La pétole pour le pétrole
Il y a quelque chose de troublant dans la manière dont sont narrées les récentes hausses du prix du baril sur les marchés internationaux.
Parler du prix en euros
On a l’impression que la barre des 70 dollars le baril est devenu
l’équivalent des 6 mètres de Serguei Bubka en saut à la perche. Une
limite inhumaine. Proposition : que l’on donne le prix du baril en
euros, cela fera moins cher. Sans rire, c’est tout de même un point
essentiel. Donner le prix du baril en dollars selon la valeur sur le
marché des changes de la monnaie américaine change considérablement la
donne, non ?
Un métro propre ? Chiche !
A chaque poussée du pétrole, on nous reparle des modes de transports alternatifs. Chiche ! Un élu écologiste parlait ce matin à la radio de promouvoir les transports en commun. Soit. Depuis 1979 on parle de cela. C’est oublier l’attachement des Français à leur voiture, constitutive de leur personnalité, marqueur social par excellence, symbole de liberté. On peut s’en gausser. Les faits sont là. Qui a déjà pris les transports en commun parisiens sait que promouvoir le métro, c’est déjà le rendre propre et le faire sentir bon.
La crise d’adolescence des traders
- Le marché du pétrole est un marché spéculatif par excellence (comme celui de toutes les matières premières stratégiques de grande consommation). De fait, il est soumis aux aléas des contraintes géopolitiques, comme l’invasion supposément programmée de l’Iran par les Etats-Unis, ou bien encore les problèmes internes au Tchad, la “révolution” vénézuélienne (quoique Hugo Chavez soit généreux en donnant à des familles américaines dans le besoin de quoi se chauffer pendant l’hiver. Véridique). Dès lors, la part du psychologique devient prédominante, rendant ce marché totalement instable. C’est le royaume des rumeurs au pays des traders. Les acheteurs internationaux deviennent aussi sensibles qu’une adolescente boutonneuse à tout ce qui peut se passer dans le monde, en interprétant les événements en fonction des a priori.
L’intérêt de tous
- Comme grand nombre d’intermédiaires sont payés en pourcentage, tout le monde a intérêt à voir le prix du baril s’envoler. (A lire, d’ailleurs, chez Dunod, une nouvelle collection : 100 petites expériences... dont celle de Nicolas Guéguen, sur le comportement du consommateur. On y reviendra) - La crise actuelle est avant tout anticipatrice, face aux risques liés à la faiblesse des stocks des pays occidentaux, et notamment aux Etats-Unis. Elle est également liée à la faiblesse des capacités de raffinage du pétrole brut et au peu de moyens engagés pour la découverte de nouvelles ressources. - Enfin, n’est-il pas normal que sur un long terme les prix montent ? Depuis le milieu des années 1950, les prix à la consommation, nous dit l’Insee, ont été multipliés par douze. C’est à peu près la même tendance pour les prix de la construction (même si, sur les dernières périodes, la hausse est plus importante). En 1955, le prix du baril, en dollar USD, et en moyenne en fonction de sa provenance, était de 18 dollars. On multiplie par douze : 216 dollars. Voilà le prix du baril, s’il avait suivi le rythme de l’inflation dans un pays comme la France. Résultat : nous devrions sourire, le pétrole vaut trois fois moins que ce qu’il devrait.
Pour en savoir plus sur Internet :
- Le pic pétrolier, pour aujourd’hui ou pour demain ? - L’historique des cours du pétrole (en anglais)
Photo : Musée français du pétrole.
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