L’Histoire pour l’Espoir
Il n’aura fallu à la France qu’une bonne vingtaine d’années pour se remettre du désastre de Sedan en 1870, et à peu près le même laps de temps pour se remettre de celui, encore plus absolu, de Juin 40.
Il ne s’agit pas ici de faire l’apologie du temps passé, de dire qu’alors, tout était parfait, loin de là, ni de vivre dans ses regrets, mais de regarder la réalité actuelle pour redonner espoir et confiance aux jeunes générations. Il s’agit de reprendre notre destin en mains, et de ne pas accepter la médiocrité actuelle comme une fatalité. Certes, les temps changent, ce qui était vrai hier ne l’est plus aujourd’hui, mais au fond, les hommes, eux, ne changent guère. Voilà pourquoi un regard lucide sur notre passé peut nous aider à construire notre avenir.
Sans faire preuve d’un chauvinisme excessif, remarquons d’abord que les périodes de crise grave ont été un extraordinaire révélateur du « génie » français. On peut le regretter, mais ainsi sommes-nous faits. Les débuts de la IIIe République dans l’ordre politique, la reconstruction des années 50 dans l’ordre économique sont là pour nous prouver que si nous voulons le faire, nous savons, et pouvons le faire.
Gambetta, Ferry, Clemenceau, Jaurès, et aussi le Père Hugo à la fin de sa vie, Renan, Bergson, Zola, et bien d’autres avant le tournant du siècle. De Gaulle, Mendès-France, Monet, et aussi Aron, Camus, Sartre et Beauvoir, et bien d’autres dans l’après guerre. Voilà de quoi nous redonner espoir.
Les périodes de déclin de la France correspondent à celles du renoncement devant des crises sociales aux allures insolubles, et provoquant des tensions et des blocages stériles. Le triomphe de la bourgeoisie "industrielle" pendant le Second Empire et l’incroyable "fracture sociale", pour employer un terme plus contemporain, des années 30 conduisant au Front Populaire, ont créé de telles conditions que personne, ou bien peu de monde alors, n’a voulu regarder en face la réalité de ce qui nous entourait. Le fait de le savoir devrait pouvoir nous empêcher de renouveler ces erreurs tragiques. En sommes-nous capables ? Gardons espoir.
Il est aussi honnête de dire que notre Histoire nous handicape aujourd’hui dans la résolution de nos problèmes, par le manque, voire le refus, d’analyse collective de notre passé. Contrairement à d’autres pays, et nous pensons là plus particulièrement à la Grande-Bretagne, la France et les Français n’ont pas surmonté leur passé impérialiste. Toutes nos attitudes, que ce soit dans le domaine de la politique étrangère ou dans celui de l’immigration, démontrent que cette question sensible n’a pas été traitée. De même, encore aujourd’hui, la question de Vichy, de la collaboration, et en général du comportement des Français pendant cette période si douloureuse de l’occupation, n’a-t-elle pas été correctement résolue, malgré de sérieuses analyses. De manière consciente ou inconsciente, le refus persistant des Français de regarder en face cette dure réalité, d’assumer leur passé, reste un handicap majeur pour notre pays. Acceptant mal son passé, celui-ci ne peut envisager sereinement son avenir.
Parlant de Jeanne d’Arc, Charles Péguy a dit "Elle aima si fort la France que la France s’aima elle-même". Faisons la part de la réalité historique, pour retenir ce que cette phrase a de symbolique. Soyons lucides, et gardons espoir.
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