La parité - un pis-aller ?
Depuis une dizaine d'années, le choix a été fait du passage en force, par la loi, qui impose autoritairement la présence d'un nombre égal d'hommes et de femmes dans les instances politiques. Ce choix d'imposer autoritairement la parité est pourtant contestable et n'a pas fait l'objet d'un véritable débat politique. Parce que c'est une question hautement sensible sur laquelle aucun politicien oserait s'avancer. Néanmoins, les quotas ne sont pas toujours respectés - les partis politiques préfèrent encore payer.
Ce n'est évidemment pas le principe d'égalité qui est en question, mais le moyen utilisé pour y parvenir. Selon un principe fondamental de la république, un élu est censé représenter tous les citoyens, quels que soient sa couleur, son sexe, son âge, son origine sociale. Si l'on décide d'isoler l'un de ces critères, on ouvre la porte à toutes les revendications particulières. La parité institue deux catégories de citoyens distincts, les hommes et les femmes, alors que la modernité insiste sur l'indifférenciation des deux sexes dans les métiers et fonctions. Mais surtout, la parité forcée est humiliante. La loi enferme les femmes dans un statut de victimes auxquelles des postes doivent être réservés. Le sexe compte alors autant que la compétence.
L'évidente légitimité de la fin - l'égalité entre les hommes et les femmes - a fait oublier, et a même interdit, un débat sur la légitimité des moyens. Le politiquement correct a gagné aussi bien la droite que la gauche. Les élus masculins font mine de reconnaître le principe de parité comme aussi raisonnable qu'équitable. Mêmes les femmes n'osent pas critiquer le principe. Seule Elisabeth Badinter, dès le début, s'est opposée à la parité :
« Elle est à la fois une erreur historique et une grave atteinte à la tradition politique française. Le législateur a pris le problème de l'inégalité à l'envers. La véritable raison pour laquelle les femmes sont moins nombreuses que les hommes en politique, c'est qu'elles assument 80 % des tâches privées. Si l'on ouvre la boîte de Pandore de la « discrimination positive » en faveur des femmes, il est inévitable que d'autres communautés demandent à leur tour à bénéficier d'un quota de représentation dans les assemblées. D'ores et déjà plusieurs associations ont exigé des quotas dans l'audiovisuel. Soulignons enfin le mépris que la loi paritaire affiche pour la notion historique de mérite républicain. Je suis convaincue que dans leur immense majorité les Françaises préfèrent être choisies pour leur compétence plutôt que pour leur sexe. »
Le principe de la parité est une réponse à un vrai problème : la misogynie régnant encore dans la classe politique française, un demi-siècle après que les femmes ont obtenu le droit de vote et d'éligibilité. Mais le moyen est trop rudimentaire. Ce n’est qu’un pis-aller qui, d’ailleurs, a eu une histoire assez mouvementée. Déjà en 1982, le Conseil constitutionnel casse une loi instaurant un quota, au nom de l'universalité des suffrages et de l'égalité des citoyens "sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents". Il faudra donc attendre 1998 pour qu'un projet de loi s'attaque à cet interdit constitutionnel. Lionel Jospin et Jacques Chirac sont mûrs pour un accord. En 1990, déjà, le Parti socialiste avait adopté la règle de 30% de femmes sur les listes électorales - longtemps restée lettre morte, mais c'était un effort. En 1994, Elisabeth Guigou soupire : "C'est un peu malheureux d'en arriver à imposer des quotas." En 1995, Lionel Jospin se dit décidé à avancer vers la parité. Parallèlement, Jacques Chirac, qui, en 1985, se refusait à "faire du sexisme à l'envers", puis en 1994 stigmatisait les quotas, change tardivement et brusquement de registre pour l‘approuver.
La parité est un objectif légitime, mais le moyen des quotas n'est pas satisfaisant. Il est humiliant pour les femmes. Jusque 2013, l’obligation de parité ne s’appliquait pas aux communes de moins que 3 500 habitants, mais depuis la loi du 17 mai 2013, c’est dans toutes les communes de plus de 1 000 habitants qu’elle doit être respecté, ce qui pose souvent des problèmes pour trouver des candidates.
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