L’élimination de Nasrallah : une victoire pyrrhique pour Israël !
Aucune élimination physique d’un dirigeant, s’il incarne le désir d’un peuple, n’a jamais empêché, ni n’empêchera, le cours de l’histoire dans la quête de ce que ce leader a représenté et incarné !
La plupart des analystes de l’actualité politique internationale, des dirigeants affectés par les guerres dans les régions en conflit, des observateurs et enfin les commentateurs de tout genre commentent et analysent les comportements, les actions et les résultats dans le conflit actuel entre Israël et une partie du monde musulman à travers le prisme des faits réels et immédiats.
Tout conflit, même entre deux personnes, et encore moins entre deux pays ou deux peuples, ne se produit jamais par hasard ou sans raisons historiques. Le conflit entre Israël, la Palestine et le Liban n’échappe pas à cette réalité ou vérité.
Les pogroms, les persécutions et la Shoah pour les communautés juives d’un côté, et la valse des différents pays et nations qui ont pris possession par la force de la région de Palestine ou du Moyen-Orient au cours des deux ou trois derniers siècles, se terminant par la Nakba pour ses habitants musulmans, chrétiens et autres communautés de ces territoires de la Palestine, marquent d’un sceau indélébile l’inconscient et l’histoire de ces peuples.
Malgré tout, on pourrait à tort, en regardant de loin et avec une supposée objectivité, affirmer que la Shoah et la Nakba ne sont pas comparables, et que les personnes ayant vécu ces événements ont disparu ou que les derniers témoins sont en train de disparaître des deux côtés. On pourrait ainsi prétendre que ceux qui se réclament actuellement de la Shoah ou de la Nakba n’ont pas le droit de le faire ni de se considérer comme leurs héritiers. Pourtant, vouloir affirmer haut et fort que ces passés n’ont rien à voir avec le présent relève d’une pure idiotie !
La réalité est toute autre : ce passé détermine les attitudes, les comportements, les actions, les guerres, les meurtres, les bombardements aveugles, les actes kamikazes, ainsi que les assassinats de personnes, de chefs et de leaders politiques et communautaires.
À ces deux histoires, autant du côté des Palestiniens que des Israéliens, s’ajoutent des influences, des rôles et des fonctions qui leur ont été assignés par les puissances étrangères dans le jeu géopolitique mondial actuel.
En effet, les pays occidentaux ont assigné, au début du XXe siècle à Israël, alors un pays en devenir, le rôle de barrière pour empêcher « la colonisation » du monde occidental par l’islam. Israël est ainsi devenu le pivot central et le tampon contre l’expansion de l’islam dans le monde occidental. En miroir et comme réponse à ce fait, le Liban et les Palestiniens se sont transformés en vecteurs de la propagation de l’islam sunnite et plus particulièrement chiite dans ce Moyen-Orient, et peut-être ailleurs. Cela explique la politique de soutien inconditionnel de l’Europe et des États-Unis vis-à-vis d’Israël, malgré les dérives politiques extrêmes et les violations des droits des Palestiniens de tout ordre, tant à l’intérieur d’Israël que sur les territoires palestiniens.
LE PANORAMA POLITIQUE INTERNE D’ISRAËL, DU LIBAN ET DE L’IRAN
Aucun de ces trois pays ne connaît une stabilité politique solide à l’heure actuelle. Israël est en proie aux secteurs religieux les plus extrémistes, et il faut dire clairement que cette situation n’est pas le fruit du hasard. Israël est la réalisation ou l’incarnation d’un rêve collectif mythico-religieux. En conséquence, il ne peut pas se permettre une politique expansionniste par adoption ou intégration ; bien au contraire, elle est fondée sur l’exclusion. Il y a appropriation de territoires, mais pas d’intégration des populations locales. Une nation qui ne peut pas se permettre d’intégrer est condamnée à disparaître à long terme par épuisement. En effet, le flux migratoire des Juifs de l’étranger vers Israël va s’assécher et ne pourra pas se maintenir éternellement ; il risque même de s’inverser dans un futur très proche.
