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Accueil du site > Tribune Libre > L’information : un secret bien gardé ?

L’information : un secret bien gardé ?

Dans notre société française comme dans les entreprises, le secret fait partie intégrante de notre culture et du management. Il y a ceux qui savent et ceux qui sont maintenus dans l'ignorance.

A force de plaidoyer pour la transparence, qui est toujours le masque de quelque chose d’autre de moins avouable, à force de céder aux sirènes de l’open data qui semble exiger toujours plus de révélations, il apparaît nécessaire de conduire une réflexion sur les limites de cette communication informelle, exponentielle et souvent assez cynique. Le secret est un des moteurs de la société qui repose sur un rapport ambigu : chacun conteste le secret des autres et chacun protège ses propres secrets. Michel Foucault l’avait démontré, le fait d'avoir une information que d'autres n'ont pas est source de pouvoir. Pas étonnant que derrière les enjeux de la transparence se cachent ceux de la gouvernance. Et par extension, pas étonnant que derrière les enjeux du « tout information », se cache sans nul doute, des velléités de contrôle sur les consciences. C’est comme si quelqu’un nous disait : « regardez ceci, mais ne regardez pas là »…

Il convient de rappeler grâce à ce petit graphique les phénomènes de déperdition de l’information dans les sociétés et les organisations. A chaque étape, le dirigeant, le journaliste, le responsable politique, estiment que les étages inférieurs (le citoyen, le salarié) n’ont pas besoin de savoir la totalité de l’information, non pas parce qu’ils ne sont pas aptes à la comprendre mais parce qu’ils croient qu’en délivrant la totalité d’une information ils perdront leur statut de dirigeant, de journaliste, de responsable politique…

La « tyrannie de la transparence » imposée aux Etats et aux institutions par un Julian Assange de Wikileaks, accompagne la perte de confiance envers les dirigeants, les médias traditionnels, les élus. Ainsi, le secret participerait-il d'une défense statutaire d'une hiérarchie, d’un pouvoir ? A l'inverse, le nouveau pouvoir né d'Internet et des réseaux sociaux ne tire-t-il pas sa légitimité de sa capacité à partager l'information pour devenir influent et faire triompher collectivement des idées et d’exercer, même provisoirement, un contre-pouvoir ?

Pourtant il paraît légitime que les organisations au sens large doivent conserver leur liberté de révéler ou non à la presse, leurs produits, leur organigramme, leur culture ou leur histoire, c’est-à-dire ce qui fait le cœur de leur patrimoine. Autre aspect : il est curieux dans notre pays que, dès lors que la question de la vie privée ou du salaire est posée, tout le monde se réfugie dans la confidentialité alors que la masse des français se régalent des coucheries de nos politiques ou des frasques médiatiques de DSK. Au nom de la transparence, les français stigmatisent la rémunération des dirigeants, les combines politiciennes, les prévarications en tout genre. En fait, les français ne savent rien. La traditionnelle courroie de transmission que jouaient les médias n’existe plus. Nos concitoyens ne sont plus informés. On leur jette en pâture quelques bribes pour les occuper et penser à autre chose tout en leur disant que la transparence est reine.

Perméabilité à tous les étages

S'il est un domaine où la frontière entre secret privé et transparence publique n'est pas facile à tracer, c'est bien celui des données sur Internet. Les individus veulent à la fois dévoiler des secrets pour créer des liens ou participer à un contre-pouvoir (« open data ») et, en même temps, demandent à être protégés des risques liés à une perméabilité grandissante entre vie publique et vie privée. Pour l'heure, le droit n'a pas clairement fixé les limites et le régulateur doit déterminer « sans idéologie » le cadre de cette relation. Le secret se fait au bénéfice de certains acteurs qui veulent accéder à des données personnelles pour les valoriser à leur profit. C’est un peu le mythe de Faust qui est réinventé toutes les minutes sur les réseaux sociaux. « Donnez moi le pouvoir de m’exprimer, mais je n’accepte pas de tout dévoiler de ma personne ». L’illusion, avec la multiplication des outils d’information et des médias sociaux, serait de croire que tout se sait sur internet. C’est complètement faux. Les pseudonymes se multiplient, les rumeurs s’amplifient, les vraies fausses révélations côtoient les scoops. C’est le fameux buzz. Il suffirait pourtant de juste se poser la question : « pourquoi je retweet une information ? » Est-ce pour exister ? Est-ce parce que je crois que cette information est importante ? Capitale ? Où simplement pour combler le vide démocratique que les politiques ont confisqué aux citoyens ? Sans nulle doute, chacun aura sa propre réponse. Il n’empêche qu’il y a à l’évidence des stratégies d’influence qui sont mises en œuvre comme le démontre bien David Réguer dans son ouvrage « e-réputation, manager la réputation à l’heure du digital  ».

Désormais qui croire ?

