La meilleure d’entre eux
Dans l'univers de l’élite boboiste, il est désormais acquis sans le moindre doute que Gisèle Halimi surpasse de plusieurs têtes toute la bobosphère française voire mondiale. La passionaria féministe, qui semblait plus ou moins avoir arrêté la compétition avec l'age, vient d'envoyer au tapis la totalité de ses challengers toutes générations confondues. Selon des sources proches, depuis quinze jours le quotidien de Bernard Henri Levy serait partagé entre crises de larmes et hurlements hystériques dans les sanitaires de l’hôtel Costes , tandis que Pascale Clarke, plus courageuse, aurait declaré les yeux remplies d'etoiles : "c'est la reine, la meilleure, elle est définitivement indépassable". Quant à Francois Begaudeau, il serait en réanimation à l’hôpital de la Salpetrière, ayant, de dépit, tenté de mettre fin à ses jours, suite à l'exploit sans précédent de Madame Halimi.
"Trente ans d'une discipline d'acier pour être balayé en une seconde par cette vieille peau. Je préfère crever", révèle la lettre d'adieu du pilier de la nouvelle génération bobo.
Mais assez perdu de temps sur le sort des malheureux challengers et savourons plutôt encore une fois cette œuvre hors du commun, avant d'essayer d'en analyser le génie.
"Comment voulez-vous croire qu'une simple femme de ménage, noire, mère célibataire de surcroît, ne dise pas la vérité ? Quel serait son intérêt ?"
Comment, comme Mademoiselle Clarke, ne pas béer d'admiration devant la précision, la pureté de ces quelques syntagmes au ciselage incomparable, englobant en une seule phrase et avec un minimum de signifiants, la totalité de la discipline boboiste ? Si la perfection existe, dans sa générosité et son humanisme naturels, Madame Halimi nous permet grâcieusement de l'entrevoir.
Là où, par exemple un Jack Lang, compétiteur au talent certes exceptionnel mais essoufflé, s'est contenté dans le camp adverse de l'affaire DSK, d'une banale euphémisation (le formellement médiocre bien qu'audacieux "Il n'y a pas eu mort d'homme"), Gisele Halimi, se paye le luxe de balayer d'une seule traite la totalité du spectre bobo, brandissant à la fois la pauvreté ("simple femme de ménage" ), l'exotisme des origines ("femme noire"), le féminisme (la "mère célibataire", donc victime de l'irresponsabilité du géniteur de son enfant) et par dessus tout l'innocence absolue de La Victime (Victime car noire, femme et pauvre) : "Comment ne dirait elle pas la vérité ?" "Quelle serait son intérêt ?", s'interroge Halimi avec une candeur repoussant au confins de l'univers connu les limites d'une délicieuse mauvaise foi.
Ici, Gisele Halimi renoue avec la tradition, elle va puiser chez les anciens la condescendance superbe, magnifique et totalement décomplexée de l'homme blanc envers le noir. Elle plonge dans les racines boboistes, va puiser à la source des maitres proto-gauchos Blum et Ferry (que l'on se rappelle le superbe "Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu'en effet les races supérieures ont un droit vis à vis des races inférieures [...]parce qu'il y a un devoir pour elles. Elles ont un devoir de civiliser les races inférieures" , Juillet 1885) pour qui le noir etait avant tout ce "bon sauvage" un peu niais mais pas méchant (trop niais en fait pour être méchant car pour faire réellement le mal il faut élaborer une stratégie - ce dont le noir est incapable - nous permettent de comprendre les ancêtres gauchos du 20e siècle naissant.
Mais Gisele Halimi ne se contente pas de ce simple hommage aux anciens. Elle transcende leur héritage, remodèle la rhétorique gaucho-bobo selon les critères du 21e siècle et la passant au crible du politically correct, réussit l'exploit insensé de faire passer avec une facilité déconcertante une phrase au racisme negrophobe exacerbé pour un plaidoyer poignant au service de Mademoiselle Diallo, alors que la patronne francaise du MLF ne sert ici qu' exclusivement sa propre cause féministe. Brillant. Magnifique. Parfait.
De simple discipline socio-politique, la dialectique boboiste vient d'être été hissée au rang d'Art majeur par Madame Halimi et nous ne pouvons que saluer humblement mais avec force cette contribution au patrimoine culturel mondial. Merci Madame Halimi.
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