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L’énigme grecque

L'énigme grecque, de Josiah OBER

Un livre paru le 23 mars 2017, de Josiah OBER (Auteur), Paulin ISMARD (Préface), Philippe PIGNARRE (Traduction).

 

Quelle énigme ?

 

Pourquoi pendant plusieurs siècles la Grèce antique était prospère.

Économie, liberté, culture, démographie, tout était en croissance, tout s’est embelli.

 

Pour comprendre cette énigme, l’auteur pose une thèse qui relève à la fois de l’Histoire et des Sciences Sociales, et il s’emploie à y répondre en apportant des arguments solides et étayés.

 

Pourquoi cet état de grâce ? N’est-ce pas à cause d’une organisation basée sur des rapports gagnants-gagnants ?

Les individus étaient libres et l’État garantissait leur liberté tout en assurant sa mission de pouvoir public.

Les individus avaient intérêt à respecter l’État qui leur garantissait sécurité et prospérité, tandis que l’État était contrôlé par une démocratie qui écartait les tentatives d’autocratie. Les rétroactions fonctionnaient dans une spirale bénéfique à tous.

 

La nature des rapports entre individus et État se retrouvaient entre États. La Grèce antique était un ensemble d’un milliers de cités-États qui avaient des liens forts entre elles.

 

La richesse venait du commerce qui a endigué les pénuries et qui a facilité la spécialisation de chacun selon ses prédispositions. La liberté de chacun, individu comme cité-État, le poussait à se spécialiser toujours davantage, et à innover, et à échanger. Ainsi était engendré un cercle vertueux.

L’auteur est conscient que ce modèle n’était pas parfait par bien des côtés : femmes et esclaves en étaient écartés. Et quand à la suite d’un différend que la diplomatie avait été impuissante à réduire, une cité en terrassait une autre à la guerre et en exterminait les hommes tout en réduisant femmes et enfants en esclavage.

 

La période antique correspond à l’âge du fer et s’établit de -800 à -300. La population grecque est passée de moins de 500.000 à sans doute plus de 4 millions. Voici des indicateurs avec leur coefficient multiplicateur :

  • population : *10 à * 20
  • plan au sol de la maison : * 3,5
  • biens du ménages : *5 à 10
  • montant médian de l’épargne : *2
  • montant moyen de l’épargne : *4

 

Les âges de l’Histoire

Pour mémoire les invasions celtiques commencent vers le 12ème siècle, à l’époque de l’âge du bronze.

Pour mémoire encore, l’âge du bronze s’étale pour la France sur un millénaire et varie suivant les régions, entre -1.800 et -800.

La civilisation des Cyclades (de -3200 à -2000 av. J.-C.) présente comme son l’indique dans les Cyclades, mais aussi en Grèce continentale, fait partie de l’âge du bronze. En Crète s’est développée la Civilisation minoenne (de -2700 à -1200 av. J.-C.). A suivi la civilisation mycénienne correspondante à la fin de l’âge du bronze en Grèce et en Crète.

Cet âge a apporté la métallurgie, les poinçons, les alênes, les poignards, les haches et les hallebardes. La métallurgie se définit comme un traitement thermique permettant l’extraction de métaux à partir de minerai. Elle nécessite un savoir-faire parfait de l’art du feu, acquis avec la cuisson de la céramique. Le bronze est un alliage de cuivre (90%) et d'étain (10%), lequel abaisse le point de fusion du cuivre.

La métallurgie a été à l’origine de la première économie complexe basée sur une production et des échanges à grandes distances, et comme les armes étaient en bronze et les outils continuaient d’être pierre, la hiérarchisation sociale a été marquée : au sommet, des rois dans des palais, avec des cours de guerriers et de serviteurs, et en bas des agriculteurs et des artisans qui produisaient mais à qui on ne laissait que le minimum vital. Le surplus était accaparé par les prédateurs qu’étaient les classes supérieures.

