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La nouvelle présidence sous oriflamme européiste

« L’Europe, je veux la changer », déclarait Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle, laissant « ouistes » et « nonistes » un peu sur leur faim. Voici un voile du mystère, peut-être devrions-nous dire du drapeau, enfin levé. Depuis le soir de son élection, il a multiplié les gestes, les signes de ce qui sera le nouveau style mais aussi la direction qu’il entend donner à sa présidence. En voici un qui risque de faire couler beaucoup d’encre. Pour la première fois dans l’Histoire, un étrange drapeau bleu étoilé fait son apparition sur le portrait officiel du président de la République. La Constitution française est pourtant claire sur ce point, en son article 2 : « L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge ». Que le président Nicolas Sarkozy veuille marteler son engagement en faveur de l’intégration supranationale, c’est son droit le plus absolu. Mais peut-il changer ainsi, sur le conseil d’un photographe « people » (!), unilatéralement et sans révision constitutionnelle, l’emblème national, en y ajoutant celui de l’Union européenne ? Et à quoi bon faire mine de se soucier de « l’identité nationale » en la collant au fronton d’un ministère de l’Immigration dédié lorsque, dans le même temps, on organise le déménagement de la souveraineté au nom de l’Europe ?

Imaginons que désormais tout nouveau président de la République adjoigne au drapeau français un autre emblème selon ses convictions, ses obsessions ou ses caprices : l’étendard "kroaz-du" s’il est breton, la tête de maure s’il est corse, la bannière étoilée s’il est américanophile, le drapeau rouge s’il est communiste, etc... ? On nous objectera que l’appartenance à l’Union européenne n’est pas une opinion, ni une culture particulière, qu’elle est un état de fait, d’ailleurs inscrit dans la Constitution française. Certes, mais il n’y est pas question d’emblème européen accolé à l’emblème national. Et dans ce cas, pourquoi ne pas adjoindre un drapeau symbolisant plutôt notre appartenance aux Nations unies ou à l’OTAN ?

Les mystérieuses sources de la symbolique européenne

Jusqu’où peut-on avancer ainsi hors du droit dans un Etat de droit, parce qu’on est président de la République élu à 53% ? Nicolas Sarkozy va-t-il demain faire jouer après la Marseillaise (et bientôt "à la place de" ?) l’Hymne à la joie de la Symphonie n°9 de Beethoven, que l’on jouait déjà d’ailleurs... devant les kamikazes japonais juste avant leur dernier voyage ? Pour mesurer davantage le mystère de tous ces symboles par lesquels l’Union cherche à se donner les apparences d’un Etat - hymne, drapeau, "Parlement", et bientôt des "lois" et un "ministre des Affaires étrangères" - avant d’en être un tout à faire grâce au recyclage de la Constitution, rappelons l’origine du nouvel emblème de la France. Selon son concepteur Arsène Heitz, ce drapeau est "le drapeau catholique de l’Immaculée Conception, le drapeau bleu sur lequel se détachent les douze étoiles d’or de la médaille miraculeuse de la Vierge Marie". Douze étoiles qui rappellent celles qui couronnent la tête de cette femme tourmentée par les douleurs de l’enfantement que décrit l’Apocalypse selon saint Jean.

Pour un avis du Conseil constitutionnel sur la photo présidentielle

C’est, en tout état de cause, un choix politique, une orientation idéologique en faveur de la poursuite de l’intégration européenne qui préside à l’affichage du drapeau européen derrière le président Sarkozy, bientôt dans les 36.500 communes de France. Et l’on voit mal comment cette initiative présidentielle pourrait être interprétée autrement que comme une violation de l’article 2 de la Constitution. Au moins aurait-il pu solliciter au préalable un avis du Conseil constitutionnel. Cet avis eût été d’autant plus nécessaire que le drapeau européen n’a à ce jour aucune véritable existence juridique dans l’Union européenne. Cet ancien drapeau du Conseil de l’Europe a en effet seulement été adopté par les chefs d’État et de gouvernement des Communautés européennes en 1985, dont il est l’emblème officiel. Mais le traité signé à Rome en 2004, qui donnait enfin une base juridique aux symboles (drapeau, hymne, etc) de l’Union européenne, a vu sa ratification rejetée par la France et les Pays-Bas en 2005, et se trouve aujourd’hui caduque, le délai de ratification prévu par le texte lui-même étant écoulé. Le Conseil constitutionnel aurait peut-être là un autre motif de condamner l’irruption d’un tel emblème sur la photo présidentielle.

Exiger des élus et futurs élus qu’ils respectent le "non" français

A l’image de l’enfant de la femme aux douze étoiles, l’Europe constitutionnelle naîtra dans la douleur après le double non franco-néerlandais, mais elle naîtra tout de même. Comme prévu, le président Sarkozy, après ses rencontres à Berlin avec Mme Merkel, à l’Elysée avec M.Pöttering et à Bruxelles avec M. Barroso, tiendra sa promesse de campagne de conserver du texte rejeté son volet institutionnel, son coeur nucléaire devrait-il dire - primauté absolue du droit européen, extension indéfinie du vote à la majorité, personnalité juridique de l’Union, Charte des droits fondamentaux - qui permettra à la "machine" d’achever elle-même l’érection du super-Etat fédéral. Après le sommet de juin qui verra la signature de ce "traité simplifié", ce sera à la nouvelle Assemblée nationale de faire son oeuvre de contournement du "non" français. D’où l’importance de la campagne législative actuelle, où parmi les quelques 7640 candidats, il s’en trouve beaucoup, mais pas les mieux placés, qui ont inscrit le respect du "non" en tête de leurs engagements. C’est ici que la campagne "Non c’est non" lancée par le groupe Indépendance et Démocratie au Parlement européen prend tout son sens. Ce sont 200.000 cartes postales qui circulent depuis six semaines maintenant et que l’on peut toujours se procurer auprès d’une fédération départementale du MPF (http://www.pourlafrance.fr/federations.php) ou auprès du RIF (www.r-i-f.org ) . De même, chacun peut envoyer un courriel-type ou télécharger la lettre "Non, c’est non" sur le blog www.noncnon.fr , à signer et à renvoyer aux députés, aux sénateurs, aux députés européens, au président de la République et aux candidats à l’élection législative. Plus que jamais, les citoyens doivent s’approprier cette campagne pour le respect du résultat du référendum, en renvoyant des cartes et ces lettres, avec copie à la presse locale, qui exigent des élus et candidats qui sollicitent actuellement leurs suffrages, qu’ils s’engagent publiquement à refuser tout recyclage de la Constitution européenne dans un "mini-traité" ainsi qu’à un référendum pour la ratification de tout nouveau traité européen. Décidément, le combat contre la Constitution européenne ne fait que commencer...

Christophe BEAUDOUIN
Publication originale du 23 mai 2007 sur www.observatoiredeleurope.com


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7 réactions à cet article    


  • tvargentine.com lerma 25 mai 2007 10:23

    Effectivement vous avez raison et votre argumentation tient la route.

    La manière de faire figurer ce drapeau sur la photo officielle est quand même étonnante.

    Il faut esperer que nous aurons pas une nouvelle écriture de la marseillaise écrit et réalisé par Nicolas Sarkozy


    • Yannick J. Yannick J. 25 mai 2007 11:04

      aahhh d’accord je comprends mieux votre position au dernier paragraphe...

      Alors, vous aurez beau vous arc-bouter sur « le non ! on a dit non à la constitution ! », je persiste et signe en disant que ce non n’a eu de majorité que parce que c’était plus un rejet de la politique gouvenementale qu’un rejet du traité lui-même. Malgré le fait qu’il était lourd et indigeste, ce vot n’a fait que sanctionner ungouvernement qui lassait la majorité des français.

      Tiens je vous fait même le pari que si le référendum se refaisait aujourd’hui le oui l’emporterai.... on parie ?

      Sinon, je ne trouve pas choquant de montrer le drapeau européen cote à cote avec celui de notre nation. Je m’explique : Nous sommes en 2007, l’europe est le dernier rampart efficace que l’on peut avoir face aux dérèglements tout azimuth dans le monde, qu’on le veuille ou non, nous n’avons pas le choix, il faut qu’elle devienne plus pérenne et efficace et pour ce faire intégrer dans les mentalités que ce n’est pas un mal. Après tout la mentalité de certains qui luttent désespérément pour rester franco-français, équivaut aux territoires, duchés, comtés du moyen age qui ne voulaient pas faire partie de la couronne et qui finallement on compris que leur intéret résidait dans l’appartenance à une nation plus grande... Bin l’europe c’est pareil au 21ème siècle, il faudra s’y faire ! Etant breton je sais de quoi je parle !

      mis je peux me tromper...


      • aquad69 25 mai 2007 11:08

        Bonjour Christophe, et Lerma,

        d’accord avec vous ; c’est là bel et bien un exemple de ces coups de forces glissé « en douce », petit à petit, pour orienter les choses à l’insu des gens.

        Etrange conception de la démocratie...

