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Accueil du site > Tribune Libre > La création, cette putain

La création, cette putain

La peinture, la mode, la sculpture, le dessin, l’écriture, le cinéma, tous ces métiers, toutes ces disciplines sont basés sur la création.

Peut-être étais-je encore trop jeune quand j’associais avec aisance et crédulité la créativité à une déesse grecque vénérable.

J’entends encore ces artistes abordant fièrement et sans équivoque les aspects viscéral, profond, obscure et brumeux inspirant leurs œuvres. Je vois encore ces mortels à l’écoute attentive, s’enivrant béatement du délicieux nectar stimulant leurs papilles mal éduquées. L’artiste est ce Dieu qu’ils idolâtrent, ils le trouvent talentueux. Il leurs rappellent Balzac et la Bohème. Balivernes, il est froid, solitaire et vit de rentes.

Moi, la création qu’elle soit abstraite, mélodieusement composée, filmée, modelée, écrite ou méthodiquement rédigée me répugne.

Je chie sur l’artiste, ses œuvres, sa création, sa vision éphémère du monde et sur tout ce qui le représente.

Je pense à celle et à celui, cette compagne ou compagnon qui partage sans relâche le quotidien d’un comédien, d’un homme de lettre, d’un musicien ou d’un styliste épris d’un amour ridicule. Je pense à moi.

La création comme la procréation sont des actes égoïstes. Il y a dans le désordre le regard, la réflexion, une longue réflexion permettant la mise en place d’une stratégie d’approche efficace, la séduction du support, la montée du désir et le désir d’assouvissement. Rien d’autre n’a d’importance pour l’artiste mis à part la volonté de « cracher son jus ». D’étaler sur cette toile vierge le fruit d’un désir longtemps contenu, de pénétrer à coup de jets d’encre les entrailles de cette page blanche, de s’emparer et déchirer ce noble tissu qui imposera ses dictats aux femmes du monde.

C’est ça, l’artiste est un dictateur, un violeur, il est homme qui par des manières de gentilhomme, par d’aimables propos et caresses appropriées tente de susciter un désir génésique chez la femme longtemps négligée. L’acte d’amour, cet acte sublime n’est plus que répugnance à ses yeux mais elle s’y soumet passivement. Elle est sa proie, son support.

Il manque cruellement de réalisme. Il bichonne, façonne sa composition bien plus qu’il n’apporte d’attention à celle ou celui qui partage sa vie. A-t-il néanmoins conscience qu’il prépare le triomphe de l’amant délicat ?

En 1976, paraissait en Allemagne un ouvrage intitulé « L’art d’être égoïste » rédigé par Josef Kirschner, journaliste de profession. Dans cet ouvrage, il encourageait chacun à suivre sa voie sans se soucier des autres, sans se soumettre aux contraintes sociales, en s’affirmant et en s’occupant avant tout de soi même sans tenir compte des autres. Très bonne lecture pour les artistes en devenir.

La création est une violente distraction émerveillant à travers le monde le visiteur, le spectateur, l’auditeur, le lecteur s’indifférant tel un artiste de la souffrance engendrée par l’œuvre qu’il admire.

Rien n’a d’importance aux yeux du compositeur quant il entreprend sa démarche créative ou devrais-je dire destructrice.

Rien n’a d’importance. Plus rien n’a d’importance.

Il ne vous touche plus, vous êtes invisible, inexistant…de trop. Vous n’êtes pas son centre d’intérêt, ni l’un d’eux, vous ne l’avez jamais été et vous le serez jamais. Vous êtes une plante desséchée, fanée, vous faîtes de l’humanitaire (entendez occuper vos journées comme bon vous semble mais loin de son espace vital).

Vous êtes un peu Première Dame d’un état en déconfiture.


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17 réactions à cet article    


  • Antoine Diederick 7 août 2012 10:53

    Etre artiste, est-ce un état social ou un état d’esprit ?


    • Christopher Montlouis-Gabriel Christopher Montlouis-Gabriel 7 août 2012 13:36

      Etre artiste, est-ce un état social et un état d’esprit ?


    • L'enfoiré L’enfoiré 7 août 2012 14:29

      En fait, ce sont les deux.


