La face cachée de l’affaire Petraeus (Episode 6/6)
"Comme on se retrouve" aurait pu dire Petraeus en débarquant de son Gulfstream en Libye, à Benghazi, où l'attend une responsabilité assez étonnante, lui qui a été aussi mauvais dans la gestion des stocks d'armes irakiens (et a laissé un souvenir aux gars du FBI avec l'épisode Stoffel). Celui de faire la chasse aux pillages des abondants dépôts de munitions laissés sans surveillance après la chute du dictateur. S'il y a bien un incompétent en la matière, c'est bien lui, à voir comment il a avait géré ceux en Irak. Surtout que sa tâche s'annonçait comme un véritable tonneaux des Danaïdes, tant, des armes, il y en a partout. Pire encore qu'en Albanie, où la folie d'un autre dictateur en avait accumulé jusque dans les mêmes recoins du pays. Comble de la sottise humaine, la plupart des armes légères déposées provenant de ces anciens dépôts albanais, rachetés à vil prix par Kadhafi à des brokers ayant toute l'apparence de marchands de mort. Avec parmi eux des américains, tel Curt Weldon, qui avait fini par fourguer les chars sur lesquels lorgnait Stoffel (voir en particulier l'épisode 11 mis en PDF). Mais il a autre chose à régler, en descendant de son avion, notre ex-général : une mauvaise surprise en quelque sorte, en face de lui, parmi les nouveaux prétendants au pouvoir, il y avait une vieille connaissance de la CIA... mais qui allait s'avérer au final un allié de taille, pour recommencer ce qui avait été fait en Irak. L'apparente mauvaise gestion des stocks d'armes en cachant une autre, en réalité... celle de la CIA.
Humphries et Kelley, les deux facettes d'une vengeance ?
Les deux personnages centraux, outre la biographe de Petraeus, sont l'homme du FBI et l'entremetteuse en chef de la ville de Tampa, ou de la base aérienne de McDill (ce qui revient au même dans notre cas, tant les élus et la base se cotoyaie. "Préoccupée par les e-mails, Kelley a contacté Humphries en juin dernier. Les deux s'étaient rencontrés lors du "2011 FBI Citizens Academy", un programme visant à enseigner le public et les journalistes au sujet de ce que l'organisme fait et comment il fonctionne. Kelley était dans la salle, où l'on donnait des conférences, et Humphries en a fait une un soir sur le terrorisme, selon Natalie Shepherd, une journaliste de télévision Tampa qui étai présente" nous fit le Huffington Post. C'est Humphries qui avait donc épluché les mails entre Broadwell et Petraeus avec un zèle tout particulier : politiquement, l'homme s'était toujours rangé du côté républicain et n'en avait pas fait mystère. Très vite, il en avait averti James Clapper, le Director of National Intelligence, sentant les échanges d'informations sensibles et l'espionnage possible.
Un bon réflexe, qui lui avait valu aussitôt de se voir retirer immédiatement le dossier, lorsqu'on a constaté qu'il s'était immiscé lui-même dans le jeu avec notamment l'envoi de sa photo torse nu. Humphries en sait bien plus que Petraeus lui-même sur les agissements tortueux de la politique américaine ces 15 dernières années ! Ecarté, il n'en était pas resté là pour autant, et avait fait appel à son penchant politique : "Jugé trop zélé par le FBI local dans l'affaire Petraeus, il avait été rapidement écarté de l'enquête. Mais l'agent, qui a été décrit dans les médias comme ayant des sympathies pour le parti républicain, a alerté l'un des piliers du parti au Congrès, Eric Cantor, quand il a estimé que l'affaire n'avançait pas assez rapidement. Il aurait cru à un complot visant à protéger politiquement Barack Obama avant l'élection. Eric Cantor n'a jamais rien révélé et il a expliqué mercredi avoir choisi cette option parce que la sécurité nationale passait avant la politique à ses yeux." On remarquera sa première analyse des faits : celle d'un complot visant à aider Obama pour se faire réélire : à force d'avoir baigné dans les pires coups tordus, dont les préparatifs du 11 septembre qu'il n'avait pas vu venir, Humphries ne pouvait plus imaginer autre chose qu'un complot, en effet. Celui-là, au moins, il ne lui était pas passé sous le nez. Mais ça n'en était pas un, celui-là. Quant à Petraeus, à peine s'il s'était aperçu de la surprise qui l'avait attendu en Libye, à la descente de son Gulfstream transformé en piège à biographe...
Le général star
Ce n'est pas un ex-général qui débarque à Benghazi, mais l'équivalent d'une star. Rihanna, à côté, et son invitation de journalistes à boire le champagne dans un Boeing loué pour l'occasion, ça fait léger. Car la "star" Petraeus, une image qu'il s'est patiemment forgée, ne déboule pas n'importe comment en ville. Chez lui, le cortège qui l'accompagne est plus long que celui d'Obama : "parmi les nombreux faits qui ont été révélés dans le scandale impliquant l'ancien directeur de la CIA David H. Petraeus, parmi les plus curieux, c'est que pendant ses jours comme général quatre étoiles, il a été une fois escorté par 28 motos de la police alors qu'il se rendait à son quartier général du Commandement central à Tampa au manoir de Jill Kelley. Bien que la plupart de ses voyages n'impliquait pas un convoi présidentiel de cette taille, le scandale a incité à de nouveaux examens des atours impériaux associés avec le style de vie d'un général âgé" note Nederlog. Ceci pour les limousines.
Question avions disponibles, les C40 A,B et C utilisés par Petraeus et ses collègues de l'armée sont des modèles "Clippers", à savoir des Boeing 737-700 de la classe "Boeing Business Jet" avec tout le confort à bord : l'armée américaine en possède pas moins de 19 exemplaires ! Petraeus utlisant, on l'a vu, un des Gulfstream de la flotte de la CIA (d'autres chefs d'état dans le monde ayant recours à ce type d'avion, fourni la plupart du temps à un tarif exorbitant par des sociétés américaines telles que Jet Greene de Miami, et son N598F, un appareil entr'aperçu lui aussi... à Benghazi !).
Des généraux chouchoutés
Si ces hommes, ou plutôt les mercenaires employés par la CIA descendent du bon vieux DC-3 à tout faire (voir ici lequel), Petraeus débarque lui de "son" Gulfstream, celui qui, à ses heures perdues, en dehors de tenir des tête à tête avec son admiratrice, a servi également aux vols infâmes de "rendition", ses sinistres aller-retour des prisonniers de Guantanamo dans des geoles disséminées dans le monde entier pour torturer à l'aise sans être inquiété par les lois américaines reprouvant l'usage de la torture sur les prisonniers (des lois modifiées à vrai dire par les décrets du Homeland Security qui permettent quasiment tout en cas de terrorisme). Des avions aux numéros changeant sans cesse, tel le "fameux" N379P, devenu N8068V (ici à Genève), puis dénommé N44982, de "Premier Executive Transport Services" (PETS) , puis "Bayard Foreign Marketing" un de ceux qui a le plus servi aux "renditions flights". Le tracé de ses parcours étant fort représentatif de son usage.... au point d'être surnommé le "Guantanamo Bay Express". Aujourd'hui devenu N126CH dans une société... du même nom installée 2930 Biscayne Boulevard à Miami, en Floride... l'adresse de Crescent Heights of America, Inc dirigé par Sharon Christenbury, grand argentier républicain. "Il profite de ses avantages, Petraeus" nous rappelle un site."
Les officiers supérieurs de l'armée américaine ont leur propre avion, une somptueuse résidence officielle que l'armée a fourni gratuitement, des chauffeurs à temps plein et gardes du corps pour porter leur sac, des nombreux adeptes des chaînes de repassage professionnels qui font leur régime alimentaire, si vous voulez écouter de la musique sur un dîner, ces hommes feront immédiatement convoqué un quatuor à cordes ou une chorale. Certains commandants qui ne se rencontrent même pas entre eux même dans l'avion d'affaires de luxe Gulfstream, chacun d'entre eux dispose d'un avion de transport C40, cet avion de transport militaire similaires à un Boeing 737, sont dont certains possèdent également un lit spécialement configuré. Comme un mélange de style de vie de riche le 4 étoiles Petraeus n'a pas tout à fait une vie de général, mais celle-ci ressemble plus à celle d'une une star. Par exemple, le commandant général William Ward, de l'US Africa Command a été récemment découvert à dépenser sans raison de grosses sommes extraites de fonds publics pour ses frais généraux privés, y compris l'utilisation d'un avion de transport militaire pour que de l'épouse aille faire du shopping et de la balnéothérapie, des fonds publics dépensés aux Bermudes dans des suites de luxe à 750 $ par nuit , l'achat de 5 motos, ou au cours d'un voyage d'affaires à Washington pour ouvrir la voie". Ce la devient une habitude chez ces généraux.
Cela rappelle étrangement le général Colin Powell posant ostensiblement dans sa Corvette, ou devant une Pace Car de la même marque, à Indianapolis, pour en faire la promotion, (fan de Corvette, comme Chuck Yeager jadis) une fois avoir quitté le gouvernement Bush. Un gouvernement qui était composé, rappelons-le, de multimillionnaires (13 sur 16 membres !), la plupart ayant fait fortune grâce aux industries d'armement (Rumsfeld), ou grâce à des sociétés fournissant les armées (Cheney, avec Halliburton ou Rice, avec ses pétroliers).
Un général pas à la hauteur et à langue de bois
Un Petraeus alors comme son prédécesseur, celui qui avait monté de toutes pièces l'incroyable fausse offensive de Marjah, qui restera un des grands sommets du détournement journalistique, avec le hissage de drapeau dans une enceinte fermée protégée tout autour par des mercenaires, par crainte de l'arrivée inopinée de Talibans, comme une grande victoire contre ses mêmes talibans, prétendument repoussés. "Pour le "discours de Marjah", la presse US a mis en ligne ce genre de photos ou celle-ci. Ou encore celle-là, avec l’indispensable gouverneur. En réalité, le plan large montre que la réunion n’a pas vraiment fait recette, et qu’on a bien aligné les gens présents pour qu’ils se "calent" dans l’objectif ! Notez les mercenaires alignés, qui "rangent" les invités !" avais-je écrit."Petraeus, qui divergeait sur la doctrine Krystal (celle des assassinats ciblés "discrets") remettra en marche les inutiles bombardements, en niant leurs effets sur la population civile. Petraeus a en fait constamment manipulé les chiffres (*)...
et les gens pour en parler, à savoir les journalistes : en décembre 2010, la CIA a publié une fiche du "National Intelligence Estimate" avec une évaluation très pessimiste de la guerre en Afghanistan.
Les talibans avaient réalisé des gains importants, dit le rapport, et de larges pans du pays étaient en danger de tomber à l'ennemi. Pendant ce temps, le général Petraeus en était à vanter les « fragiles et réversibles" gains qui avaient été faits."Eh bien, la plupart d'entre eux ont été inversés », explique Foust.
Durant le mandat de Petraeus, la violence en Afghanistan a en fait augmenté. Il a plus que doublé le nombre de "raids nocturnes, et la mise à mort lors des missions dites de capture, qui, selon lui, décimaient la structure de commandement des talibans. Mais ces missions ont causé des difficultés indicibles pour les Afghans, qui ont souvent pris entre deux feux, et a incité le président afghan Hamid Karzaï à déclarer la guerre à l'OTAN".
« Petraeus aime les chiffres », a déclaré Foust. "Il permettrait de mettre en valeur les chefs de corps, et prétendait que ces missions tuer / capturer étaient la tactique la plus réussie dans la guerre. En réalité, un pourcentage désespérément élevé de personnes capturées étaient libérés quelques jours après. "Ce nombre a dépassé 80 pour cent, selon le chercheur Gareth Porter". Petraeus, en quelque sorte le roi de la relance de balles plombée !
Un bain de sang journalier non montré
Pendant que l'on déguste des petits fours, en Irak, on massacre, allègrement. Les rues sont jonchées de cadavres, on y tue tous les jours. Des soldats sont pris en flagrant délit d'achever des blessés qui les insultent, des images révélées par un journaliste "embedded", qui n'avait pas eu envie de garder ça pour lui, pour une fois (**). Pendant que Petraeus entretient l'idée de "progrès", les meutres et les attaques ont lieu tous les jours. Des assassinats, provoqués par l'incroyable dissémination des armes dans la nature, dont le grand responsable était David Petraeus, qui avait décidé de distribuer des armes aux milices chiites... sans en tenir de registre : aucun numéro n'était enregistré, aucun ordinateur ne contenait le nombre d'armes fournies ni les noms de ceux à qui on les avait distribuées.
Quant aux journalistes un peu trop curieux, telle la courageuse Atwar Bahjat, 30 ans à peine, d' Al-Arabiya ; on les retrouvait assassinés, eux aussi, au petit matin, à deux pas de leur van encore muni de son antenne d'émission. Les assaillants auteurs de sa mort avaient fondu sur la camionnette en criant "nous voulons la correspondante"... Qui avait donc voulu la faire taire et pourquoi... reste un mystère. Quelques mois auparavant, en septembre 2004 un général décrivait dans le Washington Post les "progrès tangibles"réalisés dans la "construction des forces de sécurité irakiennes au sol. "Bien qu'il y ait aussi le contraire - pour ne pas mentionner horribles attaques terroristes", écrit ce général, « il ya eu des progrès dans les efforts visant à permettre aux Irakiens d'assumer davantage la charge de leur propre sécurité, et qu'ils sont prêts à le faire." Ce général étant bien sûr David Petraeus !
En septembre dernier une vague d'attaques tuait plus de 88 personnes et en blessait plus de 400 à Bagdad. en juillet, il y en avait eu 107 de morts , avec plus de 268 blessés : pas un mois depuis janvier sans des attaques meurtrières... dans l'indifférence générale des télévisions américaines, davantage intéressées par l'approche des élections. "Les massacres sectaires ont atteint un sommet en 2006-2007, mais les attaques mortelles ont persisté alors que les tensions politiques entre les chiites, les sunnites et les factions kurdes ont augmenté depuis que les troupes américaines ont achevé leur retrait en décembre" note l'agence Reuters.
Le ver dans le fruit
Les généraux américains comme Ward ne sont pas les seuls à avoir dilapidé l'argent public : lui vient d'y perdre une étoile (il a été rétrogradé, fait exceptionnel !) mais d'autres ont fait comme Petraeus, en détournant tant qu'ils le pouvaient les possibilités qui lui étaient offertes ? L'un des plus adroits dans le genre a été très certainement l'amiral James Stavridis (à gauche, chez lui, en Belgique, avec le Lt. Col. Rob Manning, sous-secrétaire de l'Army Public Affairs), a-t-on aussi appris récemment. Je vous parlais de ses fameuses confréries que l'équipe Bush adorait : Stavridis s'en est trouvé une, lui aussi une française en prime. "Le commandant actuel des forces américaines en Europe, l'amiral James Stavridis, est également apparu sous le contrôle de l'inspecteur général pour l'utilisation d'un avion militaire pour se rendre dans la région de Bourgogne en France pour un dîner organisé par une société internationale d'amateurs de vin (les chevaliers du taste vin !). Stavridis a défendu le voyage comme une occasion de rencontrer des militaires français et des chefs d'entreprise. Il a été blanchi des actes répréhensibles par la secrétaire à la Marine Ray Mabus ce mois-ci. Ward, cependant, n'était pas aussi chanceux. Secrétaire à la Défense Leon E. Panetta a annoncé la semaine dernière que Ward serait rétrogradé et mis à la retraite à un rang trois étoiles. Il devra également rembourser le gouvernement de 82 000 dollars, mais il reste recevra une pension de 208 000 dollars par année".
La belle vie
Dans son texte accusatif, le contrôleur faisait remarquer que Stavridis n'avait pas à se plaindre pourtant : Stavridis et son épouse, résidaient en effet au Château Gendebien, un domaine de 20 hectares fournis par le Royaume de Belgique et de l'OTAN en tant que résidence du SACEUR (pour "Supreme Allied Commander Europe") depuis 1969. Parmi les délateurs retrouvés, notre "ami" Foggo, qui a déclaré que l'amiral Michael Mullen, de la marine américaine, président du Joint Chiefs of Staff, avait été intronisé en 2009. Foggo avait travaillé pour lui à l'époque (et lui avait magouillé partout, surtout dans la bouteille d'eau.. et les prisons secrètes, - et les prostituées de luxe- alors qu'il était devenu le 3eme de l'organigramme de la CIA). Stavridis, le 8 mai 2010 avait volé de à la base aérienne de Chièvres, en Belgique (Chièvres AB),
à Dijon via un appareil militaire C-37, accompagné de sa femme, pour se rendre... au Clos Vougeot pour y être fait "Chevalier du Tastevin". Sur la photo du propriétaire des chais, Christian Moreau, on le découvre en touriste américains fort discret ! Ironie du sort, l'éruption du volcan islandais Eyjafjallajökull l'avait empêché de repartir directement vers les Etats-Unis (comme son acolyte du château, un homme très affairé que ce Manning, c'est lui qui va s'occuper semble-t-il du cas d'un autre Manning...), il était donc reparti se poser ce soir-là en Belgique. Une vraie vie de château ! Tout cela pour un tout petit speech : "Il a parlé pendant 5-7 minutes, en français, et a passé la plupart de son temps à la promotion de l'OTAN".
D'autres ont succombé au rituel, à vrai dire... (***) mais ne sont pas venus à Dijon en avion de l'armée... A noter que Chièvres est occupé par le 309th Airlift Squadron, une partie du 86th Airlift Wing, dirigé par le commandant Gaubert, et a comme spécialité d'accueillir comme type d'avions... des C-37 Gulfstream V, qui ont désormais une livrée grise. A Chièvres, il y en a 9, de Gulfstream V de ce type qui sont basés. La flotte des "chiefs of staff"... en photo ci-dessous, le Gulfstream N88ZF arrivé tôt ce matin-là à Brussels-Zaventem, et indiqué comme "privé". Hillary Clinton voyageant plutôt à Prague en avril 2010 dans le N°90404. Un bon nombre d'appareils de ce type ont été vus en 2007 à Shannon, nœud central des vols de renditions en Europe. Le même appareil que celui qui avait transporté Hillary Clinton... trois ans plus tard.

Des armes à profusion, comme en Irak
On le sait, s'il y avait bien un homme à ne pas envoyer là-bas (en Libye) pour contrôler les armes, c'était bien celui qui avait tout raté en Irak sur le même sujet (à moins de vouloir sciemment lui faire répéter la même chose, ce qui est aussi une option possible comme on va le voir). L'ambassadeur Stevens, on s'en doute, avait dû demander auparavant à la CIA ce qu'elle en savait, des armes en circulation au sein des anciens du GICL, pour savoir si une tentative de force avait des chances ou non d'apparaître. Ce à quoi on peut se douter que David Petraeus avait dû répondre qu'elles étaient sous contrôle, ces armes. Mais Petraeus aujourd'hui accusé de laisser faire, c'est bien entendu l'ineffable Benotman qui était venu expliquer ce qui s'était passé, selon lui ou plutôt selon sa fondation : "selon nos sources, propres à Quilliam Foundation, l'attaque était l'œuvre d'environ 20 militants préparés pour une attaque militaire. Il est rare, par exemple, qu'un RPG7 - un lance-roquettes anti-char - serait présent lors d'une manifestation civile. L'attaque contre le consulat a eu deux vagues. La première attaque a conduit les forces de sécurité libyennes à évacuer du consulat des responsables américains par, juste avant que la deuxième vague soir lancée contre les responsables américains après qu'ils aient été maintenus dans un emplacement sécurisé." Ce qui a l'évidence ne représente pas les faits seuls les mercenaires de Blue Mountain étant restés seuls pour la protection rapprochée de l'ambassadeur ; et les hommes de la CIA appelés après en renfort. Une attaque, rappelons-le, effectuée un 11 septembre, ce qui aurait déjà dû suffire pour parler d'attaque concertée à l'avance, et non une simple manifestation contre un film anti-islam inepte. A peine l'attaque effectuée, ses responsables avaient aussitôt fui, vers la frontière la plus proche : la Tunisie. Blue Moutain ,et ses 783 284 dollars engrangés pour protéger l'infortuné ambassadeur, retrouvé en train de mourir, asphyxié par les fumées dégagées par son bâtiment incendié.
Manipulation des faits
Très vite, une chaîne de télévision s'empare aux Etats-Unis de l'affaire : Fox News, chaîne que l'on peut qualifier d'extrême droite tant elle glorifie le Tea Party ou propose des crétins notoires comme présentateurs de grande écoute (l'ineffable Glenn Beck en étant le fleuron incontesté, à voir des gauchistes et des communistes partout) présente sa version des faits. Pour elle, c'est sûr, un ancien libéré de Guantanamo est bien derrière cette attaque. Relisez bien, car l'annonce de Fox News est un chef d'œuvre de manipulation : "des sources du renseignement ont dit à Fox News, qu'ils sont convaincus que l'attaque meurtrière sur le consulat américain à Benghazi, en Libye, a été directement liée à Al-Qaïda - avec un ancien détenu de Guantanamo impliqué.
Cette révélation intervient le jour même d'un haut fonctionnaire de l'administration d'Obama a appelé l'assaut mortel de la semaine dernière une "attaque terroriste" - la première fois que l'attaque a été décrite de cette manière par l'administration après les affirmations qu'elle avait été "spontanée". "Oui, ils ont été tués au cours d'une attaque terroriste contre notre ambassade", a affirmé Matt Olsen, le directeur du Centre national de lutte contre, lors d'une audience du Sénat mercredi. Olsen a fait écho en disant aux collègues du gouvernement que les responsables américains n'ont pas de renseignement précis sur la « planification avancée significative ou de coordination" de l'attaque (...). Sufyan Ben Qumu est cité pour y avoir été impliqué, et même peut-être mené l'attaque, ont dit des sources de renseignement à Fox News dit. Qumu, un Libyen, a été libéré de la prison américaine de Guantanamo Bay, à Cuba, en 2007 et remis aux autorités libyennes à condition qu'il soit gardé en prison. Ses dossiers de Guantanamo montrent aussi qu'il a des liens avec les financiers derrière les attentats terroristes du 11 septembre ". Vous avez bien remarqué que Fox News ne possède aucune preuve de ce qu'il avance, autre que les "sources du renseignement"... si pratiques. En prime, le dénommé Qmu a un énorme avantage : sa fiche de Guantanamo ne présente qu'une image floue et il est inreconnaissable. Pour ajouter à la fabrication, l'auteur de l'annonce, chez Fox News n'est autre que Catherine Herridge, dont le passé, même salué par plusieurs prix journalistiques, démontre des liens particuliers avec la droite au pouvoir et un goût prononcé pour le scoop (elle avait commencé sa carrière à Londres) : "en 2007, Herridge, sur l'enquête de Fort Dix a été le premier journaliste à confirmer que trois des six suspects étaient entrés illégalement aux États-Unis en se faisant passer pour des enfants. Elle a également joué un rôle clé dans la couverture des massacres de Virginia Tech en obtenant de sources fédérales les premières photos de tueur Cho Seung-Hui (...) En 2003, Herridge couvert les dernières nouvelles et informations sur la sécurité intérieure au cours de l'opération Iraqi Freedom. Elle a également fourni des téléspectateurs avec des entrevues avec des vedettes de l'actualité clés, y compris une interview exclusive avec le secrétaire à la Sécurité intérieure, Tom Ridge." Sa façon de se présenter à l'écranlaisse pourtant assez dubitatif sur ses capacités réelles à informer et non pas à séduire, disons, pour rester poli... (c'est une marque de fabrique chez Fox News .... )sans oublier son manque d'analyse : le 31 octobre, elle en était à définir que Petraeus cachait quelque chose, mais sans toujours avoir découvert quoi...
le même jour, à l'écran, la jupe cachée sous la table, cette fois, elle venait clamer une opinion franchement droitière, d'être responsable de la mort de l'ambassadeur et des mercenaires censés le protéger (en allant ainsi dans le sens du public de Fox News, toujours à brosser le poil dans le même sens poujadiste de défense des "petits" en l'occurrence ici les mercenaires). Toujours la même manipulation des faits, la harpie parlant de l'élection à venir comme étant la raison pour laquelle la responsabilité d'Al-Qaida n'avait pas été citée. Du Romney, du Tea-Party pur jus ! A la fin de son intervention, une incrustation tombée pile poil affichait les photos des quatre tués de Benghazi, de quoi faire jouer la fibre sensible : une manipulatrice de première !!!
Petraeus, indécrottable revendeur d'armes
Sans le savoir, les assaillants de Benghazi ont en fait détruit non pas une habitation ou était retranché un ambassadeur, provoquant la mort de celui-ci, mais surtout mis le nez là où se passait toute une opération douteuse de ramassage et de collecte d'armes effectuées à ce moment-là par la CIA. A Benghazi, Petraeus était en train de faire ce qu'il a toujours su le mieux faire : récupérer des armes et les vendre, le plus discrètement possible. "Le Wall Street Journal, Le Telegraph et d'autres sources confirment que le consulat américain à Benghazi a été principalement utilisé pour une opération secrète de la CIA. Ils disent que la présence du Département d'Etat à Benghazi était de "fournir une couverture diplomatique » pour la mission cachée de la CIA. Reuters note que la mission de la CIA impliquait de trouver et de racheter des armes lourdes pillées dans les arsenaux du gouvernement libyen". Des armes destinées à la Syrie, acheminées par les anciens jihadistes... toujours officiellement ennemis des américains : "en novembre 2011. Le Telegraph rapporte que Belhadj, agissant en tant que chef du Conseil militaire de Tripoli, "a rencontré à Istanbul des dirigeants de l'armée syrienne libre [FSA] et à la frontière avec la Turquie" dans un effort du nouveau gouvernement libyen pour fournir de l'argent et des armes à l'insurrection croissante en Syrie". En avril, un premier navire avait déjà été intercepté : le Lutfallah II (ici à gauche),acheminé vers le Liban. A bord, dans des containers, son inventaire était sans conteste destiné à faire une guerre :
L'enquête a précisé que la cargaison du bateau est formée de :
- Armes légères : mitrailleuses militaires.
- Armes moyennes : mitrailleuses 12,7 et lance-roquettes RPG.
- Armes lourdes : mortier 120 mm.
- Deux types de missiles : anti-chars et anti-avions.
- Munitions complètes pour chaque type d'arme.
