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Accueil du site > Tribune Libre > La Libération (61) : des U-Boot jusqu’au fond des terres canadiennes (...)

La Libération (61) : des U-Boot jusqu’au fond des terres canadiennes !

Cet été, et il y a seulement quelques jours, des sauveteurs canadiens partis il y a deux ans à la recherche des corps de trois personnes noyées dans un fleuve ont eu la surprise en réexaminant de plus près ce qu'avait capté leur sonar, de voir apparaître sur l'écran une bien étrange image : à peine sous 18 mètres d'eau ; c'était bien semble-t-il la carcasse d'un sous-marin posé sur le fond de vase qui était apparu ! Au fond du fleuve, cela semblait bien être un U-Boot qui gisait, ou quelque chose de fort ressemblant (*)... une découverte d'autant plus étonnante que ce sous-marin repose au fond du fleuve Churchill, à plus de 100 km des côtes du Labrador ! Depuis cette étonnante trouvaille, les historiens, en attendant la confirmation de la découverte, bruissent de suppositions diverses : que pouvait-donc bien faire ce sous-marin à cet endroit ? Déposer des espions ou se ravitailler en victuailles comme des autochtones avaient pu (parfois) le voir faire ? Qui était-il ? Un des U-Boot manquants dont on avait perdu la trace depuis 70 ans maintenant ? La réponse est peut-être dans un de mes précédents épisodes, à vrai dire... des sous-marins allemands au Canada, ce n'est pas vraiment nouveau à vrai dire : des corvettes canadiennes (telle la Chilliwack) ont certes coulé des U-Boot pourchassant les convois vers l'Europe, le Saint-Laurent a bel et bien été lui même l'objet d'attaques intensives de sous-marins allemands, mais c'est bien la première fois qu'on en retrouve un... enfoncé aussi loin... dans les terres canadiennes (**) !

Des meutes entières d'U-Boot chargées de faire le blocus des côtes américaines pour empêcher les ravitaillements avaient été vues dans le Golfe du Mexique, en train de s'attaquer à des pétroliers remontant d'Amérique du Sud, notamment, mais également au Nord, le long des côtes de l'est des Etats-Unis. On en a trouvé récemment au bord des côtes US : ainsi l' U-550 unType IX classe C/40 découvert au large de Nantucket dans le Massachusetts, et révélé le 23 juillet dernier seulement. Il venait juste de torpiller le pétrolier SS Pan Pennsylvania (en photo au fond le pétrolier en feu et devant l'U-550 venant de faire surface) Attaqué par l'USS Peterson, l'USS Gandy et l'USS Joyce, il avait rapidement sombré (ici la photo de sa dernière remontée). C'était en réalité sa toute première mission, affichant à son score un seul navire marchand : le pétrolier déjà cité ! Pour Garry Kozak de EdgeTech, Wareham dans le Massachussetts, qui vend lui-même des sonars, épaulé par l'équipe d'AWS Expeditions de Joe Mazraani c'était en tout cas une superbe publicité !

L'opération à laquelle participait l'U-550 s'appellait « Pauchenslag » ou"Drumbeat" pour les anglais ("roulement de tambour", dont je vous ai déjà conté les péripéties ici-même, celle de la "bataille du kérosène") qui a eu lieu pendant l'été 1942, et sa partie canadienne a été surnommée la Bataille du Saint-Laurent, endroit où plusieurs U-Boot s'étaient dissimulés en attendant le passage des convois destinés à ravitailler l'Angleterre, notamment. L'un des témoignages de la présence dans le Saint Laurent d'U-Boot allemands est pour cela très significatif : la surprise ayant été de taille, pour un navire canadien, de se voir couler... à la torpille à cet endroit par un autre U-Boot de la série. Ainsi le 15 mai 1942, comme cela avait été relaté dans la Presse locale de Gaspésie avec le témoignage d'un des marins repêchés : "C'est une torpille qui nous a coulés. Aucune erreur possible là-dessus parce que le projectile nous a touchés en plein centre, perforant la coque pour s'enfoncer dans les bouilloires. Mes hommes disparus ont certainement été brûlés par l'eau des chaudières… Dans la nuit du 11 au 12 mai 1942, les résidants de Cloridorme, un village de pêcheurs de la Gaspésie, sont réveillés par une explosion qui secoue les maisons comme un tremblement de terre. En direction du large, des lumières disparaissent. Puis, au matin, des canots de sauvetage dérivent vers le rivage. Après plusieurs heures de recherche, 111 survivants sont rescapés, sept hommes manquent à l'appel. La presse s'empare de l'événement et les esprits s'échauffent. La crainte que personne n'osait exprimer tout haut vient de se matérialiser : les U-boote allemands ont pénétré dans le golfe Saint-Laurent, la menace nazie pèse maintenant sur l'intérieur du pays. On exige du gouvernement qu'il fournisse des explications, on s'insurge contre la censure." Ce sous marin était en fait une vieille connaissance comme on va le voir plus loin : c'était "l'U-553, commandé par le kapitänleutnant Karl Thurmann, s'était embusqué dans le golfe et il a profité du couvert de la nuit pour torpiller deux cargos hollandais, le Nicoya et le Leto. Cette première agression dans les eaux du Saint-Laurent sera suivie de plusieurs autres. La topographie des rives offre aux U-boote de nombreux endroits pour se cacher et la stratification des eaux en couches de diverses températures rend l'ASDIC (sonar) inefficace. De mai à novembre 1942, 18 navires sont coulés dans le fleuve et le golfe du Saint-Laurent, incluant deux navires de la Marine royale du Canada (MRC), note le très bon site JunoBeach . 

D'autres sous-marins ratisseront les fonds du Saint-Laurent en se positionnant eux aussi en embuscade : l'U-132 du capitaine Ernst Vogelsang qui s'attaquera aux navires en partance pour Sydney, ceux faisant partie du convoi QS-15, tels le cargo grec Anastassios Pateras, le belge Hainaut ou l'anglais Dinaric, ou l'U-754 qui aura moins de chance et sera lui repéré à la sortie du Saint Laurent par un avion Hudson piloté par le Squadron Leader Norville E. Small, du 113e Escadron de Yarmouth, dont il était d'ailleurs le commandant. L'attaque à la charge de fond sera réussie, l'U-754 étant le premier sous-marin coulé par la RCAF (en photo à droite un Hudson s'équipant de charges de profondeur). Deux autres U-Boot, l'U-517 du capitaine Paul Hartwig et l'U-165 (en photo à gauche) du capitaine Eberhard Hoffman s'occupant eux du secteur de Goose Bay, où est situé la base américaine d'où partaient les convois vers le Groënland : "le 27 août 1942, deux convois, le SG-6 (Sydney-Groenland) et le LN-6 (Québec-Goose Bay), entrent dans le détroit de Belle Isle. Le U-517 torpille et coule le transport de troupes américain Chatham qui transportait 562 passagers.  Treize hommes perdent la vie malgré les efforts des gardes-côtes américains et de la corvette NCSM Trail sous les ordres du lieutenant G.S. Hall. Le lendemain, le navire marchand Laramie est torpillé et endommagé par le U-165 tandis que le U-517 coule le bâtiment américain Arlyn avec neuf marins". Ces deux navires faisaient partie du convoi SG-6. précise Wikipedia. L'U-165 faisant littéralement des ravages : "le navire marchand grec Aeas du convoi QS-33 fut coulé le 6 septembre par le U-165.  Deux personnes périrent au cours de cette attaque. Dans la nuit qui suivit, le yacht armé NCSM Racoon qui était parti à la poursuite du sous-marin fut atteint et coula avec les trente-sept marins à son bord".

Le Raccoon ayant la particularité d'être un yacht réquisitionné (photo ci-contre à droite) transformé en transporteur de troupes ou de passagers. Le sort du Raccoon reste encore une énigme : selon certains historiens canadiens, il aurait surtout été victime de sa lenteur manifeste : "Durant cette nuit, l’U-165 attaque le convoi QS-33 escorté par le yacht armé HMCS Raccoon. Quelque temps plus tard, le navire part à la recherche du sous-marin et disparaîtaprès un bruit de forte explosion. Les autres membres du convoi supposent alors que le sous-marin a coulé le yacht. Cependant, il est possible que l’explosion du Raccoon ait été causée par ses propres grenades sous-marines. Pas très rapide, il n’aurait pas eu le temps nécessaire pour se dégager du lieu d’explosion"."Le lendemain, le U-517 attaqua le reste du convoi. Les bâtiments grecs Mount Pindus et Mount Taygetus sombrèrent avec deux pertes de vie pour le premier et cinq pour le second. L'Oaktor, un navire marchand canadien coula ensuite avec trois de ses marins". Pour s'échapper de la poursuite engagée par ses poursuivants canadiens, après son dernier forfait, l'U-517 inaugura l'emploi du "Pillenwerfer" (ou "Bold"), un nouveau gadget de leur arsenal défensiif ; en fait une mini torpille, pas plus grande qu'une boîte de conserve, rempie d'hydrate de calcium, qui avait été conçue pour fabriquer derrière elle une longue traînée de bulles d'hydrogène, imitant un sous-marin complet avançant à 30 mètres de profondeur. En photo ; ici à droite, l'expluseur de la "Pillenfiller" sur la paroi interne du sous-marin.

Des sous-marins tapis au fond des fleuves, c'est plutôt rare. Car naviguer dans très peu d'eau représente un danger évident pour un sous-marin, qui perd ainsi ses facultés fondamentales d'évasion par le fond : dès qu'il est découvert dans cette position difficile, impossible pour lui de s'échapper. Il lui faut donc présenter de bonnes raisons pour le voir s'aventurer ainsi dans aussi peu d'eau. L'une de ces évidentes excuses étant le dépôt d'espions à l'intérieur des terres adverses, dans la Baie des Chaleurs notamment, ou dans la baie de Fundy ; comme en ce 14 mai 1942, où avait été déposé le le lieutenant M.A. Langbein, espion de l'Abwehr. Ou cet autre : "le 9 novembre 1942, l'U-518 débarque un homme à New Carlisle ; l'espion dénommé Alfred Waldmar von Janowski se fait trop facilement remarquer et il est rapidement intercepté par un policier." Auparavant, l'U-518 avait lancé ses torpilles contre le ponton de Scotia Pier dans les îles Bell Island et coulé le le sister ship de l'U-518, l'U-513 sous les ordres de Friedrich Wissmann, entrant dans la baie de Conception, toujours dans les îles Bell. Audacieusement, il réussit à y couler le Flyingdale et ensuite le Rose Castle, qui avait échappé en septembre qui précédait à une attaque du même U-Boot contre ses deux confrères les cargos Saganaga et Lord Strathcona (en octobre le Rose Castle, jusqu'ici plutôt chanceux, avait également échappé à l'U-69, lors de l'attaque de l'USS Caribou). Les vestiges de la torpille qui avait atteint le Rose Castle (ici à droite en photo)  ne seront retrouvés qu'en juillet 2000 par des plongeurs canadiens. L'attaque surprise du Rose Castle (***) puis dans la foulée du cargo français PLM 27 en rade de Lance-Cove (Terre Neuve), dont le commandant ce soir-là n'était pas à bord, avait laissé entendre qu'un espion aurait pu renseigner les U-Boot : le commandant du PLM 27 (un cargo charbonnier de la S.N.A., de 5733 GRT) fut même un temps soupçonné avant qu'on ne découvre la présence de Janowski dans les environs. Ce dernier sera trahi par son équipement pas mis à jour par l'Abwehr : il portait sur lui des allumettes et de la monnaie belge périmées. Plus tard, dans certains oivrages, il sera présenté comme étant devenu un agent-double retourné par les alliés. A bord du PLM 27, à noter la présence de Mathurin Le Névé, originaire de Saint Gildas De Rhuys, fusillier-marin blessé en 1915 au front par des gaz, il figure sur la liste des marins des Forces Navales Françaises Libres (FNFL).

Des espions discrètement déposés... ou des prisonniers que l'on vient chercher : deux étonnantes tentatives d'évasion par sous-marin ont eu lieu en effet sur les côtes canadiennes : Le 6 mai 1943, avec l'U-262 remonté jusque North Point sur l'Île-du-Prince-Édouard pour aller chercher des prisonniers allemands, et le 28 septembre de la même année, avec une deuxième tentative ratée d'évasion de prisonniers, par l'U-536 approché de la Pointe de Maisonnette (située au Nouveau-Brunswick) lors de l'l'Opération Kiebitz ; qui visait surtout à récupérer en priorité un marin d'exception déporté d'Angleterre au Canada : Otto Kretschmer, dit « Otto le silencieux », le commandant de l'U-23 puis de l'U-99 (ici à gauche en photo), qui avait à son score quarante-sept navires coulés avant d'être capturé. Parmi eux, trois gros cargos armés anglais : le Laurentic (18 724 tonnes), le Patroclus(11 314 tonnes)t le Forfar (16 402 tonnes) les trois torpillés en novembre1940. Attaqué le 17 Mars 1941 par le destroyer HMS Walker, il avait réussi à faire remonter son U-Boot gravement endommagé par les charges du destroyer, et avait ainsi permis de sauver ainsi 40 de ses 43 hommes d'équipage, dont il était fort apprécié par ailleurs. L'histoire de l'évasion ratée de Krestchmer est tout simplement abracadabrantesque : prisonnier, il avait réussi à converser avec son amiral (Donïtz) via une radio bricolée sur place, dans le camp :

"Au moyen de lettres envoyées à l'épouse de Knebel-Döberitz, secrétaire de l'Amiral Dönitz, il fait part de son projet d'évasion. Grâce au code "Stern" l'échange de messages secrets peut se faire aisément. Il y a également un poste émetteur fabriqué par les prisonniers et qui fonctionne en ondes courtes. Dönitz donne son accord à ce projet. L'U-536 (K.L. Rolf Schuaenburg) sera en surface pendant deux heures, chaque nuit, pendant deux semaines, à partir du 23 Septembre 1943. Du côté du camp, les travaux vont bon train. Un tunnel est creusé. Pour tromper les gardes, deux autres tunnels sont également commencés. La terre enlevée est cachée dans le plafond des baraques. Pendant ce temps, des faux papiers et des vêtements civils sont confectionnés". Voilà qui n'est pas loin d'égaler le scénario de la célèbre "Grande évasion" ( réalisé à partir de l'histoire vraie du Stalag Luft III en Pologne) ! "Après quatre mois de travaux deux des trois tunnels sont délaissés pour permettre l'achèvement du troisième. Plus de cent cinquante hommes y travaillent jour et nuit. Quelques jours avant la date d'évasion, un des plafonds s'effondre. Le bruit alerte les gardiens, surpris de voir toute cette terre !!! Les deux tunnels non terminés sont découverts.  Otto Krestschmer décide de passer à l'action. Malheureusement, le troisième tunnel, qui mesure maintenant quatre vingt dix sept mètres, est découvert, après que le sol se soit effondré par la faute d'un prisonnier occupé à creuser la terre afin de remplir une de ses boîtes à fleurs !!!. Les quatre officiers sont arrêtés et mis sous haute surveillance. Il faut dire que la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) est au courant de ce plan depuis fort longtemps. En effet le service secret militaire prévient la GRC à chaque message qui est envoyé ou reçu au Camp 30. Des microphones ont été placés pour suivre les travaux de creusage des tunnels". Otto Krestschmer restera plus de 6 ans emprisonné au Camp 30, appellé aussi Camp Bowmanville, avant d'être libéré en décembre 1947... et de continuer sa carrière militaire qui le ménera en 1965 à la tête des forces amphibies de l'Otan ! Il avait été félicité par Hitler en personne pour ses scores de torpillage... comme l'atteste un cliché.

Alors qui est donc ce nouvel intrus des fleuves canadiens découvert cet été ? Ce ne peut-être l'U-190, le dernier a avoir visité les côtes canadiennes car il s'est rendu le 11 mai 1945 aux autorités canadiennes (****) (photo ci-dessus) : reste la dernière possibilité, qui nous fait revenir à un de mes épisodes précédents (du 24 juin 2011) car c'était bien un U-Boot, l'U-537, qui avait déposé en octobre 1943 une station météorologique automatique sur la côte Nord-Est du Canada, au départ de... Lorient. "L'histoire du U-537 commence le 19 Septembre 1943 lorsqu'il quitta Kiel. La traversée de l'Atlantique se déroule bien jusqu'à ce que l'U-537 soit pris dans une tempête qui arracha le canon anti-aérien et laissa plusieurs fuites dans la coque. On avait confié au commandant de l'U-Boot, le Kapitänleutnant Peter Schrewe, une mission secrète lors de son départ, nom de code "Kurt". Elle consistait a installer une station météo, mais pas n'importe où ; Au Canada, au Labrador, dans la baie de Martin. Il s'agissait d'un endroit isolé pour minimiser au maximum le risque que la station soit découverte par les inuits qui habitent la région ou lorsque l'U-Boot fera surface durant l'installation. C'est durant la nuit du 22 Octobre 1943 que l'U-537 fait surface. Le commandant a attendu que le brouillard se lève avant de donner l'ordre de décharger le matériel.  La station consistait en un système de télémétrie pour mesurer les données, un transmetteur de 150 watts de type Lorenz 150 FK, une antenne de 10 mètres, un anémomètre et une girouette. Des batteries au nickel-cadmium lui fournissaitt une autonomie de 10 mois (voir photo à droite). Le lieu choisi était une colline de 300 mètres située près du rivage. La station transmettra des données durant 2 minutes à chaque intervalle de 3 heures. Pour camoufler le site les hommes de Peter Schrewe laissèrent sur place des paquets de cigarettes américaines pour faire croire à d'éventuels "visiteurs" d'une station météo canadienne. L'U-537 ne resta que 28 heures sur le territoire canadien, le temps d'installer la station et de réparer l'U-Boot. La station ne fut officiellement découverte qu'en 1981 par un historien de la défense nationale du Canada. Quelqu'un était déjà passé par là, parce que les bidons qui contenaient les batteries avait été ouverts et des morceaux de la station gisaient un peu partout sur le site. Aujourd'hui la station "Kurt" est exposé au musée de la guerre d'Ottawa". Les surprenants détails de cette expédition météo ne seront pas connus avant les années 80 : ce que je vous ai raconté déjà ici-même. Quant à l'U-537, ce ne peut être lui non plus notre submersible enfoui dans la vase du Saint-Laurent : le 1er octobre 1944, la 33 eme flottille d'U-Boot à laquelle il appartenait a été déplacée à Jakarta en Indonésie. L'U-537 étant lui-même coulé le 9 novembre 1944 dans la Mer de Java, à l'est de Surabaya, par un autre sous-marin américain, l'USS Flounder. Les nazis avaient-ils utilisé d'autres U-Boot pour aller déposer leurs stations météos ? Notre visiteur de l'été était-il un de ces livreurs de stations météo ?

 Reste une possibilité encore qui n'est pas non plus à laisser de côté : l'U-Boot sabordé peut très bien aussi l'avoir été sciemment par son équipage, qui aurait rejoint discrètement la terre ferme avant de le faire couler... pour eux-mêmes accoster et se fondre dans le paysage une fois la capitulation annoncée à la radio par l'amiral Donïtz : les marins allemands ayant alors tous pris ensuite l'apparence de citoyens canadiens lambda... ou même un peu plus tard américains, menant depuis une vie plutôt secrète, sous des noms d'emprunt, pendant des dizaines d'années... voilà qui n'est pas sans rappeler une méthode largement utlisée par certains dignitaires nazis en Argentine notamment (*****)... et voilà aussi qui n'est guère non plus pour rassurer : les nazis s'étaient peut-être bien trouvé d'autres points de chute que l'Amérique du Sud lors de leur fuite à la fin de la guerre... et le Canada aurait très bien pu représenter une belle terre d'accueil, à lire les événements récents comme l'histoire de ce paisible fabricant de miel de la banlieue d'Ormstown au Québec, qui s'avère être en fait Vladimir Katriuk, un criminel nazi toujours recherché : "depuis 1995, le centre Simon Wiesenthal a identifié au moins 16 criminels de guerre nazis qui ont immigré au Canada après la guerre. Neuf d'entre eux sont morts au cours du processus pour révoquer leur citoyenneté. Ladislaus Csizsik-Csatary, retrouvé en Hongrie par des journalistes britanniques, est l'un des deux Canadiens à avoir quitté le pays de son propre gré. Vladimir Katriuk, 91 ans, et Helmut Oberlander, 88 ans, qui figurent sur la plus récente liste publiée par le centre Simon Wiesenthal, vivent toujours ici. En 17 ans, aucun homme soupçonné d'être un criminel de guerre nazi n'a été déchu de sa citoyenneté canadienne et renvoyé vers l'Europe" pouvait-on lire le 18 juillet dernier dans la presse du pays ! Le Canada, jugé aujourd'hui comme étant l'un des pires candidats à la chasse aux criminels nazis... Avec comme exemple, celui de l'un des criminels de guerre parmi les plus recherchés, Laszlo Csatary, qui a été retrouvé à Budapest cet été (le 15 juillet dernier), mais qui s'était longtemps caché au Canada et avait réussi à s'en enfuir après avoir pourtant été reconnu sur place : "condamné à mort par contumace en 1948 en Tchécoslovaquie, il s'était réfugié au Canada, à Montréal et Toronto, où il était marchand d'art sous une fausse identité. Démasqué en 1995, il aurait alors reconnu devant des enquêteurs canadiens qu'il avait participé à la déportation de juifs, tout en minimisant son rôle. Il se serait ensuite enfui en Hongrie selon Efraïm Zuroff, du Centre Simon-Wiesenthal". En attendant, le mystère du sous-marin du fleuve Chrurchill reste une énigme, dont on découvrira peut-être bientôt la clé.

(*) à vrai dire, pas tout à fait : en juillet 2004, les vestiges de l'U-215 de la 9ème Flottille (ici à droite en photo), aux mains du capitaine Fritz Hoeckner avaient été découverts à 200 kilomètres au sud de Shelburne, dans la presqu'île de Nova Scotia, à 90 mètres de profondeur. Le sous-marin poseur de mines venait de torpiller l'USS Alexander Macomb quand des navires canadiens l'avaient attaqué et coulé à grands coups de charges de profondeur. L'U-215 était une "espèce rare" : il est l'un des six modèles VIID (une version allongée de la classe C) seulement construits.

(**) Difficile en effet d'imaginer qu'un submersible russe de la guerre froide, tel ceux de la classe Zulu ou Whiskey, dont certains ressemblaient encore à des U-Boot (leur taille étant assez voisine), ait pu s'égarer à cet endroit.

(***) les diverses attaques menées dans le Saint-Laurent :

1) SS Nicoya, 11 mai 1942. 2) SS Leto, 12 mai. 3) SS Dinaric, 6 juillet. 4) SS Hainaut, 6 juillet. 5) SS Anastasios, 6 juillet. 6) Frederika Lensen, juillet. 11) SS Aeas, 6 septembre. 12) HMCS Raccoon, 7 septembre. 13) SS Mount Pindus, 7 septembre. 14) SS Mount Taygetus, 7 septembre. 15) SS Oakton, 7 septembre. 16) HMCS Charlottetown, 11 septembre. 17) SS Saturnus, 15 septembre. 18) SS Inger Elizabeth, 15 septembre. 19) SS Joannis, 16 septembre. 20) SS Essex Lance, 16 septembre. 21) SS Carolus, 9 octobre. 24) HMCS Magog, 14 octobre 1944. 25) SS Fort Thompson, 2 novembre.

(****) les U-190 et U-889 (en photo ici à gauche lors de sa reddition et là sonschnorkel rétractable) de type IXC/40 s'étaient rendus respectivement le 12 et le 13 mai 1945. Ces sous-marins de type IXC/40 ont été ensuite mis en service, après guerre, dans la marine canadienne, et ont été utilisés pour les essais d'évaluation. Au début de 1946, l'U-889 a été remis à la Marine des États-Unis pour des tests supplémentaires, et un an plus tard, il a été coulé lors de tests de lancement de torpilles au large de la côte de la Nouvelle-Angleterre. L'U-190 est resté un peu plus longtemps en service, et il a été rayé des stocks en Juillet 1947. En avril 1945, l'U-190 avait coulé le dragueur de mines Esquimalt de classe Bangor au large d'Halifax, et en Octobre 1947, il a été coulé par l'aviation navale à proximité, justement, de la position où l'Esquimalt avait été torpillé...

(*****) voir à ce sujet les épisodes suivants :
N°50 : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-50-les-etranges-95378
N°51 : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-51-la-visite-guidee-des-95383
N°52 : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-52-le-nid-douillet-95411
N°53 : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-53-les-reves-nucleaires-95417
N°54 : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-54-le-role-trouble-d-95528
N°55 : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-55-carlos-menem-l-95700
N°56 : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/la-liberation-56-les-ailes-de-98370
 
 
 

-Sur l'U-165 et les Hudson canadiens :

http://www.journal.forces.gc.ca/vo5/no1/mh-hm-fra.asp

-Sur les sous-marins nazis dans le Saint-Laurent :

http://www.lapresse.ca/le-soleil/opinions/points-de-vue/201205/02/01-4521232-il-y-a-70-ans-les-u-boats-remontaient-le-saint-laurent.php

http://www.junobeach.org/f/2/can-eve-mob-gol-f.htm

http://www.republiquelibre.org/cousture/ALLEMAND.HTM

 

PS : à noter la référence de l'ouvrage pour l'épisode précédent sur Tarente :

"La bataille de Tarente", un épisode gros de conséquences" de Don Newton et A. Cecil Hampshire - Presses de la Cité 1964.


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7 réactions à cet article    


  • LE CHAT LE CHAT 7 août 2012 12:55

    en cherchant bien , y’a ptet encore quelques vieux orignals néonazis , tabernacle !  smiley


    • mortelune mortelune 7 août 2012 14:34

      Une bien belle histoire de sous marins. Cependant je n’arrive pas à oublier toutes les victimes de cette saleté de guerre. 


      • mortelune mortelune 8 août 2012 09:35

        A ce jour je suis ’moinsée’ cinq fois. J’en déduit qu’il y a au moins cinq fêlés qui ont lu mon commentaire. Inquiétant !


      • lebreton 7 août 2012 17:22

        @morice 


        merci , excellent travail ,sans surprise, venant de vous !

        • obi53 obi53 7 août 2012 19:25

          sensationnel , je serais tenté de dire comme d’habitude ! bravo  :)))))))))))))))) bien content de vous lire :)))))
          y aurait il un moyen d’avoir l’intégralité de vos post sur un support informatique ? si oui je paie les frais et le port sans problème

          très très intéressant , Merci


          • morice morice 10 août 2012 17:31

            si j’ai le temps un jour, je proposerai les textes en PDF ici-même... gratuits, bien entendu : on ne change pas un système gagnant.


          • Bilou32 Bibi32 8 août 2012 08:31

            Article passionnant, très bien documenté comme d’habitude. Merci.

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