L’insurrection morale
En 1857, les Cipayes, les soldats indiens employés par l'armée britannique dans leur colonie, se sont révoltés. La raison de cette révolte n'est pas le pillage organisé du pays par les anglais, ni la brutalité de leurs méthode qui n'était pas très éloignées ce celles des autorités locales, mais une raison morale, et uniquement morale.
Comme tous les envahisseurs, les Anglais ont joué sur les divisions internes de l'Inde pour conquérir le pays. On s'allie avec ceux-ci, contre ceux-là, on intègre les effectifs des vaincus, on renforce le pouvoir de ses vassaux sur la population et on finit par contrôler un immense pays sans trop se fatiguer. Il faut pour cela faire des concessions aux coutumes locales. Un brahmane, par exemple, membre de la caste la plus élevée qu'il faut absolument se mettre dans la poche, ça ne prend pas le bateau. C'est con, mais c'est comme ça, le brahmane perd son rang s'il navigue sur l'océan.
Le colonisateur fait avec, au départ quand il en a vraiment besoin, mais au bout d'un moment, il voudrait bien employer cette nombreuse armée ailleurs. Quand on est anglais, le bateau est une deuxième maison, et en tant qu'envahisseur on pense avoir prouvé que cette culture est supérieure à celle des terriens. Mais il ne suffit pas de convaincre le brahmane, imaginez, qu'il emmène ses troupes qui lui doivent obéissance sur un navire. La traversée se fait, et à la descente les soldats font ce qu'ils veulent en crachant au visage du chef qui a perdu tout pouvoir par la magie des eaux. Autant un politicien avisé en tiendrait compte, autant un marchand insatiable de la compagnie orientale des Indes n'en a rien à secouer. Et comme c'est lui qui fait rentrer le pognon en Angleterre, l'armée anglaise lui obéit.
Mais pour l'armée anglaise, l'Inde n'est qu'une partie de l'empire, elle ne s'organise pas autour d'elle uniquement. Le progrès dans la science de l'armement, par exemple, incite à enduire les cartouches de fusil de graisse. De la graisse de porc ou de bœuf. Vous voyez un peu le problème dans un pays ou le soldat local est soit hindou, avec un tabou sur le bœuf, ou musulman, avec une stricte interdiction de toucher au porc. Les militaires anglais ne sont bien sûr pas débiles au point d'avoir l'intention de leur imposer ce nouvel usage, mais les brahmane et les autorités musulmanes l'apprennent.
Ils y voient une aubaine. Ils ont à présent compris que les anglais ne comptaient pas partager équitablement les fruits de la conquête avec eux, mais ils ne pouvaient pas s'en plaindre auprès des troupes qu'ils menaient à la baguette, et qui se délectaient de voir le pouvoir de ceux qui les oppressaient depuis si longtemps être ridiculisée. Avec cette histoire de graisse, ils ont pu dire, regardez ce qu'ils veulent vous obliger à faire, ils ne vous respectent pas ces Anglais, nous sommes là pour protéger votre culture, révoltons nous contre l'oppresseur ! C'est l'histoire de la révolte de 1857.
Un actionnariat trop avide, des politiciens qui voient leur autorité contestée et des soldats qui crèvent la dalle qui assistent au spectacle avec dégoût. Si vous trouvez que ça ressemble étrangement à la situation actuelle, vous m'avez bien compris. Et ce qu'il faut en retenir, c'est que ce n'est pas pour s'enrichir, ni même être traité plus dignement que les Cipayes se sont révoltés, mais pour des raisons morales uniquement. Seule une insurrection morale changera le rapport de force.
Policiers, si j'ai publié ce clip contre les violences policières, ce n'est pas pour vous accuser, mais pour faire appel à votre sens de la morale. Les flics avec nous ! Les flics avec nous !
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