La plus forte perte pour les États-Unis
Le préjudice énorme causé à l’image de la mentalité et de la réputation est la plus terrible des pertes que les États-Unis ont subies lors des récents événements et de l’assaut du Capitole par certains partisans du président Donald Trump. Cet incident a été dénoncé et rejeté par la majorité des politiciens, des démocrates et des républicains américains.
L’ancien président George W. Bush a décrit la scène comme « écœurante et déchirante. » « C’est ainsi que les résultats des élections sont contestés dans une république bananière, pas dans notre république démocratique, » a déclaré Bush cité par CNN.
« Je suis consterné par le comportement imprudent de certains dirigeants politiques depuis l’élection et par le manque de respect manifesté aujourd’hui pour nos institutions, nos traditions et nos forces de l’ordre, » a averti M. Bush dans sa déclaration indiquant que la rébellion porterait gravement atteinte à la nation et sa réputation.
Il a appelé les gens à « laisser les responsables élus par le peuple remplir leurs fonctions et représenter nos voix dans la paix et la sécurité. » L’ancien président américain Barack Obama a accusé le président Donald Trump d’être responsable des événements du Congrès, déclarant que c’était « une honte [mais pas] une surprise. »
De leur côté, les responsables républicains ont critiqué ce qui s’est passé au Capitole. Selon le représentant Mike Gallagher, les scènes de cambriolage sont du genre « République bananière. »
Le sénateur Ben Sasse a déclaré : « Les mensonges ont des conséquences. Cette violence était inévitable » à cause de la division alimentée par le président. Pour le sénateur républicain Mitt Romney, les scènes sont « une insurrection, provoquée par le président des États-Unis. » La perte des États-Unis naît avec une vérité que tout le monde connaît.
Ce qu’on désigne sous le nom de « valeurs américaines » fait partie intégrante de la force et du prestige des États-Unis. Elles leur ont permis de se hisser au rang de première superpuissance à la tête de l’ordre mondial actuel.
La liberté et la démocratie sont au cœur de ces valeurs. Elles représentent l’essence même du modèle de démocratie libérale dont les Américains se targuent depuis la Seconde Guerre mondiale. Le « soft power » américain repose sur de nombreux piliers, dont la liberté et la démocratie, et tous ces piliers font partie du soi-disant rêve américain.
Le modèle américain est principalement basé sur la gouvernance démocratique. Il garantit la liberté pour tous, l’État de droit, la souveraineté du peuple et le système électoral.
Cela est devenu une source de discorde et de division parmi les composantes du peuple américain, après l’attaque par l’actuel président. Trump a lancé des douzaines d’accusations selon lesquelles les élections ne reflétaient pas la volonté du peuple américain, avant que la scène de grande division ne devienne la marque de fabrique du média américain pour le monde.
Le problème n’est pas la controverse sur les résultats des récentes élections présidentielles. Il s’agit plutôt de la façon de gérer cette controverse, de la représenter auprès du public américain et de l’utiliser pour contourner ces résultats en faveur du président républicain Donald Trump.
Il en est résulté une profonde agitation politique qui ne finira pas avec la ratification de ces résultats par le Congrès. En fait, des dizaines de millions d’électeurs ont voté pour un président qui leur assure jour et nuit que leurs votes ont été « volés » dans un prétendu complot du parti démocrate. Ainsi, l’investiture du président élu Joe Biden ne mettra pas fin à la tourmente.
Elle n’en guérira pas les effets. Elle va seulement aborder les aspects procéduraux afin que la dynamique institutionnelle puisse se poursuivre. Mais le défi le plus difficile reste de réparer les lourdes pertes au niveau mondial.
Il faudra restaurer l’image de marque de la démocratie américaine aux yeux du monde. Plus important encore, il faut, je suis sûr, s’attaquer aux profondes fractures qui ont affecté la société américaine à la suite de ce conflit politique du jamais vu.
Remettre en question le modèle de la démocratie américaine ne signifie pas seulement remettre en question les origines, la philosophie et les mécanismes opérationnels du modèle. Cela signifie plutôt un scepticisme parallèle sur toutes ses conséquences institutionnelles.
C’est surtout en ce qui concerne la politique étrangère américaine qui fait de Washington le garant des libertés, de la démocratie et des droits de l’homme dans le monde. Un tel politique se fonde sur des rapports qui classent les pratiques et les comportements des États, classification aux implications considérables.
Le classement revêt une grande importance, que ce soit pour les relations des États-Unis avec ces pays ou entre les pays et entre eux, ou encore entre les États et les organismes internationaux spécialisés. La plupart d’entre eux considèrent les rapports et les évaluations américaines sur ces sujets comme une référence directrice de poids.
Finalement, le Congrès américain a entériné la victoire du président Biden à la présidence, tournant la page sur Trump. Mais la perdition pour les États-Unis reste néanmoins grave. La force du modèle s’affaiblit. Ses bases battent de l’aile.
Il est difficile de défendre les événements au Capitole qui font penser aux « républiques bananières, » comme l’ont décrit de nombreux politiciens américains.
La mission du président élu Joe Biden, qui consiste à restaurer la confiance et à effacer les profondes cicatrices qui ont terni la réputation de son pays et sa position dans le monde, peut s’avérer un travail de longue haleine. Elle exige un effort bipartisan, démocratique et républicain, ainsi du côté de toutes les forces politiques, médiatiques et académiques américaines.
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