Comparés aux époques précédentes, l’âge du bronze a apporté une organisation sociale sophistiquée, une grande culture, de riches trésors, et de fortes inégalités et des guerres.

Mais une crise générale a traversé le monde méditerranéen lors de grandes invasions. Dans le même temps la technologie s'est renouvellée avec la production du fer.

 

L’âge du fer, qui nous intéresse ici, a commencé entre -1.100 et -750 dans une ambiance qualifiée de « siècles obscurs ».

L’âge du bronze s’est effondré, et avec lui, commerce, civilisation, techniques, etc. Sans commerce, plus de réseau d’échange. Sans comptes et archives à tenir, plus d’écriture et perte de sa technique. Sans richesses produites, plus de bureaucratie royale.

Au début de l’âge du fer, la communauté survivait si elle réussissait à développer une bonne coopération, et les chefs le restaient s’ils composaient avec leurs subalternes sans autoritarisme. Ce n’était pas l’égalité, mais la voie vers la citoyenneté.

L’âge du fer arrive donc en se démarquant de l’âge du bronze.

 

C’est dans ce contexte que l’auteur s’applique à chercher les causes du succès grec antique pluri-séculaires et leurs spécificités, et à expliquer pourquoi l'âge de fer a eu une civilisation différérente de l'âge de bronze.

La démographie

La Grèce antique est un agglomérat de 1.100 cités-États qui ont une population globale de près de 8,250 millions, avec un spectre allant pour chacune de 500 pour les villages à 250.000 pour les villes.

 

La démographie est un indicateur de bonne santé d’une communauté.

 

Longtemps après le siècle d'or est survenue une très longue période de pauvreté.

Vers 1.600 après J.-C. la population du Péléponèse approchait 250.000, soit le quart de ce qu’elle a compté 300 avant J-C.

En 1.685 la même population est descendu de moitié à 125.000, c'est à dire à celle de 1.000 avant J.-C. à la fin de l’âge du bronze et au début de l’age de fer.

En 2 millénaires le facteur a été de 1/8.

Il faudra attendre la fin du 19ème siècle pour dépasser le sommet de la fin de la période classique, mais les revenus étaient si bas au 19ème qu’ils encourageaient une forte émigration.

 

La Grèce antique a connu une période faste pendant des générations et a laissé des philosophes, des historiens, et des mathématiciens dont la renommée brille encore.

Quelles sont les conclusions de l’auteur ?
 

  • Hypothèse 1 : des règles justes qui ont favorisé les investissements en capital (humain, social, matériel) et par là fait baisser les coûts des transactions.
  • Hypothèse 2 : la concurrence libre a favorisé l’innovation et la coopération rationnelle. Les innovations étaient favorisées par l’apprentissage et l’émulation adaptative et par les garde- fou sociaux qui protégeaient les innovateurs en échec.

 

Pour étayer ces hypothèses, Sparte l’aristocrate est auscultée comme un contre-exemple, de même que les tyrannies siciliennes de Denis père et fils.

 

Conseil

C’est un livre à lire, à méditer et à discuter.

Il contient une multitude d’informations et une approche dont je n’ai dévoilé qu’un pan.

L’auteur donne l’impression que les conditions de réussite de la Grèce antique sont toujours d’actualité et qu’elles nous apporteraient aussi la prospérité.

 

Il est favorable à une économie ouverte, n’ayons pas peur des mots : à la mondialisation, car il pense que les échanges enrichissent tout le monde, à la condition qu’ils soient équitables.

 

Pour ceux qui s’intéressent à notre époque, il serait judicieux d’étudier si nos échanges sont équitables. Rappelez moi combien se vend un maillot de footballeur et combien il a rapporté à l’ouvrier pakistanais.

 

L’auteur est partisan de l’égalité qui évite que certains deviennent des prédateurs.

