La droite, la gauche et le romantisme
Bains de siège à la mutualité le week-end dernier, pour tenter d’évacuer les humeurs peccantes (mauvaises humeurs - du latin peccare : pécher) qui s’accrochent au PS. Puis réunionite et compagnie toute la semaine. « Rénovation », « Rénovation » ! Le mot est lâché, chanté, repris, scandé, psalmodié... Et une fois de plus, Hollande a préservé l’essentiel, le Ni-ni. Il a évité les petites tentations, les déplaisirs mous... Une remise à plat avant les législatives. Ne rien décider, entretenir la mayonnaise des sensibilités et jouer la musique guimauve des rancoeurs internes pour faire danser le fantôme d’un parti qui n’a plus grand-chose à proposer.

La gauche française n’a toujours pas compris qu’elle devait abandonner ses fumeuses références historiques. Voilà le fait ! Oublier les romantiques revendications du temps des Trente Glorieuses, du plein-emploi et de l’hégémonie économique de l’Occident. L’électeur, on ne peut plus le feinter à vie avec l’Etat-providence. Le miragineux progrès social illimité acquis sur le dos des générations futures ? Buffet à volonté ! La lutte des classes, la constante amélioration de la condition du soutier sur le dos du bourgeois ? Byzance now et Bagdad demain ! Miasmes d’un passé bien révolu où la croissance justifiait tous les excès (réduction du temps de travail et de l’âge de la retraite, extension des régimes de protection sociale, dérive des budgets sociaux) et où les pays émergents ne fabriquaient que colifichets et millions de fanfreluches.
C’est quoi, au fond, un parti politique moderne et efficace ? Une manufacture à faire entrer les élus dans des cases ? A émulsifier les humeurs insondables ? A baratter le consensus mollasson ? Le PS aujourd’hui, en somme. Ou bien plutôt l’UMP, un appareil à servir la soupe au chef et la mirifique économie nationale ? La réponse est claire, on a vu les résultats ! Au risque de passer pour cynique, force est de constater qu’un parti qui a l’ambition de gouverner, c’est sec de cause, pain rassis pour élever la pensée politique... Du cœur du parti, il ne sort aucune idée noble. L’homme y est brassé instantané de courants entre contre courants, mis sous cloche idéologique et avalanche de pèze, formaté pour les grandes causes ; le patron et le marché. Coq et CAC ! Résignons-nous, c’est fini le temps des partis qui gagnent à être connus, Simone Veil le sait qui prône leur suppression.
Aujourd’hui c’est le temps des leaders. Mais ils sont où les maestros du PS, libéraux et nantis libéraux ? Les Fabius, Emmanuelli et Mélanchon ? Sous la couette jusqu’au 18 juin. Y a bien DSK. Seulement voilà, Kahn c’est Jet set, pas Gengis... Son carnet d’adresses c’est Davos, grand patronat, showbiz et compagnie. Pour le militant de base, ses valeurs c’est pognon, appartement de luxe, résidence à Marrakech et jaguar ! Sans parler des casseroles politico-financières et des honoraires plaqués or du temps où il bossait pour EDF, Alcatel ou Lafarge. Et puis c’est un prof... L’assaut du PS, le coup de force ça le répugne. Il préfère argumenter, convaincre, rallier à ses idées et à ses hautes compétences... Dans l’état du PS, c’est pas la bonne méthode !
Ségolène, c’est le contraire. Son truc c’est le coup d’Etat avec préméditation, le coup de pied au cul de la fourmilière socialiste et la prise de Solférino à la hussarde. Les idées ? On verra plus tard. « Moi je », l’énergie d’abord, le reste suivra. Les échéances proches ? Elle n’est pas candidate à la députation. Pas folle la madone, elle vise direct l’investiture 2012. Une déroute socialiste en juin jetterait mille feux sur ses 60% aux primaires et ses 17 millions de voix au second tour. Elle aura beau jeu de se faire reluire le bilan et de sonner le glas des éléphants pour écrabouiller l’appareil du PS. Il ne lui restera plus qu’à chambouler le calendrier et faire main basse sur le parti. Tant que François "pâte à sel" lui sert, qu’il reste aux ordres et avale toutes les couleuvres, il peut se maintenir, ensuite...
Touche finale au tableau de famille, ils ne peuvent pas se voir en peinture les deux maîtres du PS. Dans l’entourage de Jeanne d’Arc, on traite DSK de « ripoux ». Lui réplique qu’elle « exerçait des fonctions subalternes, dans de petits ministères ». Alors un ticket Ségo-Kahn ? C’est plus exotique que le numéro gagnant de l’Euro million. Maldonne !
A court terme, y a pas le choix. Toutes les espèces du PS embarquent donc sur l’arche de Ni-ni, présentée par le premier timonier comme la seule planche de salut pour de fragiles élus avant tout soucieux d’échapper au déluge imminent, de survivre le temps que les eaux sèchent sur la fumière terre socialiste et qu’une colombe ou un corbeau ne revienne, rameau d’olivier au bec, annoncer des jours meilleurs. Le Paloma pour Sarkozy et le Radeau de la méduse pour le PS... Chacun sa croisière...
Certains passent d’un navire à l’autre. Et sans emprunter la passerelle Bayrou. Faut avouer que le Modem peine à connecter les réseaux. C’est pas du haut débit, le parti orange. C’est tout juste du vieux RTC, psh, psh, phssshh, Dung, Dung, Dung, phshh pshhh diiinng... Le cri de la carotte ! 65 000 pré-adhésions en ligne ? C’est gratuit, façon pétition, remplissez un formulaire de demande et on vous contactera. Ca n’engage à rien. Pour le nombre d’adhésions réelles et le pognon, les dons en ligne, on n’a pas les chiffres... Evidemment ! C’est émouvant et très lent tout ça. Du parfait texte ! De la bulle qui gonfle. De la grosse écume pour minivague !
D’autres comme Thibault sortent de chez Sarkozy le sourire aux lèvres. Le chef cégétiste préfère être reçu et légitimé par le prince que de tout miser sur son faible contingent d’adhérents ou les 2% de voix du PC. Ca peut se comprendre. A présent, il va réfléchir à deux fois avant de propager l’émeute. Tout le monde veut du bénéfice dans cette histoire. Sarkozy lui a promis, on discutera avec lui.
Et pendant ce temps, au PS, on vit d’immobilisme, d’indécision et d’escampette. On s’est fait piller le coffre-fort, délester des propositions concrètes et des images des pays socialistes qui réussissent. Il ne reste que contorsions et gesticulation des dirigeants, c’est bien là l’essentiel pour François Hollande. Ca lui permet de se maintenir un temps. Que l’usine à penser continue à mijoter synthèses improbables et compromis frelatés... Pâle popote ! Autant de suaves clystères intellectuels administrés depuis deux ans par l’apothicaire en chef. Vapeurs ! Vains remèdes pour un parti à la recherche de son fondement. Certains auraient préféré une saignée ? Ils attendront l’après-législatives... Les bistouris sont prêts... Ils l’ont promis. Ils vont leur faire passer le goût des fables et des contes de fées aux militants. On va revenir au concret, au pondérable, aux sciences politiques exactes... Finies les hyperboles, cocasseries et sondages... Out le romantisme. La droite contre la gauche retrouvée ! Permettez qu’on en doute...
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