’amener le PS à faire une politique d’ultra-droite en France.

        Copé se réjouit déjà, et craint que Hollande n’aille pas jusqu’au bout.

        Oui, plus j’y pense, plus je dis qu’ils nous ont eu, avec dans une main le gourdin sarkozien et dans l’autre la pommade hollandaise.

         smiley


        • alberto alberto 5 novembre 2012 17:38

          Salut JL et merci pour le lien dont la lecture est édifiante !

          Dire qu’ il y a encore des gogos pour garder leur compte à la Sogé ou à la BNP...

          Et que dire des allumés comme ce Shimkus, pourtant élu de l’Illinois ?

          Pauvres...

          Bien à toi.


        • Francis, agnotologue JL 5 novembre 2012 19:05

          @ alberto,

          merci d’avoir lu, et de le dire. Oui, ces entreprises savent bien que le modèle de la « communauté internationale » est bien l’Amérique. Et ce sont les mêmes qui pleurent pour leurs bénéfices, et qui dépensent sans compter pour faire élire le pire du pire.

          Bonne soirée.


        • Soi même Soi même 5 novembre 2012 14:45

           Encore une évidence, à ce demander qui sont les belles aux bois dormants !


          • walden walden 5 novembre 2012 16:47

            intéressant de voir comme l’idéologie individualiste-libérale repose avant toute chose sur une fois, non sur une compréhension scientifique de l’économie. selon cette fois, tout se paie, la vie doit payer pour mériter le droit de survivre. question angoissée, à qui paie la vie, à quoi, à quel principe ?


            • Axel de Saint Mauxe Axel de Saint Mauxe 5 novembre 2012 18:18

              Vous confondez tout et restituez les cours que vous donnent des médias comme Télérama et son lamentable article sur Ayn Rand...


              La Générosité, puisque vous n’évoquez même pas ce moment n’est pas une vertu collective mais individuelle...

              Vouloir être généreux avec l’argent des autres n’est pas de la générosité, mais au contraire une absence de générosité, que l’on souhaite déléguer à l’Etat.

              N’est-ce pas ce dont souffre la société française ?

              Par ailleurs la générosité est-ce de l’argent ? N’est-ce pas avant tout une forme de don de soi envers les autres, qu’il s’agisse d’un but humanitaire, scientifique, ou pourquoi pas entrepreneurial ?

              J’ai de l’admiration pour les bénévoles de terrain qui agissent.

              Ceux qui viennent à la télé donner des leçons de morale et exiger des lois, en revanche me dégoûtent.

              • ZEN ZEN 5 novembre 2012 18:35

                Bonjour cher Axel

                Avez-vous lu Ayn Rand, pour qui l’égoïsme est la valeur suprême, et que pensez-vous de son disciple Paul Ryan ?
                Lamentable article ? Démontrez en quoi...
                Il n’était pas ici question de générosité, noble valeur individuelle (mais douteuse de la part de ceux qui pratiquent la charity business par intérêt, dans des congrès à un milion de dollars), mais de simple justice et de solidarité., dont la concrétisation ne peut se faire sans règles...
                Roosevelt lui-même avait compris ça, figurez-vous.
                Il semble que ce soit vous qui confondiez tout...


                • Axel de Saint Mauxe Axel de Saint Mauxe 5 novembre 2012 22:32
                  L’article de Télérama est lamentable (beaucoup l’ont dénoncé), en cela qu’il fait de l’individualisme une monstruosité.

                  En quoi le fait que je souhaite être maître de mes choix ,de mes croyances, que je ne souhaite pas dépendre d’une autorité quelconque, y compris Etat, République, fait de moi une ordure ?

                  En quoi le fait que je rejette l’égalité, par exigence, par refus du nivellement par le bas, fait de moi un monstre ?

                  En quoi est-ce mal de vouloir sauvegarder son for intérieur des pollutions idéologiques extérieures ?.

                  Faites vous à l’idée que le collectivisme est insupportable à certaines personnes, que le collectivisme conduit à la destruction de l’individu, à la mort... ce sont des idéologies de massification totalitaires, démocratie comprise (loi de la majorité).

                  Il appartient à chaque individu, dans un élan vital, de refuser cette massification consumériste, y compris les pièges du salariat, dont on voit chaque jour les victimes.

                  Les individus emmaillotés dans les langes tièdes de l’Etat-Providence, de l’Education Nationale, de leur patron, du cannabis et de l’embourgeoisement généralisé se ramollissent, s’affaiblissent, perdent leurs facultés vitales et tombent comme des feuilles mortes au moindre coup dur...

                  Pour survivre, l’individu se doit de rester en possession de ses moyens, et rester maitre de son destin.

                  Je reconnais que cela n’est pas si simple à mettre en oeuvre, mais en prendre conscience est déjà un grand pas.

                  La solidarité dont vous parlez ne doit s’exercer qu’auprès des personnes déficientes ou physiquement affaiblies.

                • ZEN ZEN 5 novembre 2012 23:13

                  La solidarité dont vous parlez ne doit s’exercer qu’auprès des personnes déficientes ou physiquement affaiblies.

                  Qui remboursera vos frais hospitaliers après une opération lourde et coûteuse ou un traitement sur plusieurs années ? Il est vrai qu’ avec votre fortune, que suggère votre particule, vous n’aurez pas besoins des autres...
                  Aux USA, il arrive que des femmes doivent rembourser pendant plusieurs années des frais d’accouchement et que plusieurs millions de personnes ne se soignent plus ou très mal...Vive Ayn Rand !
                  Encore une fois, vous avez fait une lecture erronée de l’article incriminé et vous n’avez pas lu tout mon propos et les liens, notamment sur la notion d’individualisme


                • walden walden 6 novembre 2012 10:31

                  la liberté individualiste est parvenue à son ultime paradoxe : les contraintes économiques déterminent le destin des particuliers, on doit vendre sa force de travail (il n’y a plus de ressources communes à exploiter individuellement), on doit, ce faisant, obéir au diktat d’un patron qui, lui-même, obéit aux diktats d’une logique de la plus-value.
                  Le modèle individualiste de la liberté n’est pas mauvais en soi - à mon humble avis - il aboutit à des contradictions que les individualistes doivent surmonter. La question, c’est comment concevoir le vivre ensemble (inévitable) tout en cultivant la liberté individuelle. La main invisible du marché détruit le vivre ensemble tout en sapant la liberté individuelle. Par rapport aux objectifs des individualistes, elle est condamnée à échouer.
                  Peut-être la sphère économique doit-elle être régie pour partie par du vivre ensemble, du vivre ensemble qui soit soucieux d’épanouissement individuel. Techniquement, les possibilités sont infinies, même dans le champ de la droite.


                • Éric Guéguen Éric Guéguen 6 novembre 2012 12:37

                  @ ZEN :

                  «  Il est vrai qu’ avec votre fortune, que suggère votre particule, vous n’aurez pas besoins des autres... »

                  Délit de sale gueule ? ... Mettons ça sur le compte de la fatigue.


                • ZEN ZEN 6 novembre 2012 13:19

                  Délit de sale gueule ? .

                  Non, réponse du berger à la bergère :smiley
                  D’autant que cette particule est une fiction..


                • Axel de Saint Mauxe Axel de Saint Mauxe 11 novembre 2012 21:34

                  Lol les préjugés ont la vie dure smiley


                • Le péripate Le péripate 5 novembre 2012 22:55

                  Il n’y a aucune raison d’entretenir des complexes à propos d’idées saines et conformes aux sentiments innées de justice que chacun peut éprouver en son for intérieur.

                  Donc pas de décomplexés.


                  • Soi même Soi même 6 novembre 2012 12:33

                    je fais sans doute de contrarier, l’’égoïsme comme horizon, c’est en réalité une bonne chose, car cela lève les masques ! On moins on ne peut plus se caché la face devant son égoïsme !


                    • Éric Guéguen Éric Guéguen 6 novembre 2012 12:48

                      Ce qui est amusant, c’est de se porter sur l’identité politique des gens qui fustigent l’individualisme : ce sont eux-mêmes des individualistes, mais qui ne s’assument plus comme tels. Ça peut tout à fait être pour de bonnes raisons, mais ils gagneraient au moins à admettre que c’est l’individualisme qui a façonné le monde moderne et que même les combats qui se veulent « sociaux » tablent avant tout sur le confort d’individus lésés, non sur l’intérêt de la nation.
                      Autrement, ils ne se seraient pas battus pour les droits des individus, parmi lesquels - et oui, c’est malheureux ! - le droit à l’égoïsme.

                      Romney est plus « individualiste » qu’Obama, certes, mais de là à en déduire qu’Obama est de gauche... il faut être Français pour s’en convaincre. smiley

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès