« Le Figaro », le Président Sarkozy tourne en ridicule ses propres courtisans
Ils ont belle mine, les Bertrand, Lefèbvre, Dati et compagnie, venus au secours de leur chef pour faire croire qu’il avait raison quand il avait manifestement tort.
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Une reconnaissance implicite de sa faute
Dans une interview donnée au Figaro de ce vendredi 16 octobre 2009, à la question « Regrettez-vous d’avoir commenté l’affaire Clearstream et l’emploi du mot « coupables », lors de votre dernière interview télévisée ? », le président Sarkozy a répondu : « Ce que je voulais, c’est que la vérité éclate. Elle est en train d’éclater. Le mieux à faire est de laisser se dérouler ce procès, de faire confiance à la justice et de s’abstenir de tout commentaire. J’aurais été mieux inspiré de le faire dès le début. »
Certes il ne reconnaît pas explicitement avoir commis une faute en violant, par l’usage du mot « coupables », la présomption d’innocence des prévenus traduits en justice dans l’affaire Clearstream. Mais c’est tout de même un désaveu cinglant de ces « commentaires » aujourd’hui jugés par lui-même malvenus. Peut-on demander davantage à un président de la République ? On ne va tout de même exiger qu’il se présente en chemise, la corde au cou. Il admet son erreur. Dont acte !
Les sophismes de ses courtisans
En revanche, cette amende honorable fait des ravages dans son entourage immédiat qui s’était mis en quatre pour expliquer au bon peuple que jamais, au grand jamais, le président n’avait porté atteinte à la présomption d’innocence.
Que disait M. Bertrand, le secrétaire général de l’UMP ? On reprend les termes même de l’article que l’on a écrit à ce sujet (1). « (Il s’était offusqué) qu’on pût s’offusquer de la déclaration présidentielle. D’abord, il (avait) cru ou feint de croire qu’il était reproché au président de n’avoir pas associé l’adjectif « présumé » au nom « coupable ». Il (avouait) par là ignorer le sens de la formule « coupable présumé ». Or il passe pour avoir fait des études de droit ! Ensuite, il (avait) fait diversion en attirant l’attention sur un détail sans importance : « Est-ce qu’un seul nom a été cité par le président de la République ? avait-t-il demandé. Alors, où est le problème ? Il n’y a pas de problème » (2). Qu’aucun nom n’(eût) été cité, en effet, ne changeait rien au problème : tous les prévenus ont le droit au respect de la présomption d’innocence, dans l’attente du jugement. »
Qu’avait, à son tour, inventé M. Lefèbvre, porte-parole de l’UMP, en renchérissant dans l’odieux et le ridicule, écrivait-on : : « Les coupables, s’était-il écrié, sont toujours parmi les prévenus. » Mme Dati, peu après, avait soutenu la même ânerie comme s’il n’arrivait jamais que des prévenus fussent relaxés ou acquittés. Et elle a été Ministre de la Justice ! L’affaire d’Outreau était déjà oubliée.
De son côté, le Premier Ministre, quoique plus circonspect, avait préféré brouiller les pistes en se délectant de l’ambiguïté volontaire : « Dans cette affaire compliquée, avait-il souligné, essayons de garder quelques idées claires. Il y a une victime principale, le président de la République. Et on ne doit pas transformer les victimes en coupables ». C’était habile ! Mais il ne clarifiait pas pour autant les idées ! Il les obscurcissait au contraire. Car ce n’était pas le problème posé ! La question était de savoir si des prévenus, présumés innocents, pouvaient être qualifiés de « coupables » avant tout jugement ?
Maintenant que ces responsables politiques viennent d’être désavoués et ridiculisés par le président de la République lui-même qu’ils prétendaient servir, se pose le problème de leur crédibilité. Contre toute raison, ces gens ont tenté sciemment de tromper les citoyens sur un fondement de la démocratie, le respect de la présomption d’innocence, en essayant de faire croire que l’usage du mot « coupable présumé » n’y portait pas atteinte. Ils ont montré que leur allégeance à un homme l’emportait sur leur attachement aux valeurs de la démocratie, au besoin en soutenant des billevesées. Comment va-t-on désormais les entendre sans rigoler ?
C’est le sort des courtisans que d’être un jour ou l’autre ridiculisés par celui qu’ils couvrent de flatteries. Car vient un jour où trop c’est trop : le flatté lui-même finit par trouver que les flatteries de ses flatteurs ne sont pas flatteuses. C’est même la devise du Figaro, empruntée au valet de Beaumarchais : « Sans la liberté de blâmer, il n’est pas d’éloge flatteur. » Paul Villach
(1) Paul Villach,
- AGORAVOX, 28 septembre 2009.
« L’atteinte à la présomption d’innocence commise par Sarkozy : une habitude dans les médias »,
- RADIO SUISSE ROMANDE, vendredi 2 octobre 2009, « La présomption de culpabilité, avec Paul Villach »
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