Le scénario étant idéal, les USA ne pouvant être ainsi accusés d'armer directement les opposants à Assad. Le 19 octobre, un autre navire était arrivé à quai en Turquie, provenant de Libye, et soupçonné de transporter des armes. "Le mois dernier, le Times de Londres a rapporté qu'un navire libyen "portant la plus grande cargaison d'armes à la Syrie ... a accosté en Turquie." L'expédition aurait pesé 400 tonnes et comprenait des sol-air SA-7 et des roquettes autopropulsées. Le capitaine du navire était un libyen de Benghazi à la tête d'une organisation appelée le "Conseil national libyen de secours et de soutien", qui a probablement été mis en place par le nouveau gouvernement." Le fief des échanges étant situé dans l'enclave de la CIA, à deux pas de l'endroit où Stevens sera tué :
"à Benghazi, située à 1,2 miles du consulat américain, utilisé comme "une base pour, entre autres, la collecte d'informations sur la prolifération des armes pillées dans les arsenaux du gouvernement libyen, y compris les missiles surface-air" ... et dont les caractéristiques de sécurité "étaient plus avancées que ceux de la villa louée où Stevens est mort." Le 28 novembre, un premier résultat de la politique menée par Petraeus était obtenu : un missile des rebelles abattait le premier hélicoptère syrien.Très certainement un Strela venu de Libye (très vite un communiqué des rebelles annoncera que le missile proviendrait d'un stock de l'armée régulière pillé par eux). La CIA, de mèche avec ceux-là mêmes qui avaient attaqué l''ambassade située à deux pas : ce qui s'appelle se faire avoir en beauté. Le fiasco de Petraeus ne se niche pas seulement au fond d'une alcôve... en le nommant à la tête de la CIA, et en le laissant s'enferrer tout seul dans ses inextricables habitudes, Obama a réussi à se débarrasser d'un ambitieux, qui se sentait déjà soutenu, notamment par le groupe Fox et Ruppert Murdoch, aux dernières nouvelles, au point d'envisager toujours de se présenter à l'élection présidentielle de 2016...
Une biographe représentante de commerce... en armement !
Revenons en Floride et à notre héroïne désormais des magazines "People." Passe encore, allez, pourquoi sur les soirées où tout le gratin des armées disponibles en Floride venait siroter un cocktail (je ne pense pas que la thèse de Warner puisse se tenir, même si la réputation de "swingers" de Tampa paraît bien réelle....). Dans ce cas, bien entendu aussi, l'odeur persistante de l'espionnage possible demeure... mais il y a tout aussi grave à découvrir, non sans surprise, à quoi pouvait bien jouer exactement la fameuse biographe du général si prétentieux, une dame si préoccupée de sa ligne et qui ne sait pas être présente sur une photo sans prendre la pose. Car notre Broadwell par qui le scandale est arrivé à plus d'un tour dans son sac. Un sac dans lequel traînait un drôle d'objet en mars dernier : un pistolet-mitrailleur sans recul, de fabrication... suisse (même si l'usine dont il sort est installée aussi en Virginie). Un "Kriss Super V submachine gun" de 2,18 kg seulement et un tir d'une rare stabilité (le canon court ne remonte pas). Broadwell, venue vanter les mérites de l'arme dans une vidéo, filmée ce jour-là sur un stand de tir (à la fin de la séance, un appel d'iPhone semble la ravir ; or c'est à cette époque, justement, que la partie de jambes en l'air avec Petraeus the Pelvis (il se l'était fracturé lors d'un saut en parachute) avait lieu).
Car la dame joue aussi à ses heures les conseillères en armement : « Pour le combattant individuel, réduire poids est critique à cause de la fatigue et du stress. La réduction du poids peut améliorer considérablement l'efficacité d'une arme à feu, dit-elle.« Il permet au soldat de la porter plus loin, de toute évidence, si une personne est là-bas dans le champ de bataille. Et ce soldat devrait avoir plus de confiance dans le système qu'il emporte, dans l'idéal, car si le système est un véhicule aérien ou encore un véhicule lourd, la portée du système sera plus long, moins le réapprovisionnement des combustibles et d'autres matériaux." On pense surtout que la "conseillère" sur l'oreiller pense surtout à sa ligne, ce jour-là, mais bon... Qui a-t-il comme meilleur endroit pour convaincre, selon le lobby de l'armement, sinon l'alcôve, façon James Bond ? Voilà en tout cas la maîtresse d'un général bombardée représentante commerciale d'une firme qui fabrique des pistolets-mitrailleurs, maintenant !!! Au final, encore une vidéo que vont regarder avec sollicitude les gens du FBI, comme le rappelle le Daily Mail : "sa proximité avec le général Petraeus, l'un des membres de haut rang de l'armée américaine, et son approbation commerciale d'un fabricant d'armes apparaît suspecte et vont probablement ajouter plus de grain à moudre pour les enquêteurs fédéraux". La vengeance du FBi ne pouvait qu'en être plus piquante... Jim Kelley et Frederick Humphries se connaissant parfaitement bien...
Au final, avec l'intromission de Frederick Humprhries dans des mails privés, on a donc eu la révélation de deux choses en même temps. Le fait que le FBI peut ouvrir n'importe quel mail de n'importe quel individu, sous couvert de lois scélérates, celles du Homeland Security toujours pas abrogées, et celle de la continuation d'un trafic d'armes débuté en Irak et poursuivi cette fois en Libye par le même général : de quoi mettre à mal l'institution CIA, déjà largement décriée par son usage abusif d'assassinats ciblés par drone. Petraeus devait partir, à moins de discréditer complètement la CIA, tâclée par son vieux rival du FBI.
Les trois sources principales de cette enquête :
1) La superbe enquête du Seattle Times en date du 7 juillet 2002 (il y a 18 chapitres) est ici, à laquelle j'ai emprunté de larges extraits :
http://seattletimes.com/news/nation...
2) L'excellent dossier d'Elisabeth Campos de ERTA sur Ressam :
http://www.erta-tcrg.org/ahmedressa...
sur Ressam et ses amis :
http://www.erta-tcrg.org/ahmedressa...
3) Le livre "contre tous les ennemis" de Richard Clarke
http://www.liveleak.com/view?i=1e9_...
http://www.liveleak.com/view?i=f45_...
(***) Voici un échantillon des noms sur la liste des invités VIP avec les Kelleys à leur domicile et leurs rôles à la fois (Avril 2011) :
En fait tous sont impliqués dans des actions militaires plus ou moins secrètes ou violentes et représentent une belle brochette de conspirateurs, si demain l'armée devait venir à se révolter contre... Obama :
General James Mattis, USMC, Commander, USCENTCOM : surnommé "Mad Dog", le vrai "poète" du groupe : Ma citation préférée personnelle de Mattis est peut-être celle qu'il a donnée lors d'une réunion avec des officiers de l'armée irakienne en 2003 après l'envoi de chars et d'artillerie à domicile : « Je viens en paix, » leur dit-il. "Je n'ai pas apporté d'artillerie Mais je vous supplie, avec des larmes dans mes yeux : Si vous voulez me baiser, je vais tous vous tuer."
Admiral Eric Olson, USN, Commander, USSOCOM (celui qui est fan de Demi Moore)
le Lieutenant General John Allen, USMC, Deputy Commander, USCENTCOM (celui qui a aussi dragué sur le net)
le Lieutenant General David Fridovich, USA, Deputy Commander, USSOCOM est passé depuis au "Jewish Institute for National Security Affairs " et donc ardent supporter d'Israël.
le Major General Joseph Votel, USA, Chief of Staff, USSOCOM, le "patron des tueurs clandestins " selon Wired....
le Major General Michael Jones, USA, Chief of Staff, USCENTCOM, passé depuis au privé dans le Spectrum Group
le Major General Charles Cleveland, USA, Commander, SOCCENT" (ici à droite) a été nommé commandant de l 'U.S. Army Special Operations Command de Fort Bragg, à savoir responsable des tueurs de "tradition" sur cette base qui a tant défrayé la chronique depuis des années.
On peut aussi relire sur les errements de Petraeus :
sur la saga Diveroli, dans la série des "Cargos" :
http://www.agoravox.fr/actualites/i...
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http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
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Dans la série "En Afghanistan les américains redécouvrent la Lune" :
1) http://www.agoraavox.fr/tribune-lib...
2) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
3) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
4) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
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9) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
10) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
Et le tout premier article sur le commerce des armes :
http://mobile.agoravox.fr/tribune-l...
On peut aussi relire cet ensemble d'épisodes sur la revente des armes :
1) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
2) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
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5) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
6) http://www.agoravox.fr/tribune-libr...
(le numéro 8 étant le 7eme en réalité)
Le document accusant Stavridis
http://www.dodig.mil/fo/Foia/PDFs/A...)_Redacted.pdf
sur les vols de "rendition"
http://www.declarepeace.org.uk/capt...
Au départ, cette longue enquête a été l'objet de 15 épisodes, parmi lesquels les ratés notoires du FBI avant et après le 11 septembre, avec les cas de de Lotfi Raissi et de Redouane Dahmani, de Mohamed Harkat ou de Mazen Al-Najjar, et celui de Khaled el-Masri, revenu hier dans l'actualité par un jugement allant à l'encontre de ceux qui l'avaient kidnappé. Humphries commettant lui aussi sa bourde, avec l'affaire de Youssef Megahed, qui se retrouvera non poursuivi alors qu'il était très certainement un terroriste en puissance, mais l'incompétence manifeste d'Humphries et notamment la décision de le kidnapper sera une erreur monumentale. Dans le chapitre 11, je reviens également en détail sur l'affaire Stoffel, une de celles quui aurait pu faire tomber Petraeus depuis longtemps, avec des éléments nouveaux sur sa personnalité.
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