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Accueil du site > Tribune Libre > La vie ne commence pas à 60 ans

La vie ne commence pas à 60 ans

Le dossier retraite, est en train en cette rentrée 2019, de devenir le dossier central sur lequel se mobilisent tous les acteurs. Même quand celui-ci fait l’objet d’un renvoi à une grande concertation de plusieurs mois, cette annonce alimente la polarisation autour de la question des retraites.

http://blogouvertures.com/2019/08/la-vie-ne-commence-pas-a-60-ans.html

 

Dans ce monde dont la transformation s'accélère avec des défis sociaux et environnementaux majeurs à relever, le dossier des retraites apparaît de plus en plus comme la mère de toutes les questions, mais aussi de toutes les réponses, préempté qu'il est par 2 positionnements extrêmes. 

D'un côté, une grande partie du monde syndical soutenu par quelques cercles et intellectuels se réclamant de la gauche, aborde cette question en vaincus. Et la violence des propos contre la réforme des retraites en devenir ne doit pas faire illusion. C'est un discours de vaincus.
Pour eux la retraite est considérée comme la période de vie vers laquelle il faut aller le plus vite possible pour échapper au travail, à ces dures conditions et à cet espace qui serait devenu pour toujours, une prison que le capitalisme a construit pour tirer le maximum de profit sur le dos des travailleurs. C'est en cela que cette approche est une posture de vaincus. Pour eux, la bataille autour du travail, de sa place et de son rôle dans l'intégration des individus dans la société, dans la construction et le façonnage d'une société faites d'hommes et de femmes avec des besoins auxquels il faut répondre, des facultés du travail à révéler aux individus leur capacité créatrices..., est une bataille qui a été perdue pour toujours. C'est donc au dossier Retraite qu'il revient de réparer tout ça, en permettant aux travailleurs de rester le moins de temps au travail tout en pouvant avoir un bon revenu pour vivre ce moment dans un espace qu'ils pensent libérés de l'exploitation capitaliste. 
Et à la question de savoir qui paie, la réponse est en réserve : une fiscalité plus juste et la taxation des riches. 

De l'autre côté, une grande partie du monde de l'entreprise soutenue par des cercles de droites et intellectuels ultralibéraux abordent la question des retraites en nouveaux conquérants autant convaincus du rationalisme libéral et sa vérité scientifique que les communistes, dans une période plus ancienne, étaient convaincus du rationalisme marxiste et de sa vérité historique. Pour eux, l'entreprise doit être libérée de toutes les contraintes et les contraintes sociales sont nombreuses. Elles freinent le développement économique et plombent les entreprises face à la concurrence. Il faut donc réduire la voilure sur les dépenses sociales et approcher le travail comme une donnée incorporelle pilotée par des indicateurs et des ratios, permettant ainsi de le rendre le plus réactif au changement de conjoncture. Pour eux la richesse n’est créée que parce que le profit est l’objectif ultime qui incite les vrais entrepreneurs à innover et à prendre des risques. La cupidité est devenue avec eux le moteur du développement, que rien ne doit entraver surtout pas une fiscalité qu’ils considèrent comme confiscatoire[1].

Oui, le dossier retraite est un dossier lourd avec des enjeux très importants. Oui, il constitue un champ pour lutter contre les inégalités. Bien sûr que le calcul du montant de la retraite, comme l’âge de départ, la durée de cotisation, doivent tenir compte de la carrière des individus. Bien sûr que les périodes de chômage, la pénibilité, les périodes de précarités doivent être prises en compte. Tout cela nécessite bien sûr mobilisation et détermination.

Mais la vie ne commence pas à 60 ans. Le chômage, la pénibilité, la précarité ne sont pas des fatalités qu’il conviendrait de considérer comme des données et des réalités qui seraient gravés dans le marbre et contre lesquelles on ne pourrait rien. Ne resterait alors que la réparation et la retraite en serait le vecteur essentiel.

Donner de l’espoir à la jeunesse aujourd’hui ne peut pas passer uniquement par une promesse de réparation pour son temps passé au chômage, celui passé en période de précarité, du temps passé au travail à être exposé à des risques multiples..., quand l’heure de la retraite aura sonné pour eux.

Heureusement, une autre partie de la société civile se mobilise pour changer la réalité aujourd’hui. Elle n’accepte pas la logique fataliste qui conduit inexorablement l’humanité dans le mur, tout en se mobilisant sur le dossier retraite en cohérence avec son action sur les réalités d'aujourd'hui.

Initiée par 19 organisations, la mobilisation pour un pacte social et écologique « pour le pouvoir de vivre » a été rejointe par plus de 60 associations. L’enjeu est de travailler à la transformation des choses ici et maintenant.

Dans une tribune parue dans le monde hier, les responsables des organisations initiatrices de ce pacte social et écologique, appellent à une mobilisation pour faire du numérique un vecteur d’émancipation pour contrer la logique à l’œuvre et destructrices d’emploi et de liens sociaux. 

« Aujourd’hui, les dégâts du progrès sont du côté du numérique subi, celui qui conduit le travail de demain droit vers le XIXe siècle, facilitant des formes d’exploitation indignes, entre les microtâches sous-payées des travailleurs du clic, les contrats de prestation asservissants des coursiers et autres prestataires, la puissance des dispositifs de contrôle et de calcul qui saturent les environnements de travail, la menace stérile et insensée du remplacement par la machine. Ils sont dans l’exploitation accrue des pays pauvres au service du confort des pays riches, ils sont dans l’évaporation de la valeur de nos bassins d’emplois territoriaux au profit de logiques d’évasion fiscale et sociale. Ils sont dans les excès d’une dématérialisation des services, qui rêve de transformer les consommateurs en concurrents des travailleurs et les citoyens en auxiliaires de la fermeture des services publics dans les territoires. Mais il ne suffira pas de réparer les dégâts, de faire passer la voiture-balai : le numérique que nous voulons doit être émancipateur, conçu pour tous, humain, porteur de capacités et de choix »[2].

Le dossier retraite est certes très important. Il doit probablement avoir pour effet de réparer des dégâts, mais travailler à la transformation des réalités d’aujourd’hui, l’est tout autant pour recréer de l’espoir en luttant contre les causes et les origines des dégâts. La vie ne commence pas à 60 ans.

Gaby BONNAND

 

[1] Joseph Stiglitz : Le triomphe de la cupidité

[2] Tribune du collectif d’ONG initiatrice du pacte social et écologique Le Monde du 29 Aout 2019. « Nous voulons un numérique émancipateur, conçu pour tous, humain, porteur de capacités et de choix »


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5 réactions à cet article    


  • the clone the clone 3 septembre 2019 08:06

    Travail ou liberté ?

    Y a t’il une vie avant la mort ? 


    • Aimable 3 septembre 2019 13:17

      Je suis a peut près certain que la retraite par points qu’ils veulent mettre en place sera l’équivalent des actions en bourse avec une valeur d’achat et une valeur au moment de la retraite,c’est a dire que si la valeur des points n’est pas revalorisée tous les ans en fonction de l’inflation ( qui fait des enflés ) , que représentera cette valeur comme pouvoir d’achat 43 ou 44 ans plus tard ?


      • Le421... Refuznik !! Le421 4 septembre 2019 13:20

        @Aimable
        Sans blague !!!
        D’ailleurs, les simulations présentées par Delevoye sont pipées pas possible.
        Mais vu la connerie ambiante et le prix du pot de Nutella, ça passe comme une lettre à la poste...


      • Nicole Cheverney Nicole Cheverney 3 septembre 2019 17:09

        @ Gaby bonnand

        Bonjour,

        Je rappelle que les « retraites » sont une des 4 branches de la Sécurité Sociale. En détruisant le système existant de retraite, le gouvernement s’est attaqué frontalement à la Sécurité Sociale dans son entier. 

        Car pour que cette destruction systématique du système existant passe mieux, le gouvernement les parcellise, selon un agenda bien précis. Et met les Français devant le fait accompli. 

        La Sécurité Sociale comprend 4 branches : retraite, maladie, chomage, allocations familiales. Le gouvernement néo-con depuis Sarkozy a mis les bouchées doubles pour s’attaquer frontalement au programme du CNR mis en place en 1945. Le CNR, auquel nous devons la Sécu. (voir les déclarations de Kessler qui demandait le démantèlement ).

        Et s’il y a un combat à mener, c’est bien de réunir toutes les forces vives de la nation pour remettre sur pied le CNR et ses principes fondamentaux.

        La Sécurité Sociale, c’était les « cotisations patronales/salariées ». Point barre.

        L’Union Européenne derrière laquelle se trouve les lobbies, les trusts et les banques, s’active depuis la Commission de Bruxelles pour activer le démantèlement. Le gouvernement s’exécute.

        Deux choses à bien se mettre en tête : 1/ sortir de l’UE. Et retrouver son indépendance.

        2/ Remettre sur pieds le CNR.

        Car l’époque n’est plus aux atermoiements.


        • Aristide Aristide 4 septembre 2019 14:05

          @Nicole Cheverney

          La Sécurité Sociale comprend 4 branches : retraite, maladie, chomage, allocations familiales.

          Non les 4 branches sont
          la maladie et la maternité gérées par la CNAMTS et les CPAM en local,
          la vieillesse , les accidents du travail et les maladies professionnelles gérés par la CNAVTS et les Carsat en local,
          la famille gérée par la CNAF et les CAF en local
          et le recouvrement géré par l’ACOSS et les URSSAF en local.

          Les organismes de SS sont des administrations de droit privé chargées d’un service public.

          Le chomage est géré par l’UNEDIC qui est une association en délégation de service public. Rien à voir avec la Sécu.
           

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