La manipulation en politique (réflexions sur…)
La manipulation en politique (réflexions sur…)
Avant de traiter de la communication dans le domaine politique, rappelons dans quel cadre les dirigeants la pratiquent.
Les traités européens ont installé une zone de libre échange étendant l’espace commercial américain. Et ont organisé la suppression des réglementions contraires qui existaient au sein des Etats.
D’autres traités, du même genre, ont été rédigés (OMC, TAFTA, CETA, …). Auxquels il faut sans doute ajouter le pacte de Marrakech de décembre 2018, qui prépare, si son contenu à un sens, l’interdiction pour les Etats de contrôler l’immigration.
Des objectifs économiques et financiers sont inscrits dans les traités, puis sont mis en œuvre par organismes échappant au contrôle (1) des citoyens (2). Organismes qui décident directement ou ordonnent ce qu’il leur faut faire aux organes constitutionnels des Etats. Sous le contrôle d’organes juridictionnels eux aussi « ad hoc ».
Le maillage juridique mis en place a été très efficace : il a permis à une minorité de citoyens de capter l’essentiel de la richesse mondiale ; et à un noyau de ladite minorité de multiplier annuellement sa fortune selon un coefficient élevé.
Le système a cependant une faiblesse.
Qui réside dans la possibilité qui reste aux citoyens d’élire à la tête de leur Etat des dirigeants qui peuvent refuser de continuer à appliquer les mêmes règles. En vue de mettre en place une politique financière, économique ou sociale différente (3).
Il est donc capital que la minorité qui profite du système veille à ce que les dirigeants des Etats qui sont élus, soient des personnages acquis à leur cause, qui apposeront leur signature là où il faut .
Pour ce faire, il leur faut choisir le(s) candidat(s) et il leur faut convaincre les électeurs de voter pour ce(s) dernier(s).
Dénicher des candidats (4) n’est pas très difficile :
il y a pléthore d’individus ayant envie des honneurs et de la belle vie que procurent certaines fonctions (5) , spécialement celle des mille et une nuits de chef d’Etat. Aspirants qui font naturellement ce qu’il faut pour se faire remarquer (4) et se faire apprécier par leurs futurs « maîtres »
Convaincre les électeurs n’est pas très difficile non plus.
Au moins pour ceux qui peuvent dépenser ce qu’il faut :
- a) pour payer les services des agences de « relations publiques » (6) et de conseillers en « communication ». Dont le travail est d’exploiter la connaissance qu’ils ont des « ressorts » des êtres humains pour mettre en place les protocoles propres à déterminer les votes et les réactions de ces derniers.
- b) pour acheter les médias qui « perfuseront » les trouvailles de ces spécialistes (4).
L’usage de la manipulation / communication est, une fois l’élection acquise, un mode nécessaire (7) - devenu habituel (8) - de gouvernement (qui permet d’ailleurs de faire l’économie de l’usage – pouvant d’ailleurs être contre performant - de la force contre les récalcitrants).
Le problème, avec l’usage des techniques de manipulation, c’est que la communication ne peut éternellement être substituée à la prise de décisions.
Surtout quand l’origine des questions évacuées par ces artifices prend en réalité sa source dans la politique choisie et mise en œuvre méthodiquement par les gouvernants.
Certes, il est invraisemblable que le choc puisse venir de la classe politique.
Dont les membres sont, toutes tendances confondues (9), occupés, d’élection en élection, à assurer leur gagne pain.
Il est peu probable également que le changement vienne des citoyens eux-mêmes.
Parce que ces derniers ne veulent ou ne peuvent pas se mettre en danger (10).
Et parce que lors des élections « normales », la manipulation est toujours efficace sur les électeurs qui se rendent encore aux bureaux de vote (11).
Mais ces comportements, qui sont peut-être une constance dans la vie politique depuis bien longtemps, n’ont pas exclu certains sursauts (12).
Après que soit apparu, au bon moment, un catalyseur, transformant les exaspérations individuelles (malgré les anxiolytiques administrés par les docteurs en communication) en projet d’avenir collectif.
Le comportement de beaucoup d’individus composant la classe politique dirigeante nous paraît être devenu si caricatural et la méthode utilisée si voyante, que se pose la question de l’apparition de cet homme (ou de cette femme) « providentiel(le) » (13) .
Qui ?
Quand ?
Marcel-M. MONIN
(1) Avec comme résultat que les organes constitutionnels internes n’ont plus l’autorisation d’exercer leurs compétences traditionnelles ; et que l’usage du droit de vote par les citoyens est vidé de son contenu. Quand la décision des citoyens n’est pas bafouée par la classe politique ( annulation en 2007 par cette dernière du vote négatif des citoyens de 2005 sur la « constitution européenne »). Le mécanisme de la CECA a été une première. Un cartel a été créé, dont la gestion a été enlevée aux Etats (donc aux gouvernants et donc aux peuples) et à été confiée à un organisme appelé « Haute autorité ». L’affaire a été « vendue » aux citoyens comme devant assurer la paix entre l’Allemagne et ses voisins, au motif que les entrepreneurs allemands et français qui gagnaient leur vie à permettre la fabrication des matériels de guerre marcheront désormais de concert. Les autres institutions gérant, en marge des Etats, les activités économiques et financières de la zone de libre échange de la partie ouest du continent européen, ont été inspirées de ce modèle.
(2) dans ce contexte, les individus sont progressivement privés du cadre protecteur fourni par l’Etat, en même temps qu’ils deviennent habitants d’un vaste espace économique sur la direction et la gestion duquel ils n’ont plus aucune prise. Et sur lequel ils sont par voie de conséquence, incités à s’agréger à des communautés (religieuses, ethniques, … ) qui leur offrent la solidarité et le sentiment d’appartenance à quelque chose, dont l’Etat les a privés. Au moins tant que ces dernières ne mettent pas en cause les règles financières et économiques.
(3) Imaginons qu’un président de la République « du genre » de de Gaulle soit élu en France. Et qu’il entraîne la classe politique, élue dans la foulée, à prendre désormais ne serait-ce que les mesures suivantes : - l’Etat est autorisé à emprunter à sa banque centrale ; - l’Etat a l’autorisation de prendre des mesures de régulation des flux financiers et de l’économie ; - les élus et les fonctionnaires qui sont en situation de conflit d’intérêts perdent leur emploi, et les produits qu’ils en ont tirés ….. ….. Dans ce cas, l’essentiel de ce qui a été inséré dans les divers traités deviendrait inopérant.
(4) lire les ouvrages et voir les vidéos sur les candidats, leur trajectoire, leurs réseaux, et, de manière générale sur la préparation des élections présidentielles de 2017.
(5) Sans compter les opportunités pour soi ou pour les proches ou pour les gens donnant des gages de fidélité, de faire fructifier un jour les relations croisées tissées à un moment ou à un endroit quelconques par les gens de la sphère politique et ceux de la sphère économico-financière.
(6) on attribue à Edward Bernays ( v. sur internet les réalisations de ce spécialiste de la manipulation de l’opinion ) la création du terme « relations publiques », terme moins décrié que celui de « manipulation ».
(7) puisqu’il s’agit précisément de faire admettre ou supporter par ceux qui en sont « victimes », les conséquences des décisions prises.
(8) Parmi les exemples récents :
a) Un djihadiste présumé a infiltré la Préfecture de police de Paris ? – la population doit être solidaire et vigilante !
b) Un incendie révèle que la population peut subir des dommages graves dus à certaines activités industrielles telles qu’elle sont autorisées par les gouvernants ? - trois ministres sont dépêchés sur place pour annoncer la création de divers comités de réflexion ou d’études.
c) Des citoyens de toutes catégories descendent dans la rue habillés de gilets jaunes pour dire qu’ils n’en peuvent plus ? - On présente le « ras le bol » comme étant le fait d’un mouvement quantifiable de personnes, et l’on met en branle les vieilles recettes pour décrédibiliser ledit mouvement et créer la peur chez ses participants (v. la note 8). Parallèlement, on lance un « grand » débat.
d) Et puis, et de manière itérative, dès qu’un problème surgit, … encore et toujours de la « communication » : « le problème est connu, on l’a déjà en partie réglé, on va en discuter et la réforme qui est déjà en marche le réglera ».
e) Enfin, on notera que la classe politique, lorsque ses décisions se heurtent à l’hostilité d’une partie de la population, attribue, en dévoilant en quelque sorte sa méthode, les réactions de la population, non au contenu des décisions, mais … aux faiblesses de sa « communication » (décisions mal « expliquées »).
(9) On remarquera que le dirigeant de « la France insoumise », mouvement d’opposition (au moins affichée) à la politique de dé régularisation de l’économie et de la finance, évite semble-t-il de choquer une partie de son électorat potentiel actuel en ne mettant pas / plus ( ?) en question les règles européennes. Alors même que ces dernières engendrent précisément ladite politique libérale. Règles que ce dirigeant politique a d’ailleurs votées – traité de Maastricht qualifié par lui de « compromis de gauche » (sic) - lorsqu’il opérait dans le sillage d’un président de la République qui, bien qu’il a été élu comme socialiste, y était lui-même favorable.
(10) On rappellera que beaucoup de personnes qui ont manifesté en portant des gilets jaunes on été très grièvement blessées par certains membres des forces de police, faisant l’usage que l’on sait de nouvelles armes. On notera également que des engins blindés étaient tenus prêts à intervenir.
(11) pour prendre le dernier exemple en date : Lors des élections présidentielles de mai 2017, Marine le Pen a été aidée à réaliser un bon score au premier tour. Puis, entre les deux tours, des films sur les atrocités de l’extrême droite nazie se sont bousculés sur les écrans de télévision. On remarquera également que, de l’autre côté, et alors que J-L. Mélenchon commençait à faire figure de challenger crédible, les travers de ce professionnel de la politique ont été exploités par les médias ; efficacement si l’on en juge par le résultat que l’on sait de LFI aux élections européennes de mai 2019.
(12) Il y a toujours eu en France des moments où la société a collectivement réagi. Lorsque les dirigeants sont devenus insupportable pour plusieurs strates de la population. (NB. Quand les plus pauvres n’ont pas bénéficié d’une alliance avec d’autres couches sociales, ils ont été vaincus quand ils se sont rebiffés). Et qu’un leader potentiel, présentant certaines caractéristiques, a fait en sorte de surgir au bon moment.
De 1787 à 1789 des leaders sont apparus qui ont liquidé ceux qui étaient devenus insupportables à une grande partie de la population.
Les politiciens du régime du « Directoire » ont provoqué le 18 Brumaire et Bonaparte.
Ceux de 1848 à 1952 ont permis au neveu de copier l’oncle.
La clique de Vichy soumise à l’étranger (à l’époque, les Allemands) a donné naissance à de Gaulle
Le comportement des politiciens de la IV° République expliquent à nouveau de Gaulle et la constitution de 1958.
Chaque fois, la greffe de la population avec le « délivreur » s’est faite.
(13) Homme ou femme ne provenant probablement pas des gens du métier. Au sein duquel certains, pour survivre, adapteront leur discours au sens du vent, comme il est d’usage en pareil cas.
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