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Accueil du site > Tribune Libre > La guerre des classes selon François Ruffin

La guerre des classes selon François Ruffin

Le confort de nos concitoyens est-il à ce point important que la lutte des classes ne serait plus qu’une notion jaunie ? François Ruffin, journaliste à Là-bas si j’y suis est allé à la rencontre de ces ouvriers, ces caissières, ces chômeurs qui semblent avoir disparu de la « France qui gagne ». Et le constat est sans appel, la misère du travailleur demeure encore et toujours une constante de notre société.

Pourtant nos personnalités politiques font rarement mention de ces pauvres, de ces exclus, il faut qu’ils meurent en nombre sur nos trottoirs pour que l’on évoque leur présence. L’asphyxie d’une certaine catégorie de la population est la conséquence logique du renforcement des richesses d’une partie d’entre nous. Et que Sarkozy défende les superprofits des entreprises du CAC 40 et ne s’offusque pas de l’augmentation des inégalités sociales n’a en soi rien d’étonnant. Mais que le parti socialiste ne monte pas au créneau pour défendre les opprimés du système confine à la déraison, pour ne pas dire à la stupidité. Auprès des mineurs de Carmaux, Jean Jaurès avait appris à reconnaître l’importance de la lutte des classes, alors que le parti socialiste semble avoir fait chemin inverse en abandonnant tous ses idéaux au contact du libéralisme économique.

Que reste-t-il de la gauche en France ? Les pages que consacre François Ruffin au Parti Socialiste sont sans concession dans la mesure où l’auteur dénonce le dévoiement de ces apparatchiks de Solférino qui ont vendu l’héritage du socialisme et piétiné les racines de leurs électeurs. D’ailleurs les ouvriers ont fui devant ces socialistes qui s’adressent désormais avec bonheur aux classes moyennes. La rupture avec le « dogmatisme marxiste », comme le préconise Vincent Peillon, s’inscrit dans la droite ligne du brouillage des frontières entre la gauche et la droite initié par François Mitterand et pleinement accompli par Tony Blair.

L’ouvrage de François Ruffin est d’utilité publique, car il décrypte l’érosion idéologique et la syphilisation progressive du Parti Socialiste au contact du grand capitalisme si cher à Valls, Peillon et bien sûr Ségolène Royal. Il n’y a qu’à lire les discours de ces personnalités, s’agace Ruffin, pour comprendre qu’en voulant rompre avec la lutte des classes, le Parti Socialiste s’est rapproché dangereusement du sarkozysme. Comment choisir son camp quand il n’y a plus de camp, s’interroge l’auteur ?

Les cartes sont plus que jamais brouillées et le blairisme s’est à ce point insinué dans le parti que les socialistes viennent grossir l’UMP sans même s’en rendre compte. Il faut renouer avec une gauche colérique, demande l’auteur, et désigner l’ennemi à combattre. Car tandis que les copains de Sarkozy se pavanent avec le toutou à plusieurs millions de Jeff Koons et raillent les symboles des classes populaires, toute une partie de la population française crève dans la misère. Dans un chapitre consacré à l’organisation de la haine, François Ruffin désigne les richesses immenses de certains d’entre nous face aux profondes inégalités de notre société et la « nullité des critiques » des socialistes. Il faut dit-il, « guider cette colère », « canaliser la rage », « organiser la haine » et montrer du doigt l’oppresseur.

A l’heure de la crise du capitalisme, de la faillite des banques et des actionnaires, le Parti Socialiste aurait pu organiser la lutte, proposer un projet de société, consolider l’union et les valeurs républicaines, réaliser l’unité des socialistes autour des opprimés, mais au lieu de cela leur silence offre un boulevard à Nicolas Sarkozy pour continuer à culpabiliser les pauvres.

A l’évidence la guerre des classes n’a pas cessé et qu’il est regrettable que l’ancien parti de Jaurès en soit l’un des principaux acteurs !

Laurent Monserrat

  • La guerre des classes est publié aux éditions Fayard

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7 réactions à cet article    


  • R.L. 12 janvier 2009 11:18

    Longtemps retardée, par toutes sortes d’artifices... constituant autant de bombes à retardement, LA krise -prévisible (avec un premier trimeste de CAP de gestion ou de culture de l’honnêt homme) et inéluctable-, la vraie, la totalitaire, la profonde, la ystémique, la sociale et "sociétale", la crise de la "gouvernance" aussi... arrive et va faire des ravages qui surprendront (? !) les très nombreux responsables de la situation et qui joueront les vierges effarouchées, les (eux aussi) victimes désolées...
    L’extrème sophistication, complexité et enchevêtrement des sociétés (technologique et organisation de l’économie capitaliste) et la perte des habitudes et liens sociaux d’autrefois vont transformer la crise en véritable drame mondial.
    A l’heure où "ils" s’y attendaient le moins, la notion de classes va revenir au devant de la scène... avec ses conséquences inéluctables.
    Et les gens comme moi, qui n’ont rien à perdre et sont conscients de la réalité criminelle qui perdure depuis trop longtemps, attendent ce moment...


    • Bois-Guisbert 12 janvier 2009 11:26

      A l’heure de la crise du capitalisme, de la faillite des banques et des actionnaires, le Parti Socialiste aurait pu organiser la lutte, proposer un projet de société, consolider l’union et les valeurs républicaines, réaliser l’unité des socialistes autour des opprimés...

      Vous n’oubliez qu’une chose, mon bon Monsieur, un détail, "un tout petit rien, un incident, une bêtise" : en 2007, JMLP, Bayrou, Royal (sans projet de société) et Sarkozy ont réuni 86 % (quatre-vingt-six pour cent) des suffrages exprimés.

      Votre bla-bla-bla est antédiluvien. Il est l’ultime écho d’un monde à jamais révolu. 

      A quoi servent les projets de société quand ils peuvent être remis en cause tous les cinq ans par le suffrage universel ? Les gens veulent tout tout de suite et s’ils ne l’obtiennent pas, la petite frange de l’électorat qui scelle le résultat final en allant de droite à gauche ou de gauche à droite, châtie impitoyablement le sortant.


      • Fergus fergus 12 janvier 2009 11:40

        Les exclus du système, les démunis, bref tous ceux qui sont en très grande difficulté sociale, ne votent pas. Sans doute faut-il voir là la raison pour laquelle ils sont ignorés des partis politiques, y compris du PS qui, par son silence et son inaction, renie son histoire et ses engagements passés. Il serait grand temps que les hommes et les femmes de gauche élèvent la voix pour remettre ce parti sur des rails qu’il n’aurait jamais dû quitter pour céder aux sirènes du blairisme. 


        • Dominique Larchey-Wendling 12 janvier 2009 17:18

          Ce livre de Ruffin est vraiment boulversant ...


          • gerard56 12 janvier 2009 20:19

            Vous avez bien raison de mettre en valeur ce livre bien documenté et très bien écrit.

            Juste une petite correction sur les ’apparatchiks’ de la rue de Solférino : F. Ruffin ne met pas vraiment tout le monde sur le même plan (il a des indulgences pour Mélenchon qui était encore au PS à ce moment), il réserve ses flêches les plus acérées à V. Peillon qu’il a vu à l’oeuvre sur le terrain, et à ses amis (la mouvance S.Royal). Mais d’autre part, il pointe l’évolution sociologique du PS, qui en gros a vu les cadres supérieurs prendre le pouvoir au dépens des employés et enseignants qui étaient les bases traditionnelles du parti. Voir notamment la citation qu’il fait d’un entretien où une ’militante’ cadre sup chez F. Telecom affiche son mépris et sa morgue pour les adhérents du PS qui n’ont pas son niveau ’intellectuel’.
            Et puis une bonne partie du livre est consacrée à la droite (quand même).

            On peut retrouver F. Ruffin sur le site de son ch’ti journal :
            http://www.fakirpresse.info
            où vous pourrez constater qu’il est un des meilleurs journalistes que ce pays aie connu.


            • Laurent Monserrat 12 janvier 2009 23:39

              Bonjour et merci pour ce complément d’informations concernant le livre de François Ruffin.

              Pour ma part, je trouve que la critique portée à l’encontre du Parti Socialiste me semble nécessaire pour sa reconstruction, c’est pour cette raison que j’ai choisi d’insister sur ce point. Concernant la droite, disons qu’elle abat ses cartes sans surprise et profite de la mollesse ambiante pour accomplir ses desseins. 

              Par ailleurs, je partage votre opinion sur le fait que tous les socialistes ne sont pas à mettre dans le même sac.

              Cordialement,

              Laurent


            • Rétif 18 janvier 2009 20:51

              Mais quelle guerre des classes ?

              Vous vous prenez tous pour des prolétaires ?

              Alors, ça, Non !

              Vous n’avez pas la classe  !

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