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Accueil du site > Tribune Libre > La Revue du crieur et ses outrances concernant Marcel Gauchet

La Revue du crieur et ses outrances concernant Marcel Gauchet

On y apprend que Gauchet est un réactionnaire, un intellectuel de pouvoir, qu'il côtoie des hommes politiques de gauche et même de droite. Et que même des gens d'extrême-droite l'apprécient. Et qu'il intervient auprès de Fondapol (boîte à idées de l'UMP). On y apprend aussi qu'il considère d'un mauvais œil la promotion de la liberté des femmes, le mariage pour tous, l'immigration. Et qu'il voudrait qu'on revienne à l'autorité du passé. Et qu'il flatte dans ses bouquins ou ailleurs les institutions ecclésiastiques et que l'église l'aime beaucoup pour cela. Ou encore qu'il voue une admiration pour les État-Unis, y voit un modèle parce que les États-Unis malgré leur ultra-modernité technique sont restés socialement plus traditionnels que l'Europe.

Ludivine Bantigny et Julien Théry-Astruc ont-il vraiment lu les livres de l'auteur en question, car enfin leur manière de les avoir compris est abracadabrante, ils ont pondu un article de quinze pages qui n'a rien d'un article de fond, c'est une opinion hallucinée, incroyablement infondée et d'une outrance digne d'un Zemmour ou un Onfray. Leur méthode est la polémique, l'emballement, le jugement binaire, la simplification, le détournement en but de convaincre (le font-ils exprès ou est-ce involontaire, ne sais ce qui est pire). Quand donc serons-nous libérés de ce genre de sous-produit intellectuel qui s'exerce dans les médias ― ce n'est pas du journalisme d'idées, c'est, concernant cet article de la Revue du crieur, du journalisme puéril.

Je ne suis pas un intellectuel et ne prétends pas l'être, il me serait difficile d'expliquer le génie des ouvrages de Marcel Gauchet, je craindrais d'en déflorer les richesses. Ce sont des ouvrages complexes et en faire une vulgarisation demanderait un talent qui me fait défaut. Je ne suis pas allé bien loin dans les études, je suis un autodidacte et l'écriture ne m'est pas facile. Mais je peux au moins et en honnête homme répondre ici aux hallucinations de madame Bautigny et de monsieur Théry-Astruc. Eux sans doute se disent intellectuels ou chercheurs, eux sans doute ont fait de longues études, eux sans doute sont des héritiers, mais alors c'est bien facile, à quoi bon en être arrivé-là ― si ras de terre !

En dehors de cet article de la Revue le crieur qu'ont-il fait d'autres, je ne connais, ne sais pas et me garde de mettre tout leur travail au niveau d'une grande niaiserie (j'espère que c'est moins pire, j'espère que ça a plus d'ambition et que c'est moins tape œil : le but était peut-être d'attirer l'attention et de se faire ainsi connaître et, du même coup, faire des ventes importantes de ce numéro premier de la Revue du crieur - que pour ma part j'ai volé). Ils auraient pu tout aussi bien faire si, par exemple, ils avaient soutenu que : Albert Camus était un réactionnaire. Ou bien : Milan Kundera, George Orwell, Hannah Arendt : leurs œuvres sont de droite la plus traditionnelle et conservatrice. Ou encore : Pierre Rabhi, invité par Jean-François Copé à débattre, est à la solde de la droite.

Par exemple Le désenchantement du monde (Marcel Gauchet) ― impossible après lecture de ce livre de philosophie politique d'en comprendre le contenu comme étant une louange à la chrétienté et aux institutions de l'église (ni détestation d'ailleurs) et pourtant nos deux Crieurs estiment que oui.

Et avec ça ces deux crieurs-stigmatisateurs se permettent ce propos : « Les travaux philosophico-historiques de Marcel Gauchet sont-ils vraiment ― et sérieusement ― lus ? »

Sérieusement, ces deux-là devraient inviter Marcel Gauchet dans leur revue pour que celui-ci puisse les éclairer sur ce qu'ils ont si mal compris. Le désenchantement du monde est un ouvrage complexe et passionnant, et en parler à la place de son auteur, c'est risquer de se planter... mais s'y perdre comme madame Bautigny et monsieur Théry-Astruc s'y sont perdus, c'est puéril (je n'ose dire malhonnête car peut-être ne s'en rendent-ils même pas compte, hein). Grosso-modo, pour eux, ce livre, c'est de l'idéologie, et de l'idéologie de droite catholique.

Oh ! Qu'un véritable spécialiste nous explique à quel point ces deux Crieurs se sont prétentieusement et puérilement plantés ! ce n'est pas de mon ressort (sauf peut-être à y passer des mois).

Juste je conseille à ceux qui n'aurait jamais lu Gauchet de se faire leur propre avis en commençant par lire La condition historique, ouvrage d'entretiens qui vous permettra une lecture plus facile de son maître livre : Le désenchantement du monde (le titre est emprunté à une formule de Max Weber, vous constaterez que Gauchet en parle dans l'introduction, chose que les deux Crieurs omettent de préciser pour nous faire croire, implicitement, que Gauchet voulait le cacher). Vous pouvez aussi sur internet l'écouter dans des conférences, elles sont toujours intéressantes.

En un mot évitez le goût des abracadabrantes polémiques (journalisme puéril) de madame Bautigny et monsieur Théry-Astruc et ouvrez vous à l'intelligence de Marcel Gauchet et à sa sagesse démocratique, il en est l'un de nos meilleurs représentants.

Ce que j'écris là, bien sûr, est une forme de cri.


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2 réactions à cet article    


  • Le p’tit Charles 28 juin 2015 08:49

    Au lieu de prendre un Gaucher...prenez un Droitiez.. ?


    • Profil supprimé Jean-Michel Lemonnier 28 juin 2015 23:15

      L’historien Marcel Gauchet s’est attaqué, depuis longtemps, à une des figures tutélaires de la gauche universitaire (Michel Foucault) et n’a jamais goûté aux approches freudo-marxistes de l’histoire. Quand on conteste des « thèses » et postures qui composent le socle idéologique de la gauche française depuis plus de 40 ans : la folie invention de la modernité occidentale (comme si « l’asile » ne pouvait pas créer les conditions de la réintégration de l’individu dans la société), le surmoi création de la société bourgeoise, l’apologie des « sexualités périphériques », etc. on ne peut que s’attirer les foudres de toute cette flicaillerie qui -de l’herméneutique du sujet plein la goule- loin de défendre la liberté d’expression et un polythéisme des valeurs, protège la consanguinité idéologique de son milieu.

      Gauchet, contesté encore récemment par la connerie pétitionnaire des Vadius et Trissotin (cf. Les rendez-vous de l’histoire de Blois) autoproclamés "élite intellectuelle" du pays, a pu, comme d’autres, vérifier l’insupportable tyrannie de ces crétins pointant donc du doigt le « furieux réactionnaire » Gauchet et qui (on ne rit pas !) à la question « pour vous qui incarne la figure du »rebelle« ? » répondent Renaud, Cali ou Joey Starr...

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