Quant au Liban, c’est un pays complexe ! Il est le fruit d’une décision géopolitique et administrative des grandes puissances de l’époque, en particulier de la France. Tant que la France a pu le soutenir par sa présence militaire, son assistance économique et culturelle, ce territoire appelé Liban a pu avoir un État fonctionnel, capable d’agglutiner les différentes communautés. Plus tard, par sa transformation en plaque tournante des pétrodollars ceci a contribué à l’implosion et à l’explosion de cet État devenu mafieux. En conséquence, le Liban en tant qu’État n’existe plus réellement ! Il est condamné à disparaître en tant que tel, entraînant probablement dans sa chute l’existence du pays lui-même.
En revanche, l’Iran est une grande nation. Même sous la férule des mollahs et malgré le blocus commercial et industriel de l’Occident, l’Iran progresse. Bien entendu, les mollahs se sont éternisés à la tête de l’État, ce qui a logiquement provoqué le divorce et les tensions actuelles entre ce gouvernement théocratique et la grande majorité des Iraniens de tous bords. Ces derniers rêvent de plus de liberté dans tous les domaines et d’un contrôle de la corruption qui est caractéristique de ce type de gouvernement. En effet des groupes mafieux se sont infiltrés dans tous les rouages du pouvoir et luttent pour conserver leur influence.
Cette situation de fragilité interne rend actuellement l’Iran vulnérable face à Israël.
Par conséquent, l’Iran ne peut pas et, mieux encore, ne veut pas faire la guerre à Israël, révélant ainsi sa fragilité aux yeux du monde entier, et plus particulièrement de son opinion publique. Alors, il doit chercher un équilibre presque impossible à réaliser, surtout si la partie opposée a intérêt à briser cet équilibre.
Israël se trouve donc face à un dilemme en ce qui concerne l’Iran, un dilemme qui traduit l’essence même de son existence. Paradoxalement, Israël a besoin, et a toujours eu besoin, d’ennemis pour pouvoir justifier son existence.
Ce dilemme pour Israël est une question de vie ou de mort si l’on analyse la résolution de ce dilemme à la lumière des comportements israéliens passés et présents.
Or, il nous semble qu’il existe, à l’heure d’écrire ces lignes, deux possibilités.
Premier scénario : Israël peut prendre la décision de mettre fin à la menace iranienne. La meilleure manière d’y parvenir serait de bombarder les centres de recherche et de production d’armes nucléaires. Si cette attaque avait lieu, l’opinion publique iranienne, blessée et trahie, pourrait éventuellement renverser à court ou moyen terme l’État théocratique affaibli des mollahs. En conséquence, l’ennemi public numéro un d’Israël disparaîtrait. Ceci donnerait lieu à l’irruption plus évidente des contradictions qui couvent à l’intérieur d’Israël.
La disparition de l’ennemi principal et de ses alliés provoquerait la nécessité pour Israël de se créer un nouvel ennemi afin d’éviter l’effondrement de secteurs entiers de l’économie israélienne, en particulier ceux liés à la guerre, forçant Israël à chercher de nouveaux fronts. S’il ne le fait pas, le chômage augmenterait, le niveau de vie baisserait, entraînant une émigration vers des horizons plus favorables. L’État d’Israël entrerait alors dans une phase de dissolution partielle ou totale.
Deuxième scénario : Israël n’attaque pas l’Iran et concentre son combat contre le Hezbollah. Il détruit les deux tiers du Liban, fertilisant ainsi la terre pour la renaissance de l’hydre maudite du Hezbollah, cette fois-ci avec des milliers de têtes, rendant sa décapitation presque impossible, mais entraînant de longs combats marqués par une ingéniosité scientifique, électronique et informatique des deux côtés.
En interne, Israël appliquerait une politique d’extrême droite victorieuse, similaire à celle de l’Afrique du Sud à l’époque de l’apartheid, envers ses propres concitoyens arabes, chrétiens, druzes et travailleurs étrangers. « Le bonheur » pour les religieux israéliens !
De même, le spectre de deux États, israélien et palestinien, aurait définitivement disparu du panorama des hommes de bonne volonté d’un côté comme de l’autre.
Israël est déjà un gros caillou dans la chaussure d’un monde de plus en plus étroit, et ceci peut aussi pencher dans la balance dans son avenir.
H.Ramirez.A
Neuilly-sur-Seine, le 2/10/2024
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