Sources  :

http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/les-strategies-de-pouvoir-selon.html

http://www.ya-graphic.com/2011/11/115-e-reputation-manager-la-reputation-a-lheure-du-digital/


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9 réactions à cet article    


  • Flo-rian Flo-rian 30 octobre 2012 11:16

    Une voixoff, je pense que vous mélangez les « secrets » personnels que tout un chacun est libre de divulguer ou pas via réseaux sociaux ou autre et les secrets d’états ou d’entreprises. Ce sont deux choses totalement différentes.
    Le premier est de l’info people, qui interesse les lecteurs de closer.
    En revanche pour les seconds, ce sont des secrets qui devraient interresser la totalité de la population. Est-il par exemple normal de mentir en cachant des informations au monde entier sur l’accident de Fukushima, sur les armes de destructions massives en Irak, sur les nouveaux traités européens...ect ? Alors que sont directement impliquées les populations. Ce genre de secret n’a qu’un but, protéger le profit.


    • ZenZoe ZenZoe 30 octobre 2012 12:27

      Il faut dire que ceux qui nous gouvernent jouent sur du velours.

      On peut déplorer un manque de curiosité objective chez beaucoup de nos concitoyens (pas tous heureusement), trop occupés à se divertir ou à penser à autre chose qu’à aller vérifier ce qu’on leur raconte aux infos du JT. Combien de nos concitoyens s’informent réellement en comparant les sources et les versions d’un même fait par exemple (Le Figaro et Libé ?) ?

      En plus, combien refusent même de voir la vérité, preuves en main, parce que cette vérité dérange leur quiétude mentale ou leur vision partisane des choses ? Les exemples abondent : DSK restera à jamais un romantique incompris victime de plusieurs complots, le bébé est mort sur l’autoroute uniquement à cause du Désert Médical, la Libye est grâce à nous libérée du joug du vilain dictateur mort par accident bien fait pour lui, le cannabis est bien plus néfaste que l’alcool et le tabac réunis et doit être banni, Julian Assange est un dangereux anarchiste et donc il doit être extradé c’est normal etc.etc.

      De quoi se taper la tête contre les murs pour les courageux « lanceurs d’alerte ».


      • L’immigré 30 octobre 2012 13:49

        Et, que nous recommandez-vous pour avoir l’assurance de détenir la bonne information, Grand Maître ?
        Croyez-vous sincèrement qu’une vision française seule suffirait amplement pour analyser les informations recueillies en vue d’une prise de décision sérieuse ?


      • ZenZoe ZenZoe 30 octobre 2012 14:37

        Aller voir sur les sites étrangers si on peut lire dans la langue, toujours une très bonne idée ça.
        Courrier International propose des articles déjà traduits.
        Pour le reste, je n’ai pas trop compris ce que vous vouliez dire.


      • L’immigré 31 octobre 2012 22:11

        « les sites étrangers »
        Very funny, old chap ! Je ne suis pas certain d’avoir vraiment besoin de quelqu’un pour me dire qu’il est utile de visiter des sites étrangers pour être correctement informé. Mais, bon.
        P
        eut-être essayez-vous de me dire quelque chose à laquelle je n’y avais pas pensé.

        Vous n’avez « pas trop compris », dites-vous ? Tiens, donc !
        Ce que je voulais dire est très simple, voyons !
        J’ai un problème qui requiert une solution. Je sollicite des informations afin de parvenir à la solution.
        Les informations sont à caractère méthodologique et technique.
        1- Les objectifs que je cherche à atteindre (prise de marchés, création d’une technologie, etc.)
        2-
        La méthodologie pour ce faire (prise en compte du contexte socio-culturel, étude des impacts, prospective, etc.)
        La vision ne peut être que française, je le crois, elle est inéluctablement internationale. C’est ce qui manque en France. Comment savoir si ces informations me permettraient de parvenir à la solution ?


      • Jason Jason 30 octobre 2012 13:54

        Depuis Francis Bacon (XVIème) il a été dit que le savoir est source de pouvoir. Plus récemment, la notion d’asymétrie de l’information formulée par des économistes américains dans les années 70, montre clairement que cette situation existe virtuellement partout.

        Les « révélations » font toujours l’objet de scoops ou de coups de tonnerre médiatiques. Il s’y rattahe le problême de saturation ou de sens/signification. Le jeu est infini, et les non avertis que sont la vaste majorité des gens, se laissent docilement mener là où l’on veut.


        • ZenZoe ZenZoe 30 octobre 2012 14:42

          Oui.
          La hiérarchie de l’information est importante aussi. Les JT et les journaux imprimés sont forts pour ça. Les infos importantes sont souvent escamotées et ne font jamais les gros titres. Les gros titres, c’est pour l’enfumage.


        • Croa Croa 30 octobre 2012 20:12

          Aujourd’hui ce sont les faits divers et le foot qui font les gros titres.

          Non seulement les français sont ignares mais en plus ils deviennent chauvins (jeunes) ou craintifs voire paranoïaques (vieux) et parfois les deux avec les conneries qui passent aux « infos » télévisées !

          (J’ai mis des guillemets anglais à « infos » parce que ce conditionnement n’est pas de l’info.)


        • non667 30 octobre 2012 20:03

          à auteur
          A chaque étape, le dirigeant, le journaliste, le responsable politique, estiment que les étages inférieurs (le citoyen, le salarié) n’ont pas besoin de savoir la totalité de l’information, non pas parce qu’ils ne sont pas aptes à la comprendre mais parce qu’ils croient qu’en délivrant la totalité d’une information ils perdront leur statut de dirigeant, de journaliste, de responsable politique…

          il ne faut pas chercher ailleurs le but des réformes ( math modernes ,méthode globale etc......) et les causes de l’état déplorable de l’éducation nationale !

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