    • luluberlu luluberlu 7 août 2012 11:45

      L’acte de création, dépasse l’actualité médiatique, je clave Vraie création, là où du neuf nous arrive dans le cerveau, du jamais perçu, aussi dois je prétendre que je ne vois pas beaucoup de chose vraiment nouvelle. Beaucoup de bon comédiens, tristement que i de la vie, ce qui trouve ne fait pas toutun plat de ses nouveaux espaces., il passe par dessus les normes et formes, il n’est en tous cas pas « artiste », il crée.


      • Matthhou 7 août 2012 12:13

        "Rien n’a d’importance aux yeux du compositeur quant il entreprend sa démarche créative [...] Il ne vous touche plus, vous êtes invisible, inexistant…de trop. Vous n’êtes pas son centre d’intérêt, ni l’un d’eux, vous ne l’avez jamais été et vous le serez jamais.« 

        @ l’auteur : Pauvre compagnon d’artiste... L’artiste en train de créer ne s’occupe pas de vous et ça vous dérange ? Il vit sa vie au lieu de choyer la vôtre ? Quel dommaââââge...

        Si l’art ne vous intéresse pas, ne vous mettez pas avec un artiste !
        Si vous voulez un compagnon qui vit »pour vous« et non pas »avec vous", vous risquez d’avoir du mal à trouver quelqu’un, même si ce n’est pas un créatif.
        Un miroir vous serait sans doute plus fidèle...


        • Christopher Montlouis-Gabriel Christopher Montlouis-Gabriel 7 août 2012 13:15

          Bonjour Matthhou

          Je me permets de vous répondre car seul votre commentaire et à peu près objectif et constructif.

          Ce texte est le reflet d’une pensée d’un moment. L’art ne me répugne en aucun cas bien au contraire. Il me permets de m’évader, de réflechir, de m’interroger et de construire la personne que je suis.

          Je ne me considère pas comme un pauvre compagnon d’artiste. Je ne considère pas ces lignes comme un article mais comme un témoignage, une confession de ressentis que je souhaite partager.

          Jamais de mon jeune âge (22 ans), je n’avais connu une telle expérience, je parle de « partager » la vie d’un artiste et je dois vous dire que j’en sors grandi. Je ne regrette aucunement mon expérience et je pense que ça fait parti du « jeu ».

          Je ne veux pas d’un compagnon qui vit pour moi, bien au contraire. A travers ce texte, je fais part de mes interrogations d’un ton accusateur car je sais que ça fera réagir et c’est le cas.

          Je lis et relis vos lignes avec intérêt, me pose et y réflechis attentivement.

          Peut-être suis-je égoïste mais qui ne l’ai pas. Je sais je me contredit et ai bien conscience que ce texte pourrait s’appliquer à ma personne (moi, moi, toujours moi :) ).

          Un miroir, ne me serait d’aucune utilité, c’est par le contact des autres, de la contradiction, à travers la littérature, le cinéma, l’art dans sa globalité que je me construit, que j’apprends, que je me parfait une culture et me fais des avis sur les choses. Des avis évolutifs.

          Je vous remercie, de votre commentaire et poursuit le travail sur moi-même que j’ai entrepris depuis bien des années. J’espère que vous continuerez de réagir à mes futurs post.

          Cordialement,

          Christopher 


        • Matthhou 7 août 2012 14:36

          « je fais part de mes interrogations d’un ton accusateur car je sais que ça fera réagir et c’est le cas. »

          Christopher, vous êtes un paradoxe vivant !
          Vous dites que cherchez à nous faire part de votre témoignage, en utilisant un vocabulaire cru voire violent, pour faire réagir vos lecteurs.
          N’est-ce donc pas également une forme d’art ???
          Le « témoignage » en tant que forme stylistique, est une sorte d’oeuvre en soi : regardez toutes les biographies qu’on trouve dans les librairies.

          Vous dénigrez un acte (la création), ainsi que son créateur (l’artiste), mais ce faisant vous êtes vous-même en train de créer et devenez donc à la foi « victime » et « bourreau ». Accusateur et accusé. Critique et artiste.
          Je ne m’y connais pas assez en psychologie pour aller plus loin. Je ne citerai pas Freud ou Lacan, de peur de faire une bourde.

          Effectivement, tout le monde est égoïste. On cherche son propre bonheur dans le regard des autres. Certains veulent devenir célèbres (de l’écrivain à la « nouvelle star »), d’autres cherchent simplement un contact, un regard, une attention.
          Se sentir vivant.

          Mon conseil vaut ce qu’il vaut, et je ne le donnerais pas si je ne l’appliquais pas moi-même :
          N’essayez pas de vivre pour, par, ou à travers les autres. Chacun a sa vie et n’aura pas le temps de s’occuper de la vôtre.
          Essayez au contraire de vous servir des autres - de leurs exemples et contre-exemples - pour trouver qui vous voulez être. Soyez heureux vous-même avant d’essayer d’être heureux avec les autres.

          Je vous souhaite bon courage dans votre parcours.


        • Antoine Diederick 7 août 2012 12:48

          a l’auteur,

          ...et quelque chose qui pourrait nous émouvoir profondement....


          • Antoine Diederick 7 août 2012 12:51

            en fait je n’ai absolument rien compris de ce texte.


          • L'enfoiré L’enfoiré 7 août 2012 14:27

            Christopher,

             Je crois que vous avez une vue parcellaire de ce qu’est la création.
             Il ne faut pas être artiste pour créer.
             La création demande du feeling, de l’originalité, de l’ingéniosité, une volonté de sortir quelque chose de rien, de développer ce que votre voisin n’aurait jamais imaginer, faire oeuvre d’inventeur....
             Cela peut prendre tellement de formes.

            • Taverne Taverne 7 août 2012 14:36

              Exact, Guy, c’est très réducteur. D’ailleurs, je dis que tout le monde devrait créer. A titre personnel, quand je fais un poème, une musique ou une chanson, je ne me sens pas en état de création mais en situation de récréation. Je me divertis, je prends du plaisir. Tout le monde peut créer. Un cuisinier crée, un jardinier crée, un professeur, un rédacteur, une aide-soignante crée du lien...


            • L'enfoiré L’enfoiré 7 août 2012 15:18

              Exact, Paul.

              Laisser une trace de soi, de son passage.
              Oser tracer.
              Attention, il y a des gens qui crée la guerre aussi.
              Mais ne nous trompons pas de registre smiley

            • L'enfoiré L’enfoiré 7 août 2012 15:21

              Mais comme Christopher dit dans son A propos " Un jeune en quête d’inspiration", je crois que par ici, il va en avoir. smiley

              C’est tout le mal que l’on pourrait lui souhaiter, puisqu’il est nouveau dans l’arène

            • Antoine Diederick 7 août 2012 19:34

              a Enfoiré,

              J’ai bien aimé son article sur Richter que j’ai lu il y a quelque temps...


            • Lisa SION 2 Lisa SION 2 7 août 2012 18:02

              quelle souffrance !

              «  Il ne vous touche plus, vous êtes invisible, inexistant…de trop. Vous n’êtes pas son centre d’intérêt, » mais dès qu’il expose, avant même d’autoriser le badaud à commenter son oeuvre, il se dépèche d’expliquer comme s’il se justifiait de son geste, interdisant souvent l’autre à être son propre miroir. Christoffert, moi mais tu as un problème existentiel à vivre ta propre vie qui est devant toi il te faut te détacher à petit feu du manque de père ou de mère et t’adonner à un passe temps concret comme le bricolage ou physique comme la natation. Bon été à toi et profite ! L.S.


              • Taverne Taverne 7 août 2012 19:43

                Un « passe temps concret comme le bricolage ou physique comme la natation ». Absolument : « si rien ne t’inspire, transpire ! » (proverbe de taverne)


              • alinea Alinea 7 août 2012 18:08

                Il est exact que le créateur, quand il crée, plus rien n’existe autour de lui ; c’est pourquoi celui qui se prend au sérieux dans ce rôle, même s’il n’est pas génial, prend soin de trouver à ses côtés l’être dévoué à ses talents. Quel grand homme a pu tracer sa route sans femme à ses côtés ?
                Sinon, l’artiste vit seul, s’il est un homme libre et qu’il ne veut pas se faire servir. De toute façons il n’y a de création qu’issue de la solitude !
                Alors oui : fréquenter un créateur, mais d’égal à égal, s’il en est capable ! ne pas céder au charme factice de celui qui se prend pour un artiste ; aujourd’hui, les artistes n’existent plus, ils ne sont que des « ego » pleins du désir de reconnaissance ! Il n’est qu’à voir où en est l’art !

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