La valse des secrétaires d’Etat
Un remaniement ministériel en deux temps, c'est ouvrir la porte à ses ennemis. Je n'ai ni expérience, ni compétences particulières, je possède une forte capacité de nuisance pour le nouveau Premier ministre ? Le remaniement est fait pour moi, j'ai mes chances.
Vous voulez changer de fonction, vous n’avez ni les compétences, ni l’expérience ? Faites de la politique. C’est le plus sûr moyen d’obtenir le poste que vous avez toujours convoité. Un changement de gouvernement, c’est un peu le rêve français, tout est possible : une success story comme un conte de fée. Après un syndicaliste tête de liste aux européennes, les ministères se jouent au bonneteau.
Un remaniement ministériel remplit officiellement une fonction de changement. Or, le verbe « remanier », contre toute attente, a pour racine l’ancien verbe « remaneir » (1050) du latin « remanere » qui signifie « séjourner, s’arrêter, demeurer ». Remanier a donc repris son sens premier. Qu’on en juge : 14 des ministres du gouvernement Valls étaient déjà membres du précédent gouvernement.
Bernard Cazeneuve, successivement ministre des affaires européennes, puis du budget, arrive à l’intérieur. Benoit Hamon passe de l’économie sociale et solidaire à l’éducation nationale. François Rebsamen, considéré comme un spécialiste de la sécurité, occupe le fauteuil de ministre du travail. Au sein d’une entreprise, la même logique enverrait le responsable des vigiles à la DRH, l’organisateur de l’arbre de Noël à la formation et le directeur financier, anciennement chargé du développement commercial, à la sécurité.
Vous rêvez de changement dans votre travail ? Faites de la politique.
Mais cela n’est pas donné à tout le monde. Si beaucoup de députés rêvent, à leur tour, de décrocher un job dans un ministère, les élus ne sont pas légion. Une compétence, une expérience, un domaine de prédilection ne suffisent pas, il faut posséder une véritable capacité de nuisance pour l’hôte de Matignon.
Depuis six jours que Manuel Valls est devenu Premier ministre, les critiques n’ont cessé de pleuvoir au sein de sa famille politique. Beaucoup ont flairé l’aubaine à l’annonce d’un remaniement en deux temps. Le climat politique promet d’être mouvementé les trois prochaines années, à savoir jusqu’aux élections présidentielles de 2017. Aussi, faut-il se hâter d’entrer au gouvernement avant qu’il ne soit trop tard. Cent députés socialistes l’ont compris qui ont signé une lettre réclamant un « contrat de majorité » avec le nouveau gouvernement, juste avant le discours de politique générale.
Un des initiateurs, en apparence le plus virulent, n’est autre que Christian Paul, député de la Nièvre, ancien secrétaire d’Etat à l’Outremer sous le gouvernement Jospin. Vice président du courant socialiste « Rénover maintenant », il fait entendre sa voix dans la perspective d’obtenir un secrétariat d’Etat. Il ne fait pas exception, nombre de députés comptent leurs troupes pour peser et tenter de négocier des maroquins.
Les postes de secrétaires d’Etat doivent permettre à Manuel Valls, d’acheter la paix au sein de sa famille politique, parmi ses plus fervents ennemis.
Vous voulez changer de job ? Alors faites de la politique, mais jamais avec bienveillance.
1 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON