L’Organisation Daech a-t-elle été vaincue en Syrie ?
Le seul point d’accord possible dans toute discussion sur les critères de victoire et de défaite dans les guerres non conventionnelles est que ces normes sont "élastiques" et il semble très difficile de trancher à ce propos. Tout le monde a vu comment le parti terroriste libanais Hezbollah a fait la promotion médiatique de sa victoire militaire face à l’armée israélienne dans la guerre de l’année 2006 malgré les malheurs qu’a engendrés cette guerre, dont le Liban souffre encore des conséquences ! Cela vaut également pour le mouvement Hamas, qui lève le slogan de la victoire malgré les destructions massives dans la bande de Gaza chaque fois qu’il se produit un affrontement avec l’armée israélienne, ce qui confirme le niveau "relatif" de victoire et de défaite dans de telles guerres non conventionnelles.
Face aux organisations terroristes en général, il existe plusieurs objectifs principaux, notamment la défaite de l'organisation sur le plan militaire. Cet objectif a déjà été atteint en Irak et en Syrie, où l'organisation Daech a reçu des frappes militaires successives mettant fin au contrôle de toutes les zones que l’organisation contrôlait dans les deux pays, et il est donc compréhensible que le président Trump annonce la réalisation de cet objectif.
Le problème, c’est que la défaite de ces organisations terroristes ne signifie peut-être pas la fin de celles-ci, comme le confirment les expériences en Afghanistan, en Somalie et dans d’autres zones de conflit qui ont connu une escalade du terrorisme au cours de périodes antérieures.
Le terrorisme ressemble à une "maladie cancéreuse" dans le corps humain : il faut beaucoup de temps au patient pour faire le suivi car la maladie peut facilement revenir, et les cellules cancéreuses peuvent très bien se régénérer.
Le facteur le plus dangereux dans le terrorisme est l’idée, et non l’élément terroriste lui-même. L’idée se répand de diverses manières. Les dirigeants terroristes ont compris l’importance de la diffusion de l’idée et de la mise en place de structures institutionnelles virtuelles de l’idéologie terroriste par le biais d’Internet, qui est devenu une plateforme pour le recrutement virtuel et l’entraînement à la fabrication des explosifs et la communication entre réseaux et éléments terroristes dans toutes les langues.
Les expériences indiquent également que le phénomène du terrorisme passe par des vagues de flux et de reflux. En fait, Daech représente la troisième génération d'organisations terroristes. La première génération d'organisations date des années 1980 et 1990, petites organisations originaires de divers pays arabes et rapidement éliminées par les forces de sécurité, mais leurs racines sont restées et ses théoriciens ont transporté l’idée vers d’autres terres. La deuxième génération est née en Afghanistan par son chef, le chef spirituel d'al-Qaïda, Oussama ben Laden, et s'est basée sur la lutte contre le lointain ennemi pour fonder son activité terroriste. Il a lancé les attaques du 11 septembre et d'autres opérations terroristes. Après la mort de Ben Laden, Daech a vu le jour par Abou Moussab al-Zarqaoui, succédé par Abou Bakr al-Baghdadi, posant ainsi un nouveau fondement basé sur la philosophie de "gestion de la sauvagerie" et de lutter contre ce que l'on décrit comme l’ennemi proche !
L'élimination du terrorisme et de l'extrémisme exige non seulement une réponse sécuritaire et militaire, mais également une stratégie longue et réaliste, fondée sur des bases économiques, politiques, intellectuelles, et éducatives ainsi que sur les médias. Elle requiert également d'énormes efforts législatifs et juridiques pour lutter contre l'extrémisme et la haine de l'autre. Cela exige également une consécration de la tolérance, de la coexistence, de la modération et de l'acceptation de l'autre, et ce sont là des efforts qui ne sont pas sérieusement pris en compte par de nombreuses sociétés arabes et islamiques, ainsi que dans les sociétés occidentales, pour être juste. Il y a une ignorance vis-à-vis de l’abus envers la religion islamique, sous prétexte de liberté d'expression, il y a une forte prévalence du racisme et de l'exclusion sur la base de la religion dans de nombreux pays occidentaux, il y a un échec des politiques d'intégration et de coexistence, ce qui explique l'implication de certains des enfants de la deuxième génération d'immigrants musulmans en Occident dans les rangs de Daech en Syrie et en Iraq.
À la lumière de ce qui précède, on peut dire que la défaite de l’organisation Daech en Syrie a été réalisée, mais cela n'exclut pas la possibilité du retour de l'organisation même graduellement pour exercer son activité, même de manière moindre. La Grande-Bretagne estime que la défaite de Daech n'est pas achevée et qu'il existe une possibilité pour les cellules dormantes de refaire surface, et le même point est partagé par la France qui a dit à travers sa ministre de Défense Florence Parly "Mais Daesh n'est pas rayé de la carte, ni ses racines d'ailleurs, il faut vaincre militairement de manière définitive les dernières poches de cette organisation terroriste" Mais l'objectivité requiert de dire également que Daech a effectivement été vaincu militairement en Syrie, mais l’organisation n’est pas entièrement détruite, et ses structures sont toujours là, et le sort de son leader abou Baker al-Baghdadi est inconnu. Le président Trump sait que l'électeur américain ne se préoccupe pas beaucoup de l'existence de cellules dormantes en Syrie, mais est principalement préoccupé par la capacité de l'organisation de menacer les intérêts des États-Unis et de cibler les Américains n'importe où dans le monde. C'est pourquoi le président Trump était très prudent en niant cette possibilité pour satisfaire les électeurs américains.
La question requiert de revoir ce qui s’est passé en Syrie et en Iraq. L’organisation Daech est la principale menace qui pèse sur les pays de la région et des efforts doivent être déployés pour l’éradiquer complètement, et tout porte à croire que son éradication ne pourra être réalisée que par une série de mesures de coopération sérieuses pour détruire l’environnement social incubateur de l’idéologie terroriste autant en Syrie ou en Irakou en tout autre pays arabe ou musulman. Le terrorisme est une idée qu’il faut combattre et éradiquer, et ne consiste pas seulement en des éléments qu’il faut éliminer. La vérité nécessite de dire que ni les Etats-Unis ni aucun pays occidental n’ont de rôle à jouer dans la guerre au front des idées, c'est la bataille des Arabes et des musulmans, et ils doivent absolument la combattre sans hésitation aucune.
48 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON