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La rationalisation de l’individu ou comment rendre l’homme calculable

Pour que le capitalisme fonctionne, les théoriciens économiques se sont attachés à un paradigme aujourd’hui couramment accepté, la rationalisation de l’individu. Partants du principe que l’homme est capable de faire les meilleurs choix pour lui-même, les économistes ont considéré que les comportements humains se devaient d’être rationnels, et ont intégré à cette donnée la notion de calcul, la raison devenant le résultat d’un désir mis en confrontation avec les possibilités de réalisation de ce désir, en termes financiers. Ainsi fut établi le concept de « consommateur rationnel », unité de mesure rendant possible le fonctionnement de théories économiques mathématiques à l’intérieur desquelles l’ensemble des êtres humains est censée pouvoir rentrer.

Mais puisque l’homme n’avait pas une valeur mathématique intrinsèque, il fallait qu’à tout prix il devienne calculable, et ce dans le but avoué de pouvoir le comprendre, et aussi de le contrôler, pour pouvoir diriger non seulement ses actes individuels, mais aussi les comportements de masses qui ne sont considérées que comme une somme d’individus.

L’idée de ne juger l’homme que sous l’angle du consommateur pourrait être vu par certains comme une simplification outrancière de son humanité (voire même sa négation), mais il est apparemment accepté par la majorité que la valeur d’un homme ne se résume aujourd’hui qu’à un capital financier (ce que l’on possède). Niant ainsi toutes les autres composantes de l’être humain, le tour de force des théories économiques est d’avoir réussi à faire rentrer de force les hommes dans des cases mathématiques, en leur supposant une raison qu’ils n’ont pas naturellement, mais qui leur est peu à peu inculquée au cours de leur socialisation.

Mais qu’en est-il réellement de « l’homo oeconomicus » que le capitalisme a engendré ? la raison et la rationalité économique sont-elles différentes, et l’homme est-il véritablement calculable ?

Avant de répondre à ces questions, il faudrait pouvoir déterminer ce que représentent ces notions : car si la rationalité économique est le fait de faire un choix économique « éclairé », la raison doit-elle nécessairement pousser à la recherche de la nationalité ? pour qu’il soit en mesure d’exister, l’homo oeconomicus doit avoir au préalable accepté la morale économique comme raison supérieure, ce qui est le résultat d’un conditionnement éducatif et social programmé.

Car en réalité les théories économiques préexistent à l’arrivée de cet être rationnel. Elles fonctionnent dans la théorie, mais pas dans la pratique, parce qu’elles ne correspondent pas au comportement naturel de l’être humain. Ainsi, et pour ne pas avoir à rechercher des améliorations à ces théories (prendre en compte la complexité de tous les êtres humains est chose impossible), les grands penseurs de notre monde ont trouvé plus simple de transformer l’homme que d’essayer de le comprendre. Il fallait qu’à tout prix l’homme devienne un chiffre, une unité de mesure, et finisse par faire correspondre ses comportements au modèle désiré.

En transformant ainsi la morale et en redéfinissant la raison comme rationalité individuelle, le capitalisme a réussi le formidable tour de force de réduire le champ des comportements humains en réduisant ses volontés à la consommation, ou tout au moins à l’unique satisfaction de ses besoins matériels, et bien sûr personnels.

Cette évolution majeure de l’individu qu’est l’homo oeconomicus permet ainsi à la fois de détacher l’homme des préoccupations spirituelles et humanistes qu’il pourrait vouloir en l’intégrant de force dans la « machine » capitaliste (moins un individu possède, moins il est valorisé par la société), et également de rejeter dans la misère et l’opprobre ceux qui refusent de correspondre au modèle proposé (celui qui refuse les comportements consuméristes n’est même plus dans la société).

Pourtant, l’homo oeconomicus ne vivra pas éternellement, car l’homme n’est en vérité ni calculable ni raisonnable, et encore moins rationnel. Il est un être passionné qui ne réfléchit qu’avec son coeur, et ce malgré tous les conditionnements possibles. C’est pour cette raison qu’aucune théorie économique ne fonctionne ni ne fonctionnera jamais. L’homme est à la fois capable d’égoïsme et de générosité, capable de détruire sa planète tout en triant ses déchets, capable de faire la guerre tout en souhaitant la paix.

Nos bons gouvernants ont tous désirés un jour un monde parfait où les comportements humains seraient à la fois prévisibles et raisonnables, sans se rendre compte que ceux qui ont créé le « consommateur rationnel » n’en étaient pas eux-mêmes, et que ce monde qu’ils croient idéal n’auraient plus besoin d’eux, ni de leur pouvoir. Au lieu de ne chercher qu’à contrôler des hommes qu’ils ne connaissent pas, ils feraient mieux d’apprendre à les connaître : ainsi seulement ils n’auraient plus le désir de les contrôler.


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7 réactions à cet article    


  • NWN NWN 14 juillet 2009 12:16

     

    Merci Caleb de cette réflexion pertinente comme les autres précedement….j’ai souvent manqué de temps pour vous le dire .

    Ça fait plaisir de voir que des pensées qu’on a pas le temps d’écrire, le sont par d’autres .


    Le IXX siècle apparaitra comme un axe essentiel dans l’histoire, celui ou un basculement humain dans le rationnalisme « irrationnel » a ouvert le futur à l’émergeance de ces être devenant chose, et dont la valeur et la dignité fluctue en fonction de la Bourse . A cette époque est née la pire des sectes qu’est connue l’humanité, capable de déspiritualiser et de déshumaniser l’homme, pour en faire une machine rentable, qui de plus se croit supérieur à tout ce que l’humanité a pu produire, son ultime symptome de survivance psychologique .

    C’est aussi pour ça , que de nombreux mouvement spiritualiste sont apparue à cette époque pour contrer cette tendance .


    Contrairement a votre optimiste s’accrochant à la passion et au coeur des hommes, pour les sortir de ce marasme, tout ceci me semble faire parti de la « chute » de l’homme dans la matière et le but est bien qu’une partie en reste prisonnière .

    L’humanité doit se couper en deux, on peut déjà en voir les prémisses .


    Votre conclusion, « ainsi seulement ils n’auraient plus le désir de les contrôler. » est contradictoire avec votre titre, dans lequel vous sentez bien que l’intéret de certaines Forces Contraires est de maitriser les hommes en asséchant leur coeur, au lieu de les laisser se libérer comme le permet l’esprit .


    C’est le début d’une humanité Déchue, qui ne retrouve pas le chemin vers sa valeur intrinsèque et qui s’abîme dans une quête de valeur infernal et insatiable .

    Tout ceci n’est bien sur pas naturel et génère chez l’homme nombre de dysfonctionnements psychologiques et maladifs, mais ces même dysfonctionnements permettront de promouvoir les Dieux matérialistes qui pourvoirons a tout, jusqu’à modifier la nature profonde de l’homme pour qu’il soit mieux adapté à la logique mécanique . La science s’y emploi activement en mécanisant la vie, rendant l’homme stérile de toute liberté .
    a savoir :
    http://zone-7.net/sommes_nous_gouvernes_par_des_psychopathes/index.html
    http://zone-7.net/psy---humanite_les_2_races/index.html
    bien à vous


    • caleb irri 14 juillet 2009 22:35

      @ NWN

      tout d’abord merci pour votre message...

      au sujet de mon « optimisme », il est tout relatif en ce sens que la chute inévitable du capitalisme permettra d’une part la dislocation de l’homo oeconomicus (ce qui est une bonne chose), mais de l’autre part on ne sait toujours pas par quoi il sera remplacé... et c’est là que mon optimisme flanche dangereusement : car les dirigeants de cette planète ont compris eux aussi cette chute du capitalisme, et ils travaillent à le remplacer par l’homo miserabilis, ou esclave consentant... tandis que nous, nous ne faisons que nous plaindre sans réussir à trouver un système à opposer à celui qu’ils nous préparent...


    • NWN NWN 16 juillet 2009 00:39

       

        • tandis que nous, nous ne faisons que nous plaindre sans réussir à trouver un système à opposer à celui qu’ils nous préparent...


      Nous plaindre : c’est peut etre notre erreur . C’est aussi ce qu’ils veulent, qu’on soit dans la peur, qu’on quitte notre sérénité, ainsi on nourri leur cause, et ça grignote la notre .


      Trouver un système : Y a t-il un système a trouver ? Ne l’avons nous pas depuis toujours ? N’est-ce pas eux qui cherchent à imposer un système qui défasse l’humanité ?

      On cherche comment établir un humanisme fraternel face à cette dérive, mais l’homme serait foncièrement bon et humaniste par définition . C’est le système qui le rend mauvais et égoiste, et ce système accentue son pouvoir sur cette corruption des ames . Voir la « ponérologie » .


      A Opposer : S’opposer est aussi ce qu’ils souhaitent, qu’on se mettent en révolte contre eux et que là aussi, notre sagesse d’ame soit bafouée . C’est eux qui s’oppose à l’homme et a ce qu’il est .

      Donc nous devrions peut etre rester droit dans nos bottes, et fidèle a notre réalité humaine, plutot que de vouloir s’opposer et etre amener a pratiquer ce qu’on combat .

      La meilleur opposition n’est-elle pas la quiétude et la non opposition ? Ne pas leur donner le change et faire en sorte que leur action n’est pas d’emprise sur nous ?


      à celui qu’ils nous préparent... : Voyez, il nous prépare à devenir ce que l’on ne veut pas...Ne pas se laisser « préparer » et rester ce que l’on est intrinsèquement .

      Face à ce bordel et comment agir, je pense souvent à l’enseignement de Steiner concernant « l’individualisme éthique » (« la philosophie de la liberté »), qu’on peut percevoir comme un égoisme humaniste et propre . Rester fidèle a soi tout en étant intégrable dans l’humanisme, soit l’apport que chaque individu peut apporter à l’humanité ... Rejoignant aussi cette idée que je suis le monde et que ce que je change ou fait en moi, c’est au monde que je le fais .

      Ainsi, si j’ai l’impression de n’avoir aucun pouvoir sur le système, par ailleurs j’ai aussi tous les pouvoirs sur lui . Donc si je ne marche pas comme le système le souhaite, j’empêche ce système d’exister, puisque sa réalité n’éxiste qu’à travers mon réactif que je lui oppose .

      Si je n’est pas de réactif par rapport a ce qu’il prépare, alors il ne se prépare rien .

      L’individualisme éthique peut etre un égoisme au service de l’humanité, suivant comme je le comprend . Fidèle à sa beauté d’ame, permettrait d’assurer la pérennité de l’humanisme,...même si ces Etres ressemblent à un chapeler d’iles au milieu des eaux nauséabonde …

      Bref, comment le bon doit se positionner par rapport au mauvais, reste un sujet de méditation ...notament sur la « non-action », ne pas être réactif , si ce n’est en renforçant nos convictions de fraternité et de partage ...
      Je pense qu’ils jouent sur le groupe, les ensembles, le collectif.. et que c’est par l’individu, la liberté d’être, l’autonomie du coeur...qu’on peut peut etre le mieux s’opposer ... ?

      Donc ne pas inviter a changer le système, mais plutot à s’en libérer ...Le lacher prise ....


    • dom y loulou dom 14 juillet 2009 12:51

      oui le capitalisme aura surtout montré le leurre complet qu’il représente à partir du moment où les gros tenants de ce capitalsime montrent à tous que tout leur appartient.

      Nous vivons dans une société complètement lévitante, où les esprits errent tout le temps derrière de vaines gloires tandis que les tenants leur détruisent tous les équilibres e leur dit monde.

      Et tandis que chacun cherche à se glorifier en occident la planète souffre et les cératures disparaissent , mais jusqu’aux poisons qui nous sont saupoudrés dessus de partout, ils sont niés, tant ue les journaux ne disent pas quelque chose, cela n’existe pas.

      Grotesque. On atteint des summums. Et la plupart sont achetables très vite, surtout s’ils ont une veine contestatrice comme nicolas Hulot par xemple, qui se retrouve à militer pour la taxe carbonne !!!

      cette supercherie qui voudrait que les citoyens règleraient le réchauffement (inexistant... hormis celui parfaitement provoqué par tous les moyens possibles) en payant des taxes... mais bien sûr... la taxe changera la base énergétique utilisée pour cette soicété de consommation : le pétrole de l’empire Rockefeller ?

      Et en plus on ricanne en se disant que ce monde est celui du diable et que c’est donc très amusant qu’il soit détruit... en plus « homme » est une bête donc onse réjouit follement de la « rapture » des chrétiens, on va tous mourir assassinés, comme c’0est super et cela poruvera qu’on est des saints !! wouaouuuu, la totale.

      jamais les égos ne se seront ainsi boursouflés de connerie. Il y a en a même quo pensent qu’ils iront au paradis avec leur haine... ils ont probablement raison... ce quils ne voient pas c’est à quel point leur esprit sera en contradiction avec le grand bain d’amour qui nous attend de la’utre côté.

      Mais la vie est sacrée !! Ce que touteautre tribu de cette terre n’aura jamais oublié tandis que l’occident en descendance des fous furieux de babylone ne voit pas dans son mysticisme absolu. Car oui, le consommateur d’aujourd’hui est un être complètement mystifié qui navigue entre Adam et Eve et les chimpanzés en se demandant tout le temps de quelle faut il est encore coupable ou de quel enfer, vivant ou mort, l’attend encore.

      Donner le goût de la mort à l’humnaité, voilà sans doute le crime le plus abject des Bilderberg qui ne veulent pas laisser ce monde respirer.

      Ils ont un autre agenda où aucun de nous n’a de place.

      Fuir dans l’espace en ne laissant rien derrière, que ne reste aucune mémoire jamais de tous leurs crimes perpétrés en 4000 ans de sauvagerie, d’esclavage et de confusion apoortée aux hommes. La civilisation en occident a toujours dû se battre pour continuer à exister sous les coups d’assomoir de ces 300 familles issues des tenants de l’antique égypte déjà qui savent parfaitement semer la confusion et financer en permanence deux groupes en conflit pour assurer les dividendes de leurs usines d’armement. Demandez à Rothschild.

      Savez-vopus par exemple que presque tous les présidents des USA sont issus de lignées de hiérarques européens ? Des Habsburg, mais aussi des lignées de Napoléon ou plus lin, celle des Césars ? Bush descendant directement de Constantin, par exemple ?

      Normal dites-vous ? Complètement grotesque oui quand on croit à la démocratie, elle a toujours été un leurre complet et la représentativité A VECU.


      • Arno_ Arno_ 14 juillet 2009 14:37

        « car l’homme n’est en vérité ni calculable ni raisonnable, et encore moins rationnel »

        1. Que l’homme ne soit pas rationnel, ca se discute. Comment se mesure ou se decide la rationnalite d’un individu  ? A l’aune de ce qui est bon pour l’individu ou pour l’espece humaine ? Et ce dans quel contexte temporel (court ou long) ?
        La rationnalite se mesure en terme d’objectif. Un individu cherche a rationnaliser ses choix et ses comportements en fonction d’un objectif qu’il s’est fixe, pour lui ou pour sa famille ou pour l’espece humaine, pour maintenant ou pour dans 1000 ans...

        Supposer une rationnalite universelle implique un dessein commun de chacun des individus. Un comportement peut vous paraitre irrationnel, mais ne le sera pas selon mes valeurs, mes objectifs plus ou moins immediats.

        2. Dire que l’homme n’est PAS (et donc ne sera jamais) calculable et eriger cela en verite est une aberration. Un doute tout scientifique prevaut en la matiere. Peut-etre un jour, aussi complexe que vous puissiez l’imaginer, disposerons-nous d’un modele mathematique a 1000 milliards de variables en entree d’un systeme extremement complexe certes.
        Disons que theoriquement, ca n’est pas impossible. Et donc la verite que vous etablissez de maniere peremptoire ne saurait tuer l’eventualite de cette theorie.

        Enfin bon, je chipotte hein. Votre analyse rejoint celle de Jacques Genereux dans son livre « Les vraies lois de l’economie ». Analyse a laquelle j’adhere dans le contexte de notre epoque.


        • caleb irri 14 juillet 2009 22:48

          @ Arno

          tout à fait d’accord avec vous : ce qui est bon pour l’individu ou pour les masses diffère pour chacun. c’est pourquoi l’homme n’est pas calculable, à mon sens. par contre, le fait de considérer la question sous un angle purement économique, et l’imposer comme élément de comparaison universel, pousse les hommes, qui aiment à se comparer, à n’utiliser que cet élément, en laissant de côté tous les autres paramètres.

          ensuite, imaginer un modèle mathématique à mille milliards de paramètres est possible, mais en tirer une théorie économique universelle c’est autre chose. car les paramètres qui influent sur notre comportement sont de nature non mathématique, et un individu dit « rationnel », disposant d’un comportement conforme au modèle imposé, peut malgré tout, à un instant indéterminé et suivant des circonstances tout aussi indéterminées, ne pas suivre logiquement le comportement qu’on attendrait de lui à cet instant, et dans ces circonstances...

          en définitive, même si l’homme est conduit à l’adoption d’un comportement calculable, il lui restera toujours une part incontrôlable qu’on ne peut calculer autrement que part probabilité, et qu’il ne faut pas négliger non plus...


        • herbe herbe 14 juillet 2009 17:30

          Oui mais vint le prix nobel 2002 ( attention au terme Nobel pour l’économie ) et les avancées de l’économie comportementale :

          http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_comportementale

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