La France doit-elle changer ?
Il y a quelques temps, j’ai participé à un concours de discours politique sur le thème : « La France doit-elle changer ? » J’ai pensé que cela pouvait être une bonne idée de vous faire partager la version condensée de ce discours.
En décembre 1994, Edouard Balladur déclarait à la télévision : « La France va mieux ». Mieux que pendant les sombres heures du socialisme, nul ne peut en douter.
En octobre 1999, Martine Aubry, alors ministre de l’Emploi et de la Solidarité dans le gouvernement de Lionel Jospin, proclamait à la tribune de l’Assemblée nationale : « La France va mieux ».
En août 2000, de nombreux parlementaires socialistes déclaraient dans un communiqué commun : « Aujourd’hui, la France va mieux ».
En juin 2004, Nicolas Sarkozy, alors ministre d’État, ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, déclarait au perchoir de l’Assemblée nationale devant de nombreux parlementaires : « Bonne nouvelle : la France va mieux qu’on ne le pensait ».
Treize ans et huit gouvernements plus tard, une partie de la classe politique française continue de mal répondre à une question trop rarement formulée. La question n’est pas de savoir si la France va mieux ou non mais de savoir si la France va bien.
Car, oui, à toute époque on a pu dire que la France allait mieux. Mais mieux que quoi ? Mieux qu’avant parfois, mieux que l’année d’après souvent !
Mais la France, qu’incarne-t-elle vraiment ? La France, c’est une terre, des régions, un peuple, une culture, une histoire, l’Histoire de la France telle que nous l’aimons. Se poser, aujourd’hui, la question de la nécessité du changement est donc une question cruciale pour l’avenir de notre nation. Si la France doit changer, il faut que les Français en prennent conscience et qu’ils l’acceptent. Car la France sans son peuple n’est rien.
Désormais, le débat est clair, la France et ses Français doivent-ils changer ? Se réformer ? Rompre avec le passé ? Autant de questions à l’apparence similaire mais qui dissimulent bien des différences, à l’image de ce que nous sommes tous. Héritiers d’une même histoire, fiers du même pays, mais pourtant tous si différents.
Aujourd’hui, nous devons tous nous poser cette question :
L’état de la France nous impose-t-il de changer ?
La parole que je porte est plus grande que moi, la foi qui me fait vivre pour mes idées ne m’appartient pas. Permettez que mon identité s’estompe au profit de l’espérance dont j’ai voulu témoigner dans les propos qui vont suivre.
Alors, aujourd’hui, la vérité c’est que la France ne va pas bien, la France souffre.
Elle souffre d’un manque de compétitivité, d’une trop grande rigidité du marché du travail. La France a été trahie par son histoire - lorsqu’il y a maintenant plus de soixante ans le général de Gaulle, ce grand homme d’État, signa le 4 octobre 1945 l’ordonnance créant la Sécurité sociale française - trahie par cette logique d’assistance et de protection qui, développée à outrance comme ce fut le cas, fait qu’il est devenu plus intéressant de cumuler les prestations sociales au chômage que d’aller travailler au SMIC.
Elle souffre de cette démagogie rhétorique qui dissimule les maux de notre pays derrière les mots de notre langue. Elle souffre de ces intellectuels qui ont fait des immigrés clandestins de simples sans-papiers, des « racailles » sans éducation de simples « jeunes » en difficulté, de l’équité républicaine une égalité appauvrissante, des viols collectifs et à répétition des « tournantes » banalisées et qui nous expliquent ensuite que les pires criminels de notre pays ne sont rien d’autre que des victimes du système sociétal français. Le résultat de cela, c’est qu’à force de vouloir justifier l’injustifiable, on a fini par excuser l’inexcusable.
Nul besoin de s’appeler Nicolas Baverez pour constater que la situation aussi bien économique et commerciale que diplomatique et sociale de la France n’est pas à la hauteur du rang qu’elle mérite. Depuis 1990, à aucun moment notre taux de chômage n’a été inférieur à la moyenne des 15 puis des 25 pays de l’Union et la croissance de notre PIB/habitant n’a été que deux fois, en 15 ans, supérieure à la moyenne des pays de l’Union européenne.
Alors, si certains se contentent de ces performances pour dire de notre pays qu’il va mieux, je ne m’en contenterai pas pour dire de la France qu’elle va bien.
Oui, tout n’est pas parfait en France, oui la France ne va pas mieux mais la France ne doit pas pour autant renier son passé. Elle ne doit pas oublier son histoire ni sa culture.
Car si l’Histoire a fait de la France un pays à jamais inscrit dans la postérité des nations et dans le passé de l’Europe, notre culture, à la fois universelle et unique, exceptionnelle et reconnue, contribue encore et toujours à inscrire notre pays dans le futur.
Quel plus bel exemple que notre exception culturelle ! L’exception française, c’est cette indépendance d’esprit que nous avons toujours défendue dans notre histoire et qui est à l’origine du profond respect que nous témoignent les autres peuples du monde. La force de notre culture, c’est d’avoir su participer à ce grand mouvement d’uniformisation culturel mondial tout en défendant la spécificité de nos artistes, de nos chanteurs, de nos écrivains, de nos cinéastes.
La France est riche, riche de son histoire, riche de sa culture, riche de sa diversité. Elle est riche de tous ses Français d’origine multiple qui, chacun à leur façon, ont contribué à écrire le long roman de notre nation.
Mais la France est aussi riche de ses nombreux atouts, ceux-là même qui ne sont jamais suffisamment utilisés à notre profit.
La France est ainsi la championne mondiale du tourisme, la championne européenne de la natalité, la championne occidentale de la productivité horaire du travail. Mais dès lors que l’on s’intéresse à la productivité par salarié, notre pays, fort, ou plutôt faible, de plus de deux millions de chômeurs, voit sa productivité passer sous celle de l’Irlande et sous celle des Etats-Unis. Car le mal de la France, c’est son trop grand nombre de chômeurs et son temps de travail hebdomadaire bridé par des mesures régressistes qu’aucun autre pays n’a d’ailleurs jugé bon de mettre en place à son tour.
Là encore, l’un de nos atouts n’est pas suffisamment exploité et nous fait perdre une bonne partie de ce qu’il aurait pu nous faire gagner.
Partant de ce constat général, sévère mais objectif, la réponse se devine d’elle-même : oui la France doit changer.
Oui, notre pays doit se réformer, doit être transformé.
Bien évidemment, nous ne devons pas attendre patiemment le changement comme un messie improbable. Le changement viendra parce que nous le voudrons, il viendra parce que nous l’aurons choisi.
Il nous faut donc changer notre rapport à l’État.
L’État, ce n’est pas le « plus froid de tous les monstres froids », ce n’est pas cette entité nietzschéenne qui nous « ment froidement » en nous disant « Moi l’État, je suis le peuple ». Les hommes politiques ne cessent de nous le répéter : « L’État c’est vous ET nous ! ».
L’État ne peut pas et baisser les impôts et augmenter les prestations sociales et les services publics. L’État doit être géré aussi sérieusement et rationnellement qu’une entreprise.
L’État français, c’est 63 millions d’actionnaires individuels, 1 200 milliards d’euros de dettes, aucun dividende depuis 30 ans et un taux de croissance qui ne ferait rougir que nous.
Il faut donc arrêter de taxer à outrance ceux qui réussissent, d’entretenir sans rien demander en retour, et d’oublier cette classe moyenne - toujours assez riche pour payer des impôts mais jamais assez pauvre pour en bénéficier.
Plus généralement, la France doit se réformer en profondeur et rompre avec les politiques-rustines. Elle doit repenser ce qui a fait pendant trente ans le succès de notre modèle social. Car aujourd’hui, notre modèle n’est efficace que pour rendre les pauvres toujours plus pauvres, les classes moyennes toujours plus oubliées du système et les riches toujours plus taxés.
Pour que notre génération ne soit pas cette génération sacrifiée dont on parle tant, et ainsi éviter que pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, une nouvelle génération n’hérite d’un monde pire qu’avant, nous devons réagir au plus vite.
L’ultimatum est lancé, nous avons moins de vingt ans pour inverser la tendance écologique, moins de dix ans pour équilibrer nos comptes de retraite avant la banqueroute. Alors aujourd’hui, faisons changer les mentalités et la France changera.
Nous voilà devenus, aujourd’hui, ce que Jules-Paul Tardivel, journaliste canadien de la deuxième moitié du XIXe siècle, appelait de « vrais patriotes ». « Le vrai patriote, disait-il, s’inquiète non du poste qu’il doit occuper dans la patrie, mais du rang que la patrie doit atteindre parmi les nations ».
Cette année, le 22 avril, France SA réunit son Assemblée générale extraordinaire. Alors, vous comme moi, tout petit actionnaire que nous sommes, allons voter.
Allons-nous exprimer ! Et n’ayons pas peur de le dire : « Oui, la France doit changer ».
La France doit changer pour ne pas changer. La France doit changer pour ne pas subir le changement qu’elle ne veut pas.
La France n’a jamais changé à coups de réformes. Les Français sont ainsi faits qu’ils ont besoin de grands mouvements pour accepter le changement. Car au fond de nous-mêmes, nous tenons profondément à nos valeurs, à notre nation, à notre culture, à nos territoires. Nous sommes tous quelque part en nous des conservateurs. Nous conservons tous en nous des marques de l’histoire de notre nation. L’Histoire de France est ponctuée de ses grandes ruptures qui ont transformé notre pays, tout en le faisant demeurer ce qu’il est fondamentalement.
La France s’est construite de ces grands évènements où le courage se mêlait à l’espoir d’un monde meilleur. Il en a fallu du courage au peuple français pour prendre la Bastille et déclencher la Révolution. Il en a fallu du courage pour créer la IIIe République. Il en a fallu du courage au gfnéral de Gaulle pour défendre la France libre.
Si nous n’agissons pas très vite, oui la France changera. Mais nous le regretterons car elle s’appauvrira et elle perdra sa place dans le monde. Et cela, je n’en veux pour rien au monde.
Évidemment, cela ne sera pas facile. Mais je garde toujours en mémoire cette phrase de Mark Twain, qui, bien souvent, m’a donné le courage dont j’avais besoin pour réussir.
« C’est parce qu’ils ne savaient pas que c’était impossible, qu’ils l’ont fait ».
Vive la République !
Vive la France !
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