La lente agonie des CIO (Centres d’information et d’orientation) ?
Le dernier reportage d’Envoyé Spécial consacré aux CIO (Centres d’information et d’orientation de l’Education nationale) en juin dernier fut, s’il en est, prétexte à une violente charge contre l’action des Copsy (Conseillers d’orientation-psychologues) au sein de l‘institution scolaire.
Désinvolture, approximations, conseil à l’emporte-pièce y étaient mis en exergue, aux côtés de quelques rares traits de créativité et d’empathie pour des élèves bien tolérants et insouciants au demeurant.
Une réaction du SNES donne la mesure de l’émoi qui a saisi la profession alors : http://www.snes.edu/snesactu/spip.php?article2618
Cinq mois plus tard, où en est-on ?
Cette vénérable corporation se voit aujourd’hui attaquée de toutes parts.
Décriée au sein même de son ministère de tutelle, qui lui a pourtant délégué en pure perte une brochette de chargés de mission aussitôt piégés dans la nasse, l’institution CIO continue d’intriguer, d’irriter, voire de susciter la méfiance dans les familles qui se tournent maintenant vers le conseil privé, les coachs, et plus récemment vers le conseil en ligne, dernier avatar d’une question épineuse que nous peinons à régler intelligemment.
Principal reproche adressé aux Copsy : une « prétendue » aversion pour l’entreprise, un manque criant de culture économique, un penchant pour la sélection par la note scolaire.
Les Copsy n’ont-ils pas loupé le dernier fiacre les invitant à venir prendre quartier au sein des Conseils régionaux ?
Il semblerait, que le gouvernement, lassé des atermoiements de ce corps fier et réfractaire, ait pris en grippe la profession jusqu’à l’avoir désormais en ligne de mire. Différents signaux permettent de juger que l’action est à l’œuvre ; départs à la retraite non remplacés, création de poste en nette diminution, fermetures successives de CIO ou mises en congé pour travaux.
Un consensus semble s’opérer autour de l’idée que l’Education nationale ne serait plus à même, dans le contexte actuel, de continuer à porter seule cette mission.
Du coup, certains verraient bien la création d’un service extérieur d’information, sous la forme d’un guichet unique, articulé autour du service public de l’emploi.
Pendant des années et, persuadés de la suprématie de leur formation sur celles de leurs concurrents, quasi inexistants à leurs débuts, les Copsy n’ont peut-être pas su voir que l’orientation faisait sa révolution silencieuse et que de nouvelles approches techniciennes (école orientante québécoise, orientation éducative...) allaient bousculer les certitudes et les repères établis par les théoriciens inventeurs et tenants de la psychologie différentielle -
http://pmev.lagoon.nc/Evolpsydif.htm, - ceux-là mêmes qui les ont formés et façonnés au moule et à la louche artisanale.
Une révolution qui entraînera avec elles des cohortes nouvelles de professionnels plus ou moins aguerris, mais néanmoins conquis et prêts à s’adapter coûte que coûte à l’appétence nouvelle des entreprises et des individus pour le conseil en carrières, le bilan de compétences et l’accompagnement en orientation tout au long de la vie.
Pourtant, si le dispositif d’orientation scolaire fonctionne aussi mal, c’est aussi quelque part le péché originel de l’Etat que d’avoir voulu trier sélectivement les élèves en confondant orientation avec gare de triage et passeport pour voies de garage tout comme sa grande incompétence à employer intelligemment des professionnels au demeurant mieux formés que bien d‘autres.
Alors que l‘on découvre, un peu tardivement, que pour rendre efficace le dispositif d’orientation et assurer la réussite de tous les élèves, il faille dorénavant mobiliser les parents, les CPE - http://cpe.paris.iufm.fr/spip.php?article939 - et former les enseignants, afin qu’ils soient eux aussi en mesure de les informer sur les métiers et les formations existantes, il apparaît que les COPSY n’ont plus vraiment leur place au sein de l ’école et qu’on préférerait en quelque sorte les voir ailleurs.
Au train où vont les choses, les voir disparaître progressivement, un peu comme s‘éteint une espèce inadaptée à son environnement, serait, à en croire les rumeurs, un secret espoir nourri par quelques machiavels de cabinet.
D’aucuns s’agacent de la morgue qui caractérise parfois cette corporation, et l’absence de réaction de certains des plus modernes d‘entre eux et des plus réfractaires à la langue de bois. En effet, il eût été salutaire de proposer quelques actes positifs plutôt que de chercher à savoir s’il est judicieux ou non pour les Copsy de se débarrasser du titre de psy.
Comme si en allégeant le fardeau, on espérait seulement que le baudet puisse courir quelques arpents de plus.
Si nous convenons que chaque jeune a le droit à un accompagnement personnalisé et de qualité dans la construction de son projet scolaire et professionnel, il apparaît clairement aujourd’hui que l’orientation est bien l’affaire de tous et non l’apanage des seuls professionnels de l’orientation.
Si nous convenons également que l’expérience des Copsy est indispensable comme éclairage sur la psychologie de l’enfance et de l‘adolescence, tout comme leur grande connaissance de la machinerie Education nationale, alors il faudra veiller à leur rendre la place qui aurait dû être la leur au départ : celle d’un acteur essentiel parmi d’autres, tout aussi essentiels.
Et faire ainsi en sorte que l’échec ne soit jamais le début d’une histoire d’orientation.
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