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L’humour : le nouveau vecteur de la démagogie et de la pensée unique

Tout droit importé des Etats-Unis, le « stand-up » fait actuellement fureur en France. Porté par une poignée de représentants, il est devenu le mode d'expression humoristique le plus en vogue chez les jeunes générations, particulièrement en banlieue.

Pour autant, il ne faudrait pas penser que cet humour est apolitique, bien au contraire. Ses représentants ont tous des choses à dire et ne le cachent pas (ou bien maladroitement). Des années 1990 à la décennie 2000, cet humour « jeune » a en réalité été l'un des piliers de la démagogie ambiante qui est le ciment de la fameuse bien-pensance.
 
Cela commence avec les premiers humoristes d'origine étrangère : il y a bien évidemment Jamel Debbouze, qui fut longtemps l'une des personnalités préférées des français. Mais aussi les duos mixtes Éric et Ramzy, Omar et Fred ou encore Gad Elmaleh. Que de personnalités sympathiques, a priori inoffensives et inévitablement attachantes. Elles font rire tout le monde, toutes les classes sociales, femmes et hommes, de 7 à 77 ans. On pourrait même affirmer sans risques que des électeurs de la droite ou même, du FN, qui représentent l'incarnation même du Mal comme chacun sait, rient devant leurs sketches.
 
Pourtant le politiquement correct se manifeste sans subtilité aucune dans cet humour. Parce qu'il induit des postulats de départ directement hérités de la bien-pensance. Des « clichés » pas bien méchants destinés à faire rire mais en réalité totalement révélateurs du climat malsain qui règne actuellement en France sur le plan sociétal. Quels sont-ils ? La soupe habituelle : les français « blancs » sont racistes, intolérants, frustrés et peureux, mais on les aime bien quand même ! Les arabes et les noirs sont sympathiques (même quand violents), espiègles, solidaires, dignes.
 
Quoi, vous êtes outrés ? C'est pour rire. Et si vous n'y croyez pas, jugez par vous même en regardant les spectacles du Jamel Comedy Club, parfaite illustration de l'humour communautariste et clientèliste. Les blagues sur les blancs font rire les noirs. Les blagues sur les noirs font rire les blancs (mais pas trop quand même). Les blagues sur les arabes font rire les blancs et les noirs. Allez, j'exagère, mais c'est le principe. Un humour à la fois ciblé et exhaustif : il y en a pour tout le monde, mais toujours en entretenant le même communautarisme et la même qualité d'écriture au ras des pâquerettes.
 
Je ne suis pas aigri, comme tout le monde je rigole devant ces sketches (sauf quand ils sont réellement médiocres et pas drôles, comme ceux de l'arabe de service assumé et pistonné Mustapha El Atrassi ou du pathétique idiot utile Yassine Belattar), mais ce n'est pas parce qu'il s'agit d'humour qu'on ne peut rien en dégager.
 
En fait cet humour tend à admettre des pré-supposés et à tisser son matériau drôlatique en partant de ces postulats de départ on ne peut plus erronés mais communément admis par une génération politiquement et culturellement inculte. De quoi développer en toute facilité un humour sociétal mensonger mais qui illustre parfaitement bien les amalgames politiques et sociaux que tendent à développer la sphère médiatique, toujours en décalage total avec la réalité populaire.
 
Mais cet humour ne se revêt pas toujours d'un caractère purement sociétal. Nous avons, en France, une grande tradition de comiques engagés et militants. De Coluche à Desproges en passant par Bedos et Guillon, l'humour aborde parfois la politique de plein front, sans sous-entendus ou thématiques périphériques. Mais les héritiers idéologiques (parfois biologiques) de cet humour se sont mis au diapason en adoptant le nouvel humour bien-pensant.
 
Ainsi, très récemment, Bedos fils, n'a pas manqué de se payer Marine Le Pen dans l'émission de Franz Olivier Giesbert sur France 2, sous l'œil admiratif des antiracistes les plus méprisants du PAF (comme la gauchiste hystérique Caroline Fourest). Je lui reconnais un talent indéniable sur la forme, mais sur le fond, il a définitivement opté pour la facilité avec la même rengaine adolescente et politiquement stérile. Le caractère comique de la prestation ne devrait pas exclure un minimum de sens critique et d'honnêteté intellectuelle. Les raccourcis « FN = fachos », à l'heure où 36% de la classe ouvrière se déclare en faveur de Marine le Pen, devraient être passés de mode, humour ou pas humour.
 
Mais avec le soutien infaillible de gens du spectacle de mauvaise foi, cela ne risque pas d'arriver. Ainsi la comique Sophia Aram s'est permis de qualifier les électeurs du FN de gros cons dans l'une de ses chroniques sur France Inter, en mars dernier. A part Guy Carlier, qui s'est fendu d'un droit de réponse sur Europe 1, tout comme le magistrat Philippe Bliger sur son blog, cela n'a pas suscité de très vives réactions au sein de la sphère médiatique ou même politique. La même insulte proférée à l'égard des électeurs PS, que je pourrais très facilement taxer de bobos imbéciles (pour rester poli) ; ou du NPA, les adolescents déficients mentaux, aurait sans nul doute provoqué moult remous au sein des mêmes médias.
 
Fondamentalement, je suis pour que l'on puisse se permettre ce genre de petite sortie osée, mais encore faut-il que cela soit possible pour n'importe quel parti.
 
Taper sur le FN ou sur la « droite dure » (qui aurait été qualifiée de molle il y a 15 ans, mais passons), c'est l'une des grandes caractéristiques de l'humour à caractère politique. On en a une illustration savoureuse tous les soirs dans les « Guignols de l'info ». Lorsqu'il s'agit de s'en prendre à l'UMP, on peut les traiter de racistes, de beaufs et d'imbéciles (d'une façon souvent très drôle, ne soyons pas de mauvaise foi).
 
Par contre, lorsqu'il s'agit de la gauche, on se moquera tout au plus des kilos en trop de François Hollande, ou des querelles internes au PS (qui les empêchent d'accéder au pouvoir, ou comment faire part de ses préférences à travers des pastiches humoristiques). Mais jamais on ne verra les auteurs s'attaquer à leur angélisme ridiculement comique, ou de leur programme rétrograde, de leur nostalgie Mitterrandienne révisionniste ou du fait qu'ils soient désormais entièrement coupé des classes populaires. Ce n'est pourtant pas comme si ces sujets étaient trop difficiles à parodier, bien au contraire. La différence de traitement s'illustre alors par un humour gentil (qui aime bien châtie bien) pour la gauche, et ouvertement insultant et une fois encore en décalage total avec la réalité pour la droite. Tirer sur les ficelles, caricaturer à souhait, il n'y a absolument rien de dommageable à cela, mais la différence de traitement est trop visible pour ne pas être soulignée. Un humour malhonnête donc, et manipulateur, qui traduit les préférences de la sphère médiatique (90% des journalistes se déclarent de gauche) et pas les sentiments réels de la population.
 
Il y a aussi ceux qui se croient dissidents. Un statut qu'aime revendiquer Stéphane Guillon depuis qu'il a été licencié de France Inter. En réalité, il n'y a pas plus consensuel et imbus de sa propre personne que Stéphane Guillon, qui supporte bien mal la critique, alors qu'il passe son temps à faire des caricatures pas vraiment inspirées et pas vraiment osées sur Canal+. Récemment humilié par le très pertinent Alain Soral (président de l'association Egalité et Réconciliation), qu'il avait lâchement attaqué sur le plateau du grand journal en le qualifiant de « très dangereux » (tout en sachant que ce dernier n'aurait jamais la possibilité de lui répondre puisqu'il est banni du paysage médiatique), Stéphane Guillon a préféré garder le silence : le syndrome de l'arroseur arrosé ?
 
Il est, du reste, souvent associé à son compère Didier Porte, qui ne vaut guère mieux, et qui, s'il aime se faire défenseur de la liberté d'expression, est en réalité un gauchiste censeur comme un autre.
 
Et puis, au-delà de ces façades médiatiques qui passent leur temps à faire couler le robinet d'eau tiède, il y a les véritables engagés. Dieudonné par exemple, est un paradoxe vivant. Il est l'humoriste qui vend le plus de billets de spectacles en France, mais a pourtant été à jamais banni des plateaux télévisés depuis un sketch pourtant on ne peut plus conforme au réel humour politique où il évoquait « l'axe americano-sioniste ». Ses spectacles, à l'écriture ciselée et réellement irrévérencieuse, continuent pourtant de séduire les amateurs d'un humour véritablement engagé et malgré tout hilarant sur des sujets aussi divers que les relations hommes femmes, le fanatisme, la beaufitude... Ses frasques provocantes ne sont pas toujours d'un très bon goût, mais le tout a été pensé pour tendre un bras d'honneur à un système médiatique qu'il est définitivement très aisé de manipuler. Privé de moyens licites de promotion, Dieudonné use de la provocation pour faire parler de lui, et aime glisser à cet égard des « quenelles », à savoir faire s'offusquer les objecteurs de conscience sur le ton de l'ambiguïté.
 
Enfin, comme pour parachever d'illustrer que cet humour de la démagogie est plus que jamais d'actualité, était organisé hier soir par le collectif francophobe (sous couvert de francophilie, comme d'habitude) de l'imbuvable Rokhaya Diallo, Les Indivisibles ; une remise de prix sur le ton de plaisanterie pour les propos les plus « racistes » et « discriminatoires » de l'année, les Y'a Bon Awards 2011. Parce que cet événement est une illustration parfaite de tous les points qui ont développés dans ce billet, il n'y avait pas plus indiqué pour le clôturer.
 
http://bobignyblog.blogspot.com/2011/05/lhumour-le-nouveau-vecteur-de-la.html

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5 réactions à cet article    


  • voxagora voxagora 26 mai 2011 13:18

    .

    C’est en effet un sujet très intéressant à étudier.
    Rire est si bon, qu’on a tendance à en redemander.

    Avant on disait que les chanteurs étaient « lancés », comme des savonnettes.
    Et si nous assistons à un déferlement d’humoristes,
    « lancés » à qui mieux mieux,
    c’est que ça rapporte très bien (pourquoi pas s’il est bon ?),
    mais aussi, comme vous l’analysez, cela peut être instrumentalisé.

    Et n’oublions pas que s’il y a pléthore d’interprètes de toutes sortes,
    c’est parce que les « droits d’auteurs » sont devenus une industrie 
    à quoi veulent prétendre un nombre incalculable de nullités.
    .

    • Léo Dumas 26 mai 2011 13:56

      Voila une belle dénonciation de la démagogie dans l’humour... de gauche. Entre l’apologie de la profondeur de pensée politique du célèbre « Israheil » d’un Dieudonné, et le qualificatif de « très pertinent » accolé à Soral (totalement absent des médias, comme chacun sait...), sans parler d’un « 90% des journalistes se déclarent de gauche » qui fera bien rigoler Jean-Pierre Pernaud, on peut dire que l’auteur, à défaut de faire preuve d’humour, a au moins le mérite de ne pas cacher ses sympathies.

      C’est dommage, car le présupposé de l’article est tout à fait pertinent.


      • Pie 3,14 26 mai 2011 14:02

        Eh oui, les humoristes sont plutôt de gauche. Si cela vous déplait, lancez-vous dans le spectacle.


        • Jean-Pierre 26 mai 2011 15:22

          Au moins,on voit à qui on a à faire ici !Savant triturage de méninges ,immense mépris,paroles de hyène ! Ah,Caroline Fourest,l’« hystérique »,bien sûr ! Ah,dieudonné,la référence,bien sûr ! Beuark !


          • Bobignyblog 26 mai 2011 22:37

            Pour Omar : Si je n’en parle pas, c’est parce que les humoristes en question évitent soigneusement les blagues sur les juifs depuis le sort qui a été réservé à Dieudonné.
            Dieudonné dont je parle d’ailleurs dans l’article pour en dire du bien, je ne vois donc pas pourquoi vous m’accusez de connivence !

            Et à monsieur Dumas, je ne suis pas du bord que vous sous-entendez... quand je dis qu’Alain Soral est pertinent, ça ne veut pas dire que j’adhère avec l’intégralité de sa pensée.
            Le sujet a été traité de façon forcément subjective mais pas partisane. Si des humoristes de droite insidieux émergent je serais ravi d’en parler aussi, mais force est d’admettre que, comme dans la sphère journalistique, cela n’existe pratiquement pas (pas du tout, même)

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