Le gouvernement français, drame ou psychodrame ? Comparons avec le mètre étalon allemand !
À l’heure où tout le monde s’entre-tue sur la France soi-disant devenue ingouvernable suite aux élections de juin 2024 qui semblent ne pas avoir dégagé de majorité claire. Depuis 36 jours la France n’a pas de gouvernement et notre pays peu habitué à la vacance du pouvoir semble perdre ses nerfs si l'on se fie à la chaleur des échanges sur Twitter. L’exemple allemand devrait pourtant nous appeler à savoir raison garder !
Rappelons les faits : suite aux élections européennes le président de la République choisit de procéder à une dissolution de l’Assemblée nationale.
À ce stade, une première remarque s’impose : le président disposait d’un groupe important à l’Assemblée nationale, mais pas d’une majorité absolue. Le choix de la dissolution place donc immédiatement le scrutin sous le signe de la majorité absolue et cela colore certainement encore aujourd’hui la perception des étapes politiques à suivre.
Seconde remarque, le président organise le vote avec un délai extrêmement court avec un objectif qui évident au premier abord : empêcher les petites formations politiques, déjà mobilisées par les Européennes de se présenter et prévenir la constitution de coalition. La campagne semble au moment du discours devoir se réduire à un duel entre le parti d’Emanuel Macron et celui de Marine Le Pen.
On connaît la suite : l’accord obtenu entre LFI, le PS, EELV, le parti communiste et d’autres formation de moindre importance. Le duel devient un affrontement entre trois forces quasi équivalentes. Première surprise dans ces élections, le duel disparaît de l’agenda.
Second élément, alors que le débat semblait annoncer une usure du barrage dit républicain, l’analyse des reports de voix après les élections démontrera au contraire la bonne discipline de vote de ceux décidés à refuser le succès du RN. Les désistements croisés entre le premier et le second tours permettront de réduire massivement le nombre de triangulaires. À quel prix ? La question ne sera pas posée, contentons-nous du résultat qui voit émerger trois forces à peu près égales :
RN 143 députés
Ensemble : 163 sièges
NFP : 180 sièges.
La différence est que si RN et Ensemble forment des partis cohérents, le NFP est une coalition. Elle est donc susceptible d’éclater. Au contraire Ensemble peut assez facilement rallier le groupe LR au côté de ses députés.
Dés lors, le parti le plus en position pour former une coalition est Ensemble et non LFI, il lui suffit de rallier les 59 députés PS et les 29 députés EELV1.
La seule coalition possible est donc 163 + 67 + 59 + 28 = 317 députés.
NFP ne peut imaginer briser la cohérence d’ensemble sauf à rallier 109 députés par des débauchages individuels dans les autres groupes, ce qui est irréaliste.
Le résultat sera donc la seule coalition possible, ce qui vous explique le délai que s’accorde E. Macron qui peut ainsi marchander le ralliement des deux groupes au moindre prix.
De même, vous comprenez ainsi la stridence d’un Jean-Luc Mélenchon confronté à l’éclatement programmé de sa coalition, s’il échoue à trouver un gambit pour placer un gouvernement NFP improbable selon la réalité arithmétique. Pour cette raison, il insiste sur son "droit" à placer un candidat NFP à Matignon. Admirer le courage du vieux lion cerné par les hyènes n’empêche pas de pronostiquer un échec !
Le PS doit juste faire oublier le rôle des voies LFI dans l’obtention de ses députés et, second problème plus complexe pour lui, préserver les arrangements avec LFI qui seront nécessaires pour les municipales de 2026 !
Il lui faut donc travailler sa rupture avec LFI et se vendre au mieux à Macron. Difficile tâche pour son président. Enfin, l’historique des luttes de courants au PS forme en général de bons négociateurs et ils ont de l’art de la trahison une pratique raffinée depuis 1983 ! Mélenchon saura le leur rappeler et les clouer au pilori de l’infamie le jour où ils officialiseront leur aventure avec Ensemble2.
Alors, qu’importe si face à de telles difficultés, les négociations prennent du temps ? La belle affaire ? En Allemagne la coalition pourtant en principe validée dès le 15 octobre 2021 débouchera sur un gouvernement seulement le 8 décembre 2021.
Alors, s’il est vrai que la courte période concédée par Macron pour l’organisation des élections permet de lui reprocher les semaines entières qu’il s’accorde désormais pour partir en vacances à Brégançon, le délai est normal dans une coalition parlementaire où tous les détails doivent être négociés.
Seulement, la France n’a pas la culture de la coalition. Construite autour d’un roi, elle associe les factions à la Fronde et à l’anarchie. L’Allemagne au contraire a vécu sur le régime post guerre de trente ans avec une multitude de pouvoirs locaux, très autonomes, habitués à régler leurs conflits par la négociation. Alors, villages protestants et catholique devaient s’entendre et ont, malgré leurs graves différents appris à le faire, cette expérience imprègne encore la mentalité allemande.
Et cela doit interroger sur la méthode française du pouvoir. Verticale, défaut encore aggravé par la pratique à minima autoritaire de notre actuel président.
Puisse l’exercice l’adoucir, même si en réalité il a la partie facile : ses partenaires de coalition semblent partager ses principales options et Bruxelles, en accords avec Bercy dicte le budget. Leur principale demande sera surtout une pratique moins polémique qui évitera de contraindre les ralliés à se distancer pour éviter d’être entraînés dans l’aura de haine que l’employé de Rotschild crée autour de sa personne !
2 Pour une fois, il aura la tâche facile vu la manière dont ce qui devait être le parti des travailleurs a trahit le salariat francais. Jaurès doit se retourner dans sa tombe, Mélenchon s’en fera l’interprète !
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