        Merci de vos intéressants éléments sur le drapeau européen, Christophe ; celà éclaire un peu cette tentative, discrèrement manifestée par les membres de l’est sous prétextes culturels, de donner un aspect confessionnel chrétien à la construction Européenne.

        En savez-vous, pouvez-vous nous en dire plus ?

        Cordialement Thierry


        • LaEr LaEr 25 mai 2007 12:10

          Je suis un anti-sarkozyste convaincu, mais il est hors de question de le blâmer pour la simple présence du drapeau européen sur la photo officielle. C’est même le contraire qui m’aurait choqué. Cela fait des années que drapeau Européen est affiché en couple avec le drapeau tricolore, et pour ma génération, il est autant un symbole de notre identité que le drapeau français. Que le président Sarkozy en soit conscient est au moins un bon point pour lui.

          La France n’a pas dit non à l’Europe, elle a dit non à cette constitution illisible et au gouvernement Rafarin.

          Certes, il nous faudra faire attention à ce que le gouvernement Sarkozy (il est impossible de parler du gouvernement Fillon :) ) ne fasse pas passer en douce la C.E , mais pour une fois, je ne vois nullement de « coup en douce » dans le fait de mettre le drapeau Européen dans la photo officielle.


          • Sylvain Reboul Sylvain Reboul 25 mai 2007 15:43

            Vous commettez une erreur juridique : le non au référendum n’a en rien aboli les traités antérieurs ratifiés par la France et cela pour deux bonnes raisons :

            Sur la forme, il n’était pas destiné à les remplacer mais à les améliorer en leur accordant une « valeur » symbolique supplémentaire dite « constitutionnelle » à l’échelle européenne, alors qu’elle est juridiquement déjà telle en droit français par les ratifications antérieures et les modifications de la constitution française qu’elles ont entraînées !

            Sur le contenu, nul ne sait sur quoi précisément à porté un non aussi contradictoire dans ses motivations (plus d’Europe vs moins d’Europe).

            Le refus (à mon provisoire) du TCE n’a fait que laisser en place tous les traités existants.

            Enfin, sur le plan politique, les élections présidentielles ont démontré au moins une chose, à savoir que les « vrais » souverainistes de votre espèce sont tellement minoritaires en France qu’ils ont été laminés au premier tour et cela à tel point que même votre dirigeant politique ainsi que D.A ont appelé sans condition à se rallier à NS a deuxième tour ; c’est dire leur manque de conviction... ou leur réalisme politicien.

            Libre à vous d’aimer les causes perdues..., mais à condition de respecter les faits.


            • Boileau419 Boileau419 28 mai 2007 05:03

              Totalement d’accord avec l’auteur de l’article, le drapeau de l’Union n’a rien à faire sur la photo présidentielle.

              Je doute fort que ce chiffon ait rien à voir avec l’apocalypse de St Jean. Après tout, les termes de « chrétien » ou de « christianisme » ont été évités dans le TCE.


              • dilettante 28 mai 2007 08:06

                Ce brave M. Beaudoin ne reculera donc devant rien pour convaincre les « nonistes » de soutenir son projet souverainiste anti-européen aux relents nationalistes nauséabonds MPF-FN... même s’il doit publier un article par jour sur Agoravox pour faire la pub de son site. Encouragez-vous aussi ceux des altermondialistes anti-libéraux qui ont voté non pour une toute autre logique que la vôtre à rejoindre votre « non c’est non »... ?

                Sur la question du drapeau européen, cela fait une bonne dizaine d’années qu’il s’est trouvé derrière Chirac à chacune de ses allocutions télévisées officielles. Sa présence sur la photo officielle de Sarkozy n’est pas une innovation, elle s’inscrit dans la continuité de ce qui s’est fait pendant les deux mandats de Chirac, pourtant européen très tiède. On pourrait à la limite dire que la présence de ce drapeau est une officialisation.

                Sur l’Europe, et une Union européenne qui fasse enfin disparaître les frontières entre les peuples frères, isolés par les expansionnismes des Etats, j’estime que c’est l’idéal auquel devrait aspirer tout citoyen européen. Je suis surpris de voir que vous le rejetez, il ne devrait pourtant pas choquer les racistes de l’extrême-droite, car l’Europe après tout ce n’est qu’une union de blancs ; à moins qu’ils soient en plus xénophobes... ? J’avoue toujours avoir du mal à voir ce qui fait cette différence, apparemment essentielle pour certains, entre les Français et les ressortisants des Etats voisins qui empêche de pousser plus avant l’idéal européen...

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