La France ensemble, de François B.
L’évènement politique du week-end du 12 novembre n’était pas la rencontre Le Pen - Dieudonné si dramatiquement médiatisée, mais la présentation du projet UDF. Premières réactions...
Ce week-end, l’activité politique a été florissante et les tentations de réagir fort nombreuses. Mon choix s’est porté sur la politique de proximité, ayant eu comme voisin le Conseil national de l’UDF et m’étant procuré le document La France ensemble, présenté dans la matinée par Pierre Albertini (paraît-il brillamment).
Pour faire court, dans la globalité, ça va dans le bon sens, me semble-t-il. François Bayrou nous livre une analyse réaliste et pertinente de la situation ainsi qu’un projet cohérent, ce qui représente un réel atout face à la concurrence. L’UMP, pour ne prendre qu’un exemple, nous livre un ensemble hétérogène de non-idées minimalistes parsemées de quelques réformettes de « rupture ». Il faudra d’ailleurs y revenir afin de comprendre l’expression étonnante de François Fillon : « Franchement, on a bossé ! ».
Quant à elle, l’UDF exprime une vision de la France, de l’Etat, de l’Europe, et des propositions axées sur une réforme de la démocratie et un humanisme notoire. Enfin un programme politique qui vit autour de quelques principes de bases, simples et donc compréhensibles. On est d’accord ou on n’est pas d’accord sur le fond, mais c’est déjà un évènement en soi. Reconnu même par Jean-François Kahn, centriste réputé, lundi sur Canal+.
Tout d’abord, Bayrou considère que la démocratie et l’Etat doivent être réformés en profondeur pour libérer les énergies et les talents et propose une VIe république plus transparente, plus juste, plus responsable, plus proche des citoyens et des entreprises (en particulier des petites). Il en appelle à une « révolution civique ». Considérant également que l’exclusion sous toutes ses formes (travail, famille, santé...) est un des maux majeurs dont souffre notre pays, il cherche à lier libération de l’emploi (transfert des charges pesant sur le travail, « Small Business Act ») et solidarité (modernisation du débat social, régionalisation de la santé, service civique de solidarité, fins naturelles des régimes spéciaux). Avant de conclure sur un nouveau traité européen plus politique et démocratique, il insiste sur l’école et l’université (sans parler de régionalisation comme pour la santé, c’est bien dommage) et la recherche (sans évoquer suffisamment la nécessité d’une relation quasi fusionnelle entre recherche, université et tissu économique).
Mais arrêtons là les compliments et entamons la critique, car la critique s’impose. Une critique constructive sur quelques points, sur lesquels la qualité voire la consistance n’était pas au rendez-vous, ou non aboutie. En voilà quelques-uns, d’autres suivront certainement.
L’Europe et l’environnement - regroupés ici car ils sont, ensemble, les deux enjeux capitaux de ce début de millénaire : notre capacité à relever ces défis conditionnera notre avenir à court et à moyen termes. Et je crains que des réponses par trop institutionnelles et théoriques, bien que nécessaires, ne génèrent pas l’influx salutaire ni aux citoyens, ni aux entreprises, ni à nos partenaires. Un « ministre de haut rang » ou un traité, on l’a vu, ne sont pas facteurs d’adhésion ni de transformation de la société. Quels sont les trois projets européens prioritaires que la France doit pousser et imposer ? Quelles sont les modifications profondes de consommation d’énergie qui permettront la maîtrise de notre stratégie énergétique et qui motiveront les citoyens et les entreprises, car ils y trouveront un progrès en termes de qualité de vie ou de création de valeur ? Ne faut-il pas répondre à cela ?
La réforme de l’Etat - Côté réforme des institutions, de la démocratie, le projet de Bayrou respire bon. On avance. Un point déçoit. Quand je lis « une décentralisation clarifiée qui mette fin au morcellement des compétences et simplifie notre organisation administrative », l’espoir naît. Quand je ne vois aucune réforme claire et ambitieuse sur cette organisation, il retombe comme un soufflet. Alors qu’il ne manque que la conclusion : supprimer l’échelon départemental, diviser le nombre de communes par huit ou dix sur base des regroupements existants (et supprimer lesdits regroupements sans légitimité démocratique), et éventuellement rassembler, voire redessiner certaines régions. Tout cela en partant d’un principe simple : chaque collectivité doit être capable de fournir les services qui relèvent de sa compétence. Mais on peut comprendre Bayrou qui, tout réformateur qu’il soit, reste le président d’un parti politique aux élus locaux très nombreux. Sera-t-il celui qui coupera la branche sur laquelle ses supporters sont assis ?
Pour conclure, un mot sur la méthode. En matière d’environnement ou d’organisation, comme ailleurs, l’Etat doit montrer l’exemple, être le premier de la classe. Question de principe. Question de méthode. Quand on annonce « l’extinction » des régimes spéciaux, il serait de bon ton d’annoncer en priorité celui des élus. Quand on veut réformer les autres, il faut commencer par se réformer soi-même. Bayrou esquisse un vrai changement, mais doit encore démontrer l’essentiel, c’est-à-dire construire « La France ensemble » comme s’il était de la société civile.
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