La déconstruction de la liberté
La déconstruction de la liberté.
De grandes libertés ont été proclamées dans des déclarations de droits. Certaines acquises au prix du sang versé.
Parmi lesquelles les libertés, liées entre elles, de penser, de parler, d’écrire.
L’exercice de ces libertés a évidemment gêné ceux dont l’intérêt était que l’on ne parle pas, ou que l’on pense différemment qu’eux.
L’analyse de faits contemporains, montre que deux techniques principales sont utilisées, qui s’appuient sur des techniques entre autres juridiques. L’une conduisant à l’auto censure, l’autre conduisant à la censure, c’est à dire à la suppression de la liberté.
A.
Celle qui débouche sur l’auto censure, est la procédure bâillon.
Quelqu’un révèle quelque chose qui dérange ; on porte plainte quitte à utiliser des incriminations qui sont inadaptées aux faits ; on sait qu’on va perdre devant les tribunaux. Mais le fait pour l’adversaire, qu’il lui faille se défendre, payer un avocat, vivre dans l’incertitude du sens du jugement … a souvent les effets escomptés : l’auto censure.
Nous prenons ici ( leur description est renvoyée dans la note 1) des exemples de « déconstruction de la liberté » dans le milieu universitaire. Parce que traditionnellement, les professeurs y jouissaient - en droit et en fait – et sous les réserves d’usage, d’une liberté totale de parole, de recherche, et de publication. Liberté découlant de l’indépendance des universitaires, d’ailleurs érigée en principe constitutionnel par le Conseil constitutionnel en 1984 ( CC décision n° 83-165 DC du 20 janvier 1984 https://www.legifrance.gouv.fr/cons/id/CONSTEXT000017667639 ) Exemples qui montrent comment la déconstruction s’est opérée. Avec comme résultat que des professeurs d’université n’osent même plus, selon les déclarations mêmes de certains, dire certaines choses … au deuxième degré.
Ce qui fait que, pour reprendre l’astucieux morceau de plaidoirie anticipée d’Edourad Philippe, on ne peut plus parler qu’en … « gérant son risque pénal » si l’on use de sa liberté.
B.
L’autre technique est plus radicale. Elle consiste à établir des incriminations pénales, qui répondent aux demandes formulées par ceux qui ont intérêt à la déconstruction des libertés en question.
Incriminations nouvelles qui sont souvent inutiles quand il s’agit de réprimer les comportements qui, par la parole ou l’action, portent atteinte à divers principes qui garantissent le respect de la personne, dont l’intégrité physique. En la matière, des délits et des crimes existent depuis longtemps, qui n’ont aucune connotation communautariste, et qui permettent la répression des malfaisants.
Les incriminations ciblées sont en revanche utiles pour imposer ce qu’il conviendrait désormais de penser et de ne pas dire.
A ces fins on utilise banalement la technique classique du marketing.
Un peu à la manière dont on conduit les gens à avoir besoin d’acheter un produit, on les conduit à accepter de penser (2) ce qu’on leur donne à penser, et à rejeter ce qu’on leur interdit de dire .
Le concept d’ « antisémitisme » fut renforcé par son mélange avec le concept de « racisme », et est en train de devenir politiquement opérationnel par l’ajout de l’ « antisionisme ». Ce qui permettra, quand la jonction aura été consacrée par le législateur, comme y préparent certaines autorités, le président de la République en tête (3), de mettre sous les barreaux toute personne qui continuerait à critiquer la politique d’expansion territoriale du gouvernement israélien.
Les Salafistes et autres Frères musulmans utilisent à l’évidence la même tactique. Puisque qu’ils travaillent, avec succès ( d’ores et déjà les femmes portent le voile dans les espace publics, n’ont affaire avec les hommes ni dans les piscines, ni à l’hôpital, les enseignants la « bouclent » sur ce qui est leur dogme…), à ce que la loi religieuse, au moins telle qu’il la voient, s’impose sur le territoire de la République.
La critique devient « islamophobie ». « Islamophobie » que l’on commence à traiter ( voir la note 1) comme l’antisémitisme / racisme.
On trouve un peu le même phénomène, dans l’usage des concepts « d’homophobie » , plus récemment de « complotisme » … Dans lesquels on peut mettre ce qui arrange. Et qui, au bout d’un certain temps, commence à se concrétiser par l’annonce de nouvelles dispositions législatives ou réglementaires.
La méthode.
On martèle la même chose. On répète inlassablement les mêmes anathèmes et les mêmes accusations. Et les concepts entrent alors peu à peu dans les esprits. C’est d’ailleurs le travail ordinaire des lobbyistes. Qu’on ne saurait blâmer de bien le faire. Spécialement lorsqu’ils utilisent les faiblesses des êtres humains : ne pas faire de vagues, mauvaise conscience, lâcheté, méconnaissance de l’histoire, je-m’en-foutisme pour les autres, peur pour la carrière ( et maintenant peur « d’y passer ») , arrière pensées électoralistes, stupidité, …
Ce qui permet, quand le travail est bien fait, d’obtenir la sympathie des décideurs (3) et des juges (4) . Et même des associations de défense des droits de l’Homme.
Alors, comment, pour reprendre une autre formule de style, « déconnardiser » le fonctionnement de la société ? (5)
Il faudrait sans doute mieux enseigner l’histoire et rappeler le mot de Cambronne. Puis apprendre aux gens à s’en servir.
Et ... « contre-attaquer ».
En portant plainte pour dénonciation calomnieuse chaque fois que l’opportunité se présente. En demandant systématiquement à l’administration qu’elle assure la protection et qu’elle indemnise ceux de ses agents qui ont fait l’objet d’attaques ad hominem. Et en déférant ses refus au juge administratif. En s’en prenant aux associations de défense des droits de l’homme qui mettent le respect qu’elles ont acquis naguère dans de nobles combats pour les droits et les libertés, au service de politiques dont l’effet et le but est paradoxalement de tailler dans les droits et les libertés existants.
Ce n’est pas si difficile que cela.
Ceux qui paraissent forts ne le sont que lorsqu’on leur montre qu’on est faible.
Et puis et surtout, c’est si amusant de voir la tête de celui auquel on vient de dire : « va te faire … », qu’on a envie de recommencer. C’est alors que le rapport de force commence à s’inverser.
Marcel-M. MONIN
Constitutionnaliste.
(1)
a) exemple 1
lire « l’université et le bâillon » par Alain Garrigou, Le Monde diplomatique du 24 mai 2017 ( article que l’on trouve sur internet)
https://blog.mondediplo.net/2017-05-24-L-universite-et-le-baillon
Dans cette affaire, l’université à laquelle appartenait l’enseignant-chercheur avait accordé sa protection fonctionnelle à ce dernier.
b) exemple 2
Un professeur d’université utilisa un jour une figure de style ; selon laquelle les religions s’acquièrent par voie sexuelle, dès lors que selon les dogmes, tel ou tel des parents confère sa religion au nouveau né.
Dans la seconde aventure, et contrairement à ce qui s’était passé à l’université de Nanterre, l’institution (par les déclarations non ambigües de ses représentants condamnant le contenu du cours de leur collègue) , est venue en quelque sorte à la rescousse de l’assaut . (Réflexe qu’avaient d’ailleurs eus des collègues et des membres des structures académiques avant que le professeur S. Paty ne soit assassiné pour le même genre de griefs).
S’agissant de la formule de style, nous regrettons de ne pas pouvoir en revendiquer la paternité. Mais nous ne résistons pas au plaisir de provoquer l’ire de certains excités potentiels. En faisant remarquer que dans le Christianisme ce n’est pas tellement « mieux ». On devient Chrétien par le baptême. Les parents, auxquels on a mis dans la tête que si leur bébé mourrait avant d’être baptisé, il n’irait pas au paradis, se précipitent souvent vers les fonds baptismaux. Avec dans les bras, leur enfant qui ne sait pas plus que les autres nouveaux nés ce qui lui arrive. (A la différence près il est vrai, mais c’est une autre question, que si l’ancien bébé baptisé se proclame plus tard athée ou s’il change de religion, il ne lui arrivera pas forcément la même chose.).
(2) Ce qui est utilisé dans tous les domaines : V. par exemple, les manœuvres psychologique en direction des couches modestes de la population, pour qu’elles acceptent d’envoyer leurs enfants faire une guerre qui est parfois déclenchée en réalité, pour la satisfaction des intérêts économiques ou financiers de l’élite. V. également les mesures de préparation de l’opinion, utilisées par les gouvernants avec l’aide de leurs « communiquants » et des médias, pour « faire avaler » la suppression des services publics. Etc…
(3) v. « Macron annonce que la France va intégrer l’antisionisme à se définition juridique de l’antisémitisme » par Jeanne Bulant ; 20/02/2019 BFM TV.
(4) Les plaintes déposées par certaines organisations ne sont pas classées par les parquets qui ouvrent des enquêtes préliminaires.
Pas loin du sujet, écouter les déclarations de M. Jacob Cohen ; dont il faut signaler qu’il fait, (d’ailleurs dans la logique de ce qui est dit ci-dessus) l’objet d’attaques ad hominem particulièrement virulentes, le présentant même comme un « conspirationniste » .
Le Conseil d’Etat, ayant à statuer sur la légalité d’un règlement intérieur d’un établissement scolaire qui interdisait le port du voile, fit jouer le texte de lois sur la vie scolaire ( ce qui lui a permis de recourir à sa jurisprudence sur les interdictions générales et absolues) contre le principe constitutionnel de la laïcité : CE 2 novembre 1992, n° 130394 https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000007834413/ . NB. Le raisonnement conduisant à la solution contraire était évidemment techniquement possible.
(5) Synthèse, disent certains, des dispositions que l’on trouve dans les statuts de certaines obédiences maçonniques aux termes desquelles les Francs Maçons « oeuvrent à l’amélioration du genre humain ».
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