La Marine mobilisée pour un Royal poisson d’avril en 2012

Ce n’est pas la Marine qui pêche mais les médias qui se dépêchent, à force de dépêches, d’attirer le chaland sur leur chalut afin d’attraper le maximum de citoyens en appâtant avec un hameçon très prisé de la marine médiatique qui navigue sur les sentiments et les émotions pour une moisson d’audimat… Les médias ont ce don assez spécial d’interférer sur une élection sans se prévaloir d’une quelconque compétence en terme de programme et de dessein national ou international. Ils zanalysent, ils décortiquent, ils se pavanent surtout chez Denisot, fiers d’en être, de cette race des saigneurs de l’interprétation. Cette situation de l’info politique, on peut la déplorer mais elle est incontournable, tout comme les bouses qu’il faut recycler lorsqu’on élève des vaches. Les médias imaginent sans doute qu’ils élèvent des veaux de Français vers l’éducation politicienne ou qui sait, contribuent au grand show rock n’ roll de la vie politique et médiatique à l’ère post-Elvis et post-Coluche. La cour s’amuse, la croisière aussi, bien que les forçats de la salle des machines puissent avoir un avis différent, qu’on ne leur demandera pas puisque le monde du travail est devenu invisible.

Le sondage créditant Marine le Pen d’une première place au premier tour de la présidentielle de 2012 relève-t-il d’un poisson d’avril, d’une manœuvre visant à vendre un journal et surtout en parler, ou d’une escroquerie, ou d’une farce destinée à faire parler tous ces clowns de la politiques qui se pressent sur les plateaux de radio et de télévision. En tous cas, c’était la grande question du week end, à laquelle n’échappa aucun politicien venu faire le spectacle, passage obligé par le grand confessionnal médiatique qui tente d’extorquer quelques avis, commentaires, jugements et même déclarations. Il n’aura échappé à personne que le journaliste de France Inter préposé à la tranche horaire du dimanche soir de 18 heures a titillé Dominique de Villepin pour lui faire avouer une éventuelle candidature en 2012, mais le bougre, aussi muet que le Sphinx-Kahn, s’est rétracté dans un subtil mutisme fait de savant verbiage et donc, oui, Dominique comme l’autre Dominique n’a rien avoué mais juste déclaré qu’il était sur le chemin et qu’il avançait. Et ça nous avance à quoi ? Ma voisine de palier, chauffeur de bus, avance aussi, tout comme l’éboueur du coin ou le postier qui livre le courrier. Honnêtement, je ne pense pas que la majorité des citoyens se prennent dans les filets de ce sondage aussi détonnant dans la classe politique qu’il est irréel mais sans doute le témoin d’une emprise des médias sur la vie politique et l’on saura reconnaître dans cette publication d’un résultat singulier mais controversé la signature d’une campagne que l’on pressent médiocre et décalée des questions fondamentales que du reste, les politiciens ne savent pas résoudre parce qu’ils sont comme la plupart des citoyens, aliénés.

Les sondeurs contribuent à fabriquer des présidentiables. On se souvient de 2007, avec un candidat naturel de la vie politique, Nicolas Sarkozy, adoubé par son parti, alors qu’en face, deux figures ont été fabriquées par les médias, François Bayrou, le troisième homme et Ségolène Royal, la dauphine, une Ségolène qui comme Marine s’est trouvée en osmose avec l’opinion publique par cette magie superficielle qui crée aussi les stars du cinéma et de la chanson. Une Ségolène aussi magnétique que Marine, jouant sur la démocratie participative, comme Marine joue sur la Nation participée (comprenne qui pourra). Cette fois, le sondage détonnant façonne une princesse amenée vers le trône, une Marine le Pen captant tel un fantôme de 21 avril l’attention des analystes qui visiblement n’ont manifesté aucun recul et se sont engouffrés dans l’arnaque, n’hésitant pas à se manifester tels des ectoplasmes faussement instruits émanés des salles de rédaction. Car ce sondage n’a évidemment aucune valeur et se déconstruit aisément. D’abord parce que contrairement à son père, Marine le Pen suscite quelque sympathie dans un pays où les hommes ne portent plus la culotte (Soral, quitte mon corps je t’en prie !) et où afficher quelque sympathie avec cette blonde forte en gueule ne suscite aucun discrédit ni honte, contrairement aux sondés peinant à afficher leur préférence nationale pour Jean-Marie. Du coup pas besoin de correction du biais. Cette fois, les sondés y vont franco de leur colère, et protestent avec la préférence Marine sans craindre de se noyer dans la honte. Ajoutons à cet élan protestataire la configuration spéciale du sondage avec une martingale improbable mais ajustée pour que le résultat soit au rendez-vous. Une très incertaine Martine Aubry opposée à un Sarkozy affaibli par un Villepin très en forme jouant le Chevènement ou la Taubira de service pour conférer à ce sondage le seul maigre intérêt d’être une propédeutique à l’examen des candidatures multiples et de l’éparpillement des voix sur une accession au second tour d’une Marine le Pen qui ne parviendra pas au pouvoir suprême parce que les Français ne sont pas fous mais qui aura réussi à pourrir une élection mais, pourquoi pas être joyeux et se réjouir de cette farce que nous jouent les politiciens et les sondeurs. C’est gros comme une maison, cette première position de Marine mais une fois analysées les conditions du sondage, la supercherie est évidente. Par contre, moins évident de constater à quel point les médias et les politiciens font semblant de prendre au sérieux ces chiffres. Ils nous prennent pour des cons et comme disait Coluche, c’est que nous devons l’être un peu !

Cette situation ubuesque se conclut misérablement par la déclaration d’une ancienne porte parole de Villepin lui enjoignant de ne pas se présenter en 2012 pour ne pas risquer un 21 avril alors que l’intéressé a déclaré sur France Inter qu’il ne fallait pas avoir peur contre Kadhafi et ne pas craindre les révolutions arabes. C’est dire si le cirque politique est misérablement plombé par ces piètres pleutres craignant la vague du FN et soumettant leur stratégie minable au diktat des sondages. La France ne ressort pas grandie de ce week-end de crispation politicienne. Les lâchetés se combinent aux légèretés d’une grande farce jouée dans un pays qui, riche de ses citoyens, s’en remet hélas au jeu de gens qu’on peut aisément qualifier d’imbéciles du progrès. Le faux est un moment du vrai pensait Hegel, alors osons penser que les imbéciles permettent d’accéder à la vérité d’un improbable futur qui saura congédier ce cirque politicien d’autant plus intense que la société française est à la dérive, sans vigie ni capitaine. Il faut rester vivant. Vivre, c’est devenu le moyen de narguer ceux qui participent à l’avènement d’un monde invivable.