La souveraineté de l’Irak et la sécurité nationale arabe
Déjà, le nouveau gouvernement irakien de Mustafa Al Kazimi a du pain sur la planche face aux opérations militaires menées par l’Iran et la Turquie sur le territoire irakien. En réaction, les Irakiens ont convoqué l’ambassadeur iranien et lui ont remis une note de protestation.
Selon une déclaration des Affaires étrangères irakiennes, « cet appel fait suite à un bombardement de l’artillerie iranienne. Les bombardements de l’artillerie iranienne ont frappé les villages frontaliers irakiens à Haj Omran dans le gouvernorat d’Erbil, mardi dernier, faisant des pertes matérielles, des dommages aux biens et semant la panique parmi les habitants de ces régions. »
D’un même souffle, Bagdad a demandé à Ankara de retirer ses troupes du territoire irakien et de « renoncer aux actions provocatrices » au lendemain du lancement par la Turquie d’une offensive terrestre dans le nord sous prétexte de poursuivre des membres du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).
Pour tout dire, rien ne justifie de manière réaliste et acceptable que l’Iran et la Turquie mènent des opérations militaires en Irak. Nous assistons plutôt à une agression flagrante sur le territoire irakien, une violation patente de la souveraineté nationale irakienne et une nouvelle double atteinte à la sécurité nationale arabe.
Mon sentiment est que les opérations ont été coordonnées conjointement par les parties iranienne et turque. Ils tâtent le terrain pour voir la réaction et les orientations du nouveau gouvernement irakien. Ce surtout ce que veut la Turquie, qui saisit au vol la préoccupation mondiale de la lutte contre le coronavirus pour atteindre ses fins régionales. Les agissements observés rappellent la nécessité pour le nouveau gouvernement irakien de revoir la politique de ce grand pays arabe à l’égard de l’Iran et de la Turquie en particulier.
Les deux acteurs sont déterminés à resserrer les contours de la souveraineté de l’Irak sur son territoire. Chacun d’eux compte sur ses cartes respectives pour gagner leur pari : L’Iran entretient des relations étroites avec les milices sectaires qui cherchent à saper la volonté politique irakienne, comme l’a dit Al Kazimi lui-même, et la Turquie à abuser des accords de sécurité signés dans diverses circonstances avec les précédents gouvernements irakiens, s’arrogeant ainsi le droit d’intervenir pour traquer les éléments du PKK sur le territoire irakien.
Certains rapports des médias ont attiré l’attention sur une visite secrète du chef des services de renseignement turcs Hakan Fidan en Irak juste avant le début des opérations militaires. Ces rapports lient l’opération turque aux entretiens de Fidan avec le Premier ministre irakien. Ceux-ci laissent entendre un feu vert irakien à cette opération. Mais je ne pense pas que ce soit vrai.
Depuis son entrée en fonction, Al Kazimi s’est montré soucieux de la souveraineté de l’Irak et de la non-ingérence dans ses affaires intérieures. Il est donc peu logique qu’il commence sa mission par donner aux Turcs l’autorisation de bafouer la souveraineté de son pays pour n’importe quelle raison, en particulier dans un climat régional empreint de vigilance face aux interventions provocatrices des Turcs en Syrie et en Libye. Ou alors, la partie turque s’est engagée à faire quelque chose mais à aller plus loin que les limites de ce qu’il a été convenu, ce qui n’est pas surprenant de la part de la Turquie erdoganienne.
Eriger un nouvel Irak ne se fera pas sans une vision et une stratégie nouvelles et pointues dans la gestion des relations notamment avec la Turquie et l’Iran, en passant par consolider la souveraineté irakienne.
Il faut passer en revue tous les accords antérieurs qui ne sont pas conformes ou contraires aux exigences de cette souveraineté ou laissent transparaître des atteintes à cette souveraineté, quels que soient les objectifs et l’intérêt de ces accords. Nos frères irakiens peuvent faire cette évaluation en fonction des intérêts de leur pays, de la sécurité de leurs citoyens et de leurs responsabilités nationales.
Il y a d’anciens accords de sécurité avec la Turquie signés dans des contextes géopolitiques différents que la Turquie utilise pour attaquer la souveraineté de l’Irak, puis établir une réalité qui sera plus tard la base de nouveaux objectifs.
Les États arabes voient avec optimisme que le nouveau gouvernement irakien dirigé par Mustafa Al Kazimi est capable de restaurer la position et le rôle de l’Irak au sein de la famille arabe. Les Arabes ont un besoin urgent d’un Irak à la hauteur de son rôle historique et national. Les Irakiens ont également besoin de leur giron arabe normal.
Il est indispensable que le présent gouvernement traite les ingérences iraniennes et turques sur le sol irakien par une stratégie ferme qui mette les points sur les i et ferme la porte aux ambitions tendant à réduire le rôle régional de l’Irak et à l’isoler de son milieu arabe national.
8 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON