La tête de Turc
La loi sur la négation du génocide est une démence en soi digne des plus grandes heures de l’inquisition des consciences.
La papauté a nié la rotondité de la terre, l’héliocentrisme, et reconnu ses erreurs qu’en 1992, si les scientifiques avaient fait voter une loi en ce sens, aurions-nous mis le pape en prison ?
De tous les temps il y a eu des négationnistes, j’ai encore le souvenir de ceux qui niaient que l’on ait pu poser les pieds sur la lune, d’autres nient l’extermination des populations amérindiennes et parlent de conquête. Quelle est donc cette folie de vouloir imposer notre lecture sélective de l’histoire au monde, et punir les négationnistes ? Dans 100 ans il y aura peut-être encore plus d’hommes pour ne pas croire en l’histoire, faudra-t-il les mettre en prison si la loi n’est pas abrogée, faut-il mettre en prison ceux qui nient des pans d’histoire, je nie que Jeanne d’Arc fut pucelle et brûlée, faudra-t-il m’emprisonner pour cela aussi ? Faudra-t-il emprisonner tous ceux qui n’acceptent pas une vérité officielle ?
En quoi un génocide serait-il plus criminel, plus odieux qu’une guerre ? Il distingue seulement une forme de massacre ciblé, point barre. Il appartient à ceux qui portent un regard sur des événements d’en juger en leur âme et conscience.
Quel intérêt y a-t-il de faire une loi pour punir ceux qui nient, ce que d’autres peuvent penser librement et interpréter l’histoire avec leur filtre, est-ce que les Turcs vont faire une loi pour punir tous ceux qui disent que ce sont des génocidaires ?
Allons-nous, après avoir développé la pensée unique, imposer la pensée officielle, il y a des marches vers la dictature qui ne trompent pas, et elles se parent toujours des prétextes les plus fondamentaux, et des événements les plus émotionnels.
Mais en l’espèce je n’y vois qu’un calcul politicien de notre président.
Il peut bien faire dire qu’il tient une promesse électorale, il faut vraiment prendre les citoyens pour des cons, ses prédécesseurs Chirac et Jospin avaient enterré ce dossier pour politiquement ne pas détériorer les relations avec la Turquie qui frappait aux portes de l’Europe.
Et voilà que Zorro, qui clame la nécessité d’équilibrer la balance commerciale par des exportations, se prive des relations économiques avec cet état, laïque de surcroît. Que nous reconnaissions le génocide est notre droit le plus strict, que nous punissions les négationnistes quand nous savons que la Turquie en fait partie, laisse interrogatif.
Il n’y a pas dessous une problématique liée aux droits de l’homme, sinon qu’irions nous faire en Chine, pourquoi accepterions-nous alors ses financements pour sauver l’euro ?
Y a-t-il une raison d’état supérieure que nous ne puissions différer cette loi, cette obstination à vouloir punir les négationnistes va causer un trouble certain ?
Imaginez un ambassadeur turc en France, dans son ambassade il est protégé, dehors il devient un délinquant, imaginez les Turcs vivant en France, nous allons devoir les juger pour négationnisme et les emprisonner, allons-nous organiser une rafle et leur demander de se rétracter ?
Si ceci n’est pas folie je ne m'y connais pas, mais folie ne veut pas dire fou, il faut donc en rechercher les véritables motivations.
Nous pouvons penser que c’est une manière définitive d’exclure la Turquie de l’entrée dans l’Union Européenne, et plaire à l’électorat opposé à cette ouverture.
Mais je crois que le pouvoir tient là un moyen de tension facteur d’angoisse et de peur dans l’imaginaire et la fantasmagorie d’un électorat potentiel, notre président n’est obsédé que par cela.
Depuis qu’il est en campagne il a repris l’exploitation des événements, il est dans la panade jusqu’au cou et il va engager un conflit avec la Turquie. Je ne peux penser qu’il s’agisse d’une erreur de jugement, d’autant plus que c’est le plus européen des pays musulmans, le seul qui soit laïque, une laïcité qui l’aurait tôt ou tard amené à la reconnaissance du génocide, comme nous, nous avons fini par reconnaitre notre collaboration avec l’Allemagne nazie.
Il faut alors peut-être creuser plus loin, c’est mon analyse et elle n’engage que moi.
L’échec de Jospin en 2002 mais en évidence l’impact des thèmes du FN, sur l’insécurité l’immigration, la nation. Le 28 novembre 2004 Sarkozy s’assoit dans le fauteuil du présidentiable à la tête de l’UMP, il se fait désigner en mars 2005 au ministère de l’intérieur car c'est là que se jouent et se déroulent les thèmes d’actualité. Durant son ministère, à chaque mort il sera là, à chaque événement dramatique il interviendra, durant tout ce ministère il a associé son action, son nom et son image à ces thèmes.
Quand survient l’élection de 2007, c’est au FN qu’il prendra une partie de l’électorat assurant son élection. Elu il continue d’occuper le terrain médiatique people, parle comme le peuple, se porte au secours du peuple, choisit les thèmes qui divise les français, et associe toujours son nom à la sécurité, un fait divers, une instrumentalisation émotionnelle et une loi.
Seulement une pause durant la présidence à l’UE. Ainsi quand l’on interroge les français sur l’homme politique le plus efficace en matière de sécurité, à 43% les Français répondent Sarkozy.
Il dispose donc en la matière d’un potentiel électoral important, alors donnez-moi une bonne raison pour qu’il y renonce. D’autre part son impopularité a engendré plus de votes blancs ou abstentionnistes que de transferts vers d’autres partis.
En conséquence, les votes blancs ou l’abstention éliminent les bulletins défavorables des mécontents, il n’a donc pas de raisons de changer de stratégie puisque les mécontents ne bénéficient pas aux autres partis (je ne parviens pas trouver une étude sur les intentions d’abstention ou de vote blanc).
Avec la grève des aérogares nous voyons qu’il n’a pas renoncé à diviser les Français, et que ses interventions ou celles de ses ministres sont des interventions de candidat en campagne, car un républicain démocrate n’utiliserait pas le mot otage pour designer les voyageurs privé de transport dans un conflit salarial.
Chaque division est un éparpillement de voie, un potentiel qu’il retire à ses adversaires de gauche.
Cette grève est une opportunité inespérée, j’avais déjà écrit qu’un conflit du travail serait contre-productif. Il n’a pas manqué l’occasion pour montrer sa détermination musclée, la police remplacera les grévistes, c’est anti constitutionnel, mais il s’en fout à partir du moment où il a émotionnellement joué les pères salvateur auprès de l’opinion sensible à cette période de fête. Tant pis pour ceux qui ne réfléchissent pas. Si cette grève n’avait pas été un objet sécuritaire il ne s’y serait pas impliqué, on retrouve là son terrain favori.
Il en est donc de même avec la Turquie, c’est un facteur angoissant qui éveille également le besoin de sécurité.
Nous voyons donc notre président allumer des feux, et je pense que d’ici l’élection il prendra toutes les opportunités qui se présenteront pour jouer sur la peur car c’est là qu’est son potentiel de voix en réserve. Je pense donc que nous aurons un coup dur d’ici les élections, je l’ai déjà écrit et je persiste, car sans cela il est perdant.
Il ne peut en principe pas compter sur les voix du FN qui n’envisage pas d’alliance avec lui, même si secrètement beaucoup le souhaiteraient pour conserver leurs sièges de député, car il y a peu de chance que Bayrou se désiste pour lui, il est donc isolé.
Donc plus les voix seront dispersées plus il a de chances en se serrant les coudes avec ses députés aux abois de fédérer son potentiel traditionnel, si en plus il peut s’approprier ceux qui ne voteraient pour lui que par sécurité (43%), il peut encore espérer être élu.
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