La vie sans hasard, n’est-ce pas la mort ?
La vie est faite de bien plus de hasards que de nécessités. La Raison, présentée constamment comme le juge suprême de toute chose, si elle peut permettre de retarder (un peu) la mort, ne permet certainement pas, à elle seule, la Vie.
Les mains, les pieds, la tête, le cerveau, sont présents dès les premières semaines et se développent. Initialement, un fœtus mesure environ 3 centimètres et son cœur bat déjà. Le fœtus peut plier sa tête, et effectuer des mouvements de tout son corps. Le cerveau montre des signes d'activité dès le 54e jour. Les sillons de l'épiderme responsables des empreintes apparaissent. À partir de la 9e semaine le fœtus peut plier ses doigts autour d'un objet, replier les jambes ou courber les orteils en réponse à un contact. Les premiers signes mesurables d'activité cérébrale se produisent durant la 12e semaine. De la 16 à la 25e semaine, les sourcils, les cils, les ongles apparaissent, le système respiratoire se développe, la mère peut ressentir les mouvements de son enfant. À partir de la 30e semaine, une activité cérébrale continue peut être mesurée. Le fœtus est considéré comme arrivé à son terme de développement entre la 35e et la 39e semaine.
Le nombre d’Interruptions Volontaires de Grossesses (IVG) était selon l’INED de 217 291 en 2019, en augmentation significative depuis 1996. Dans le même temps, 753 000 bébés sont nés. Il y a tout lieu d’espérer que l’avortement est un acte raisonné et qu’il représente donc une emprise rationnelle sur le cours de la vie.
Un gamète est une cellule reproductrice spécialisée dans la fécondation. Les gamètes mâles sont stockés dans les testicules. L'éjaculation libère 50 à 100 millions de spermatozoïdes possédant chacun la moitié (23) des 46 chromosomes possibles. Les chromosomes portent chacun plusieurs milliers de gènes qui déterminent les caractéristiques du futur être lorsque l’union ovule-spermatozoïde sera effective. Seule une dizaine de spermatozoïdes pourront arriver jusqu’à la trompe de Fallope où réside l'ovule fécondable. À l’instant précis où le spermatozoïde rencontre l’ovule, il ne s’agit plus d’une partie du corps de la mère, ni d’une excroissance de la chair du père, il s’agit d’un enfant à nul autre pareil que l’on nommera embryon, fœtus ou bébé selon les cas.
Tous les êtres humains, à part les jumeaux vrais, sont génétiquement différents. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la reproduction sexuée a supplanté la scissiparité qui elle ne conduit qu’à des organismes identiques. La part de non-choix délibéré, de hasard est essentielle dans toutes les organisations vivantes. Elle assure la diversité et permet en conséquence de pouvoir affronter des situations parfaitement inattendues en trouvant des processus de contournement. Le hasard permet de s’adapter à des situations extraordinaires, la Raison ne fait que recenser les recettes du passé en espérant qu’elles seront efficaces pour l’avenir. La sélection est un mécanisme essentiel de l'évolution en ne conservant que les plus aptes à surmonter un problème donné. Mais les problèmes sont innombrables et la seule Raison ne peut pas les prévoir. La ‘Nature’ fait donc appel au hasard qui assure le foisonnement du vivant permettant une infinité de variations, l'environnement faisant ensuite le tri. Il est strictement impossible de déterminer qui, de tous les être uniques nés ou à naître, sont ou seront utiles, indispensables ou nuisibles à l’espèce toute entière (même si l’expérience nous donne a posteriori des indices).
La théorie (classique) de l’évolution est une théorie statistique qui n’a de sens que pour des grands nombres. Elle permet de donner des probabilités pour telle ou telle prévision, mais ne permet pas de prédire le changement précis qui va avoir lieu. Indéterminisme ou déterminisme perd de toute façon son sens devant la quantité et la complexité des phénomènes participant à l’évolution, phénomènes qui sont souvent de nature non-linéaire, la cause se mêlant à l’effet.
Pourtant les sociétés humaines s’orientent vers une maîtrise administrative des comportements encore plus stricte.
Article L. 2213-1 du code de la santé publique (en cours de discussion).
. Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, ce péril pouvant résulter d'une détresse psychosociale, l'équipe pluridisciplinaire chargée d'examiner la demande de la femme comprend au moins quatre personnes qui sont un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, membre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, un praticien spécialiste de l'affection dont la femme est atteinte, un médecin ou une sage-femme choisi par la femme et une personne qualifiée tenue au secret professionnel…
Il est possible avec les techniques de génie génétique d’aller encore plus loin pour museler le hasard.
Les modifications génétiques ont été utilisées très tôt pour augmenter les ‘performances’ des animaux d’élevage. Dès 1985, des chercheurs américains réussissaient à engendrer des porcs présentant des taux élevés d’hormone de croissance afin d’obtenir des animaux moins gras et plus musclés. En 2001, une compagnie elle aussi américaine dépose une demande de commercialisation pour un saumon transgénique ayant lui aussi un surplus d'hormone de croissance. D’autres chercheurs ont inséré un gène bactérien chez le porc afin d’obtenir un enzyme normalement absent dans les glandes salivaires. Chez la vache, plusieurs modifications ont été effectuées afin de changer la composition de son lait, en particulier pour diminuer la teneur en lactose. La transgénèse permet aussi la production de protéines antibactériennes dans les glandes mammaires des vaches, diminuant ainsi l’utilisation d’antibiotiques utilisés pour prévenir les infections des pis.
Mais les modifications génétiques ne s’appliquent pas seulement aux animaux d’élevage. En 2004 une compagnie américaine a commercialisé un poisson rouge fluorescent. La fluorescence a été obtenue en incorporant un gène provenant d’un corail. Dans le même esprit, un lapin fluorescent a été créé puis exposé en tant qu’objet d’art.
Le poisson et le lapin fluorescents sont emblématiques de ce que sont capables généticiens et biologistes moléculaires : tout ce qui peut être imaginé.
Des réticences ont été rencontrées pour faire le même type d’expériences sur les humains. He Jiankui, un scientifique chinois, fut à l’origine de la naissance de bébés génétiquement modifiés. Il fut condamné à trois ans de prison ferme et à 3 millions de yuans (386 000 euros) d’amende pour « pratique illégale de la médecine » par les autorités chinoises. Mais lorsqu‘une technique est utilisable, la plupart du temps, on trouve un moyen de l’utiliser, on trouvera de bonnes raisons pour cela.
Si la Raison s’impose (ou s’imposera) à l’échelle moléculaire, elle est également triomphante à l’échelle macroscopique sans qu’on y prête vraiment attention. Comment pourrait-on faire coexister des dizaines de milliers d’habitants au km2 sans une multitude de règles raisonnables : on s’arrête au feu rouge, on cesse de faire du bruit à 22H, on évite de caillasser les voitures de police… Des institutions locales, départementales, régionales, supranationales, mondiales s’efforcent elles-aussi d’imposer la Raison. Le ‘principe de précaution’ peu à peu a conduit l’ensemble des politiques. Il expose que ‘malgré l'absence de certitudes dues à un manque de connaissances techniques, scientifiques ou économiques, il convient de prendre des mesures qui anticipent d’éventuels risques sur l'environnement et la santé.’ Pourquoi pas ! Exprimé autrement, il s’agit de ne rien faire mais prudemment car la très grande majorité des petites comme des grandes découvertes ont été faites en prenant des risques, et ce n’est pas Marie Curie et sa brouette qui me contredira.
15 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON