La France inaudible
La France serait-elle entrée dans une société de la peur ? Des signes multiples semblent confirmer que la population française perd progressivement tout ses repères et se réfugient dans la contestation systématique.
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Le contexte français de crise sociale est récurrent. Notre pays semble se tourner en permanence vers lui-même, avec cette faculté à se regarder le nombril et développer une forme de cécité coupable. Pourtant, on peut s'interroger sur cette attitude et se demander si le dialogue sociétal existe véritablement ? Ainsi, la France des familles a manifesté ce weekend contre la modification de la loi sur l'interruption volontaire de grossesse. Ce sont les mêmes qui avaient copieusement conspué le gouvernement sur la mise en place du mariage pour tous. Les commentaires parisiens dénoncent cette France catholique du repli identitaire. En même temps, chacun serait en droit de réclamer des débats nationaux sur des sujets de société si profonds. Et il semble que la contestation ne porte pas tant sur l'objet même de ces progrès sociaux mais bien sur une forme de confiscation de la parole citoyenne. Confiscation qui pose in fine la confiance accordée à la représentation nationale. Il est bon ainsi de rappeler que le gouvernement mis en place par François Hollande est bien le gouvernement de tous les français, y compris de ceux qui contestent les réformes sociales.
Au delà de ces critiques permanentes, il est juste aussi de constater que ce gouvernement a fait preuve d'une forme d'amateurisme stupéfiante. Le "choc fiscal" annoncé a surtout touché les classes moyennes. Les plus riches sont toujours un peu plus riche et les pauvres toujours un peu plus pauvre. Le rêve d'une égalité sociale existant dans les gènes du socialisme demeure un rêve. Au contraire, la fracture semble s'agrandir entre les cercles du pouvoir et la France dite "d'en bas". Ainsi il faudrait rappeler le déjeuner mensuel du cercle le Siècle, réunissant les puissances de l'argent, les grands journalistes, les administrateurs, quelques sénateurs et députés, c'est à dire tout ceux qui se partagent une parcelle de pouvoir. Un temps de partage entre "amis" où les grandes décisions sont prises et où il convient de fixer les orientations et des "éléments de langage" et, si possible, de détourner l'attention des français vers des sujets faciles à comprendre...
Ce qu'il convient d'entendre dans les manifestations de ce weekend, c'est bien une méfiance accrue envers ces cercles de pouvoir. Si l'anti parlementarisme a toujours été une constante française, encore faudrait-il que le dialogue existe entre les citoyens et toutes les formes de pouvoirs politiques. Il est étonnant que dans la manifestation de dimanche dernier à Paris, les manifestants déclaraient que le gouvernement "ne les voient pas, ne les entend pas et ne les compte pas". Et de réclamer des référendums sur des sujets de société aussi profonds et qui risquent, selon les manifestants, de déstabiliser le corps social et les racines profondes de la société française.
Faudrait il rappeler au gouvernement l'agora grecque où chaque citoyen (l'habitant de la cité) avait le droit (et parfois le devoir) d'interpeller directement les édiles ? Il ne peut y avoir de progrès social sans un dialogue permanent, ouvert et décrispé.
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