Le Libéral-Bolchevisme
Les théories politiques sont des attrape-gogos, l’argent est une valeur plus sûre, plus concrète, plus facile d’accès en apparence. Mais l’argent rend con, pas seulement les riches, les pauvres aussi.
Le mot ‘Libéral’ sonne bien ! On pense à la liberté de penser, d’agir, d’entreprendre. Plus prosaïquement, il ne signifie qu’une chose : « Qui paie commande ». C’est vrai aussi bien à Wall Street parmi les gens prestigieux de la finance, qu’au bar d’une brasserie où un péquin sirote son café-crème. Est-ce à dire que la possession d’une plus ou moins grande fortune donne une meilleure aptitude pour trouver le chemin qu’il convient de suivre ?
Jean-Marc Jancovici, polytechnicien de formation, est considéré comme le meilleur expert mondial concernant les divers aspects du réchauffement climatique. Il veut sauver la planète du désastre qui se profile. Il touche un salaire mensuel d’environ 10 000 euros. L’Homme le plus riche de la Terre veut lui aussi sauver la planète, il possède 264,6 milliards de dollar, environ 10 millions de fois plus que le précédent (sans que le décompte puisse être précis). Il envoie des voitures dans l’espace, il veut coloniser Mars, promouvoir le tourisme spatial vers la Lune, il fait fabriquer des voitures électriques, il veut connecter les cerveaux humains avec un ordinateur... toutes choses que n’envisagent pas M. Jancovici qui prêche la sobriété.
Pourtant, M. Jancovici, qui semble le plus raisonnable bien que le moins fortuné, a beaucoup de mal à prendre une place dans un monde enseveli sous les miracles annoncés par M. Elon Musk et auxquels les financiers font semblant de croire.
Il n’en reste pas moins que les décideurs sont les payeurs. Pour cerner les contours de cette néanmoins classe dirigeante, il est bon de se rappeler que les personnes qui représentent 1% de la population mondiale détiennent 50% de la richesse mondiale existante. En 2021, on dénombrait 2.755 milliardaires à travers le globe. Les Hommes les plus riches sont répartis dans tous les pays sans tenir compte de la teinture politique de leurs dirigeants. Les cinq pays qui comptent le plus de milliardaires sont en effet les États-Unis (571), la Chine (190), le Royaume-Uni, l’Allemagne (123) et la Russie (114). Le nombre de milliardaires français avoisine les 100 unités.
Pour comparaison, un Président de la République gagne 13 500 € et il a en charge un budget de 450 milliards d’euros. BlackRock est une société multinationale américaine spécialisée dans la gestion d’actifs pour le compte de compagnies d’assurance, de caisses de retraite, d’entreprises, de banques. La valeur des actifs gérés par la société s’élevait à environ 7 500 milliards de dollars en 2019. Le PDG de BlackRock a gagné plus de 25 millions de dollars la même année. Il faut considérer que la France, comme la plupart des pays occidentaux, doit emprunter des sommes considérables à des officines comme Blackrock pour combler les déficits de leurs budgets et pouvoir ainsi continuer à vivre plus ou moins aisément mais à crédit. La dette publique de la France est de 2 638,3 milliards d’euros à la fin du deuxième trimestre 2020, soit 114,1 % du PIB, aucun budget à l’équilibre n’a été présenté depuis 1975. Les Hommes politiques quelles que soient leurs étiquettes ou leurs nationalités ne jouent pas dans la cour des grands, ils vont donc se cantonner dans le secteur qu’on veut bien leur abandonner : le spectacle de la bienfaisance, la philanthropie audiovisuelle, la compassion pour toutes les victimes réelles ou supposées, la distribution de ressources que l’on n’a pas.
Les dépenses de la protection sociale en France atteignent 813 milliards de dollars (35% du PIB, 30% du budget total). En 2020, la France a consacré 12 080 € à chaque habitant pour assurer sa protection sociale avec conjoncturellement une volonté de préserver l’emploi lors de la pandémie de Covid-19. Les prestations associées au risque maladie atteignent 228 milliards d’euros. Quelques exemples d’aides gouvernementales (financées ‘grâce’ aux marchés) peuvent être donnés :
- le Revenu de solidarité active (RSA) assure aux personnes sans ressources un niveau minimum de revenu ; seul(e) sans aucune ressource il est perçu 524,16 euros. L’allocation de solidarité spécifique (ASS) ou l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) peuvent s’y ajouter. Il existe aussi une aide exceptionnelle de solidarité Covid.
- l’Allocation supplémentaire d’invalidité (ASI)
- l’Allocation aux adultes handicapés (AAH).
- la Prime d’activité qui dépend des ressources de l’intéressé et de celles des membres du foyer
- la Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C)
- l’Aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS).
- les Allocations familiales
- l’Allocation soutien familial
- le Complément familial
- l’Allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant.
- les Aides au logement : l’Allocation de logement sociale, l’Allocation de logement familiale, l’Aide personnalisée au logement.
- les Bourses de l’Education nationale
D’autres dispositifs sont possibles comme les prestations versées par des collectivités locales, les aides de régimes spécifiques, les tarifs sociaux de l’énergie…
L’argent distribué ne résulte pas du labeur de la collectivité française. Malgré les proclamations contraires des théoriciens libéraux, est-ce un effet de la compassion des plus fortunés vers les plus démunis ? Poser la question c’est y répondre.
Les occidentaux se présentent eux-mêmes comme un modèle universel de société qui doit tendre à se répandre irrésistiblement à l’ensemble du monde. Sans ces transferts massifs de fonds associés aux aides sociales, des troubles importants ne manqueraient pas de surgir ce qui remettrait gravement en cause les valeurs démocratiques censées assurer à tous la plénitude du bonheur due à une robuste consommation. Mais la déconnection entre travail et rétribution atteint ses limites.
Les médecins américains prescrivent facilement des antidouleurs tels que des opiacées de synthèse pour des raisons diverses et souvent bénignes pour contrecarrer des douleurs physiques ou mentales. Ces antidouleurs ont de forts effets addictifs et ont conduit à 500 000 morts aux USA. La société pharmaceutique Purdue Pharma responsable des faits a dû verser une amende considérable après procès et ses trois dirigeants ont été déclarés criminellement coupables. Le cabinet de conseil McKinsey a dû s’excuser d’avoir collaboré activement avec Purdue Pharma.
Mais il existe d’autres moyens d’anesthésier une population en la menant vers des paradis artificiels fabriqués par les milieux financiers.
L’obésité aux États-Unis est l’un des problèmes de santé les plus importants des dernières décennies. Le taux d’obèses atteint 40 % pour les adultes en 2016. Il est connu que manger constitue un dérivatif au mal-être. Ce qui déclenche le processus de manger est souvent un sentiment de désespérance. C’est une drogue au même titre que les opiacées avec le même cadre marchand.
Résultat : l’espérance de vie des américains est inférieure à celle des cubains.
L’essence du libéral-bolchevisme est maintenant plus facile à saisir.
Une caste d’ultra-riches régente le monde selon ses intérêts indépendamment de toute espèce de cadre politique ou religieux : avoir c’est être. Il est bon de nommer le cadre comme étant libéral, la bannière est attrayante. Les gens du commun s’agitent entre eux en brandissant des rêves, des idéaux mais ils ne peuvent que suivre le courant que d’autres animent. Les contraintes qui s’exercent sur le tout venant des citoyens relève du bolchevisme : tout est prévu pour eux sans qu’ils puissent décider de quoi que ce soit d’important. Toutes les sortes de répressions possibles sont utilisées si besoin est pour maintenir l’ordre parmi les gens-qui-ne-sont-rien mais l’addiction aux passions tristes et aux plaisirs mortifères se révèle particulièrement efficace. D’ailleurs, ils ne se manifesteront que pour pouvoir acheter davantage de choses nuisibles ou qui ne servent à rien. Mais puisque la liberté constitue le socle proclamé de toute action, les pauvres ont choisi d’être pauvres et d’avoir des plaisirs de pauvres. De toute façon le déclin des pouvoirs d’achat est inéluctable et les compresses permises par le crédit ne feront qu’augmenter avant que d’autres ayant connu le pire prennent leur place et s’accommodent des nouvelles conditions d’esclavage.
Et l’on nommera le tout une Démocratie par un cynisme digne d’éloge, et l’on fera se battre pour elle des légions entières.
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