Cet été, j’ai eu l’étrange impression que la grippe A s’était arrêtée à nos frontières, comme l’avait fait un célèbre nuage radioactif en 1986. Peu d’information dans la presse, pas de mobilisation visible des pouvoirs publics. Pas étonnant que 64 % des Français ne se sentent pas inquiets, comme le rapporte Le Figaro. On a tout fait pour !
Alors que l’OMS a placé dès le 11 juin 2009 la planète en alerte pandémique de niveau 6, la France, si l’on en croit le site officiel français
Info Pandémie grippale, est encore aujourd’hui en alerte 5A ("Transmission interhumaine d’un virus grippal dans au moins deux pays non limitrophes d’un même continent"). Non limitrophes ! Admettons, avec les mauvaises langues, que le Royaume-Uni ne fasse pas partie de l’Europe. Mais difficile de trouver plus frontalier que l’Espagne ! Or, les autorités sanitaires espagnoles ont commencé dès le début du mois d’août 2009 à lancer des messages préventifs en direction de la population, comme
celui-ci : "No beses, no de la mano, di hola" ("N’embrasse pas, ne serre pas la main, dis bonjour"). Selon le quotidien
El Pais, 15 000 personnes sont contaminées chaque semaine par le virus, qui a déjà fait 17 morts dans la péninsule ibérique. Sans céder à la panique, les Espagnols ont pris le temps d’apprendre les gestes qui réduisent les risques de contamination. Car le plus grand danger ne réside pas, semble-t-il, dans le virus, plutôt bénin en lui-même, mais dans le manque d’information et le sentiment d’inquiétude que cela peut engendrer dans la population. Après avoir dansé tout l’été, les Français de retour des plages croulent désormais sous une avalanche de nouvelles consignes : n’appelez plus le 15 mais votre médecin de famille, portez un masque si vous êtes grippé, n’éternuez plus dans vos mains mais dans le pli du coude... Les écoles n’ont pas encore réouvert que professionnels et parents sont bombardées de
circulaires ministérielles qui demanderont plus d’un conseil des maîtres pour être parfaitement assimilées... Il faut du temps pour modifier les gestes, les habitudes et les mentalités. Fallait-il attendre la rentrée scolaire s’en préoccuper ?
La cigale, ayant chanté tout l’été, se trouva fort dépourvue lorsque la bise fut venue.
Jean de La Fontaine (1621-1695).