La réalité historique : l’antisionisme n’est pas de l’antisémitisme
Un député en marche, ex de l'Union pour la démocratie française, du Nouveau Centre et de l'Union des démocrates et indépendants, présente à l'assemblée nationale une proposition de résolution visant à lutter contre l’antisémitisme en décrétant que l’antisionisme est « une des formes contemporaines de l’antisémitisme », pour reprendre les mots du Président de la République.
Dit simplement l'antisionisme est de l'antisémitisme.
Avant de vouloir affirmer quoi que ce soit, commençons peut être par préciser ce sur quoi porte le débat.
De quoi parle-t-on ?
Israélien : tout citoyen d'Israël est israélien ; il peut être croyant (juif, musulman, chrétien, autre) ou athée ; d'origine européenne, arabe ou autre.
Juif : tout croyant adepte du judaïsme. Il n'y a pas de lien nécessaire entre être juif et être israélien.
Sioniste : tout individu qui revendiquait la création d'un état israélien et depuis son implantation en 1948 au moyen orient, tout individu qui en défend la sauvegarde.
Le sionisme a été traversé par des courants politiques divers allant de l'extrême droite nationaliste laïque à l'extrême gauche anarchiste en passant par des fondamentalistes religieux ou des communistes.
Les orientations politiques vont de la constitution d'un état laïque avec octroi de territoires aux palestiniens, à la revendication d'un état purement juif d'Israël avec le transfert des Palestiniens et des Arabes israéliens vers les autres pays arabes.
Antisémite : être contre les sémites.
Sémites : « aujourd’hui, les peuples qu’on peut qualifier de sémites sont essentiellement les Juifs et les Arabes, mais, dans l’Antiquité, on comptait également les Assyriens, les Babyloniens, les Araméens, les Cananéens et les Phéniciens. Ils se caractérisent par leur appartenance à une même famille linguistique, mais ne présentent pas nécessairement d’autre parenté. » (Dominique Mataillet dans "Jeune Afrique")
Ainsi littéralement, antisémite c'est aussi être anti arabe.
Dans les faits, tel qu'il est employé aujourd'hui, antisémite remplace anti juif.
Les termes "hébreu" et "israélite" désignaient les peuplades originelles du judaïsme et ont conservé cette connotation religieuse et se rapprochent du terme juif, le plus utilisé désormais.
Antisioniste : ceux qui ont été hostiles à la création d'un État juif, ceux qui sont aujourd'hui hostiles à son existence et, plus nuancé, ceux qui critiquent la politique actuelle des gouvernants israéliens dans ses aspects expansionnistes et guerriers lesquels, en toute neutralité, sont indéniables.
L'antisionisme est disparate : il y a eu des antisionistes religieux juifs européens, des ultra-orthodoxes ashkénazes, dans divers pays, des mouvements socio-démocrates, socialistes, en France, avant 1945, l'Alliance israélite universelle.
Beaucoup contestaient les modalités de création de l'état, son lieu d'implantation ou son caractère non religieux, etc.
On le voit, tout cela est très complexe et parfois ahurissant : l'accord Haavara.
L'accord "de transfert" conclu avec une frange du mouvement sioniste allemand a été accepté par le gouvernement d’Hitler en 1933, entre autres choses, pour permettre l'émigration juive d'Allemagne vers la Palestine.
(Bien évidemment, en aucun cas on peut y voir l’expression d’une alliance ou d’un rapprochement entre sionistes et nazis.)
On pourrait dire qu’Hitler, antisémite monstrueux, a été pro-sioniste en la circonstance.
Alors peut-on considérer l'utilisation des mots "sioniste", "sionisme" comme une insulte antisémite dans tous les cas ?
Et plus radicalement encore, doit-on promulguer une loi pour permettre de condamner tous ceux qui pourraient les employer quelles que soient les circonstances ?
Il est vrai que certains dissimulent leur antisémitisme derrière ces mots. Mais ceux-là sont déjà facilement démasquables et donc condamnables avec la législation actuelle.
La preuve :
« Le gilet jaune mulhousien de 36 ans qui avait insulté le philosophe Alain Finkielkraut, "espèce de sioniste", "sale race", "t'es un haineux et tu vas mourir", a été condamné à 2 mois de prison avec sursis pour « injures publiques en raison de l'ethnie, nation, race ou religion de la victime. »
Vendredi 12 juillet 2019 à 16:18 - Par Guillaume Chhum, France Bleu Alsace, France Bleu Elsass, France Bleu.
La lutte contre l'antisémitisme comme celle contre le racisme nécessitent d'autres armes.
Est-ce que cela intéresse vraiment nos gouvernants ?
Cette proposition a été enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 novembre 2019 et signée entre autres par Gilles Le Gendre, Stanislas Guérini, Aurore Bergé, François de Rugy, Benjamin Griveaux, Cédric Villani, enfin vous voyez qui.
C'est quand même bizarre cette coïncidence récurrente : dès qu'une crise sociale s'annonce, on met en avant l'antisémitisme ou l'islamisme ou l'immigration ou l'insécurité ou les privilèges des fonctionnaires, des régimes spéciaux.
A croire que certains voudraient jouer à colin-maillard avec l'actualité, n'est-ce pas Sylvain.
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