Devinette : quel journal gauchiste a écrit en 2011

« Avec un niveau de vie médian de 1 630 euros par mois, l'écart entre riches et pauvres s'est encore creusé en France en 2011. Une situation qui nourrit une désillusion face au politique …

la situation s'est améliorée en 2011 pour la moitié de la population la mieux lotie. En revanche, elle a continué à se dégrader chez les plus modestes, et ce pour la troisième année consécutive. Près de 8,7 millions de personnes, soit 14,3 % de la population (contre 14 % en 2010), vivaient en 2011 sous le seuil de pauvreté, soit 977 euros mensuel

les 10 % les plus pauvres, qui vivent avec moins de 877 euros par mois, et les 10 % les plus riches qui disposent d'au moins 3 120 euros ...

Plusieurs facteurs expliquent que l'écart se creuse entre riches et pauvres. D'un côté, le smic a été faiblement revalorisé en 2011, et les emplois à durée limitée ou à temps partiel ont augmenté. De l'autre, les revenus du patrimoine - qui concernent surtout les plus riches - ont augmenté.… » 

Réponse : http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2013/09/13/20002-20130913ARTFIG00256-des-riches-toujours-plus-riches-et-des-pauvres-encore-plus-pauvres.php

 

Ajoutons

Le patrimoine cumulé des 1 % les plus riches du monde a dépassé l’an dernier (en 2015) celui des 99 % restants, selon une étude de l’ONG britannique Oxfam réalisée à l’approche du forum économique mondial de Davos (Suisse), et publiée lundi 18 janvier 2016.

La crise mondiale des inégalités atteint de nouveaux sommets. Les 1 % les plus riches possèdent désormais davantage que les 99 % restants. Ils font usage de leur pouvoir et de leurs privilèges pour biaiser le modèle économique et creuser le fossé entre eux et le reste de la population.

Un réseau mondial de paradis fiscaux a permis aux plus riches de cacher quelque 7 600 milliards de dollars. La lutte contre la pauvreté est vaine si la crise des inégalités n'est pas résolue. 

https://www.oxfam.org/fr/rapports/une-economie-au-service-des-1

http://www.lemonde.fr/economie-mondiale/article/2016/01/18/les-1-les-plus-riches-au-monde-possedent-plus-que-les-99-autres_4848830_1656941.html

Alors ? Si on croit au conclusion de Josiah OBER et si on veut relancer la croissance, que reste-t-il à faire ?

 

Prière d’insérer

Pourquoi refaire l'histoire de la Grèce classique, du VIe siècle à Alexandre le Grand ? D'abord, parce que l'on dispose d'une masse d'informations supplémentaires sur les 1 035 cités-Etats s'étendant depuis l'Espagne et le sud de la France jusqu'aux rives de la mer Noire, exploitées ici pour la première fois de manière systématique. Ensuite, parce que, contrairement à ce que les historiens ont longtemps cru, on sait désormais que le monde grec a connu une croissance économique exceptionnelle, rendue possible par l'invention de la démocratie et des droits civiques, sur fond d'innovations institutionnelles, techniques et culturelles (théâtre, philosophie, mathématiques, etc.) permanentes.

Enfin, parce que les Grecs ont expérimenté toutes les ressources de la démocratie : élection, limitation des mandats électifs, tirage au sort. Ils ont réfléchi aux relations entre les citoyens et les responsables, au rôle des experts, aux moyens de réduire le pouvoir de nuisance des démagogues, à la place de la religion, etc. Des questions qui restent au cœur du débat démocratique actuel. Comment est-on passé en si peu de temps de villages dispersés ayant perdu l'usage de l'écriture après l'effondrement de la fin de l'âge du bronze à cette riche civilisation, brillante et inventive ?

Conjuguant avec talent histoire et sciences sociales pour nous permettre de mieux saisir cette période, l'auteur fait d'Aristote ou de Thucydide non seulement des informateurs précieux, mais aussi des interlocuteurs théoriques.

