L’Ukraine s’invite au conseil des ministres franco-allemand
Ils ne voulaient pas en parler. François Hollande et Angela Merckel vont devoir aborder, au cours du conseil des ministres franco-allemand d'aujourd'hui, la situation en Ukraine. Que vont-ils décider ?
Aujourd’hui, un conseil des ministres franco allemand se tient à l’Elysée, le 16ème du genre depuis cinquante ans. L’ordre du jour, arrêté de longue date, risque d’être bouleversé. La situation à Kiev est préoccupante. Certes, il sera question de défense, d’énergie et de fiscalité mais l’Ukraine sera au cœur des discussions.
Cette nuit, à l’Elysée et au Quai d’Orsay, les conseillers ont suivi heure par heure les événements. Ils ont rédigé des notes pour proposer à l’Allemagne une position commune des deux pays face à la crise et les bases d’une réaction européenne.
Mais que se passe-t-il à Kiev ?
Depuis trois mois, les jeunes, les classes moyennes et les citadins, soient près de 100 000 manifestants occupent la place de l’indépendance, la place principale de la capitale. Ils avaient réagi lorsque la pays avait, sous la pression russe, à renoncer à un accord d’association avec l’Union Européenne en novembre. Cet accord représentait un premier pas vers une probable candidature à l’adhésion d’ici dix à quinze ans. Leurs revendications se sont radicalisées, les manifestants réclament maintenant le départ du président Ianoukovitch et une réforme constitutionnelle. Mais ces événements ont divisé le pays en deux. En effet, les habitants des campagnes, les ouvriers des usines obsolètes veulent rester ancrés à la Russie, seul débouché traditionnel. Qu’on ne s’y trompe pas, une future adhésion à l’Union européenne moderniserait le pays, mais générerait du chômage, du ressentiment et, de fait, ferait le lit de nationalistes.
Alors que faire ?
C’est la question que vont se poser Angela Merckel et François Hollande. Depuis quatre mois, aucun ne s’est publiquement exprimé sur le sujet. La France n’en possède plus les moyens, ni la crédibilité internationale. On se rappelle qu’en 2008, Nicolas Sarkozy avait obtenu un cessez le feu en Géorgie. Quant à l’Allemagne, elle brûle le gaz sibérien dans ses usines et vend ses produits à Moscou.
Avec les images des affrontements, cette nuit, les morts et surtout, la mobilisation des médias, les politiques ne peuvent plus rester muets. L’Elysée tremble à l’idée que Bernard Henri Lévy ne monopolise les plateaux télés.
Se contenter d’adresser des messages de soutien aux pro européens serait provoquer une crise profonde en Ukraine et faire courir le risque de déchirements internes, ou pire.
Promettre de verser des aides à la modernisation et des compensations à l’Ukraine pour la perte du marché russe n’est pas possible. La crise économique et financière a vidé les caisses. L’Union européenne ne peut pas, non plus, se mettre la Russie. Cette dernière pèse lourd dans en matière de fourniture de gaz.
Une crise grave et durable en Ukraine déstabiliserait le pays, la région, voire le continent tout entier. L’Europe doit réagir. Angela Merckel et François Hollande le savent. La marge est étroite car l'UE ne peut soutenir les manifestants sans leur donner espoir, puis assurance, d’accueillir leur pays.
L’Union européenne n’a que deux choix. Aider financièrement l’Ukraine, au détriment de l’Espagne, du Portugal, de la Grèce, voire de l’Italie, c’est courir le risque de faire replonger la zone euro. Assumer le coût en terme d’image en ne faisant rien, c’est voir discréditer son modèle.
Dans les deux cas, décider à quelques mois des élections européennes, le bilan sera lourd.
27 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON