Dans l’affaire Clearstream, première du nom, la justice ne doit pas relever la sortie quelque peu hâtive, présomptueuse ou simplement banale du président de la République : elle doit suivre son chemin en toute vérité et en toute impartialité. Psychanalyse (y compris de comptoir) ou pas. En espérant ne pas commettre de lapsus calami dans le présent article !
En indiquant que les "coupables" seraient traduits devant le tribunal, M. Sarkozy n’a pas forcément commis un lapsus (linguae). De plus, son intervention était orale, pas écrite. Evidemment, sa position est particulière puisqu’il est le garant de l’indépendance de la magistrature tout en étant partie civile dans un procès, étant donné qu’il avait déposé plainte (contre X, nous dit-il), avant sa prise de fonctions en tant que président de la République française.
On joue beaucoup sur les mots, sans prendre parti ni dans un sens ni dans un autre, à ce sujet, même s’il est de bonne "guerre", voire de bon aloi, de la part du prévenur M. le Premier ministre Dominique Galouzeau de Villepin de déposer un recours contre cette présumée atteinte au principe de la présomption d’innocence à son encontre.
Mais, d’une part, le président de la République ne nommait personne dans sa déclaration depuis New-York en direct à la télévision française, et, d’autre part, on peut estimer valablement, nous semble-t-il, que, dans son esprit, les coupables quels qu’ils soient (sans même présumer de leur nombre, il aurait pu dire "le ou les coupables", mais c’eût été assez lourd, convenons-en) doivent être traduits devant le tribunal et condamnés, comme il se doit.
Il reste encore l’hypothèse, plausible elle aussi, du simple lapsus, même si le président doit mesurer ses propos en pareille circonstance, doublement, donc, vu sa position de partie civile au procès Clearstream, premier du nom, et son rôle de garant des institutions y compris judiciaires, comme on l’a dit.
Dans tous les cas, il s’agit, vu d’avion, d’une tempête dans un verre d’eau, probablement, dont l’intérêt est de voir lancer une action en retour par un des principaux intéressés peut-être, ne nous engageons pas, action légale qui n’aura de possibilité de prospérer juridiquement qu’après les fonctions de M. Sarkozy comme président de la République, le cas échéant, étant donné son immunité présidentielle confirmée pour le cas de M. Chirac antérieurement.
Quoi qu’il en soit, il ne faudrait pas que la justice soit véritablement sensible à ce genre de pataquès. Elle doit rester libre et impartiale. Gageons que ce sera le cas. Conformément à notre idée de la République.