La liberté d’expression confisquée
Ou les grandes manœuvres autour des médias numériques.

Quelques faits.
Des opinions ne convergent pas avec les propos et les intérêts des « Big Pharma », de l’OMS et des autorités de santé publique. Ces opinions dissidentes sont diffusées principalement via les réseaux sociaux. Pour certaines, elles relèvent en partie du complotisme. D’autres sont solidement étayées et promues par des personnes ayant l’autorité que leur confère leur savoir et leur expérience. Les réseaux sociaux suppriment des contenus qui contreviennent à la doxa officielle.
Le Président des États-Unis d’Amérique en exercice voit des médias sociaux le censurer en l’interdisant de publier et en rendant inaccessibles toutes ses publications antérieures. Certains de ses partisans subissent un sort similaire. Tous ceux qui préfèrent le débat, fût-il musclé, à la proclamation univoque de la doxa bien-pensante cherchent une agora alternative.
Une des alternatives existantes fait l’objet d’attaques, c’est le réseau social « Parler ». Il semblerait que la censure du Président Trump ait déclenché une ruée vers lui, ce qui a l’heur de déplaire aux GAFAM : Il est reproché à Parler une modération insuffisante. Il est donc dorénavant impossible de télécharger Parler à partir de l’Applestore ou de Googleplay. Parler, qui utilise les services d’hébergement d’Amazon AWS, voit couper les accès du public par décision unilatérale de son prestataire.
Les plateformes comme Facebook, Twitter et YouTube sont considérées aux yeux de la loi américaine comme des hébergeurs. Ceci les exonère d’une responsabilité éditoriale sur les contenus qu’ils hébergent et diffusent.
Les réactions des GAFAM + Twitter semblent coordonnées. Lors de l’audition musclée de Sundar Pichai (Google donc YouTube), Jack Dorsey (Twitter) et Mark Zuckerberg (Facebook) devant une commission du commerce du Sénat le 28 octobre dernier portant sur la préservation du statut d’hébergeur, cette « entente » a été évoquée par certains sénateurs.
Quelques réactions et interrogations en vrac.
Un détenteur ou un aspirant au pouvoir régalien dans n’importe quel pays du globe pourrait s’interroger sur la suzeraineté d’une oligarchie qui impose de façon unilatérale une forme de pensée unique progressiste et libérale-libertaire. Les pouvoirs politiques feront-il allégeance à ces empereurs des médias sociaux, ou exigeront ils leur sujétion ? Éternel dialogue « Qui t’a fait comte ? » ; « Qui t’a fait roi ? ».
Les récents évènements ne laissent guère de doute, il est très compliqué de censurer un Président en exercice et en même temps de prétendre rester un simple hébergeur neutre face aux contenus et soumis à la seule obligation de modération a posteriori : ils deviennent des éditeurs. En toute logique, ils devraient devenir solidaires et coresponsables de tous ceux qui publient des informations diffamatoires ou tombant sous le coup de la loi. S’ils décident de mettre en œuvre une modération a priori, même algorithmique, ils y perdront la fluidité qui faisait une partie de leur succès. Si elle est exercée a posteriori, elle ouvrira en cas d’inefficacité une responsabilité fiduciaire qui pourrait être importante et perturber leur modèle d’affaire. Il y a plus de dollars à gagner à ester en justice contre une grande entreprise solvable que contre un avatar anonyme dont rien ne garantit qu’ils soit localisé dans un pays où le droit américain s’applique.
L’entreprise qui doit héberger des données pourrait s’interdire de solliciter ou s’empresser de quitter un simple prestataire technique assez déloyal pour violer son contrat parce que tel est son bon plaisir. Quel crédit lui accorder pour héberger des données éventuellement vitales et sans doute en partie confidentielles ? Resterait-elle avec une banque qui lui refuserait le droit d’user de son argent au moment où elle le souhaite ? Continuerait-elle d’user des services d’un avocat qui se livrerait à une sorte de chantage envers elle ?
Le libéralisme ambiant semble oublier que les situations de monopole sont intrinsèquement nocives. Il conviendrait de constater qu’une entente même informelle entre des entreprises non-concurrentes peut produire les mêmes abus qu’un monopole.
Le quatrième pouvoir est-il devenu tyrannique ? Il aurait pu rester un contre-pouvoir, mais il se sent pousser des ailes. En tentant d’étouffer le débat et en le limitant à de simples ersatz, les médias bafouent le bien commun et blessent la démocratie. « La liberté de la presse ne s’use que si l’on ne s’en sert pas » écrit le palmipède chaque mercredi. Quelle différence (à de rares exceptions près) entre les grands médias sociaux ou non d’aujourd’hui et l’Agit-Prop ou la Propaganda Staffel de sinistre mémoire ? Sans doute pas plus que des méthodes plus douces et plus hypocrites.
Tout se résume finalement en une simple interrogation : Quelle est la légitimité des GAFAM+Twitter pour arbitrer le débat public ? Je pense aucune.
Plus que jamais les agoras alternatives sont indispensables. Plus que jamais, il est nécessaire de continuer de porter au quotidien des opinions dissidentes dans les médias « officiels », qu’ils soient sociaux ou non, pour ne laisser aucun « ministère de la vérité » prendre assez de pouvoir.
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