La maîtrise israélienne de l’eau régionale
La première Intifada a été un mouvement de révolte devant la situation de l'époque, notamment sur la question de l’approvisionnement et la répartition de l'eau. Un pillage dont voici les grandes lignes. De cette époque. Le problème actuel est peut-être différent, (il y a des piscines en Cisjordanie occupée, un mauvais contre-argument brandi par les pro-sionistes. Serait-ce trop ) mais certains aspects subsistent dont on ne parle que rarement, un point sensible qui ne fait pas la Une des médias.
A/ L'accaparement
a/ Dès les années 1890 les Sionistes tentèrent de faire figurer le Jourdain et le Litani sur les cartes de la Palestine et le Nil et l'Euphrate sur celles du Grand Israël. Les frontières proposées par les Sionistes après la Première Guerre mondiale partaient de la Méditerranée jusqu'à l'Est, vers le Golfe d'Aqaba en y incluant toutes les sources qui se jettent dans le Jourdain les affluents du Yarmouk.A la fin des 19e siècles et dans la première moitié du vingtième, tant dans la Palestine ottomane que sous le mandat britannique, l’administration autorisait tout propriétaire terrien à exploiter librement le sous-sol. Les premiers immigrants juifs ont donc développé des techniques de forage,qui existaient à leur arrivée, très rudimentaires, afin d'utiliser au mieux une ressource précieuse et indispensable à leur prospérité.
b/ En 1953, Israël annonce son intention de puiser dans les eaux du Jourdain pour irriguer le Néguev, ce qui déclenche un tollé parmi les pays riverains. A tel point qu' Eisenhower envoya un expert chargé d’élaborer un plan équitable de partage et en propose le financement. Mais les Israéliens refusent ce plan.
c/ L'une des premières dispositions prises par Israël, après la guerre de juin 1967, est d'appliquer aux Territoires occupés la loi israélienne de nationalisation sur l'eau datant de 1959, qui empêche les Palestiniens de disposer librement de leurs ressources hydrauliques. Un système de quotas fonctionne depuis 1975 dans les Territoires occupés. Immédiatement après la guerre des Six-jours, la Mekorot commença la construction d'un vaste réseau d'adduction destiné aux futurs colons. Un régime spécial est mis en place pour les “colonies planifiées” (sic) : elles ont droit à une allocation d'eau en tant qu'utilisateurs collectifs, en y excluant les utilisateurs palestiniens. Les Israéliens bénéficient de l'eau courante toute l'année, les Palestiniens sont victimes de coupures arbitraires durant l'été, destinées à réaliser des économies d'eau au profit des colonies.
Sous des prétextes sécuritaires, ce système se renforce de l'injuste “loi des absents” et de la proclamation de “zones ou régions spéciales”. Conformément à l'ordonnance militaire sur la “propriété abandonnée” (ordre n° 58 de 1967), Israël prend possession de ces terres, expropriant de cette façon un nombre inconnu de puits qui étaient utilisés par les Palestiniens, ayant subi l'exode de 1948, et depuis considérés comme “absents”.
d/ En 1982 Sharon ordonna que l’eau de la Cisjordanie passe sous le contrôle de la Compagnie israélienne des Eaux, depuis, 92 % de l’eau est consommée par les colonies juives de peuplement. Pour les Palestiniens ce projet constituait un vol pur et simple, ce fut-là l’un des facteurs déclenchant de l’Intifada parmi d’autres. [1]
B/ Le droit international
L'administration israélienne contrôle la Mekorot et Tahal dont les objectifs communs sont le soutien exclusif des intérêts israéliens et placent les Territoires palestiniens dans une situation de dépendance. La pénurie actuelle est aussi le fait des négligences volontaires d'Israël dans le secteur hydraulique des Territoires occupés. Les agissements discriminatoires d'Israël constituent des violations des règles et des lois internationales.
a/ Ils bafouent la Convention de la Haye de 1907 selon laquelle la puissance occupante doit respecter les lois en vigueur avant l'occupation et qui établit que la propriété privée doit être respectée et ne saurait faire l'objet de confiscations.
b/ Israël bafoue la quatrième Convention de Genève, au sens de l'article 55, qui oblige toute puissance occupante à assurer la satisfaction des besoins de la population occupée et lui interdit toute réquisition.
c/ Les Règles d'Helsinki de 1966 définissent le principe d'utilisation équitable des ressources communes. Les ressources de l'aquifère montagneux de Cisjordanie et du bassin du Jourdain sont, selon ces règles, considérées comme des “eaux internationales” : l'utilisation de ces ressources doit donc être partagée entre Israéliens et Palestiniens. Israël estime jouir de droits historiques (et bibliques) légitimes sur l'aquifère.
L'utilisation des eaux palestiniennes et la non-satisfaction des besoins élémentaires des populations concernées sont des violations du droit international, car les besoins de la population palestinienne ne sont assurés qu'une fois les soins des colons juifs et de la population israélienne pris en compte.
C/ Négociations
L'échec du sommet de Camp David a mis un premier coup d'arrêt à l'application de toutes les résolutions précédentes dont certaines avaient été menées à bien et d'autres pas. Ainsi, le Comité sur l'eau avait été mis sur pied, mais le volume d'eau alloué aux Palestiniens en juin 2000, n'atteignait seulement la moitié de celui qui avait été prévu en 1995. Aucun document officiel n'indique l'état réel des négociations sur le partage de l'eau à Camp David II, comme qu'aux discussions de Taba en janvier 2001. B'Tselem (2) n'hésitait pas à écrire : « La politique hydraulique israélienne est directement responsable de la grave pénurie d'eau qui frappe les territoires palestiniens et s'emploie à démasquer la stratégie hydraulique israélienne conçue pour assurer l'approvisionnement prioritaire des colonies de peuplement et du réseau israélien, politique responsable de la pénurie d'eau dans les territoires occupés. Ce n'est qu'une fois » ses priorités assurées que les besoins des Palestiniens commencent à être pris en compte, à condition qu'ils n'entrent pas en conflit avec les intérêts d'Israël. Le rapport de la plus grande organisation israélienne de défense des droits de la personne confirme, discriminations institutionnalisées, négligences volontaires, interventionnisme arbitraire des droits les plus élémentaires de la population palestinienne sont bafoué. Cette organisation détaille la politique israélienne en matière d'eau. Ainsi, bien que les accords d'Oslo soient censés mettre un terme aux politiques restrictives israéliennes, dans la pratique, la mainmise israélienne se poursuit et la dépendance des Palestiniens à l'égard de la compagnie Mekorot s'est accentuée. En 1984, Thomas Stauffer, pouvait écrire : « que les coûts auxquels les Israéliens devraient faire face s'ils voulaient trouver le moyen de remplacer l'eau qu'ils puisent dans les Territoires occupés s'élèveraient à 2 milliards de $ par an. "Le prix à payer pour la paix »
Tout futur arrangement politique de la question de l'eau doit inclure le principe d'un transfert de l'eau du secteur agricole israélien vers la satisfaction des besoins des populations palestiniennes. De fait, la proportion de terres cultivées palestiniennes irriguées est bien inférieure à celle des terres israéliennes. Douloureux handicap pour l'agriculture palestinienne : les colonies irriguent 60% de leurs terres cultivables, contre 45 % en Israël et 6% en Cisjordanie. Les Palestiniens voient dans cette politique la volonté israélienne de les détacher progressivement de leur terre.
D/ Le mur
L'impact de la construction du Mur de l'Apartheid constitue un grave sujet d'inquiétude sur les ressources en eau dans les secteurs proches. Plusieurs puits cesseront d'être accessibles aux communautés proches du Mur. Dans un groupe de villages le Service palestinien d'Hydrologie a recensé 30 puits qui seront perdus dès la première phase de sa construction. Alimentés par la nappe aquifère occidentale, ils ont été creusés avant 1967. Avec eux, les Palestiniens vont perdre près de 18% de leur approvisionnement à partir de cette nappe aquifère. La population actuelle de Cisjordanie dispose de la même quantité d'eau d'origine souterraine que la population qui vivait là en 1967, alors que de nouveaux besoins sont apparus au cours des années d'occupation, que ce soit en matière de développement ou en matière d'hygiène.
C’est aussi pour cela que la guerre que l’Etat d’Israël mène aux Palestiniens est aussi une guerre essentielle, celle de l’eau, donc un facteur supplémentaire de déstabilisation régionale.
[1] Un projet allait encore plus loin dans ce sens, inique à tel point que Washington se mêla lui-même de la question ; en tant que puissance occupante, Israël pouvait, certes exploiter les sources de la région pour ses ressortissants, mais n’avait pas le droit de transférer cette eau sur son propre territoire. Ce projet fut abandonné par les sionistes.
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