Car il est important de savoir comment les Grecs eux-mêmes pensaient leur système politique, leur économie, etc. Sans que l'on s'éloigne un instant de l'histoire événementielle : on est plongé dans les guerres avec le redoutable Grand Roi perse, on assiste aux péripéties de la guerre du Péloponnèse qui oppose Sparte à Athènes. Et l'on comprend enfin comment Philippe II de Macédoine puis son fils Alexandre le Grand ont pu, grâce à ce qu'ils ont hérité des cités grecques, construire un gigantesque empire qui s'étendra jusqu'aux rives de l'Indus.


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3 réactions à cet article    


  • JC-van-Dale 28 août 2017 10:05

    Bonjour,

    Dévoilons les Mystères de la Grèce antique.
    Rappelons que dans les premiers temps, le pouvoir a été attaqué en Grèce par des hommes que l’histoire appelle des Héros, mais qui en réalité ne sont que des grands bandits.
    Ces hommes, Thésée, Persée, Bellérophon, Jason, etc. doivent être montrés aux jeunes générations comme des brigands qu’il faut mépriser et non comme des héros qu’il faut admirer.
    Avec ce dernier millénaire avant notre Ère, un cycle nouveau va commencer.
    - LA SCIENCE ANTIQUE CACHÉE DANS LES MYSTÈRES
    - LE POLYTHÉISME EN GRÈCE
    - ORIGINE DE LA POÉSIE ET DE LA DIVINITÉ D’APOLLON
    - LE PRÊTRE CHEZ LES HELLÈNES
    - LA LÉGENDE D’ORPHÉE
    - RENAISSANCE PYTHAGORICIENNE :
    Le mot Pythagore ne désignait pas un homme, mais une science.
    - L’UNITÉ DIVINE L’INDIVIDU ET LE DUPLEX
    - LES PYTHAGORICIENNES - FONDATION DES COLLÈGES D’HÉTAÏRES
    - LA PHILOSOPHIE EN GRÈCE
    - SOCRATE (469-401)
    - PLATON (429-347)
    - HEMOERA :
    Hemoera est une Déesse dont le nom et l’histoire remplissaient l’Europe, qui joua un grand rôle en Grèce et particulièrement dans l’ancienne Achaïe.
    - LE CULTE DE LA DÉESSE HEMOERA :
    C’est la Déesse Hemoera qui écrivit les poèmes dits homériques, qui sont considérés comme les livres saints de la Grèce.
    - HEMOERA MASCULINISÉE
    - LES POÈMES HÉMOERIQUES RÉVISÉS
    - L’ILIADE
    - DÉCADENCE DE LA GRÈCE
    - ALEXANDRE LE GRAND, VRAIMENT ?
    Liens :
    Cordialement.

    • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine7 28 août 2017 11:42

      Ah , le merveilleux siècle de Périclès. Seules les Hétaïres avaient accès à l’enseignement. C’était une autre époque. Aujourd’hui les prostituées sortent de l’enseignement spécial,...Avec la Reanissance, la belle époque le Haut Myen-âge, ce sont mles époques préférés. La nôtre est en déclin. Bonne nouvelle : tout est à refaire. Comme une piece de Lampecco qui n’a pas tenu à la cuisson. Il faut la casser (et peut-être se servir des morceau pour les decouper et garnir une table,...tout n’est pas à jeter (jutilise un ordinateur,...), mais à refaire, certainement. Je propose de reprendre à partir de 1983 avant les années Thacher et ragan. C’est à ce moment là que la société a commencer à se pervertir comme le siècle de Périclès) qui on se rappelle à déclineé à cause de l’homosexualité, et le relâchement des moeurs...On parle toujours de l’homosexualité des grecs mais elle était de type initiatique (le maître se collait par derrièrel’élève mais, il n’y avait pas de pénétration,...).


      • cathy cathy 28 août 2017 15:25

        Alexandre n’a été que l’empereur de l’Asie pas de la Grèce.

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