Le Kazakhstan, en marche pour le climat sur les « nouvelles routes de la soie »
Grèves pour le climat. Marches pour le climat. Sommet onusien pour le climat. D’un bout à l’autre de la planète, la transition énergétique mobilise les consciences. Le réchauffement climatique ne connaît ni frontière, ni clivage entre pays développés et pays émergents, ou pays démocratiques et régimes autoritaires. Les transports étant la 1ère cause d’émission de gaz à effet de serre, les « nouvelles routes de la soie » chantier du XXIème siècle interrogent la faisabilité d’atteindre l’objectif de l’Accord de Paris. Le cas du Kazakhstan est intéressant, car ces « nouvelles roues de la soie » qui relient la Chine à l’Europe traversent son territoire.
Dans l’immensité de la steppe, parabole d’un monde infini, l’advenue du monde post-carbone entrechoque l’édification de ces routes. Chine et Russie s’affrontent, afin d’élargir leur sphère d’influence. Le Kazakhstan sera-t-il le garant de la neutralité carbone dans ce « nouveau grand jeu » en Asie centrale, dont ni l’Union européenne, ni la France ne sont absentes face à l’urgence climatique.
Les « nouvelles routes de la soie » passent par le Kazakhstan
La construction du gigantesque réseau d’infrastructures terrestres et maritimes des « nouvelles routes de la soie » pensées par Pékin en 2013 n’est pas sans impact sur l’environnement. L’ambitieuse initiative « une ceinture, une route », également nommée « nouvelles routes de la soie » est le fer de lance de la politique d’influence chinoise. Elle conjugue rayonnement international et relais de croissance, ainsi que prise de contrôle économique de certaines zones stratégiques ; moult observateurs n’hésitant pas à qualifier ces « nouvelles routes de la soie » de plan Marshall du XXIème siècle. Principal écueil du projet : son empreinte carbone. Selon le think tank chinois Tsinghua pour la finance et le développement, la Russie par exemple devrait réduire de 68% ses émissions de CO2, afin de limiter le réchauffement climatique à 2% d’ici 2050. Or, La stratégie Kazakhstan 2050 s’inscrit dans la transition écologique, alors que le pays est un véritable « hub » des corridors terrestres.
Au nord, les 10 000 km de voie ferrée du pont Trans-eurasien Chongqing-Duisbourg, principal corridor terrestre Chine-Europe traversent la frontière sino-kazakhe à l’Est du Kazakhstan par l’historique porte des Dzoungars à proximité du port routier de Khorgos dans le Xinjiang. Cette voie ferré parcourt 4000 km à travers le Kazakhstan, traversant Astana la nouvelle capitale et faisant escale devant le site de l’exposition internationale Expo 2017 : Energie du futur, puis elle rejoint Ekaterinbourg et Moscou, Minsk, Brest-Litovsk et enfin Duisbourg. Au sud, le corridor Chine-Asie centrale-Moyen-Orient relie Urumqi à Ankara et à Bandar Abbas (Iran), empruntant le tracé de l’antique route de soie.
La stratégie offensive chinoise et la stratégie défensive russe s’affrontent, afin d’entendre leur zone d’influence. La stratégie chinoise s’appuie sur la signature en mai 2019 du Partenariat stratégique global sino-kazakh qui a scellé la synergie de développement micro-économique entre « le chemin lumineux » Nourly Jol kazakh et « ceinture et route » chinoise. La société d’Etat chinoise Sinopec a ainsi racheté la branche kazakhe du russe Loukoil. Quant à la stratégie russe, l’ancien « grand frère » veut conserver un poids dans le pays. Le russe est la langue nationale à côté du kazakh, la population est constituée de 20%. L’union économique eurasienne vient consolider les liens économiques entre Russie et Kazakhstan. Entre une Chine 1er émetteur mondial de C02 et une Russie qui vient à peine de ratifier l’Accord de Paris ; la recherche d’autres partenaires est possible.
Le Kazakhstan, acteur eurasien de la neutralité carbone à l’horizon 2050
Le 9 juin 2019, l’élection du diplomate Kassym-Jomart Tokaïev à la présidence du Kazakhstan n’était pas étrangère à la volonté d’affirmer le rôle du pays dans la diplomatie environnementale. Le Kazakhstan 1er producteur mondial d’uranium, 9ème producteur mondial de pétrole et 2ème fournisseur de pétrole brut de la France veut diversifier son économie. Il s’imagine en phœnix verdissant les « nouvelles routes de la soie » à travers la steppe. En septembre 2018, lors d’un voyage culturel au Kazakhstan, j’ai été frappée par l’application des normes environnementales dans le développement des infrastructures. Je connais cette région pour y avoir travaillé à la Commission européenne pendant 2 ans dans les années 2 000 dans le projet TRACECA (Transport Corridor Europe-Caucase-Asie).
L’exposition internationale Astana 2017 : Energie du futur a facilité l’essor des énergies renouvelables (EnR) par le transfert de technologies énergétiques vertes. D’ici 2020, 23 centrales photovoltaïques, 20 champs d’éoliennes et 10 unités de production de biomasse supplémentaires devraient ainsi porter la part des EnR à 3% de la production nationale d’énergie.
La France est le 3ème investisseur direct étranger (IDE) au Kazakhstan, après la Hollande et les Etats-Unis. Le stock d’investissements directs français au Kazakhstan s’élevait à 13,3 Milliards de dollars au troisième trimestre 2018. Cependant, au 1er trimestre 2019, selon les chiffres de l’Institut national de statistiques du Kazakhstan, le montant des IDE français plaçaient la France en 8ème position, alors que la Russie et la Chine occupaient respectivement les 5ème et 6ème rangs.
Le Kazakhstan s’est engagé à réduire ses gaz à effet de serre de 25% en 2030 vs 1990. Aider le Kazakhstan à verdir les « routes de la soie », c’est permettre à l’Union européenne et à la France d’agir concrètement en faveur du développement durable. Alstom produit déjà les locomotives électriques KZ4AT du pont Trans-eurasien.
Dans la steppe, la faisabilité d’atteindre la neutralité carbone en 2050 se joue aussi, faisant du Kazakhstan un pays qui a sa place dans la lutte contre le réchauffement de la planète.
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