En terre anglo-saxonne en tout cas, le débat est clos depuis l’invention de l’épilation au laser : ce sera sans poils. Finie the full bush, les jolies filles de Playboy Mansion affichent un corps imberbe et doré, et la majorité des femmes de moins de trente ans aux Etats-Unis ont opté pour l’épilation complète, comme l’atteste une étude américaine récente.
Car sociologiquement au pays de l’Oncle Sam, le poil renvoie à l’animalité, il fait « sale », « mal entretenu », et doit donc être traqué jusqu’aux parties les plus intimes.
Pour une jeune française débarquant sur le sol américain, le choc culturel peut être violent. Ayant enfin compris après quelques jours d’égarement que l’américaine moyenne ne marche jamais dans la rue, mais dans une salle de gym sur un tapis roulant, avec des écouteurs sur les oreilles et l’œil rivé sur 10 écrans de télé géants, la voilà qui se décide à souscrire un abonnement dans un club de sport.
Hélas, rien ne la prépare à la TERRIBLE épreuve du vestiaire. Interdit même aux petits garçons de moins de cinq ans qui sont priés d’attendre leurs mamans à l’entrée, celui-ci pullule de jeunes femmes à la chevelure blonde et impeccablement disciplinée, exhibant sans pudeur des seins refaits, et surtout…un sexe parfaitement épilé.
Les douches étant collectives, la jeune française se faufile dans un coin en essayant tant bien que mal de cacher quelques malheureux poils pubiens derrière ses petites mains. Elle récolte au passage deux ou trois regards écœurés et comprend vite le message : ici, le poil est persona non grata.
D’ailleurs, même les hommes s’y sont mis et partout sur les appareils de musculation, ce ne sont que mollets lisses et torses glabres, aisselles de bébé et beaux pectoraux imberbes. La mode de la boule de billard, quoi… Et à entendre leurs conversations, coucher avec une fille qui ne serait pas entièrement épilée s’apparenterait ni plus ni moins à une expérience zoophile.
La jeune française doit se résigner : son intégration aux USA passe forcément par l’épilation définitive.
En France et en Europe, les opinions sont plus nuancées. Le mâle gallo-romain hésite : au fil des forums sur le sujet, on peut lire que certains préfèrent nettement un sexe épilé (plus agréable pour les cunnilingus), d’autres restent des fervents défenseurs de la fourrure naturelle et veulent des femmes dans leurs lits, des vraies, et surtout pas des petites filles !
Le marché de l’épilation laser s’est adapté au débat, et propose à celles tentées par l’épilation définitive de garder un petit triangle de poils au dessus du mont de Venus, histoire d’écarter tout soupçon d’immaturité sexuelle. Même les psychologues et les historiens s’y mettent, on refait ici ou là l’histoire du poil depuis l’Antiquité, on cite en référence Pline et César, et surtout, on fustige les films pornos qui auraient imposé un nouveau diktat du sexe épilé.
Bien évidemment, ailleurs dans le monde, les gens ont souvent d’autres préoccupations plus graves que celles de se regarder les poils pubiens. Et d’ailleurs, certains me feront remarquer fort justement qu’on s’en fout un peu de la mode des sexes glabres, alors que la crise tape à nos portes, que le chômage atteint des sommets stratosphériques et que le pouvoir actuel enchaîne les pieds-de-nez aux valeurs républicaines. Que tout cela reste des préoccupations superficielles d’un monde occidental décadent et déboussolé. Voilà qui est bien vrai …
D’autant plus que le sexe, tout comme le People, font partie des techniques d’enfumage actuelles pour distraire le peuple français et le détourner des vrais sujets qui fâchent. A l’approche des élections européennes, on aurait pu s’attendre à lire dans nos quotidiens ou hebdomadaires indépendants quelques dossiers profondément fouillés sur l’inaction du gouvernement face à la montée du chômage ou les vrais enjeux de l’Europe. Que nenni...
A la place, on voit fleurir dans les journaux des études diverses et variées, sur la sexualité des français, la vraie infidélité (question de sentiments ou de pénétration ?), la chimie de l’amour, la masturbation, et j’en passe et des meilleures. On va même jusqu’à nous endormir avec des dossiers sur les mœurs de nos amis les bêtes (Une du Point sur le dauphin)…
Pire : on nous abreuve de peopolitique… La déflation menace gravement l’économie européenne ? Allez hop, une vidéo du couple Sarkozy à l’Elysée, recevant avec leurs chiens cinq lectrices de Femme Actuelle, relayée dans toute la presse hexagonale. Plus 60 000 chômeurs en avril, et les manants chipotent ? Allez zou, une photo de la Première Dame aux côtés de mamie Bernadette en Une du Figaro-Magazine…
Mieux encore : il y a le sexe du peopolitique… Et oui, cette fameuse photo de Carla à moitié nue qui sera mise aux enchères le 4 juin prochain, tombe à pic dans l’actualité et a déjà créé un véritable buzz sur Internet, le dernier média que notre président voudrait conquérir.
Et toujours dans la même veine (sans que cela ne revête le moindre rapport avec l’actualité électorale), je vous concocte pour dimanche prochain un petit billet au titre plutôt racoleur : et vous, vous préférez ça comment ? Avec ou sans vaseline ? Question éminemment d’actualité pour l’ensemble des français, n’est-ce pas ?