La chimie, pour quoi faire ?
Je réagis ici aux propos de Jean-Luc Martin-Lagardette dans son article sur "les dérives d’une médecine policière". En effet, lui-même et de nombreux intervenants montrent une méfiance vis-à-vis de la "chimie" et montrent bien en cela que la matière demeure une inconnue et une "menace" pour un très grand nombre.
La raison qui me pousse à intervenir réside dans la confusion qui existe entre la connaissance d’un domaine et les applications qui peuvent en découler.
Ainsi, les chimistes ont non seulement appris à synthétiser de très nombreuses molécules naturelles et artificielles, mais ils ont également appris à comprendre les mécanismes des réactions chimiques artificielles et naturelles. Ils ont à leur disposition des outils qui leur permettent de prévoir et d’intervenir pour faire évoluer une situation délicate.
Ceci, parce qu’ils ont appris que, dans des conditions opératoires précises, telle réaction aura ou non lieu. Ces outils peuvent être la détermination - approximative cependant - des sites réactionnels par des méthodes faisant appel à des calculs "quantiques". Ils peuvent aussi consister en divers tests - bien ciblés -, en détermination des vitesses de réaction, du pouvoir "rotatoire" d’une molécule, etc... et j’en passe.
Ainsi, quand certains parlent d’une différence entre substances naturelles - c’est-à-dire extraites du règne végétal ou animal - ou artificielles possédant pourtant la même structure, soit ils sont dans l’erreur si la substance naturelle est très pure et donc en tous points identique à la substance artificielle, soit ils ne parlent pas de la même chose. En effet, les extraits naturels sont très souvent des mélanges - même si une substance est fortement majoritaire - ce qui la différencie fondamentalement de cette substance majoritaire synthétisée et donc purifiée selon les canons de la chimie expérimentale.
Le point essentiel qui devrait être débattu réside dans la compréhension des mécanismes d’action des substances naturelles et artificielles qui interfèrent avec les systèmes vivants. Je ne suis pas seul à regretter que l’étude approfondie de ces mécanismes soit laissée de côté par les entrreprises qui fournissent des matériaux réagissant chimiquement avec le vivant - dont les médicaments bien sûr.
Je ferai part ici d’un exemple vécu et qui concerne un troupeau de vaches laitières, stabulant dans une étable de type "caillebotis - logettes ", et qui subissait le syndrome du "dépérissement de la vache Prime Holstein", décrit par exemple par une biologiste de Maison-Alfort, Mme Brugère-Picoux.
Après avoir longuement discuté, l’éleveur et moi-même nous sommes posé la question de l’impact des produits de traitement - désinfection - des installations de traite, qui sont systématiquement reversés au lisier sur lequel vivent les animaux.
Et c’est là qu’interviennent les connaissances du chimiste : L’eau de javel utilisée le matin réagit avec les matières organiques pour donner des agents alkylants très puissants (choroalcanes). L’acide nitrique utilisé le soir peut, grâce aux microorganismes être transformé en nitrites, etc...
Au bout du compte, il était logique de penser qu’il pouvait se former un gaz très toxique - je n’entre pas dans les détails, cela en rebuterait plus d’un - , capable de faire apparaître les symptômes de cette maladie chez les animaux, ...et chez les humains - car le propriétaire-éleveur se plaignait lui-même de troubles étranges.
La logique voulait qu’on mette en oeuvre cette hypothèse en détournant temporairement ces effluents. Il faut savoir que cette pratique - le lagunage - est interdite par la commission européenne. Mais il fallait en avoir le coeur net, et nous le fîmes malgré tout.
Et le résultat a été spectaculaire : la mortalité du cheptel a fortement diminué, les troubles psychiques se sont résorbés, les mammites ont disparu et le lait a acquis une qualité jamais atteinte auparavant par l’éleveur.
Cependant, la loi était contre nous, et nous avons cherché un agent nettoyant qui ne présentait pas de tels risques et pouvait donc être versé dans ce lisier.
Là encore, la connaissance des sous-produits apparaissant en présence de chlore (agents alkylants) ou d’azote oxydé (agents nitrosants, ou nitrants...) nous a fait préférer les désinfectants ne contenant que de l’oxygène - ici l’acide peracétique.
Nous avions donc gagné la bataille, et pensions qu’il fallait partager cette bonne nouvelle avec d’autres éleveurs grâce à l’intervention de l’état et des scientifiques qui s’occupent de cette maladie.
Eh bien, ce fut une fin de non recevoir. Comme si cette avancée mettait en jeu des intérêts que nous ne soupçonnions pas. La biologiste sus-nommée elle-même n’a rien voulu entendre.
J’en viens à ma conclusion. Il me semble que la chimie fait peur, non seulement aux personnes de la rue, mais également à de nombreux scientifiques qui ne la pratiquent pas. L’intrusion des règles de la chimie dans le fonctionnement du vivant demeure encore lettre morte.
Je prends un autre exemple. Les antiinflammatoires non stéroïdiens de type paracétamol ou ibuprofène se fixent sur une enzyme - la cyclooxygénase -, empêchant qu’elle ne transforme divers composés insaturés en prostaglandines. Or, pourquoi n’y a-t-il pas de recherche pour analyser comment, en dehors du concept clé-serrure, ces AINS vont interragir avec une enzyme permettant l’oxydation. Il est tout de même frappant de constater que ces AINS sont des composés riches en électrons, donc réducteurs, et que la différence de réactivité de l’un par rapport à l’autre peut fort bien provenir de leur pouvoir réducteur.
Il me semble donc aussi qu’on ne peut parler de médecine scientifique parce que tel ou tel médicament a passé des tests statistiques. Ce n’est pas cela qui lui confère sa scientificité. Ce devrait être d’abord la compréhension de tous les mécanismes. Sinon, à quoi bon faire la différence entre médecine officielle et médecines parallèles ?
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